Turquie et Europe

« Par moi les rois règnent, et les souverains décrètent la justice ! » (Pr 8.15)
MB
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Message non lu par MB » dim. 03 oct. 2004, 19:34

Je voudrais développer ce que j'ai entrevu sur la question de l'identité européenne, considérée par rapport à celle de la Turquie. L'identité culturelle, l'identité nationale, ne sont pas des concepts figés, ils sont dynamiques. Leur contenu dépend de ce qu'on veut bien y mettre ; il ne forme pas un matériau dur et solide, mais il est fait d'un ensemble de discours, de considérations, de représentations, qui peut varier.

La notion d'identité nationale elle-même est un exemple-type de discours variable. Cette notion a été créée en Europe au 19ème siècle ; sans être fausse (puisqu'elle est constitutive de la réalité actuelle), elle n'est pas moins quelque chose de littéralement "artificiel". La nation, avant la Révolution française, en gros, ça n'existe pas ; et quand on dit le mot "nation" avant le 19ème siècle, c'est dans un tout autre sens ; il a fallu tout un travail de réflexion, de politique, de propagande, pour imposer ce concept qui en soi n'avait rien d'évident. Or on cherche à appliquer à l'ensemble institutionnel "Union européenne" les mêmes critères de définition que ceux qui font l'identité nationale, et cela ne me paraît pas correct.

Un pays peut tout à fait illustrer cette problématique. C'est l'Allemagne ; aujourd'hui, l'identité de ce pays ne pose aucun problème en elle-même. On sait ce que c'est que l'Allemagne, et ce pays nous paraît être une réalité d'un seul tenant, évidente par elle-même. Mais cela n'était pas le cas avant 1871. Non seulement le pays était désuni en plusieurs Etats, mais en plus l'idée même de son union paraissait inadéquate à bien des "Allemands" : par exemple l'aristocratie prussienne, les aristocraties allemandes en général, étaient contre ; le Junker ne se définissait pas comme Allemand mais comme Prussien. La définition même de l'identité allemande posait problème, on ne savait pas très bien les contours qu'il fallait lui apporter (comme le disait Heine, "est-on Allemand parce qu'on boit de la bière ?"). Et pourtant, après 1871, cela s'est imposé : il a fallu plusieurs guerres (Autriche, France) et la désignation d'un ennemi commun permettant une auto-définition par contrecoup (la France), plus une bonne dose de volontarisme politique (celui de Bismarck, qui a surmonté beaucoup d'oppositions y compris dans son propre parti). Ce n'est donc pas parce qu'une situation culturelle ou identitaire nous paraît incongrue aujourd'hui qu'elle le sera aussi demain : ces choses bougent énormément.

Je pense donc une fois encore que si des arguments doivent être opposés à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, les arguments identitaires ne sont pas les bons. Quant à ceux liés à la religion, ils posent problème : ils reviennent à dire aux 20 millions de musulmans européens qu'ils ne sont pas chez eux ; et puis soyons sérieux, ce qui menace le christianisme en Europe même, ce ne sont pas les musulmans de chez nous (et encore moins ceux de la Turquie, qui pour la plupart vivent très bien la laïcité de leur pays), mais ce sont les pseudo-intellectuels et les media post-soixante-huitards.

Cordialement

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Christophe
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Identité turque et Identité européenne

Message non lu par Christophe » dim. 03 oct. 2004, 21:54

Cher MB
MB a écrit :Je pense donc une fois encore que si des arguments doivent être opposés à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne, les arguments identitaires ne sont pas les bons.
[align=justify]Vous me coupez un peu l'herbe sous le pied en réfutant mon argument avant même qu'il ait été exprimé... :huh:

Je partage avec Franck l'idée qu'il existe une identité occidentale (dont les principaux éléments sont certainement la culture grecque, le droit romain et la religion chrétienne) commune aux pays européens de l'Union.

Que la France et la Turquie reconnaissent ou non les massacres respectifs dans lesquels chacune possède une part de responsabilité ne changera rien au fait que la France est un pays européen et que la Turquie ne l'est pas.

Je me réjouis évidemment si nous pouvions faire de l'ennemi séculaire un allié sincère et fidèle. Faire de la Turquie un partenaire privilégié de l'UE me semble tout à fait souhaitable, et repousserait au loin le spectre du choc des civilisations annoncé par Samuel Hutington. Cependant, même dans ce cas, la Turquie ottomane ne pourra jamais faire partie de l'Union Européenne, sauf à condamner l'UE à n'être qu'une outre vide, sans aucune perspective, ce qu'à Dieu ne plaise. Arrêtons donc de donner aux turcs de faux espoirs, de leur mentir, ce qui ne pourra que créer du ressentiment lorsque - acculés au pied du mur - il faudra enfin faire preuve de franchise à leur égard.

