Du synode allemand au synode sur la synodalité

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Gaudens
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Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Gaudens » mar. 12 sept. 2023, 16:24

Le cardinal Muller,ancien préfet de la Congrégation pour la doctrine de la Foi et auteur d'un livre remarqué( De buona fede - de bonne foi -) non encore traduit en français,semble-t-il, en janvier dernier,vient de donner une entrevue très éclairante à un journal italien.
A quelques jours de l'ouverture du synode génaral à Rome,il évoque les ambitions des promoteurs du synode allemand et aussi les dysfonctionnements de la bureaucratie vaticane alors que la crise de l'Eglise latine en Occident a atteint un point crucial :

https://www.benoit-et-moi.fr/2020/2022/ ... nal-muller

Certaines de ses affirmations peuvent provoquer des questions (mais la traduction de l'italien à l'espagnol puis au français est peut-être fautive) mais le questionnement de fond me parait irrécusable.

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Gaudens » mar. 03 oct. 2023, 10:08

Au moment où vient de s’ouvrir à Rome le « synode sur la synodalité »,un fait majeur risque de passer inaperçu :
Cinq cardinaux (Sarah,Burke,Brandmueller,Zen -ancien évêque de Hong Kog- et Sandoval) avaient adressé au pape il y a quelques semaines une lettre énumérant trois « dubia », demandes d’éclaircissement sur des points fondamentaux préalablement à l’ouverture du Synode).Le pape avait répondu en juillet par une brève lettre très vague et synthétique n’y répondant pas point par point.Il évoquait même le danger de la « peur » supposée motif de la lettre des cinq cardinaux).
Derechef ceux-ci ont répondu en maintenant leur demande d’éclaircissement ,jusqu’ici sans réponse.Tout donne à penser qu’il n’y en aura pas, ce qui fait craindre les conclusions de ce synode lorsqu’elles seront connues.
Voir tout le déroulement de l’affaire ci-dessous :
https://www.benoit-et-moi.fr/2020/2023/ ... t-la-manip

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Olivier JC
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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Olivier JC » mar. 03 oct. 2023, 10:21

Bonjour,

Pour être précis, il y a 5 dubias adressés en juillet dernier au Souverain Pontife, qui y a répondu en août dernier. Ce sont ces réponses qui sont publiées aujourd'hui par le Saint Siège, au moment même où les cardinaux soumissionnaires, ne s'estimant pas suffisamment éclairés par les réponses pontificales, ont adressé à nouveau ces 5 dubias en les reformulant de telle sorte que la réponse soit, comme elle doit l'être en la matière, OUI ou NON.

Et ces dubias ne sont pas anecdotiques :

1. Est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale, que ce soit par le Pape ex cathedra, ou selon les définitions d’un Concile œcuménique, ou encore selon le Magistère ordinaire universel des Évêques dispersés dans le monde (cf. Lumen Gentium 25) ?

2. Est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu ? En lien avec ce dubium, il est nécessaire d’en soulever un autre : l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constituent un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?

3. Le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Évêques (cf. can. 336 C.I.C.)

4. L’Église pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que la réservation exclusive de ce sacrement à des hommes baptisés appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Église ne peut pas changer ?

5. Un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ?

Il va de soi que n'importe quel fidèle correctement catéchisé pourrait répondre à ces dubias : non, non, oui, non, non et non.

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par prodigal » mar. 03 oct. 2023, 11:27

