La vocation de la famille selon Benoît XVI

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La vocation de la famille selon Benoît XVI

Message non lu par mgls » ven. 30 déc. 2005, 22:45

Benoît XVI s'est rendu ce matin au dispensaire Sainte Marthe du Vatican qui assiste les familles nécessiteuses ayant des enfants de moins de deux ans.

Après avoir rappelé combien Noël nous parlait de l'Amour de Dieu :

"Ces jours-ci nos regards sont tournés vers l'Enfant-Jésus...qui depuis la grotte de Bethléem frappe à la porte de nos cœurs, nous demande de lui faire de la place dans nos vies. Dieu est ainsi, il ne s'impose pas, il n'entre jamais par la force. Comme un enfant, il demande à être accueilli. D'une certaine façon, il montre qu'il a besoin de notre attention et que nous ayons soin de lui",

Benoît XVI a une nouvelle fois affirmé la vocation première de la famille comme étant :

"la vocation fondamentale de la famille à être le lieu premier et principal d'accueil de la vie. Notamment en réaction au passé, la conception moderne de la famille accorde une grande importance à l'amour conjugal, dont il souligne la liberté du choix et des sentiments. Elle a par contre plus de mal à percevoir et comprendre l'importance de l'appel à collaborer au plan de Dieu en procréant".

Il a enfin insisté sur le rôle que les sociétés devaient tenir en faveur des familles :

"la société contemporaine ne facilite pas toujours le rôle des parents, en particulier au plan des motivations spirituelles et morales ou bien des conditions de la vie pratique. Il existe un grand besoin culturel mais aussi législatif pour soutenir la famille".
"France, qu'as-tu fait de ton baptême ?" Jean-Paul II (Le Bourget - 1er juin 1980)

Le pti prince
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Message non lu par Le pti prince » sam. 07 janv. 2006, 2:10

il devient aujourd'hui dans le consensus social souvent suspicieux que d'oser simplement prononcer le mot "famille". En effet, un sociologue comme Singly l'a tout simplement abandonné, en tout cas pour lui il n'est que l'apanage des réactionnaires ennemis de la République... Aujourd'hui on ne parle plus de famille, mais d'individus qui coopèrent ensemble pour un temps, la "cellule familiale" n'a plus de sens dès lors que les nouvelles formes de cohabitation se propagent où l'individu n'est plus membre d'une cellule (concept bien trop retrictif pour l'homme libre de l'individualisme que défend Mr. Singly) mais un membre complétement libre qui ne doit rendre compte que du contrat qui le lie (et que, d'ailleurs, il peut à sa guise interrompre, dès qu'il en sent le besoin, afin de toujours plus s'émanciper- c'est leur mot ça :P ) et c'est tout...

Pour ce qui est de la famille, je m'interroge actuellement dans un travail sur la figure paternelle qui a comme nous pouvons tous le constater, perdu de l'influence qu'elle avait un temps. On peut soulever de nombreuses raisons à cette désaffection des pères dans la société actuelle, entre autre: les avancées technologiques provoquant la perte de la conception du père possédant le savoir. Les conceptions libertaires qui ont gagné nos sociétés depuis, entre autre, mai 68 ont placé l'autorité du père (pas seulement celle du père bien évidemment) dans une position plus que délicate. En effet, toute forme d'autorité aujourd'hui n'a plus sa place, car elle risque d'entraver le sacro-saint libre-arbitre de l'enfant. Les père ont été stigmatisé (mais cela depuis déjà deux siècles) comme les principaux responsables de l'endoctrinement des enfants et donc comme principaux contradicteurs de l'Etat ou de l'Histoire (pour le communisme) ou des idéologies (le nazisme par exemple a eu comme principal objectif de retirer aux pères leur pouvoir en endoctrinant les enfants dès leur plus jeune âge) comme celle que nous vivons aujourd'hui, éprise de libertinage (mais l'on commence à observer les dérives d'une éducation trop laxiste, par exemple dans les événements qui se sont déroulés dans les banlieues françaises dernièrement- même si la problématique est bien plus vaste, je pense que l'éducation et ses composantes en sont un versant indéniable)

Et plein d'autres raison encore :)

Par exemple, il y a un lien entre la perte de l'autorité paternelle et la perte de la référence au Dieu Père chrétien dans notre société sécularisée. Perte d'une référence extérieure: aujourd'hui la référence suprême est l'individu, son épanouissement et la construction de son identité propre, à travers les autres individus qu'il "utilisera" afin de s'émanciper toujours plus.