Que l'idée du nationalisme turc ait été "importé" d'Europe ne donne pas à la Turquie une identité occidentale. Que l'idée même d'identité nationale soit un concept moderne corrélé à l'émergence des Etats-nations moderne ne permet pas d'invalider la référence à ce concept pour la création d'un Etat-civilisationnel, tel que l'UE.[/align]

Amicalement
Christophe
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Message non lu par MB » lun. 04 oct. 2004, 11:56

Bonjour

Une fois de plus, je vois qu'on parle d'identité occidentale. Permettez-moi de répéter que l'identité est ce qu'on en fait, et que nous n'avons aucune idée de ce que l'histoire intellectuelle des cinquante ans à venir va nous réserver. Si des éléments s'accumulent qui fournissent peu à peu à la Turquie une "identité européenne" dans les années qui viennent, ce sera un pays européen au sens où vous l'entendez. Il n'y a pas de raison a priori que cela ne se produise pas (qui, en 1050, aurait pu prévoir que l'Anatolie deviendrait musulmane ?).

Beaucoup de gens - et j'en suis - opposent à l'entrée de la Turquie des arguments techniques : Etat de droit déficient, collusions mafieuses entre Etat et monde des affaires, manque de respect des minorités, etc. Or je pense qu'il ne s'agit pas de critères simplement "techniques" : les respecter, c'est pratiquer la philosophie occidentale fondée sur le droit (Rome), le droit à la réflexion autonome (Athènes), la dignité de chacun d'entre nous (héritage du christianisme, qui n'est pas interdit aux autres puisque même les athées de nos pays le pratiquent). On a tendance à faire de ces éléments des faits évidents, qui fournissent une sorte de minimum moral totalement neutre ; c'est faux, ils contribuent puissamment, et de manière décisive je crois, à la création d'une identité. Il se trouve, remarquez-le, que les seuls pays dans le monde qui respectent ces critères à peu près intégralement sont les pays d'Europe (même pas les Etats-Unis, puisqu'ils appliquent la peine de mort... outre-mer, exceptons les pays sous la souveraineté de la Queen). Ce qui signifie, concrètement, que le jour où la Turquie appliquera ces critères, elle sera un pays européen.
Ils ont du travail, cela dit, il faut bien l'admettre...

Bien à vous
PS : question-piège : si les Turcs, dans les années qui suivent, se convertissent en majorité à une confession chrétienne, que penserez-vous ? :P

MB
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Re: Identité turque et Identité européenne

Message non lu par MB » mar. 05 oct. 2004, 13:39

Bonjour Charles
Charles a écrit :
Christophe a écrit :Je partage avec Franck l'idée qu'il existe une identité occidentale (dont les principaux éléments sont certainement la culture grecque, le droit romain et la religion chrétienne) commune aux pays européens de l'Union.
Oui, ce serait très drôle que chacun ait une identité, américaine, chinoise, africaine, arabe, indienne, japonaise... mais que l'Europe en soit dépourvue... Cette "exception européenne" dans l'absence d'identité n'est rien d'autre qu'un témoignage rendu à l'identité chrétienne de l'Europe : que son identité se dissolve avec sa foi chrétienne ou qu'elle soit niée dans le rejet de son christianisme...
Il faut que je me maîtrise et que j'évite de me taper la tête contre les murs... je n'ai jamais dit que l'Europe n'avait pas d'identité, mais que cette identité n'est pas un fait inné, c'est un fait acquis, donc variable. C'est un construit culturel, donc il est dans sa nature d'évoluer et nous n'avons pas le droit de le figer. Il est évident que l'identité européenne est indissolublement liée à la foi chrétienne (mais alors, quid des deux Amériques dont les habitants sont plus chrétiens que nous ?) ; cela vaut aussi pour les pays dont la population est majoritairement athée (Pays-Bas, R. tchèque, ex-RDA...) qui n'en sont pas moins européens.
Vous venez d'ailleurs d'entrevoir un danger à faire trop d'identitaire : si vous liez notre civilisation, qui est un fait local, à une religion universellement vraie, vous "localisez" l'universel, ou alors vous dissolvez le local dans l'universel. Je suppose que vous préférez la deuxième solution : mais alors, n'importe quel pays peut être européen, et même les pays d'Afrique noire par exemple, dans lesquels la foi chrétienne (de toutes confessions) est en train de dépasser l'islam, ne doivent pas être exclus a priori. Ou bien vous précisez, ou bien vous assumez.

Bien à vous

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L'identité n'est pas un vêtement