Cher Olivier JC,
la démarche suivie est censée viser la clarification, tant mieux. Mais je ne suis pas sûr qu'elle y parvienne. Reprenons les dubia un par un.
1) Est-il possible que l'Eglise revienne sur l'un de ses enseignements passés, non revêtu du charisme de l'infaillibilité, pour le corriger? Il me semble bien que oui. En fait, tous les enseignements passés ou présents de l'Eglise n'ont pas forcément la même autorité.
2) Cela me paraît moins ambigu. Toutefois, la formulation rejette totalement l'idée que l'on puisse prendre en compte l'intention de l'acte, ce qui me semble excessif.
3) Il me semble que la réponse est dans la question! Je ne comprends pas bien.
4) Nous n'en savons rien en réalité, puisque cette question engage l'avenir. Mais là encore la réponse est dans la question, puisque celle-ci présuppose que l'ordination sacerdotale ne pourra jamais être conférée à des femmes, ce qu'elle prétend prouver. C'est un cercle.
5) Tout est dans le "d'une quelconque manière".
Au final, je n'ai pas l'impression que le but visé soit vraiment la clarification, mais plutôt la polémique. La question de fond, c'est la distinction entre ce qui est intangible et ce qui est susceptible d'évolution. C'est la même depuis bien des années, depuis que l'on se sert des termes de modernisme et d'intégrisme. Je ne vois pas l'utilité de ces dubia, ainsi formulés, sinon de faire pression sur l'autorité suprême pour qu'elle choisisse l'intégrisme contre le modernisme. Mais l'urgent, selon moi, est de sortir de cette querelle mortifère.
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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Gaudens » mar. 03 oct. 2023, 13:26

Bonjour Prodigal,

Je laisse à Olivier JC ,plus ferré que moi en théologie et en droit canon,le soin de vous répondre point par point.

Toutefois je souhaite mettre l'accent sur deux points particuliers, qui me paraissent révélateurs:

1) l'intention d'un acte est-elle déterminante pour discerner s'il est ou non une action pécheresse ? N'y -a-t-il pas des éléments clairement objectifs? Dans le cas d'actes homosexuels,pardon d'être un peu crû mais la sodomie est-elle ou non en soi un péché grave - qui existe du reste aussi de façon plus raredans des relations hétérosexuelles illicites ,de façon tout aussi condamnable aux yeux de l'Eglise - au moins jusqu'à présent si l'on vous suivait .
2) l'ordination des femmes;comment pouvez-vous concevoir une possible évolution sur ce point ? La lettre apostolique de St Jean-Paul II Ordinatio Sacerdotalis et la lettre De gravioribus delictis l'excluent formellement, exclusion tenue comme une "vérité tranchée de manière définitive et devant être tenue par tous"(lettre OS + motu proprio At Tuendam Fidem) .

Ces deux exemples font craindre que vous poussiez la limite de ce qui peut évoluer dans la doctrine de la foi de manière excessive (j'ai envie de dire "jésuitique" au mauvais sens du terme).

Mais ce qui me parait inacceptable serait de juger a posteriori la nature et la motivation de ces Dubia (cinq en effet et non trois) comme relevant de la polémique.Je ne l'excluerais pas absolument s'agissant du seul cardinal Burke qui a quelques comptes à régler mais pas des autres et certainement pas du paisible et ferme cardinal Sarah. C' est vraiment un jugement téméraire de votre part tout comme de dire que ces cardinaux veulent faire choisir au pape l'intégrisme contre le modernisme.Comme vous l'abus de ces deux termes me parait malséant, alors pourquoi les utiliser ici si ce n'est pour disqualifier la démarche des cinq cardinaux? Ne pourrait-on dire plus exactement et plus sereinement qu'il s'agit de retenir le pontife actuel du côté de la conservation du dépôt de la foi, tout simplement ?

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Perlum Pimpum » mar. 03 oct. 2023, 13:41

Bonjour Olivier,

1. Est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale, que ce soit par le Pape ex cathedra, ou selon les définitions d’un Concile œcuménique, ou encore selon le Magistère ordinaire universel des Évêques dispersés dans le monde (cf. Lumen Gentium 25) ?
De facto, c’est déjà le cas, avec l’herméneutique de rupture du magistère suprême post-conciliaire

2. Est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu ? En lien avec ce dubium, il est nécessaire d’en soulever un autre : l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constituent un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?
La théologie bergoglienne répond affirmativement aux deux questions.