Donc la question qui se pose: quel rôle le père doit-il (pourra-t-il) prendre dans la famille (souvent éclatée) actuelle et puisque l'on est dans un forum politique, quels sont les enjeux qui permettront aux pères d'avoir une place dans la dynamique familial, si d'autant que notre société lui reconnaisse encore le devoir d'être une figure identitaire indispensable pour la croissance de l'enfant- ce qui n'est pas acquis dans une perspective purement individualiste défendue par des sociologue comme Singly.

Car ce qui se cache derrière tout cela est bien sûr l'éducation et la croissance de l'enfant. De nombreuses recherches ont montré que l'absence du père (pour différentes raisons, par exemple le fait que la loi française interprétée aujourd'hui fait que 9 fois sur 10 la garde de l'enfant est attribuée aux mères) et du symbole qu'il représente pour l'enfant (l'autorité, le respect de la loi mais aussi la possiblité d'avoir un modèle identitaire lié à des valeurs et à des responsablités qu'il aura à analyser plus tard pour se construire) ont provoqué chez les adolescents de profonds troubles psychologiques et même des déficiences intellectuelle graves...

Qu'en pensez-vous ?
N'espère rien de l'homme s'il travaille pour sa propre vie et non pour son éternité.


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Message non lu par Hélène » sam. 07 janv. 2006, 15:07

Bonjour le pti Prince :welcome:

Je vous rejoints entièrement dans ce que vous dites. Je me permets avec sa permission et sa bénédiction (paternelle !) de reproduire une analyse du père Joseph-Marie Verlinde concernant les carences de la paternité et les dégâts que cela a pu entraîner dans notre société moderne (en fait, depuis Genèse 3 ! :blink: ). J'invite d'ailleurs chacun de nous à non seulement lire ce qui suit mais à s'y reconnaître et à s'approprier l'analyse pour aller vers un chemin de guérison, car c'est bien à cela que cette analyse doit aboutir : une amorce de guérison pour chacun de nous :

Les carences de la paternité

Être père n’est pas une tâche facile ! Non pas au sens charnel de l’engendrement, mais au sens biblique de la responsabilité de la croissance de l’enfant – puis de l’adolescent – jusqu’à l’âge adulte.

C’est peut-être en raison de cette difficulté et des erreurs inévitables dans son exercice, que cette très belle mission a été aussi radicalement mise en cause durant la grande période de contestation des années 1960-70. Quoi qu’il en soit, la peur de tomber dans le travers du « paternalisme » qu’elle avait si violemment contesté, a culpabilisé et inhibé la génération ’68 confrontée à l’éducation de ses propres enfants, au point de démissionner de sa tâche, avec toutes les conséquences, souvent dramatiques, pour la progéniture. Privé de paternité – que le papa soit absent physiquement ou qu’il n’assume pas son rôle – l’enfant aura en effet beaucoup de mal à trouver son identité propre.

Avant d’esquisser les conséquences de l’absence d’une paternité structurante, nous envisagerons schématiquement les deux formes les plus typiques de cette carence : l’un par excès et l’autre par défaut :

• Le paternalisme étouffant; et
• l’absence de ministère de paternité.

Le paternalisme étouffant

Le refus de partager l’accès à la parole

Le père symbolise pour l’enfant l’altérité et l’extériorité objective, qui le « sauve » de la fusion narcissique avec sa mère. C’est en sollicitant l’enfant d’une façon qui éveille son intérêt pour la nouveauté, la différence, que le père lui donne le désir de découvrir son identité propre pour vivre sa vie.

Tout sentiment de peur face à une altérité menaçante, provoquera une attitude régressive, un retour à l’état de fusion narcissique avec la mère.

Nous avions vu que la parole du père constitue l’inter-dit fondateur de la personnalité de l’enfant, qui découvre sa liberté, sa responsabilité, et ainsi son identité, en réagissant à l’inter-pellation de son père. Mais si au lieu d’ouvrir l’espace du dialogue, l’inter-dit signifie au contraire que toute réponse est défendue; autrement dit si le père refuse de partager la parole, mais se l’approprie de façon exclusive, celle-ci devient répressive et étouffante. Là où le droit à l’expression est refusé, la paternité se pervertit en paternalisme, qui au lieu de favoriser, va tout au contraire inhiber la construction de la personnalité de l’enfant.