Message non lu par Christophe » mar. 05 oct. 2004, 21:38

Cher MB ! :)
MB a écrit :Une fois de plus, je vois qu'on parle d'identité occidentale. Permettez-moi de répéter que l'identité est ce qu'on en fait, et que nous n'avons aucune idée de ce que l'histoire intellectuelle des cinquante ans à venir va nous réserver.
La question de l'identité européenne est l'arlésienne du débat sur l'Europe. :roll: Même en admettant avec vous que "l'identité est ce qu'on en fait" ( :???: ), et sans savoir ce que l'intelligentsia officielle en fera, je ne vois aucune raison, en attendant qu'elle nous l'apprenne, de faire le pari que la Turquie pourra - à ce moment là - être considéré comme européenne.
Si des éléments s'accumulent qui fournissent peu à peu à la Turquie une "identité européenne" dans les années qui viennent, ce sera un pays européen au sens où vous l'entendez.
Avec des "si", on mettrait Paris en bouteille. :P Aujourd'hui, la Turquie n'est pas européenne mais c'est aujourd'hui que la Turquie frappe aux portes de l'Europe.
On a tendance à faire de ces éléments des faits évidents, qui fournissent une sorte de minimum moral totalement neutre ; c'est faux, ils contribuent puissamment, et de manière décisive je crois, à la création d'une identité.
Dans votre conception de l'identité il y a de fortes inspirations behavioristes. Personnellement, mais c'est un avis assez partagé (ce qui n'est certes pas un critère de vérité) je considère que l'on est pas seulement ce que l'on fait, et que la Turquie aura beau - sous les diktats de la Commission - singer l'Occident, elle n'en sera pas plus européenne.
Vous voulez croire que l'identité est une chose non seulement construite mais artificielle, dont les personnes individuelles, les nations, les civilisations sont libres de se débarasser comme d'une chemise sale.

Et bien cela me semble tout à fait erroné. Si une identité peut être reconstruite - ce qui présuppose la destruction de l'ancienne identité - cela ne se fait pas sans douleurs. Historiquement, hors des cas de colonisations-acculturation, jamais un peuple n'a renié durablement son identité.
Que l'identité soit une chose construite, certes. Mais elle se construit sur des générations et des générations. Il y a donc, à chaque génération, une partie de l'identité collective qui est innée - et "subie" - quand une autre part, acquise - est à constuire.

A mon humble avis, Kemal Attatürk n'a transformé la Turquie que superficiellement et la Résurgence islamique balayera aisément un siècle de laïcisme d'inspiration maçonnique.
Ce qui signifie, concrètement, que le jour où la Turquie appliquera ces critères, elle sera un pays européen.
Question piège : le jour où les européens mangerons des tapas, nous serons tous mexicains ?
PS : question-piège : si les Turcs, dans les années qui suivent, se convertissent en majorité à une confession chrétienne, que penserez-vous ? :P
Vous ne m'en voudrais pas de répondre à votre question par une autre question : la Thaïlande (majoritairement peuplé de chrétiens) a-t-elle vocation à rejoindre l'Union Européenne ?

Vous avez bien fait de reprendre Charles lorsqu'il laissait entendre que l'identité européenne se réduisait au Christianisme. Le Christianisme n'est pas une civilisation, mais la Civilisation. Et, bien qu'il soit l'un des élèments majeurs de l'identité européenne, celle-ci est faite d'autres élèments.

Très cordialement
Christophe
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Message non lu par MB » mer. 06 oct. 2004, 16:05

Bonjour Christophe

Cette discussion est passionnante, mais pour qu'elle le soit encore plus il faut être précis st surtout éviter tout soupçon de mauvaise foi :roll:

Il faut que je vous reprenne sur pas mal de points...

- Je vous cite :
"Dans votre conception de l'identité il y a de fortes inspirations behavioristes. Personnellement, mais c'est un avis assez partagé (ce qui n'est certes pas un critère de vérité) je considère que l'on est pas seulement ce que l'on fait, et que la Turquie aura beau - sous les diktats de la Commission - singer l'Occident, elle n'en sera pas plus européenne.
Vous voulez croire que l'identité est une chose non seulement construite mais artificielle, dont les personnes individuelles, les nations, les civilisations sont libres de se débarasser comme d'une chemise sale.

Et bien cela me semble tout à fait erroné. Si une identité peut être reconstruite - ce qui présuppose la destruction de l'ancienne identité - cela ne se fait pas sans douleurs. Historiquement, hors des cas de colonisations-acculturation, jamais un peuple n'a renié durablement son identité.
Que l'identité soit une chose construite, certes. Mais elle se construit sur des générations et des générations. Il y a donc, à chaque génération, une partie de l'identité collective qui est innée - et "subie" - quand une autre part, acquise - est à constuire.
"

L'identité est en effet, à mon sens, une chose artificielle ; mais cela ne veut pas dire qu'elle est fausse. Par exemple, l'identité nationale a été inventée au 19ème siècle, mais elle est tellement entrée dans notre façon de penser que nous l'avons pour ainsi dire incorporée ; quoiqu'elle soit fondée sur du seul discours, ce discours fait partie de nous, et comme nous l'avons en ce nous, cette identité est vraie et réelle. On peut la modifier, la changer (pensez aux émigrants qui s'adaptent à leur pays d'accueil), mais cela ne signifie pas qu'on la change "comme une chemise sale". Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit ; pour parler comme Hayek, je ne suis pas un "constructiviste", et je m'oppose à la méthode de la table rase.