1) Si François est cohérent avec lui-même, lui sera impossible de refuser qu’elles soient bénies. Il lui suffira de dire que ce n’est pas la stabilité dans le péché qui est bénie, mais les personnes appelées à se convertir…

2) Et il prétendra que la doctrine reste inchangée : les actes homosexuels restent intrinsèquement peccamineux, raison pourquoi, si les circonstances peuvent en atténuer la malice, elles ne peuvent aucunement la supprimer, de sorte que pour autant que les circonstances (dont Bergoglio/François a une conception large) soient telles qu’elles diminuent suffisamment la gravité de l’acte pour le rendre véniel, les homosexuels pourront communier sans qu’il leur soit besoin de réformer leurs mœurs…

3. Le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Évêques (cf. can. 336 C.I.C.)
C’est au choix du pape.

4. L’Église pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que la réservation exclusive de ce sacrement à des hommes baptisés appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Église ne peut pas changer ?
C’est impossible au regard du canon 750 §2 : « On doit aussi adopter fermement et faire sien tous les points, et chacun d'eux, de la doctrine concernant la foi ou les mœurs que le Magistère de l'Église propose comme définitifs, c'est-à-dire qui sont exigés pour conserver saintement et exposer fidèlement le dépôt de la foi ; celui qui repousse ces points qui doivent être tenus pour définitifs s'oppose donc à la doctrine de l'Église catholique. » L’enseignement magistériel « définitif » engage l’infaillibilité (ut tenenda).

« En ce qui concerne la nature de l'assentiment dû aux vérités proposées par l'Église comme divinement révélées (1er alinéa) ou à tenir de manière définitive (2ème alinéa), il importe de souligner qu'il n'y a pas de différence au niveau du caractère plein et irrévocable de l'assentiment dû respectivement à ces diverses vérités. La différence se situe au niveau de la vertu surnaturelle de foi: dans le cas des vérités du premier alinéa, l'assentiment est fondé directement sur la foi dans l'autorité de la Parole de Dieu (doctrines de fide credenda); dans le cas des vérités du deuxième alinéa, l'assentiment est fondé sur la foi dans l'assistance que le Saint-Esprit prête au Magistère et sur la doctrine catholique de l'infaillibilité du Magistère (doctrines de fide tenenda). » Congrégation pour la doctrine de la foi, Note doctrinale illustrant la formule conclusive de la Professio fidei, 8.

« De toute façon, le Magistère de l'Église enseigne, par un acte définitoire ou non, une doctrine à croire comme divinement révélée (1° alinéa) ou à tenir de manière définitive (2° alinéa). Dans le cas d'un acte définitoire, une vérité est solennellement définie par une déclaration « ex cathedra » du Pontife romain ou par l'intervention d'un concile œcuménique. Dans le cas d'un acte non définitoire, une doctrine est enseignée infailliblement par le Magistère ordinaire et universel des Évêques dispersés de par le monde et en communion avec le Successeur de Pierre. Cette doctrine peut être confirmée ou réaffirmée par le Pontife romain, même sans recourir à une définition solennelle, en déclarant explicitement qu'elle appartient à l'enseignement du Magistère ordinaire et universel comme vérité divinement révélée (1° alinéa) ou comme vérité de la doctrine catholique (2° alinéa). Par conséquent, quand, sur une doctrine, il n'existe pas de jugement sous la forme solennelle d'une définition, mais que cette doctrine, appartenant au patrimoine du depositum fidei, est enseignée par le Magistère ordinaire et universel – qui inclut nécessairement celui du Pape –, il faut l'entendre comme étant proposée infailliblement. Quand le Pontife romain, par une déclaration, la confirme ou la réaffirme, il n'accomplit pas un acte nouveau qui élève cette vérité au rang de dogme, mais il atteste formellement qu'elle est déjà propriété de l'Église et par elle infailliblement transmise. » Congrégation pour la doctrine de la foi, Note doctrinale illustrant la formule conclusive de la Professio fidei, 9.

« À propos des vérités du second alinéa, c'est-à-dire celles qui, avec la Révélation, entretiennent des rapports de nécessité logique, on peut considérer, par exemple… En ce qui concerne le récent enseignement sur la doctrine sur l'ordination sacerdotale exclusivement réservée aux hommes, il faut remarquer un processus similaire. Le Souverain Pontife, tout en ne voulant pas arriver jusqu'à une définition dogmatique, a eu l'intention de réaffirmer qu'il faut considérer cette doctrine comme définitive, dans la mesure où, fondée sur la Parole de Dieu écrite, elle est transmise constamment par la Tradition de l'Église et enseignée par le Magistère ordinaire et universel. Il n'empêche que, comme le démontre l'exemple précédent, la conscience de l'Église puisse progresser dans le futur, au point de définir cette doctrine comme divinement révélée. » Congrégation pour la doctrine de la foi, Note doctrinale illustrant la formule conclusive de la Professio fidei, 11.


