Extraits de la lettre de 50 personnes de la communauté universitaire de Louvain-la-Neuve lue au Pape François le 28 septembre 2024 qui a écrit : Quelle place pour les femmes dans un plan de lutte pour la justice sociale ?
Que signifie pour l’Église Catholique la notion de développement intégral ? L’Église est-elle prête à l’envisager dans une perspective inter-sectionnelle en prenant en compte les inégalités de genre, de classes, de races ? L’appel à un développement intégral nous paraît peu compatible avec les positions sur l’homosexualité et la situation des femmes dans l’Église.
Où trouver la place des femmes dans l’encyclique. Elles sont absentes de Laudato si’. Vous soutiendrez peut-être que le soin à la maison commune qu’est notre terre mère est une interpellation directe à la vocation féminine, mais n’est-ce pas aussi la vocation des hommes ? Ne restons-nous pas dans une injuste répartition des tâches au nom d’une propension soi-disant naturelle qui débouche sur une division sexuelle du travail ? La théologie catholique a renforcé cette division via sa théologie de la femme, exaltant son rôle maternel en lui interdisant l’accès aux ministères ordonnés.
Quelle place pour les femmes dans l’Église ? L’encyclique parle de générosité et de gratuité dans la prise en compte sociale des droits fondamentaux des plus défavorisés. Mais l’idéal de justice sociale qui est promu n’est pas étendu à la justice du genre. Il passe sous silence le fait que la pauvreté est encore majoritairement féminine, que ce sont les femmes qui ont subi et subissent cruellement le système de domination dénoncé dans ce texte.
Laudato si’ porte les germes d’une réflexion prometteuse pour l’inclusion de tous et toutes, mais, comme souvent dans l’Église, les femmes sont invisibilisées. Invisibilisées dans leur vécu, invisibilisées dans leurs apports intellectuels. Aucune théologienne n’est citée, or nombre d’entre elles ont étudié et dénoncé les liens intrinsèques entre domination de la nature et domination des femmes, esquissant des voies inspirantes pour un éco-féminisme chrétien.
Quelle place pour les femmes dans la production d’un cadre de pensée qui innerve les conceptions et les décisions dans l’Église ? L’invisibilisation des femmes a des conséquences sur la manière de vivre la transition écologique.
Face à la destruction écologique actuelle, l’humanité ressent le besoin de se donner des limites. Le recours à – je cite l’encyclique – « la figure d’un père créateur et unique maître du monde » pourrait induire l’idée que seule l’autorité masculine est susceptible de nous en fournir. Mais, la soumission à un père extérieur à la création ne correspond pas à une humanité mature et multiple, à une humanité qui pourrait intégrer des limites dans un mouvement responsable d’adhésion à la dynamique de la vie.
Nous avons besoin d’un changement de paradigme, un changement qui doit s’appuyer tant sur les trésors des spiritualités que sur le développement des doctrines scientifiques.
https://www.youtube.com/watch?v=ZVlmKDiYcdc
(de 1.00.05 à 1.04.44)
Extraits de la réponse du Pape François lors de sa rencontre avec les étudiants universitaires le 28 septembre 2024 qui a écrit : La guerre, la corruption et les nouvelles formes d’esclavage. Parfois, ces maux polluent la religion elle-même qui devient un instrument de domination. Faites attention ! Mais c’est un blasphème. L’union des hommes avec Dieu, qui est Amour salvifique, devient ainsi un esclavage. Même le nom du Père, qui est révélation d’attention, devient une expression d’arrogance. Dieu est Père, pas maître ; il est Fils et Frère, pas dictateur ; il est Esprit d’amour, et pas de domination.
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Maintenant, l’option à prendre se situe… entre manipuler la nature et cultiver la nature. Une option comme celle-ci : soit manipuler la nature, soit cultiver la nature. À commencer par notre nature humaine – pensons à l’eugénisme, aux organismes cybernétiques, à l’intelligence artificielle –. L’option entre manipuler ou cultiver concerne également notre monde intérieur.