(parenthèse : Nous avons un héritage en effet, il modèle en grande partie ce que nous sommes et ce que nous faisons, et nous pouvons le transformer avec le temps. Je crois que sur ce point précis, notre désaccord porte sur le degré de la présence de cet héritage et non sur l'héritage lui-même. Faites attention quand même, à trop forcer sur la culture dont nous sommes les porteurs, nous en venons, à la limite, à nier notre responsabilité et notre libre-arbitre. A trop insister sur la culture, on devient relativiste. )

J'ai cité l'exemple de l'Allemagne : en 1820, les gens qui, mettons dans le royaume de Prusse, se disaient allemands et mettaient l'accent là-dessus, étaient très minoritaires, souvent influencés par la Révolution d'ailleurs, et on les jetait en prison (quand ce n'était pas pire). En 1880, l'Allemand, tout le monde croit savoir ce que c'est, à commencer par les Allemands eux-mêmes. Les Allemands ont modifié notablement leur façon de penser entre ces deux dates, et ont fini par se définir selon des critères nouveaux, qui n'étaient pas évidents "au départ". Pourquoi ce qui est vrai de l'Allemagne ne le serait-il pas d'un autre pays ?

- Je vous cite encore :
"Question piège : le jour où les européens mangerons des tapas, nous serons tous mexicains ? "
Vous êtes de très mauvaise volonté, désolé. J'ai parlé de l'application des critères de civilisation liés au droit, au respect de la personne, etc... que je considère comme intrinsèquement créateurs d'identité (puisque seuls les Européens, et encore pas tous, les appliquent à peu près intégralement). Ce ne sont pas des choses à mettre sur le même plan que des spécialités culinaires (au fait, question ingénue : les tapas, c'est espagnol ou mexicain ?).

- Je vous cite de nouveau :
"Vous ne m'en voudrez pas de répondre à votre question par une autre question : la Thaïlande (majoritairement peuplé de chrétiens) a-t-elle vocation à rejoindre l'Union Européenne ?
Vous avez bien fait de reprendre Charles lorsqu'il laissait entendre que l'identité européenne se réduisait au Christianisme. Le Christianisme n'est pas une civilisation, mais la Civilisation. Et, bien qu'il soit l'un des élèments majeurs de l'identité européenne, celle-ci est faite d'autres élèments.
"
Votre réponse est claire, et c'est celle que j'espérais. Je redoute simplement que des gens fassent du christianisme un privilège européen (et vice-versa), et je me réjouis de voir que ce n'est pas votre cas. Posons d'ailleurs la question : oserez-vous dire que les Français musulmans ne sont pas français ?
L'identité européenne telle que nous nous la représentons (mais c'est précisément une représentation) est, comme l'a dit P. Valéry je crois, la conjonction de la conscience grecque, du droit romain, de l'héritage judéo-chrétien. Bon, il doit y avoir des précisions à apporter, des choses à redire (y a-t-il un héritage indo-européen, etc.), mais en gros, on va dire que c'est ça. Comme vous le dites très justement, le christianisme n'est pas une civilisation particulière. Mais, mélangé à d'autres facteurs, il est créateur d'une civilisation particulière, la nôtre en l'occurrence. Le souvenir majeur de cette civilisation, c'est aujourd'hui, à mon avis, l'application des critères "techniques" (pas si purement techniques que cela, en fait) dont je vous ai parlé ; souvenir assez fort pour s'appliquer à des pays peuplés d'athées. Je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas s'appliquer à la Turquie.
(et je répète que je ne suis pas favorable à son entrée dans l'UE dans les conditions actuelles ; p. ex. je voterai non tant qu'Ankara n'aura pas reconnu le génocide de 1915)

- Je vous cite encore, en manière de petit florilège :
"A mon humble avis, Kemal Attatürk n'a transformé la Turquie que superficiellement et la Résurgence islamique balayera aisément un siècle de laïcisme d'inspiration maçonnique. "

"sous les diktats de la Commission"

je vous en supplie, évitez ce genre d'expressions. On commence par dénoncer le complot des multinationales, puis les protestants, puis les francs-maçons, puis les Juifs, etc. Si vous voulez dire quelque chose sur les francs-macs et leurs rapports avec les kémalistes, choisissez bien vos mots (j'ai hésité à m'inscrire quand j'ai vu que vous aviez écrit, pour définir la France : "République maçonnique hexagonale" - c'est limite). Je passe aussi sur la Résurgence islamique qui n'est pas si résurgente que cela... enfin c'est un autre débat.
Quant aux diktats de la Commission, c'est carrément du n'importe quoi. La Commission a les pouvoirs qu'on veut bien lui laisser (le Conseil européen lui est supérieur), elle est contrôlée par le Parlement européen (qui peut la renverser comme l'a montré l'actualité récente), élu au suffrage universel. Si vous vous plaignez de la forme de son pouvoir, vous n'avez qu'à vous en prendre à la France ; l'administration communautaire a été partiellement inspirée par l'administration française des années 50 et 60, alors forcément, 'faut pas chercher à comprendre... si Bruxelles fait des "diktats", dans ce cas Paris aussi.
Peut-être faites-vous du second degré en disant tout cela, et alors je manque de recul ; mais Rolando aussi faisait du second degré (ceux qui connaissent le forum d'il y a un mois comprendront). Enfin c'est une parenthèse...