5. Un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ?
C’est le principe même d’Amoris Lætitia VIII.


Il va de soi que n'importe quel fidèle correctement catéchisé pourrait répondre à ces dubias : non, non, oui, non, non et non.
Il va de soi que les auteurs des dubias doutent très sérieusement de la catholicité de Bergoglio/François
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par prodigal » mar. 03 oct. 2023, 14:12

Gaudens a écrit :
mar. 03 oct. 2023, 13:26
Bonjour Prodigal,
Toutefois je souhaite mettre l'accent sur deux points particuliers, qui me paraissent révélateurs:

1) l'intention d'un acte est-elle déterminante pour discerner s'il est ou non une action pécheresse ? N'y -a-t-il pas des éléments clairement objectifs? Dans le cas d'actes homosexuels,pardon d'être un peu crû mais la sodomie est-elle ou non en soi un péché grave - qui existe du reste aussi de façon plus raredans des relations hétérosexuelles illicites ,de façon tout aussi condamnable aux yeux de l'Eglise - au moins jusqu'à présent si l'on vous suivait .
2) l'ordination des femmes;comment pouvez-vous concevoir une possible évolution sur ce point ? La lettre apostolique de St Jean-Paul II Ordinatio Sacerdotalis et la lettre De gravioribus delictis l'excluent formellement, exclusion tenue comme une "vérité tranchée de manière définitive et devant être tenue par tous"(lettre OS + motu proprio At Tuendam Fidem) .

Ces deux exemples font craindre que vous poussiez la limite de ce qui peut évoluer dans la doctrine de la foi de manière excessive (j'ai envie de dire "jésuitique" au mauvais sens du terme).

Mais ce qui me parait inacceptable serait de juger a posteriori la nature et la motivation de ces Dubia (cinq en effet et non trois) comme relevant de la polémique.Je ne l'excluerais pas absolument s'agissant du seul cardinal Burke qui a quelques comptes à régler mais pas des autres et certainement pas du paisible et ferme cardinal Sarah. C' est vraiment un jugement téméraire de votre part tout comme de dire que ces cardinaux veulent faire choisir au pape l'intégrisme contre le modernisme.Comme vous l'abus de ces deux termes me parait malséant, alors pourquoi les utiliser ici si ce n'est pour disqualifier la démarche des cinq cardinaux? Ne pourrait-on dire plus exactement et plus sereinement qu'il s'agit de retenir le pontife actuel du côté de la conservation du dépôt de la foi, tout simplement ?
Cher Gaudens,
en ce qui concerne l'ordination des femmes, il est avéré que le magistère s'est prononcé comme vous le dites. Il s'ensuit que la question est actuellement close, quand bien même on jugerait que le magistère a eu tort. Mais c'est franchir un autre pas que dire non seulement que le magistère a eu raison, mais que la réflexion sur la question est désormais exclue. Concrètement, je vous concède qu'exiger l'ordination des femmes serait un acte de désobéissance. Mais faut-il franchir un degré supplémentaire, et estimer que l'impossibilité d'ordonner une femme relève de la foi? Je concède aussi le caractère "intellectuel" de ma réflexion (jésuitique, diriez-vous :D ), mais supposons qu'un pape décide un jour que les femmes pourront être ordonnées. Est-ce que cela signerait ipso facto la mort du catholicisme? Cela fait un peu disputatio du Moyen-Age ce que je dis là, mais c'est une question néanmoins sérieuse.
Sur le deuxième point, à savoir la prise en compte de l'intention, je reprécise que je ne dis absolument pas que l'intention efface la faute, je dis seulement qu'il faut la prendre en compte dans son objectivité (car il y a une dimension objective de l'intention). Je veux dire, par exemple, que si je tue un homme en état de légitime défense ce n'est pas un assassinat. Je fais une grande différence entre la débauche, dont l'intention est de jouir en se dégradant, et la vie d'un couple illégitime, qui est susceptible de rechercher le bien dans la manière même de vivre maritalement. Il ne s'agit pas d'excuser ou d'accuser, il s'agit de reconnaître les différences qui existent. Mais je vous l'accorde, vivre en couple homosexuel entre en contradiction avec la morale chrétienne, ce point n'est pas douteux. Reste à le faire comprendre, et à ne pas oublier la poutre dans son œil.
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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Olivier JC » mer. 04 oct. 2023, 8:49