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Penser à l’écologie humaine nous amène à toucher un thème qui vous tient à cœur, plus encore à moi et à mes prédécesseurs : le rôle de la femme dans l’Église. J’aime ce que tu as dit. Les violences et les injustices pèsent lourd ici, ainsi que les préjugés idéologiques. C’est pourquoi il faut redécouvrir le point de départ : qui est la femme et qui est l’Église ? L’Église est femme, L’Église est une femme, elle n’est pas “il” Église, elle est “la” Église, elle est l’épouse. L’Église est le peuple de Dieu, pas une entreprise multinationale. La femme, dans le peuple de Dieu, est fille, sœur, mère. Comme moi je suis fils, frère, père. Ce sont les relations qui expriment notre être à l’image de Dieu, homme et femme ensemble et non pas séparément ! En fait, les femmes et les hommes sont des personnes, et non des individus ; ils sont appelés dès le “commencement” à aimer et à être aimés. Une vocation qui est mission. D’où leur rôle dans la société et dans l’Église (cf. S. Jean-Paul II, Lett. ap. Mulieris dignitatem, n. 1).
Ce qui caractérise la femme, ce qui est féminin, n’est pas déterminé par le consensus ou les idéologies. Et la dignité est garantie par une loi originelle, non pas écrite sur le papier, mais dans la chair. La dignité est un bien inestimable, une qualité originelle qu’aucune loi humaine ne peut donner ou enlever. À partir de cette dignité, commune et partagée, la culture chrétienne élabore de manière toujours renouvelée, dans différents contextes, la mission et la vie de l’homme et de la femme et leur être mutuel, dans la communion. Non pas l’un contre l’autre, ce qui serait du féminisme ou du masculinisme et non pas dans des revendications opposées, mais l’homme pour la femme et la femme pour l’homme, ensemble.
Rappelons que la femme est au cœur de l’événement salvifique. C’est par le “oui” de Marie que Dieu en personne vient dans le monde. La femme est accueil fécond, soin, dévouement vital. C’est pourquoi la femme est plus importante que l’homme, mais il est mauvais que la femme veuille faire l’homme : non, elle est femme, et c’est “lourd”, c’est important. Ouvrons les yeux sur les nombreux exemples quotidiens d’amour, de l’amitié au travail, de l’étude à la responsabilité sociale et ecclésiale ; de la vie conjugale à la maternité, à la virginité pour le Royaume de Dieu et pour le service. N’oublions pas, je le répète : l’Église est femme, elle n’est pas homme, elle est femme.
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Sans vérité, notre vie perd son sens. L’étude a un sens lorsqu’elle cherche la vérité, L’étude a du sens lorsqu’elle cherche la vérité, lorsqu’elle essaie de la trouver, mais avec un esprit critique. Mais la vérité, pour la trouver, a besoin de cette attitude critique, ainsi nous pouvons aller de l’avant. L’étude a du sens quand elle cherche la vérité, ne l’oubliez pas.
https://www.vatican.va/content/francesc ... itari.html
Extraits du communiqué de l’Université de Louvain-la-Neuve du 28 septembre 2024 qui a écrit :
En bref :
L’UCLouvain remercie le Pape d’avoir répondu et de partager les préoccupations majeures exprimées par 50 membres de sa communauté
L’UCLouvain déplore néanmoins les positions conservatrices exprimées par le Pape François quant à la place des femmes dans la société
A l’occasion de la visite du Pape François célébrant les 600 ans de la création de l’Université de Louvain, le Saint-Père a rencontré la communauté universitaire, ce 28 septembre 2024. A cette occasion, un groupe de 50 étudiant•es, scientifiques et académiques lui a transmis une lettre, lue sur la scène de l’Aula Magna par la dramaturge Geneviève Damas. L’objectif de cette lettre était d’initier un dialogue avec le Pape au sujet des préoccupations autour des transitions qui animent la communauté UCLouvain : l’éco-anxiété, les inégalités, les racines philosophiques, la place des femmes dans la société et la sobriété.
Dans son discours adressé à l’assemblée et retransmis mondialement, le Pape François a saisi la balle au bond et répondu aux préoccupations exprimées. « Nous saluons cette entrée en dialogue. Nous constatons des convergences en rapport avec les inégalités environnementales et sociales que dénonce l’UCLouvain. Mais nous notons également une divergence majeure, en ce qui concerne la place des femmes dans la société », note Françoise Smets, rectrice de l’UCLouvain.
