Dieu et vie morale

« Donne à ton serviteur un cœur attentif pour qu'il sache discerner le bien du mal » (1R 3.9)
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Altior
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Re: Dieu et vie morale

Message non lu par Altior » sam. 19 oct. 2019, 21:30

Cher frère en Christ,

Je ne le vois pas de cet oeil:
Suroît a écrit :
mar. 15 oct. 2019, 15:17
Il est remarquable de voir que la distinction du bien et du mal, c'est-à-dire des objets de la connaissance morale, apparaît dans le contexte d'un interdit. Manger de l'arbre de la connaissance du bien et du mal entraîne la mort et donc la tristesse et l'impuissance. Connaître est sans doute à prendre au sens intellectuel, mais aussi au sens pratique d'éprouver quelque chose, d'en faire l'expérience. Comme si Dieu, au commencement, voulait nous interdire de faire de la "morale", et nous mettait en garde devant ce poison pour la vie qu'est la conscience du bien et du mal. D'autant plus intriguant que l'arbre de Vie, lui, n'est pas frappé d'interdit. Comme si la morale était un obstacle pour la Vie en Dieu, la vraie Vie, et que celle-ci était par delà la connaissance morale du bien et du mal. D'ailleurs la sanction est immédiate, car une fois mangé, une pluie de châtiment tombe, et elle consiste entre autre à être séparé de l'arbre de Vie (Gn. 3, 24).

Ce texte étrange m'interroge beaucoup. La connaissance morale serait un poison pour la vie, l'origine et le résultat d'une vie pécheresse et diminuée, au lieu d'être un progrès humain dans la conscience de soi. Non seulement Dieu ne serait pas nécessaire à la vie morale, mais en plus la morale n'était pas nécessaire à l'homme pour demeurer dans la Vie de Dieu, et elle semblait même incompatible avec cette Vie éternelle en Dieu, puisque par elle nous sommes coupés de l'arbre de Vie.
Dans ma paroisse, à l'occasion de plusieurs sermons et de la caté pour adultes, on a écouté et beaucoup échangé sur cette question. L'interprétation courante chez les tradis du sens allégorique du nom de cette espèce d'arbre est justement contraire au message cité. Ainsi, manger du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal signifie se dispenser de Dieu en tant qu'auteur du bien et du mal: se fabriquer sa morale, à la place de Dieu, comme si on était Dieu. D'ailleurs, dans le dialogue entre le Tentateur et Eve, cette signification se dévoile. Connaître c'est posséder. L'arbre de la connaissance du bien et du mal c'est l'arbre de la possession du bien et du mal. Par cet interdit, Dieu met en garde l'homme (Adam) sur la conséquence de s'ériger en auteur de la loi morale: la mort, l'impossibilité d'avoir accès à l'arbre de la Vie et de l'ensamble des merveilles de l'antitype du Paradis qu'est le jardin d'Eden. St Paul dit: le salaire du péché est la mort. C'est ce que Dieu interdit à l'homme: «ne t'érige pas en auteur de la loi morale, car tu mourra»s. Qui dit le contraire ? C'est le Serpent.

De plus en plus, de nos jours, l'homme s'érige en auteur de la morale et se met à la place de Dieu. «Cet enfant est malade. Ou simplement indésiré. Alors on peut, en bonne conscience, le tuer». «Ce vieillard souffre beaucoup. Il est mieux (bien) de le tuer». Ce sont des conséquences de l'ignorance coupable de l'interdit que Dieu eût fait à nos premiers parents et à nous tous.

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Fernand Poisson
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Re: Dieu et vie morale

Message non lu par Fernand Poisson » sam. 19 oct. 2019, 21:52

Bonjour Suroît,

Je ne suis pas sûr de bien vous suivre mais ce que vous dites est intéressant.

Pour aller dans le sens de votre lecture de la Genèse, on peut remarquer que l'interdiction faite par Dieu à Adam ("l'arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n'en mangeras pas") doit peut-être davantage être rattachée aux paroles par lesquelles Dieu crée et ordonne le monde ("Que la lumière soit", "Qu'il y ait un firmament au milieu des eaux", etc.) qu'à des commandements légaux. En effet, si on suit l'ordre d'exposition de la Genèse, rien ne permet de supposer que ce décret ("l'arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n'en mangeras pas") ne sera pas suivi d'effet. Puisque jusqu'à présent tout ce que Dieu a dit s'est accompli. Il ne s'agit pas tant pour Dieu de faire le partage du permis et du défendu que de continuer son oeuvre créatrice. Dieu n'ordonne pas à proprement parler (ou alors il ordonne au sens où il ordonne à la Terre de tourner), il fait.

La désobéissance d'Adam et Ève est en ce sens un événement sans précédent puisqu'elle introduit dans la Création la possibilité qu'un décret divin ne soit pas suivi d'effet, c'est-à-dire le mal. Dès lors, le monde a effectivement besoin d'une nouvelle économie providentielle qui est celle de la Loi, du partage du permis et du défendu ("Tu ne te feras pas des dieux en métal fondu", "Le septième jour, tu chômeras", etc.), donc ce que vous associez à la vie morale.

Là où je serais (peut-être) en désaccord avec vous, c'est que je trouve votre caractérisation de la vie morale trop restrictive. Je pense que lorsqu'on emploie l'expression en général, on ne veut pas seulement dire le fait de s'efforcer d'être "dans les clous", en faisant ce qui est prescrit et en s'abstenant de ce qui est interdit. La vie morale, c'est aussi tout simplement vivre de l'amour de Dieu et chercher sans cesse à le faire grandir en nous.

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