Dans la lettre qu’il écrivit à son père en 1919, Kafka a exprimé de façon poignante, le drame intérieur de cet étouffement progressif dans l’étau du paternalisme :

« De ton fauteuil tu gouvernais le monde. Ton opinion était juste. Toute autre était extravagante, folle, cinglée, anormale.

Et avec cela, ta confiance en toi-même était si grande que tu n’avais pas besoin de rester conséquent pour continuer à avoir raison.

Tu pris à mes yeux ce caractère énigmatique qu’ont les tyrans dont le droit ne se fonde pas sur la réflexion, mais sur leur propre personne.

Quand j’entreprenais quelque chose qui te déplaisait et que je te menaçais d’un échec, mon respect de ton opinion était si grand que l’échec était inéluctable.

Je perdis toute confiance dans mes actes personnels. Je devins instable, indécis. Plus je vieillissais, plus grossissait le matériel que tu pouvais m’opposer comme preuve de mon peu de valeur. Peu à peu, les faits te donnèrent raison à certains égards.

Le courage, la décision, la confiance, la joie que j’éprouvais au contact de telle ou telle chose ne résistaient pas quand tu y étais hostile ou que je supposais seulement ton hostilité, et je ne pouvais guère m’empêcher de la supposer toujours quoi que je pusse faire.

En ta présence, je me mettais à bégayer, mon élocution se troublait; cela même était encore de trop à tes yeux, finalement je me taisais, d’abord par défi, peut-être, puis parce que ta présence me rendait incapable de penser comme de parler.

Et parce que tu avais été mon véritable éducateur, je devais l’en ressentir en tout domaine, au cours de ma vie.

Devant toi, j’avais perdu la confiance en moi-même et assumé en retour un sentiment de culpabilité sans borne. »


La surprotection

Toute forme d’excès dans le ministère de paternité peut devenir étouffante. Prenons le sentiment si important de sécurité; il est également assuré par le père à travers la protection qu’il offre à sa famille. Mais il est certain qu’une protection excessive – un « protectionnisme » - sera à nouveau nocive. Car le père doit également éveiller – particulièrement chez ses fils – le goût du risque. Une prudence exagérée, mettant sans cesse en garde contre des dangers invisibles, risque d’éroder – voire détruire – l’esprit d’initiative et d’audace de l’enfant, engendrant une certaine pusillanimité, une peur diffuse devant l’imprévu qui ne peut être que menaçant; attitude dont l’enfant souffrira plus tard.

L’autorité du père doit aider l’enfant d’une part à se connaître, de l’autre à évaluer objectivement les situations, afin de pouvoir affronter les obstacles de la vie sans présomption ni peur, mais de façon réaliste. C’est ainsi que l’enfant est progressivement initié à l’école de la liberté et de la responsabilité.

L’absence de ministère de paternité

Si le ministère d’autorité n’est pas assuré par son support normal, le père, c’est la mère qui devra l’assumer, alors que sa participation à cette fonction ne devrait être que secondaire. Cette confusion des rôles sera toujours dommageable pour l’évolution de l’enfant.

L’absence de paternité n’est pas forcément réelle – mort, abandon du foyer ou séparation des conjoints; elle peut également être « virtuelle », lorsque le ministère n’est que partiellement assuré ou par intermittence. Commençons par ces cas d’absence « virtuelle ».

Les pères absents par intermittence

Certains pères sont obligés de s’absenter régulièrement du foyer familial, par exemple pour des raisons professionnelles. L’enfant s’accommode mal de cette situation en dents de scie, où l’autorité est vécue ordinairement par la mère, qui cède son rôle au père lorsque celui-ci réapparaît.

D’autant plus que la mère aura tendance à confier à son mari la tâche de régler les conflits latents et de donner des directives fermes qui lui permettront de garder la maîtrise du foyer durant son absence. Dans ces conditions, le père apparaîtra inévitablement comme celui qui vient de temps en temps troubler un certain modus vivendi sans l’assumer lui-même, puisqu’il est absent. De plus l’enfant peut se sentir trahi par sa mère qui se plaint auprès du père de ses écarts, et traité injustement par ce dernier, qui sévit sur simple parole de la mère.

Par ailleurs, si l’absence est suffisamment prolongée, le garçon, qui entre-temps aura pris la place du père comme (petit) « homme » du foyer, pourra considérer comme une trahison l’affection que la mère manifeste à son mari lors des « apparitions » de celui-ci. Aussi l’enfant risque-t-il de considérer son père comme un rival, voire un intrus.