Bonjour,
1. Est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale, que ce soit par le Pape ex cathedra, ou selon les définitions d’un Concile œcuménique, ou encore selon le Magistère ordinaire universel des Évêques dispersés dans le monde (cf. Lumen Gentium 25) ?
Une telle question revient à demander au Souverain Pontife si l'Eglise peut enseigner une doctrine contraire à une doctrine infaillible. Spontanément, la réponse venant à l'esprit ne peut qu'être négative.

Cependant, au regard des circonstances actuelles, il me semble qu'il faut être plus nuancé selon la forme que prendrait un tel enseignement contraire à une doctrine infaillible :
1. Si la forme est celle du Magistère extraordinaire ou ordinaire, la réponse ne peut qu'être négative dès lors que si une telle chose se produisait, il faudrait en conclure que les portes de l'Enfer ont prévalu contre l'Eglise et que, par conséquent, notre Foi est aussi vaine qu'elle le serait si Notre Seigneur n'était pas ressuscité d'entre les morts.
2. SI la forme n'est pas celle du Magistère extraordinaire ou ordinaire, la réponse peut être positive dès lors que si, comme Notre Dame l'annonçait à La Salette, Rome perdra la foi, il faut bien que cela se manifeste visiblement.
2. Est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu ? En lien avec ce dubium, il est nécessaire d’en soulever un autre : l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constituent un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?
Sur le premier point, d'un strict point de vue doctrinal, la réponse est négative. Une situation pécheresse ne peut faire l'objet d'une bénédiction dès lors que dire du bien du mal n'a strictement aucun sens. Cependant, il faut encore être plus nuancé : l'Eglise pourrait-elle décider de le faire ? Incontestablement. L'assistance divine n'a pas été promise à l'Eglise en tout domaine. Sera-ce un scandale ? Incontestablement.

Sur le second point, la réponse ne peut qu'être positive. En revanche, et c'est d'ailleurs tout le sens d'Amoris Laetitia, la question est surtout de savoir si l'accent est mis sur le versant objectif ou sur le versant subjectif. Ces deux versants sont légitimes, même s'il est évident qu'il est bien plus facile de 'déraper' sur le second que sur le premier et de passer de la considération selon laquelle tel acte n'est pas subjectivement un péché grave à la considération selon laquelle ce même acte n'est pas objectivement peccamineux.
3. Le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Évêques (cf. can. 336 C.I.C.)
La réponse ne peut là encore qu'être négative, dès lors qu'un synode n'est pas titulaire de l'autorité suprême dans l'Eglise. Dans les apparences, cependant, les choses risquent d'être un peu plus compliquées puisque la législation applicable à l'assemblée synodale prévoit désormais deux hypothèses :
1. Soit le Souverain Pontife, auquel l'assemblée synodale transmet ses conclusions, les approuve spécifiquement, auquel cas ces conclusions deviennent partie intégrante du Magistère. Elles le deviennent donc, non pas par elles-mêmes, mais du fait de l'approbation pontificale.
2. Soit le Souverain Pontife a délégué un pouvoir particulier à l'assemblée synodale pour voter sur telle ou telle question, auquel cas le résultat de ce vote fera partie intégrante du Magistère pour autant qu'il soit approuvé ou ratifié par le Souverain Pontife. Là encore, c'est le sceau pontifical qui donne sa valeur magistérielle à l'énoncé.
Il est aisé de voir comment l'acte qui donne à l'énoncé sa valeur magistérielle peut être passé sous silence.
4. L’Église pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que la réservation exclusive de ce sacrement à des hommes baptisés appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Église ne peut pas changer ?
En droit, la réponse est négative puisque cette question est tranchée, n'en déplaise au Souverain Pontife qui estime, dans sa réponse, que ce qu'il faut entendre par définitif ne serait pas clair et devrait être approfondi.