L’UCLouvain exprime son incompréhension et sa désapprobation quant à la position exprimée par le Pape François concernant la place des femmes dans l’Eglise et dans la société. « La femme est accueil fécond, soin, dévouement vital. » a-t-il déclaré. Une position déterministe et réductrice face à laquelle l’UCLouvain ne peut qu’exprimer son désaccord. L’UCLouvain s’affirme comme université inclusive et est engagée dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Elle réaffirme sa volonté pour que chacune et chacun s’épanouisse en son sein et dans la société, quelles que soient ses origines, son sexe ou ses orientations sexuelles. Elle appelle l’Eglise à emprunter le même chemin, sans aucune forme de discrimination.
https://uclouvain.be/fr/decouvrir/press ... jeure.html
Les propos sur la femme, exprimés à Louvain-la-Neuve en Belgique par le Pape, ont choqué la rectrice de l’Université catholique de Louvain qui s’est empressée, avant même que le Pape François ait achevé de lire son discours devant la communauté universitaire de Louvain-la-Neuve, de rédiger une réplique exprimant « son incompréhension et sa désapprobation » des paroles du Pape qui fut publiée immédiatement le jour même.Extraits de la réaction du Pape lors de sa conférence de presse du 29 septembre 2024 dans l’avion du retour à Rome dont le Vatican a écrit :
Question de Annachiara Valle, de Famiglia Cristiana : (Traduction Google) : Hier, après la réunion à l'Université catholique de Louvain, un communiqué a été publié dans lequel, j'ai lu, "l'Université déplore les positions conservatrices exprimées par le Pape François sur le rôle des femmes dans la société". Ils disent qu'il est un peu restrictif de parler des femmes uniquement en termes de maternité, de fertilité, de soins, ce qui, en fait, est un peu discriminatoire car c'est un rôle qui revient aussi aux hommes. Et en lien avec cela, les deux universités ont posé la question des ministères ordonnés dans l’Église.
Réponse du Pape : (Traduction libre) : Tout d’abord : cette déclaration a été faite au moment où je parlais. C’était préfabriqué et ce n’est pas moral.
Concernant les femmes : je parle toujours de la dignité des femmes et là j'ai dit quelque chose que je ne peux pas dire des hommes : l'Église est femme, elle est l'épouse de Jésus. Masculiniser l'Église, masculiniser les femmes n'est pas humain, ce n'est pas chrétien. Le féminin a sa propre force. En effet, les femmes - je le dis toujours, et je l'ai dit - sont plus importantes que les hommes, parce que l'Église est la femme, l'Église est l'épouse de Jésus. Si cela semble conservateur à ces dames, je suis Carlo Gardell [eh bien... chanteur connu de tango argentin]. Parce que tu ne comprends pas... Je vois qu'il y a un esprit ennuyeux qui ne veut pas entendre parler de ça. La femme est égale à l'homme, elle est égale, en effet. Dans la vie de l'Église, la femme est supérieure, parce que l'Église est femme. Concernant le ministère, la mystique de la femme est plus grande que le ministère. Il y a un grand théologien [Hans Urs von Balthasar] qui a fait des études sur ce sujet : quel est le plus grand, le ministère pétrinien ou le ministère marial ? Le ministère marial est plus grand parce que c'est un ministère d'unité qui rassemble, l'autre est un ministère de leadership. La maternité de l'Église est une maternité de femme. Le ministère est un ministère beaucoup plus petit, donné pour accompagner les fidèles, mais toujours dans la maternité. Et divers théologiens ont étudié cela, et disent que c'est une chose réelle. Ils ne disent pas que c’est moderne, mais réel. Ce n'est pas démodé. Un féminisme exagéré qui veut dire que les femmes sont « masculinisées», ça ne marche pas. Le masculinisme est une chose qui est fausse, le féminisme est une chose qui est fausse. Ce qui va, c'est l'Église fémme qui est plus grande que le ministère sacerdotal. Et parfois, tu ne penses pas à cela. Merci pour la question.
https://www.vatican.va/content/francesc ... torno.html
Dans l’avion qui le ramenait à Rome, le Pape François s’est désolé, à juste titre, de cette indélicatesse qui, par son immédiateté, n'a pas laissé à chacun un temps de réflexion et d’écoute des propos du Pape avant tout réaction.