On peut également parler d’une forme de paternité par intermittence dans le cas où les parents sont séparés. L’enfant est confronté séparément au ministère paternel et maternel, de sorte que chacun de ces ministères se trouve amputé de la complémentarité de l’autre qui équilibrait son exercice. En fait, chacun des parents aura à assumer les deux rôles durant le temps où l’enfant lui est confié, ce qui ne va pas sans difficulté, car la tentation est grande de critiquer la façon d’agir de l’autre devant l’enfant, augmentant ainsi sa confusion et son angoisse.

Le père virtuellement absent

Que de père sont virtuellement absents de leur foyer, ne rentrant que tard le soir, alors que les enfants dorment déjà, et quittant la maison avant leur lever !

D’autres, harassés par une journée stressante, bousculent et repoussent leurs enfants en quête de contact.

Et lorsque enfin ils parviennent à dégager quelques heures à leur consacrer, ils renoncent aux exigences de leur ministère de paternité, sous prétexte de ne pas gâcher ces rares moments de rencontre.

Le père indifférent

D’autres sont physiquement présents au foyer, mais pour des raisons relevant probablement de leurs propres blessures, se révèlent incapables d’assumer leur rôle de père. Ils sont certes les géniteurs et les nourriciers de leurs enfants, mais là semble s’arrêter leur mission. Ils se déchargent complètement sur la mère de l’éducation, n’intervenant en rien et cachant leur impuissance derrière une façade de parfaite indifférence à ce qui se passe dans la maisonnée. Ils sont certes présents, mais totalement investis dans leurs propres occupations, vivant une sorte de vie parallèle sous le toit familial.

Le père « copain »

Certains pères, enfin, n’ayant sans doute pas bénéficiés eux-mêmes d’une authentique paternité, et voulant à tout prix éviter que leurs enfants ne nourrissent envers eux les sentiments qu’ils ont voués à leur propre paternel, esquivent carrément le ministère qui est le leur, essayant d’entrer dans le rôle du « copain » plutôt que du père.

Mais l’enfant ne cherche pas un camarade adulte : il revendique le droit à la paternité sans laquelle il ne peut se construire; le mépris qu’il nourrit pour ce père falot risque de s’incarner dans un comportement de rejet, voire d’hostilité, qui s’intensifie à mesure que le « père » redouble ses tentatives de proximité amicale.

La figure dégradée du père

Dans certains cas extrêmes – un père alcoolique par exemple – l’enfant peut évacuer de son horizon existentiel la réalité insoutenable de cette paternité dégradée. Mais il reste écartelé entre le mépris qu’il ressent pour cet homme en qui il refuse de reconnaître son père, et l’intense culpabilité que ce sentiment engendre dans sa conscience.

Conséquences de l’absence du père

Fondamentalement, ce qui a manqué à l’enfant privé d’une paternité structurante, c’est la reconnaissance et la confirmation du droit de disposer de sa propre vie; ou encore : de vivre en tant que personne, c’est-à-dire en tant que sujet libre et responsable.

Je ne peux recevoir ce droit que de celui qui est mon origine, et dans la mesure où il me signifie que la vie est un don gratuit dont je peux librement disposer; qu’elle est un bien; que l’a-venir m’est offert pour tenter de réaliser quelques-unes des possibilités que je pressens en moi.

De la conscience de ce droit, naît le désir de se « lancer », de s’affirmer dans son originalité, de courir le risque de l’engagement, des responsabilités partagées.

Bien sûr il y a des « lois » à respecter; non seulement celles des diverses sociétés dans lesquelles je risque mes premiers pas – la famille, l’école, plus tard la cité – mais surtout la loi intérieure, celle qui est inscrite dans mon cœur. C’est encore le père qui aide l’enfant à s’établir et à demeurer dans la vérité en lui faisant prendre conscience de ces structurations internes et externes, qui lui sont offertes comme des balises éclairant sa route.

Aussi les carences de la paternité vont-elles affecter la personne tant au niveau de sa liberté intérieure face aux défis de la vie, qu’au niveau de sa relation à la loi – morale, civile ou autres.

Nous pouvons résumer les symptômes de cette carence en trois traits caractéristiques.