J'espère qu'on va encore beaucoup discuter de tout cela (il y a tellement de points mis de côté...)
Bien à vous

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Message non lu par Christophe » mer. 06 oct. 2004, 20:39

Bonsoir MB
L'identité est en effet, à mon sens, une chose artificielle ; mais cela ne veut pas dire qu'elle est fausse. Par exemple, l'identité nationale a été inventée au 19ème siècle, mais elle est tellement entrée dans notre façon de penser que nous l'avons pour ainsi dire incorporée ; quoiqu'elle soit fondée sur du seul discours, ce discours fait partie de nous, et comme nous l'avons en ce nous, cette identité est vraie et réelle.
[align=justify]Il me semble que vous amalgamez deux concepts différents : l'identité nationale et le sentiment (identitaire) d'appartenance nationale, qui est la double prise de conscience par une nation de son identité et par les citoyens de leur appartenance à cette nation, c'est à dire la participation à cette identité.
Si la prise de conscience collective nécessite la conceptualisation, l'identité nationale elle-même préexiste tant à la prise de conscience qu'à la conceptualisation - qui signifie une prise de conscience personnelle par une élite.[/align]
On peut la modifier, la changer (pensez aux émigrants qui s'adaptent à leur pays d'accueil), mais cela ne signifie pas qu'on la change "comme une chemise sale".
[align=justify]Alors nous sommes d'accord. Cette reconstruction identitaire, déjà si douloureuse pour la personne individuelle, l'est infiniment plus pour une communauté entière. L'identité psychique d'une personne n'est contenue que dans son crâne si je peux dire, quand celle d'une nation est contenue dans le crâne de tous ses membres et dans toutes les matérialisations de sa culture : institutions sociales, politiques, économiques ; créations artistiques ; langage ; coutumes et traditions... L'acculturation de cette nation nécessitera de purger tout cela, le plus souvent contre la volonté de ses membres, ce qui augure l'utilisation de moyens d'une violence extrême.[/align]
Posons d'ailleurs la question : oserez-vous dire que les Français musulmans ne sont pas français ?
[align=justify]Non je n'ose pas. Et pour être franc avec vous, je n'ai aucune certitude sur la question. Il me semble que cela pose la question du rapport du particulier à l'universel.[/align]
L'identité européenne telle que nous nous la représentons (mais c'est précisément une représentation) est, comme l'a dit P. Valéry je crois, la conjonction de la conscience grecque, du droit romain, de l'héritage judéo-chrétien. Bon, il doit y avoir des précisions à apporter, des choses à redire (y a-t-il un héritage indo-européen, etc.), mais en gros, on va dire que c'est ça.
[align=justify]Disons que ce sont là les grandes étapes de la construction de l'identité européenne, mais une identité me semble être une réalité indicible, inépuisable, dont les mots sont incapables d'exprimer toute la richesse et tout le sens. Une identité collective, c'est l'âme et la culture d'une nation, modelée - telle un galet - par des siècles et des siècles d'histoire. Cette identité peut être appréhendée et comme vous dites "représentée" par quelques concepts clefs, quelques traits saillants qui la singularisent, mais il ne faut pas oublier que cette identité formalisée n'est que l'ombre de la réalité qu'elle prétend décrire.[/align]
Le souvenir majeur de cette civilisation, c'est aujourd'hui, à mon avis, l'application des critères techniques dont je vous ai parlé ; souvenir assez fort pour s'appliquer à des pays peuplés d'athées. Je ne vois pas pourquoi il ne pourrait pas s'appliquer à la Turquie.
Parce que la Turquie ne fait pas partie de la civilisation européenne... Que quelques critères techniques [align=justify]permettent accidentellement de singulariser les pays qui participent à une identité civilisationnelle ne signifie pas qu'ils suffisent à constituer essentiellement une identité, a fortiori quand la validation de ces critères est obtenue de façon volontariste.[/align]
Si vous voulez dire quelque chose sur les francs-macs et leurs rapports avec les kémalistes, choisissez bien vos mots
[align=justify]J'ai choisi un mot dont je n'ai pas à rougir : inspiration. Si ce mot vous chagrine, je vous invite à developper.[/align]
(j'ai hésité à m'inscrire quand j'ai vu que vous aviez écrit : "République maçonnique hexagonale", c'est limite).
[align=justify]Alors je vais changer ma localisation, si cela peut permettre à ce forum de compter d'avantages de membres de votre trempe. ;-) [/align]
Je passe aussi sur la Résurgence islamique qui n'est pas si résurgente que cela.
C'est pourtant l'expression consacrée. Qui n'est pas de moi, mais qui - à mon avis - n'est pas inopportune.
Quant aux diktats de la Commission, c'est carrément du n'importe quoi.
[align=justify]Je vous rappelles la définition du mot, pour mettre fin à la polémique que vous lancez : Diktat : traité imposé par une nation à une autre ; par extension, décision imposée.
Quand la commission impose à la Turquie de modifier son code pénal pour pouvoir obtenir un avis favorable pour l'adhésion et que la Turquie s'exécute, non par conviction sur le bien fondé des réformes entreprises ni même sous la pression populaire mais à seule fin d'obtenir les bonnes grâces de la Commission, le terme diktat est justifié.[/align]

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Message non lu par MB » sam. 09 oct. 2004, 0:33