Pourquoi donc une telle promptitude qui ne laisse pas le temps nécessaire à l’accueil de l’autre en soi ?
Lorsque l’autre se présente, avec une pensée autre que la sienne, la priorité n’est-elle pas d’abord d’écouter et de laisser mûrir en soi ce que l’autre vient apporter ? A fortiori dans une université qui ne doit cesser de chercher la vérité au-delà des préjugés et des réactions spontanées.
Pourquoi se précipiter à exprimer sa différence, son propre point de vue, et même son rejet, au lieu de chercher d’abord à accueillir et à méditer ce que l’autre vient apporter ?
En fait, cette réaction de la rectrice de l’Université de Louvain-la-Neuve a hélas présenté ainsi une contre-image de la femme telle qu'elle a été évoquée par le Pape.
Car, en effet, le Pape a surtout regardé dans la femme le symbole de l’accueil de l’autre. Cela n’exclut rien, ni ne limite en rien le rôle des femmes ni dans la société, ni dans l’Église.
Dans un discours de quelques minutes sur un sujet aussi sensible et fondamental, abordé parmi d’autres sujets complexes dont les questions du respect de l’environnement, il est évident que le Pape ne pouvait tout dire.
Il aurait pu faire une synthèse des enseignements nuancés de l’Église sur la femme ou montrer toutes les responsabilités exercées par les femmes dans l’Église actuelle, mais il a préféré mettre l’accent sur un point de vue, ce qui n’exclut en rien les autres mais montre ce qui lui paraît essentiel non seulement à lui-même, mais à l’Église qu’il conduit et représente.
À cet égard, le Pape a d’abord veillé à écarter énergiquement les rapports de domination dont les femmes furent et demeurent trop souvent victimes, y compris dans l’Église.
« La guerre, la corruption et les nouvelles formes d’esclavage. Parfois, ces maux polluent la religion elle-même qui devient un instrument de domination ».
C’était un premier écho à la question du statut de la femme. Le Pape François comprend que pour beaucoup de personnes, et notamment pour bien des femmes, la religion semble devenue « un instrument de domination » et il a ajouté aussitôt que « L’union des hommes avec Dieu, qui est Amour salvifique, devient ainsi un esclavage. Même le nom du Père, qui est révélation d’attention, devient une expression d’arrogance. »
Mais, dans l’Église et la foi chrétienne, il a montré que les images de la différentiation sexuelle invitent à un autre regard car « Dieu est Père, pas maître ; il est Fils et Frère, pas dictateur ; il est Esprit d’amour, et pas de domination. »
Voilà qui éclaire autrement la différence symbolique de l’homme et de la femme.
Bien sûr que, littéralement, Dieu n’est ni père ni mère, ni homme ni femme. Ce sont là des mots tirés de l’expérience humaine que la foi retient pour leur signification, leur portée et valeur symboliques pour exprimer ce qui est vrai.
Dieu est « Père » mais c’est dans le sens qu’il n’est « pas maître ». Dieu est « Fils » mais c’est dans le sens qu’il est « Frère, pas dictateur ». Dieu est Esprit, mais c’est dans le sens qu’il est « d’amour et pas de domination ».
Ne faut-il pas l’entendre ?
L’image de la mère, de la femme et de la réalité physique féminine est, de ces trois points de vue, tout autre.
Durant neuf mois, la mère porte l’enfant en elle-même dans une situation de totale dépendance, de quasi-fusion. Cette réalité maternelle est une étape temporaire et transitoire qui est nécessaire pour la transmission de la vie humaine et qui mérite infiniment d’être louée, mais cette image de la mère qui porte l’enfant en elle n’est pas adéquate pour révéler symboliquement ce que la création de notre vie a de spécifique. Nous sommes créés libres pour pouvoir aimer.