Une personnalité mal rassemblée

Un enfant n’ayant pas joui du ministère de paternité, risque de développer une personnalité sans armature, ni structure, manquant de fermeté, de consistance, d’autonomie.

Ne sachant pas vraiment qui elle est, une telle personne souffre d’un profond manque de confiance en elle-même; aussi la conduite de sa vie est-elle marquée par l’indécision et par l’incertitude (1). Ne se sentant jamais sûre de quoi que ce soit, elle ne parvient pas à faire de choix, à se fixer un but et à s’y engager résolument.

Arrivés à l’âge adulte, le jeune homme ou la jeune fille se trouvent incapables de décider d’une orientation professionnelle ou d’un état de vie. Choisir fait peur car l’appel profond qui structure la personnalité et qui permettrait de trancher dans un sens ou dans l’autre, n’a pas été entendu. S’installant dans l’éphémère, ils repoussent sans cesse à demain une décision qu’ils n’osent prendre, faute d’avoir découvert leur identité profonde.

Conscientes de cette impuissance qui les angoisse et les humilie, ces personnes tentent de faire bonne figure en adoptant les comportements qu’elles croient être ceux que leur entourage attend d’elles. Mais cette dépendance excessive du regard des autres, et cet effort ininterrompu d’adaptation aux circonstances sont épuisants et angoissants, au point de pouvoir conduire à la dépression.

L’adolescent puis l’adulte tentera de cacher son manque de maturité et sa profonde incertitude sous des affirmations sans nuances, catégoriques qui lui donnent l’apparence d’une forte personnalité; mais ses pieds sont d’argile : il éprouve de très grande difficultés à prendre des responsabilités, à respecter l’autorité tout comme à l’exercer. Son sens du devoir et des obligations envers les autres est peu développé; sa conscience morale est pauvre et les valeurs ne le mobilisent pas vraiment.

Affectivement isolée

Ceux qui ont manqué d’autorité paternelle cherchent inconsciemment à retrouver dans les relations adultes, le rapport fusionnel avec la mère auprès de laquelle ils se sentent sécurisés. Mais ces pseudo-relations ne débouchent pas sur un engagement profond et durable, car la tendance narcissique domine. Aussi ces personnes éprouvent-elles de grandes difficultés à fonder un foyer ou à y demeurer fidèle.

En quête de refuge

N’osant pas entrer dans le jeu de l’altérité, les personnes n’ayant pas joui d’une autorité paternelle structurante, chercheront toute leur vie un « sein substitutif » de celui de leur mère. L’imaginaire, les mystiques fusionnelles, l’alcool, la drogue sont autant de refuges dans lesquels l’adolescent puis l’adulte peut chercher à s’abriter pour échapper à l’exigence des relations interpersonnelles auxquelles il n’a pas été initié et qui sont pour lui source de tension, voire d’angoisse.

Humiliées par l’inadaptation sociale qu’elles éprouvent douloureusement, ces personnes sont aussi des proies de choix pour les mouvements sectaires dont elles reçoivent une identité d’emprunt et une structure de pensée toute faites.

Un chemin de guérison

Pour permettre aux personnes qui n’ont pas joui des bienfaits d’une paternité structurante, il n’est pas d’autre chemin que de les aider à découvrir leur personnalité et à se structurer intérieurement en acceptant d’être pour eux, à l’âge adulte, ce vis-à-vis qu’ils n’ont pas connu étant enfant.

Long cheminement de patience, où l’espérance sans cesse côtoie la peur. Espérance d’avoir enfin accès à cette identité profonde hors de laquelle il n’est pas de vraie vie personnelle, peur de devoir se confronter à la différence et de ne pas pouvoir l’assumer.

Chemin qui passe par la verbalisation des blessures, des rancoeurs cachées, des haines étouffées qui empêchent de vivre et enferment dans la culpabilité.

Mais pour que ce chemin ne s’enlise pas dans le ressentiment et débouche sur la vie, il est impératif qu’il soit parcouru dans la lumière de l’Esprit du Christ, qui seul peut nous combler dans le lieu même de nos manques, et bien au-delà de notre attente.

Car il est un droit plus originaire et dès lors plus fondamental encore que celui de pouvoir habiter sa vie de façon personnelle; un droit qui englobe et dépasse le droit de vivre que nous espérions recevoir de notre père selon la chair. Ce droit, que le Créateur seul peut me donner, est celui d’exister. En m’offrant à chaque instant « la vie, le mouvement et l’être (Ac 17, 28) », Dieu me redit sans cesse ce droit radical qui contient tous les autres, y compris ceux qui n’ont pas été confirmés par mes parents au cours de ma croissance.