Bonsoir

N'ayant pas suivi de formation philosophique, je n'ai pas assez de moyens pour préciser mon opinion et pour la détailler comme il faut. Donc soyez patient...
Il me semble que vous avez une définition "essentialiste" de la nation ou de l'identité. Vous reconnaissez que certains moyens intellectuels sont plus utiles que d'autres pour les comprendre ou pour les représenter ; mais au fond, vous pensez - corrigez-moi si je me trompe - que l'identité est une réalité antérieure au moment de sa conceptualisation. Vous pensez que lorsqu'un discours identitaire est prononcé, il ne crée pas une identité mais la révèle. Cela me laisse perplexe.
(En particulier si l'on réduit l'identité à l'identité nationale, relation qui n'est pas systématique puisque, au risque de me répéter, la nation est une catégorie intellectuelle récente.)
Les peuples ou les groupements de gens ne sont pas des réalités pleines et entières (il n'y a jamais eu de peuple français - ou franc - originel) ; elles se meuvent en permanence, et peuvent être "dites" de manières contradictoires selon les époques. Il me semble que le discours "républicain", malgré tout ce qu'on peut en penser, est une composante essentielle de l'identité française actuelle ; mais cela n'était pas le cas il y a quelque temps. L'"âme" d'une nation, je veux bien que cela existe, quelque chose comme ça se ressent de temps en temps, mais alors il faut préciser le sens du mot "âme". Vous admettez vous-même que l'identité est façonnée par plusieurs siècles d'histoire ; mais l'histoire continue de nos jours, c'est nous qui la faisons, et donc nous pouvons intervenir sur notre identité, quitte parfois à la changer de bout en bout.
Je suis confus, je sais, mais tout cela est bien difficile à formuler... il reste encore bien des choses à dire.

Vous dites, sinon, que le changement d'identité est douloureux et parfois violent. Pas forcément. D'immenses violences, d'immenses douleurs, peuvent en effet changer une identité communautaire ou individuelle ; l'histoire du 20ème siècle nous l'a confirmé trop souvent. Mais cela ne veut pas dire que tout changement est violent ; il n'y a pas besoin de "purge" comme vous dites (en fait j'ai l'impression que vous vous fondez sur la seule histoire de France, en particulier sur la destruction des identités régionales par l'Etat jacobin ; certes, certes, mais la France n'est pas le seul pays au monde...). Rien ne dit non plus que la reconstruction individuelle soit une chose "si douloureuse" ; le nombre actuels de candidats à l'émigration dans le monde (je ne parle pas des "déplacés" mais des gens qui veulent émigrer) semble montrer que ces douleurs ne sont pas nécessairement vécues comme décisives. D'ailleurs il me semble que l'homme qui aime la vérité n'a pas de patrie ; la patrie du chrétien est là-haut.

- Pour les questions d'expression et de terminologie ("francs-maçons", "diktats"), je ne veux pas faire de polémique. J'ai trop vu de textes écrits par des catholiques dans lesquels l'emploi de ce genre de mots dissimulait autre chose ; ce n'est pas votre cas, toutes mes excuses si vous l'avez mal pris.
Je maintiens en revache mon opinion sur le terme de diktat. Un diktat est imposé en cas de situation de force, or ce cas ne s'applique pas ici. La Turquie peut choisir de rester hors de l'UE, vous considérez vous-même cette éventualité comme possible et viable, puisque vous la souhaitez. Donc personne ne force ce pays à commencer le processus de négociation ; c'est volontairement qu'il acceptera (ou non) les "diktats" des négociateurs européens. De plus, il me paraît normal, quand on entre dans une association, dans un club, dans une fédération, appelez cela comme vous voulez, de devoir accepter certaines règles. Enfin, je ne vois pas en quoi l'application de règles de civilisation que bien des Turcs souhaitent eux-mêmes - ne pas passer à l'acide les filles violées, ne pas torturer les détenus, laisser les Kurdes s'exprimer dans leur langue, etc. - relèveraient de quelque diktat. Si Bruxelles "impose" à Ankara la reconnaissance du génocide de 1915, appellerez-vous cela un diktat ?

Bien à vous

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Message non lu par Christophe » sam. 09 oct. 2004, 1:54

Bonsoir MB

Rassurez-vous, je n'ai pas de formation philosophique plus poussée que vous...

Je n'ai que quelques points à préciser en réaction à votre dernier message :

[align=justify]Je pense que le discours identitaire révèle d'une certaine façon - bien imparfaite - la réalité d'une identité qui le précède et existe par ailleurs. Pourtant, je vous le concède, ce discours identitaire va lui-même rétroagir sur l'identité collective.

Chaque génération doit assumer et poursuivre l'héritage que lui ont légué ses ancêtres. C'est ce que j'avais maladroitement tenté d'exprimé dans les messages précédents. Chaque génération ne part pas de zéro et il existe une certaine force d'inertie que l'on ne peut pas négliger. Mais l'avenir reste bien entendu ouvert...

Ce n'est pas l'évolution de l'identité (qui est un phénomène naturel), qui est douloureux mais sa reconstruction : substitution d'une nouvelle identité en rupture avec l'ancienne, comme ce serait le cas si la Turquie devait devenir un pays d'identité occidentale. Pour vous en convaincre, je vous invite à discuter avec un psychologue ayant eu à traiter avec des immigrés de seconde génération...