Et, si la vie humaine vient naturellement dans le monde par la femme, par un temps de neuf mois de dépendance à l’intérieur du corps d’une femme « mère », il faut observer que, de ce point de vue, Dieu se révèle plutôt, en réalité, comme « père », créateur d’un être extérieur à Lui-même, d’un être libre, capable de choisir librement d’aimer.
Comme un père humain, Dieu sème une tout petite graine puis la laisse grandir librement en dehors de lui, et, en cela, c’est en tant que père qu’il se révèle le mieux. Il serait erroné d’aller y chercher une image de maître, de dictateur ou de dominant que les pères humains peuvent souvent davantage manifester.
Ce donné fondamental a été développé par le Pape du point de vue de l’écologie qui avait principalement retenu l’attention de la communauté universitaire.
En effet, le Pape a commencé son discours en rappelant que, par rapport à la nature, « La première attitude est la gratitude car cette maison nous est donnée : nous n’en sommes pas les maîtres, nous sommes des hôtes et des pèlerins sur la terre. »
À cet égard, le Pape a attiré l’attention sur les réalités de la nature dans lesquelles plonge la révélation autant que tout l’enseignement de l’Église concernant la différence sexuelle.
Selon le Pape, l’option à prendre se situe « entre manipuler la nature et cultiver la nature » et c’est par là qu’il a voulu aborder la question de la femme dans l’Église sur laquelle il a été interpellé : « Penser à l’écologie humaine nous amène à toucher un thème qui vous tient à cœur, plus encore à moi et à mes prédécesseurs : le rôle de la femme dans l’Église. »
Pourquoi, à cet égard, l’Université de Louvain-la-Neuve a-t-elle d’emblée déploré « les positions conservatrices exprimées par le Pape François quant à la place des femmes dans la société » alors que celles-ci n’ont pas été exprimées dans son discours à Louvain-la-Neuve qui n’avait pas abordé les nombreuses questions que pose cette question générale mais a choisi de se concentrer sur la question de la place des femmes « dans l’Église » ?
Selon le communiqué en cause, « L’UCLouvain s’affirme comme université inclusive et est engagée dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Elle réaffirme sa volonté pour que chacune et chacun s’épanouisse en son sein et dans la société, quelles que soient ses origines, son sexe ou ses orientations sexuelles. Elle appelle l’Église à emprunter le même chemin »
Mais, bien sûr ! En quoi le Pape aurait-il contesté cette affirmation ou s’en serait-il écarté ? En quoi l’Église n’emprunterait-elle pas ou pas suffisamment le même chemin ?
En fait, tout apparaît dans l’ambiguïté de la suite du communiqué qui invite l’Église à suivre ce chemin « sans aucune forme de discrimination » ce qui est pleinement justifié s’il s’agit de refuser toute forme de traitement injuste dans un sens du mot « discrimination », mais ce qui se discute s’il s’agit de refuser toute forme de différenciation objective entre hommes et femmes et toute l’altérité qu’elle infuse dans l’humanité depuis les origines.
Où est le goût de la vérité si l’on veut dissoudre toute différenciation entre homme et femme ?
Qu’est-ce donc qu’une université qui réplique et rejette sans même prendre le temps d’écouter et de réfléchir ? Elle a d’emblée rejeté l’avertissement du Pape qui lui a pourtant rappelé par trois fois que « l’étude a un sens lorsqu’elle cherche la vérité ».
Et, sur ce point, l’image symbolique de la femme est revenue discrètement dans la finale de son discours car « La vérité se laisse trouver : elle est accueillante, elle est disponible, elle est généreuse. Si nous renonçons à chercher ensemble la vérité, l’étude devient un instrument de pouvoir, de contrôle sur les autres. ». On retrouve ici le cœur de l’image juste de la femme dans la révélation et dans l’Église : « accueillante ».
Comment trouver la vérité sans un accueil de l’autre, une écoute de l’autre, un temps de gestation ?
Pour la transmission sexuelle de la vie, c’est la femme qui « accueille » l’autre en elle dans l’acte sexuel. Cette image est une réalité radicalement différenciée par rapport à celle de l’homme qui, au contraire, « pénètre » l’autre, vient chez l’autre.