C’est donc vers cette paternité existentielle et absolue, d’où toute paternité tire son nom, au ciel et sur la terre (Eph 3, 15) que nous nous tournons, pour trouver la guérison des blessures dues aux carences de la paternité psychique et charnelle.

S’il est vrai que lui seul est Père, alors la révélation de son visage de tendresse devrait pouvoir combler les attentes insatisfaites et libérer la personnalité enfouie : « Que le Seigneur fasse pour toi rayonner son visage et te fasse grâce ! Que le Seigneur te découvre sa face et t’apporte la paix ! » (Nb 6, 25 ss.).

Bien souvent hélas l’absence du père bloque l’accès à une authentique expérience de la paternité de Dieu, qui est vue à travers le prisme déformant de la paternité naturelle déficiente. Aussi le ministère de guérison auprès de ceux qui n’ont pas connu la médiation paternelle qui devait leur permettre d’être eux-mêmes, consiste-t-il essentiellement à ouvrir et à scruter avec eux les Écritures dans lesquelles se dévoile progressivement la paternité divine, plus digne de confiance et plus solide que la paternité humaine : « Mon père et ma mère m’abandonnent, le Seigneur me reçoit » (Ps 26, 10). Mais cette découverte ne se fait qu’au prix d’un travail laborieux et persévérant, dans la foi et l’espérance, qui nécessite d’être accompagné et soutenu.

« Mon cœur m’a redit ta parole : "cherchez ma face". C’est ta face, Seigneur, que je cherche » (Ps 26, 8). « Rechercher le visage de Dieu, commente Jean-Paul II, est un chemin nécessaire, que l’on doit parcourir avec la sincérité du cœur et un effort constant. Seul le cœur du juste peut se réjouir dans sa recherche du visage du Seigneur (cf. Ps 104, 3 ss) et, sur lui, peut alors resplendir le visage paternel de Dieu (cf. Ps 118, 135; cf. aussi Ps 30, 17; 66, 2; 79, 4.8.20) (2) »

Ce cheminement culmine dans la rencontre personnelle avec le Christ – « Qui m’a vu a vu le Père (Jn 14, 9) » - car seul Jésus peut, dans l’Esprit, nous révéler le vrai visage du Père en nous offrant de communier à sa vie filiale : « Voyez comme il est grand, l’amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu, et nous le sommes (1 Jn 3, 1) ».


(1) Voir la lettre de Kafka à son père.
(2) Jean-Paul II, Audience générale du 13 janvier 1999, DC 2197 (1999) 105-106.


Père Joseph-Marie Verlinde, Lettre de la Famille, no 84, décembre 2001, p. 4-18.
Également dans Parcours de guérison intérieure; à l'écoute de la Parole, Presses de la Renaissance, Paris 2003, p. 117-132. Analyse plus complète. http://www.lecatalogue.info/product_inf ... 5a5fb82b7b
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Message non lu par Le pti prince » sam. 07 janv. 2006, 21:35

Merci Hélène de ces informations partagées ! Très intéressant pour mon travail :) !

On peut d'ailleurs remarquer (et cela fera un lien avec un autre sujet de ce forum) que Harry Potter, l'enfant héros qui a mis en branle des milliers de jeunes, est justement un enfant orphelin, qui plus est maltraité, angoissé, déprimé, résilient qui tente de survivre tant bien que mal dans le monde des adultes. Si cela vous intéresse d'ailleurs, un pédopsychiatre, Eric Auriacombe a écrit un livre très intéressant "Harry Potter, l'enfant-héros" aux éditions Puf, où il propose, à travers une lecture attentive de Harry Potter, une approche de la psychopatologie du deuil de l'enfant, du traumatisme, de la maltraitance, ainsi que des mécanismes psychologiques plus spécifiques, comme la cryptophorie ou la revenance.