Vous écrivez que le chrétien n'a pas de patrie. Je ne vois pas le rapport entre amour de la vérité et identité. Avoir des racines n'est pas un obstacle au salut... Je reconnais dans votre discours un certain universalisme bien français... Si le catholicisme a par définition une portée universelle, l'Evangile doit être assimilé par chaque culture et n'a pas vocation à les éliminer ou à les remplacer !

Si la reconnaissance du génocide arménien par l'Etat turc devait n'être pas sincère, ce serait effectivement un diktat. (Je vous signales au passage que je n'étais pas spécialement favorable à ce que l'adultère soit punissable de peines de prison...)
Le problème est que vous greffez sur la sémantique du mot diktat des connotations négatives sur le contenu des décisions imposées, et qui ne font pas partie de la définition stricto sensu.[/align]

Bien amicalement
Christophe
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MB
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Message non lu par MB » dim. 10 oct. 2004, 18:38

Bonjour Christophe

Sur ce que vous dites de l'identité, nous sommes alors assez proches, pas de souci. Encore que, en ce qui concerne les immigrés de deuxième génération, il y ait des choses à dire (mais laissons cela pour une autre fois). Un autre problème encore : comme vous le dites vous-mêmes, le discours sur l'identité révèle cette dernière de manière bien imparfaite. J'irais plus loin, ce discours peut parfois être faux, ou se renverser avec le temps ; ce qui signifie que, sans aller jusqu'à cette extrémité, il ne faut jamais juger ce genre de discours comme définitivement établi et irréfutable, mais au contraire chercher à l'améliorer ou même à le réfuter. Donc il me paraît périlleux de fonder une politique sur un discours dont la véracité n'est jamais tout à fait établie.

Cela dit, vous me reprochez "un certain universalisme bien français"... vous ne tombez pas juste. L'homme qui cherche la vérité - et à plus forte raison le chrétien - cherche sa véritable patrie ; cette image n'est pas dérivée de l'universalisme franco-jacobin, mais de la réflexion chrétienne et philosophique. La vérité n'a pas de nationalité ; et sa recherche non plus. Les patries terrestres (y compris la "patrie des droits de l'homme"), à côté, sont quelque chose d'assez secondaire, ce qui ne veut pas dire qu'il faille les détruire, mais simplement qu'il faut savoir faire la hiérarchie, et savoir aussi faire preuve de finesse. Personne n'est plus étranger que moi à l'universalisme jacobin, très différent de cet état d'esprit.

Je n'ai rien dit non plus de votre éventuelle position sur la loi sur l'adultère en Turquie, et je ne vous accuse de rien... quant à la notion de "diktat", elle a de fait une connotation négative ; mais cette connotation était très présente la première fois que vous avez employé ce mot, ce qui prête à confusion. Le terme ne me paraît toujours pas le bon ; l'UE n'est en position de force que parce que la Turquie le veut bien (ce pays peut très bien choisir de ne pas rentrer dans l'Union) ; elle n'impose donc rien à ce pays. Ou alors vous assimilez à des diktats tous les compromis diplomatiques internationaux ?

Bien à vous

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Christophe
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Message non lu par Christophe » dim. 10 oct. 2004, 22:35

Cher ami,

Je suis content que nous soyons tombés quasiment d'accord sur une conception - certes encore approximative - de l'identité.
MB a écrit :Un autre problème encore : comme vous le dites vous-mêmes, le discours sur l'identité révèle cette dernière de manière bien imparfaite. J'irais plus loin, ce discours peut parfois être faux, ou se renverser avec le temps ; ce qui signifie que, sans aller jusqu'à cette extrémité, il ne faut jamais juger ce genre de discours comme définitivement établi et irréfutable, mais au contraire chercher à l'améliorer ou même à le réfuter. Donc il me paraît périlleux de fonder une politique sur un discours dont la véracité n'est jamais tout à fait établie.
Votre conclusion me gêne. C'est le même raisonnement que mène au scepticisme et au nihilisme... qui sont aussi des voies extrêmement périlleuses...
La vérité n'a pas de nationalité ; et sa recherche non plus.
La vérité n'a peut-être pas de nationalité, mais vous, vous en avez une. Le nier c'est - quoique vous en disiez - adopter une conception révolutionnaire de l'homme. On peut être chrétien et français...
Je n'ai rien dit non plus de votre éventuelle position sur la loi sur l'adultère en Turquie, et je ne vous accuse de rien... quant à la notion de "diktat", elle a de fait une connotation négative ; mais cette connotation était très présente la première fois que vous avez employé ce mot, ce qui prête à confusion.
J'ai fait la remarque concernant la loi sur l'adultère en Turquie parce que j'ai cru que vous suggériez que, selon le fond de la réforme imposée, le terme diktat aurait été adapté ou non.
Le mot diktat possède effectivement - en raison de son sens même - une connotation négative. Mais cette connotation s'applique à la forme de la décision imposée, et non au fond.
Ou alors vous assimilez à des diktats tous les compromis diplomatiques internationaux ?
Si je voulais faire du mauvais esprit... :lol:


Bien à vous
Christophe
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Message non lu par MB » lun. 11 oct. 2004, 22:43

Coucou !
Christophe a écrit :
MB a écrit :Un autre problème encore : comme vous le dites vous-mêmes, le discours sur l'identité révèle cette dernière de manière bien imparfaite. J'irais plus loin, ce discours peut parfois être faux, ou se renverser avec le temps ; ce qui signifie que, sans aller jusqu'à cette extrémité, il ne faut jamais juger ce genre de discours comme définitivement établi et irréfutable, mais au contraire chercher à l'améliorer ou même à le réfuter. Donc il me paraît périlleux de fonder une politique sur un discours dont la véracité n'est jamais tout à fait établie.
Votre conclusion me gêne. C'est le même raisonnement que mène au scepticisme et au nihilisme... qui sont aussi des voies extrêmement périlleuses...
Pas tout à fait. Les embûches qui se dressent sur le chemin de la vérité ne prouvent pas qu'elle n'existe pas. Elles doivent au contraire nous inciter à la chercher toujours davantage. Beaucoup de gens se sont trompés dans le passé, mais cela ne veut pas dire qu'il faille cesser de réfléchir et de creuser. Je ne fais que rappeler des mesures de prudence ; on a fondé des identités - voire des politiques - sur des discours qui parfois étaient totalement faux (par exemple, la "pureté originelle" des peuples). Evitons de prendre des risques, c'est tout, et soyons modestes.
Mon opinion s'inspire librement - et un peu superficiellement, peut-être - des ouvrages du philosophe Karl Popper qui me paraît avoir dit les choses adéquates sur le sujet. Je me permets de vous renvoyer à lui.

Cordialement

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La prudence de Popper

Message non lu par Christophe » lun. 11 oct. 2004, 22:55

Bonsoir,

[align=justify]Popper - que vous appréciez manifestement beaucoup ;-) - considère, a contrario de vous, qu'une théorie scientifique doit être conservée (même lorsqu'il est admis qu'elle est fausse) tant qu'une autre théorie plus efficace n'aura pas été élaborée.
Jamais il n'a suggéré qu'il fallait s'abstenir d'utiliser une théorie sous prétexte qu'elle pourrait donner des résultats erronés.

Il n'avait pas votre prudence... :P [/align]

Bien à vous
Christophe
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Re: La prudence de Popper

Message non lu par MB » lun. 11 oct. 2004, 23:13

Bien vu, et je m'aperçois que j'avais raison de dire que je m'en inspirais très librement. :roll: Et en effet, pour vérifier qu'une théorie est fausse, il faut l'avoir testée.
Ici, je ne parle pas de réflexion épistémologique, mais des relations entre pratique politique et réflexion politico-identitaire. Pour appliquer à la réalité, au niveau politique, une théorie particulière, il faut toujours se rappeler que les enjeux soulevés sont importants (car en dernière analyse, c'est toujours des hommes et de leur vie qu'il s'agit). Donc faire preuve de prudence.

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Pétition adressée au président contre l'entrée de la Turquie

Message non lu par mc » ven. 12 nov. 2004, 19:19

[align=center]ATTENTION *** URGENT *** 1.000.000 DE SIGNATURES INDISPENSABLES ***

- AVANT LE 16 DECEMBRE -[/align]

Danger immédiat : Jacques Chirac veut faire entrer la Turquie en Europe.

Fait démontré : L’opinion est massivement contre.

Décision indispensable : Ensemble, arrêtons-le !

[align=center]FAITES CIRCULER CE MAIL MASSIVEMENT ! A TOUT VOTRE CARNET D’ADRESSES[/align]

Motifs de bon sens :

M. Jacques Chirac se trompe lourdement, ce n'est pas la Paix qu'il nous prépare :
  • Car la laïcité turque est incompatible avec la laïcité selon le modèle chrétien.
    Car il est malhonnête de négocier quinze ans avec les Turcs si c’est pour leur fermer brutalement la porte de l'Europe.
    Car la Turquie peut jouer un rôle de pont entre l'Asie et l'Europe, mais elle n'est pas européenne.
Action urgente :


[align=center]DEMANDONS UN REFERENDUM
sur l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne avant de commencer les négociations
[/align]

Signez et faites signer la lettre ouverte que nous adresserons le 16 décembre au Président de la République : Je veux signer la pétition


-------------------------------------------------------------------------------------------------------------
La Fondation de service politique engage une grande campagne démocratique pour exiger légitimement que les Français soient consultés sur la question turque.


Les actions efficaces de la FSP :

- 300.000 lettres-pétitions postées le 2 novembre. Budget = 210.000 €
- Le site Internet http://www.libertepolitique.com recueille votre signature : nous en attendons 1.000.000 avant le 16 décembre : budget = 15.000 €
- Au printemps nous organisons un grand colloque-forum sur l’identité de l’Europe. Nous vous tiendrons informé. Budget = 200.000 €

Agissez dès aujourd’hui :
  • - Signez la pétition en ligne
    - Faites circuler MASSIVEMENT ce mail

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