Pour la fécondité, c’est encore la femme qui « accueille » un autre en elle pendant neuf mois pour le rendre capable de vivre de manière autonome en ce monde après sa naissance. Ici encore, cette image est radicalement différenciée par rapport à celle de l’homme qui, au contraire, soigne et soutient cette vie nouvelle de l’extérieur.
Les différences sont ici objectives. Elles portent des significations autres dans la révélation de Dieu parmi les hommes et, dès lors, dans l’Église.
La liberté humaine est pleine et entière pour tous, homme ou femme. L’égale dignité de l’homme et de la femme est tout aussi certaine et fondamentale.
Mais nier la différence objective ou symbolique entre homme et femme est un aveuglement devant le réel.
Certes, ces différences ne peuvent justifier des restrictions à la liberté humaine d’assumer un rôle ou une fonction du fait du sexe, mais parce que chacun n’est pas l’autre, il est essentiel de reconnaître que la réalité sexuelle d’un homme peut symboliser d’autres réalités que la réalité sexuelle d’une femme et réciproquement.
De ce point de vue, « dans l’Église », puisque tel était le sujet principal de l’interpellation faite au Pape à Louvain-la-Neuve (qui, dans son bref discours inévitablement limité, n'a pas développé les innombrables questions concernant la place de la femme « dans la société »), la femme a un rôle et une fonction qui s’harmonisent et évoluent selon sa signification symbolique dans la révélation divine qui a son sommet dans le Christ et dans son corps qu’est l’Église.
Le Pape a écarté d’emblée toute approche déterministe. Il ne s’agit pas de chercher à définir l’homme ou la femme de manière à restreindre l’un ou l’autre dans sa liberté, dans ses actions, fonctions ou rôles prédéterminés.
Dans l’image du père ou du fils, « Ce sont les relations qui expriment notre être à l’image de Dieu, homme et femme ensemble et non pas séparément ! »
C’est de ce point de vue que le Pape François a alors exprimé un résumé nouveau auquel il est bon d’être attentif : « La femme est accueil fécond, soin, dévouement vital. » En quoi serait-ce scandaleux au point de provoquer un message immédiat de désolidarisation ? L’Université de Louvain, dans sa réaction immédiate y a perçu seulement « Une position déterministe et réductrice face à laquelle l’UCLouvain ne peut qu’exprimer son désaccord. »
Les responsables de l’Université de Louvain n’ont-ils pas négligé de s’ouvrir à la vérité de ces mots en les comprenant d’emblée et sans délai de manière caricaturale au lieu d’écouter l’autre avec le temps nécessaire pour comprendre sa réflexion autre d’un point de vue autre ?
Ces mots expriment une vérité théologique, un regard, certes partiel, mais qui n’exclut en rien tout ce qui peut et doit être dit par ailleurs sur la féminité. C’est une réponse à la question qui concerne la place de la femme dans l’Église, dans le corps du Christ. Il ne s’agit pas d’un enseignement sur les rôles et fonctions infiniment variés que les humains, hommes autant que femmes, peuvent exercer dans la société. Il ne s’agit pas davantage d’une réflexion générale sur la femme pour laquelle le Pape pouvait renvoyer à la lettre apostolique Mulieris Dignitatem écrite à ce sujet en 1988, par le Pape Jean-Paul II.
Dans la révélation chrétienne et dans l’Église qui en est le prolongement, le Pape nous situe ici dans le « vital », la vie. Et ici, la femme est une image essentielle et spécifique dans sa différence sexuée et par la particularité féminine de la transmission de la vie.
À cet égard, la féminité n’est pas regardée du point de vue de sa réalité physique, ni même culturelle, mais du point de vue de la « relation » à l’autre.
Le pape François est venu nous dire que « L’Église est femme ». Parce qu’elle « accueille » en son sein. L’Église est ainsi épouse et mère. C’est le corps du Christ.
C’est cela que la femme symbolise dans l’Église.
Le Pape a invité chacun à le méditer sans imposer aussitôt une opposition avec ce qui différencie ce symbole féminin de l’image de l’homme masculin, sauf pour écarter vigoureusement tout rapport de domination.