Il n'est sans doute pas annodin que des miliers d'enfants de nos sociétés contemporaines se soient identifiés aussi massivement à cet enfant sans père ni mère... :blink:
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Message non lu par Hélène » sam. 07 janv. 2006, 22:01

Le pti prince a écrit : On peut d'ailleurs remarquer (et cela fera un lien avec un autre sujet de ce forum) que Harry Potter, l'enfant héros qui a mis en branle des milliers de jeunes, est justement un enfant orphelin, qui plus est maltraité, angoissé, déprimé, résilient qui tente de survivre tant bien que mal dans le monde des adultes. Si cela vous intéresse d'ailleurs, un pédopsychiatre, Eric Auriacombe a écrit un livre très intéressant "Harry Potter, l'enfant-héros" aux éditions Puf, où il propose, à travers une lecture attentive de Harry Potter, une approche de la psychopatologie du deuil de l'enfant, du traumatisme, de la maltraitance, ainsi que des mécanismes psychologiques plus spécifiques, comme la cryptophorie ou la revenance.

Il n'est sans doute pas annodin que des miliers d'enfants de nos sociétés contemporaines se soient identifiés aussi massivement à cet enfant sans père ni mère... :blink:
Ça c'est aussi très intéressant comme approche. Le père Joseph-Marie (encore lui !) en fait une analyse semblable dans un enseignement intitulé "Comment éduquer nos enfants à l'époque des sorcières" où il explique de façon magistrale l'arrière-fond social de ces phénomènes de héros populaires (entre autres Harry Potter et le Code Da Vinci). Il recule jusqu'au siècle des Lumières en passant par le refus de Nietzsche et les philosophes du soupçon, à la révolte des années '60 jusqu'à aujourd'hui où nous sommes dans une pathologie sociale quant à la crise de la paternité en brossant un portrait social, se référant aux outils de la psychologie et bien sûr au phénomène religieux...bref, géniale analyse.

J'aimerais bien mettre la main sur ce bouquin dont vous me parlez...je suis aussi confrontée avec une amie catho qui s'obstine à vouloir me "prouver" qu'il y a un message chrétien dans Harry Potter :sick: ... à trouver des arguments autres que catholiques (ça en prend pour les convaincre...). Cette personne est aussi psychologue... :)

Merci pour le tuyau !
Union de prière,
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Message non lu par mc » dim. 08 janv. 2006, 10:31

Concernant Harry Potter (dénoncé en son temps par le patron des exorcistes, Dom Amorth) j'avais assez aimé l'analyse fouillée de l'évangélique Richard ABANES dans 'Harry Potter et la Bible", 2002, Edition française chez Editions Ministères Multilingues, Longueil (Québec) Canada
ISBN 2-89576-004-7

Merci en tout cas pour le texte du Père Verlinde.

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Pétition pour la revalorisation du mariage

Message non lu par mgls » mar. 17 janv. 2006, 21:30

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[align=center]Image[/align]
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Message non lu par mgls » ven. 20 janv. 2006, 12:33

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Life parade - Manifestation le 17 mars 2007

Message non lu par mgls » lun. 12 févr. 2007, 0:45

Rendez vous à 14h30 place Saint Sulpice à Paris le 17 mars 2007

Après avoir rassemblé des dizaines d’associations et des milliers de participants, jeunes pour la plupart, au cours de ses deux premières éditions, la Life Parade continue d’œuvrer pour la culture de la vie et de la famille. Parce que nous construisons aujourd’hui la société de nos enfants et petits-enfants, nous devons une nouvelle fois nous mobiliser.

http://lifeparade.org
"France, qu'as-tu fait de ton baptême ?" Jean-Paul II (Le Bourget - 1er juin 1980)

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giorgino
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eh pui !!

Message non lu par giorgino » lun. 12 févr. 2007, 19:35

L' un des signes du déclin de la France , c'est AUSSI de ne plus s 'exprimer en français : Jamais je n' adhererai a la LIFE PARADE ! jamais ! A la parade de la vie , oui ! Mais a un mouvement incapable de s 'exprimer en Français surement pas !!!

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giorgino
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anglicisme

Message non lu par giorgino » lun. 12 févr. 2007, 19:58

J' ai fait des etudes de sémiologie , science des signes , et je vous dis ceci : quand on veut se démarquer d'un fait , on commence a s 'en démarquer au niveau du signifiant , c 'est a dire du mot du son linguistique , de la forrme . Appelez ça a votre guise . Vous communiquez exactement comme les homos ,Gay PRIDE , Act UP , faire son " coming out" . Une personne agée , ou peu au courant , ou non anlophone , entend Life pride , elle LIT quoi ???
De plus un pays incapable de creer des mots nouveaux est un pays sur le déclin !! Votre attitude a le don de m' enerver au plus haut point !!

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