En fait, là encore, rien ne s'y oppose. Une telle ordination serait naturellement et nécessairement invalide. Mais ce n'est pas parce qu'elle interviendrait, fut-ce en la Basilique Saint Jean de Latran, qu'il faudrait en tirer comme conséquences que les portes de l'Enfer auraient prévalu contre l'Eglise.
5. Un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ?
Là encore, la réponse à cette question est à l'évidence négative. Toute la subtilité, cependant, se situe dans "d'une quelconque manière". En substance, ce que le Souverain Pontife soutient, c'est que le seul fait de faire la démarche d'aller se confesser est de nature à manifester une attrition suffisante, et c'est comme cela qu'il justifie le fait qu'il ait pu enseigner à des séminaristes qu'un prêtre doit toujours et en toutes circonstances accorder l'absolution. C'est discutable. Cela ne me semble pas être, de soi, contraire à l'enseignement tridentin à défaut d'être conforme à la prudence.

+

Plus généralement, la question qui se trouve en filigrane de ces dubias, comme au demeurant de celles qui avaient suivi Amoris Laetitia, est la suivante : l'Eglise de Rome peut-elle faillir dans l'office qui est le sien de présider à la foi et à la charité au sein de l'Eglise universelle ? Avec cette deuxième question qui surgit immédiatement : si l'Eglise de Rome devait ainsi faillir, cela impliquerait-il la défaillance de l'Eglise universelle et, par conséquent, la vacuité des promesses de Notre Seigneur ?

Le Catéchisme de l'Eglise catholique promulgué par S. Jean-Paul II a déjà, me semble-t-il, répondu à ces questions, certes d'une manière moins explicite. Oui à la première. Non à la deuxième.

Mon propos peut paraître apocalyptique en première lecture. Sommes-nous dans les derniers temps et le retour de Notre Seigneur est-il plus proche qu'il ne l'a jamais été ? C'est une question, et je l'ai dit ailleurs, que je me garderai bien de trancher. Mais il me semble qu'il faut la garder à l'esprit pour rester serein dans la situation très particulière qui est celle de l'Eglise aujourd'hui pour rester ancré dans la Foi. L'Eglise doit suivre son Seigneur dans la mort, enseigne le Catéchisme de l'Eglise catholique. Y sommes-nous ? Dieu le sait. Mais le savoir permet de garder, me semble-t-il, une grande sérénité. La connaissance de l'histoire de l'Eglise le permet aussi. Quelle que soit la spécificité de la situation actuelle, en vérité sans précédent dans cette histoire, il n'en demeure pas moins que les hommes s'acharnent depuis 2000 ans contre l'Eglise et qu'elle est toujours là.

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Gaudens » mer. 04 oct. 2023, 10:40

Bonjour Olivier;
Je ne suis pas sûr de bien vous comprendre.
Sur le dubium 1 (une doctrine contraire à la doctrine de l'Eglise introduite dans son Magistère ordinaire ou extraordinaire) vous pensez que les portes de l'Enfer auraient prévalu (expression qui devrait d'ailleurs être expliquée,je pense).
Par contre,sur une éventuelle ordination(apparente) des femmes ,même dans la solennité de Saint-Jean de Latran,vous écrivez que ,pour autant, les portes de l'Enfer n'auraient pas prévalu.
Voulez-vous dire que ce qui serait gravissime, ce serait l'implantation d'une fausse doctrine alors qu'un acte,même grave,n'aurait pas cette conséquence? Mais pourtant une telle "ordination"* ne devrait-elle pas se prévaloir d'un changement de la doctrine exprimée explicitement par St Jean Paul II dans "Ad Fidem Tuendam ?


* je précise bien qu'il s'agit ici de l'ordination au presbytérat. L'"ordination" éventuelle de femmes dans un ordre spécifique des diaconesses revivifié ne saurait y être assimilé et relèverait d'un changement disciplinaire acceptable;mais il s'agirait d'ailleurs peut-être plus d'une consécration que d'une ordination...

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Perlum Pimpum » mer. 04 oct. 2023, 10:51

Bonjour Olivier.


Pour 1.
Si la forme est celle du Magistère extraordinaire ou ordinaire, la réponse ne peut qu'être négative
Je ne le pense pas. La question n’est pas celle du magistère ordinaire ou extraordinaire mais celle du magistère faillible ou infaillible. Dans un Concile Œcuménique, seules les définitions solennelles engagent l’infaillibilité, les chapitres doctrinaux les encadrant ou préparant ne l’engageant pas. Il en va de même avec les enseignements pontificaux, qui n’engagent l’infaillibilité que s’ils sont des actes d’enseignement définitifs (en faisant de « définitif » un genre dont « définitoire » (ex cathedra) est une des espèces ; tandis qu’à restreindre « définitif » aux enseignements autres que définitoires, comme dans le document de la CDF, définitoire et définitif sont deux espèces du genre infaillible). Un pape peut tomber dans l’hérésie toutes les fois que, parlant comme docteur public, il n’engage pas l’infaillibilité. Et cela n’implique nullement que l’Enfer prévale alors sur l’Église. Les fumées de Satan peuvent infester l’Église, et ainsi l’altérer (l’affaiblir, la rendre malade) ; elles ne peuvent la corrompre (la tuer).


Pour 2.

Je suis entièrement d’accord avec ce que vous écrivez.


Pour 3.

Je suis de nouveau en désaccord. Car quoi fait qu’un Concile est Œcuménique sinon l’approbation du Pape ? Le synode romain peut donc être élevé au rang de Concile Œcuménique si le Pape en manifeste l’intention. Il ne semble pas qu’il veuille le faire, mais il pourrait à raison même de son office (du moins s’il est encore formellement Pape, ce qui est une autre question, des plus casse-gueules). Mais même à ce qu’il élève le synode au rang de Concile Œcuménique, les assertions synodales ne seront pas du fait même revêtues d’infaillibilité (cf, 1). Même remarque s’il ne fait que les approuver en forme spécifique.


Pour 4.

Nous sommes d’accord.


Pour le reste.

La défaillance du pape pris selon sa personne n’implique nullement celle de l’Église dans son ensemble, encore que, tel Satan entraînant dans sa chute les anges rebelles, la défaillance d’un Pape peut entraîner celle d’une fraction de l’Église.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Olivier JC » mer. 04 oct. 2023, 17:13

Bonjour,
Gaudens a écrit :
mer. 04 oct. 2023, 10:40
Sur le dubium 1 (une doctrine contraire à la doctrine de l'Eglise introduite dans son Magistère ordinaire ou extraordinaire) vous pensez que les portes de l'Enfer auraient prévalu (expression qui devrait d'ailleurs être expliquée,je pense).
Par contre,sur une éventuelle ordination(apparente) des femmes ,même dans la solennité de Saint-Jean de Latran,vous écrivez que ,pour autant, les portes de l'Enfer n'auraient pas prévalu.
Voulez-vous dire que ce qui serait gravissime, ce serait l'implantation d'une fausse doctrine alors qu'un acte,même grave,n'aurait pas cette conséquence? Mais pourtant une telle "ordination"* ne devrait-elle pas se prévaloir d'un changement de la doctrine exprimée explicitement par St Jean Paul II dans "Ad Fidem Tuendam ?
Avec cette précision, fort heureusement apportée par Perlum Pimpum dont l'habituelle sagacité en matière de précision n'a pas été prise en défaut ;) , qu'il s'agit du magistère en son expression infaillible, oui. Il faut cependant bien voir la perspective dans laquelle je me place, qui est celle des promesses faites par Notre Seigneur. Il n'a pas promis que l'Eglise serait impeccable, il a promis qu'elle serait infaillible. Admettre une femme aux ordres sacrés, c'est un péché imputable à tous ceux qui auront participé à cette mascarade. Enseigner ex cathedra avec toutes les formes de l'infaillibilité que l'Eglise a le pouvoir d'admettre une femme aux ordres sacrés, ce serait encore plus grave puisqu'en réalité, il ne serait même plus possible de dire qu'il s'agit d'un péché puisque tout l'édifice du dépôt de la foi s'écroulerait. Cela signifierait en effet que ce qui est enseigné comme devant définitivement être tenu, revêtant donc tous les caractères de l'infaillibilité comme je prétends que l'est cette question, n'est en réalité pas infaillible. Si un point n'est pas infaillible, alors l'infaillibilité en elle-même n'existe plus et il ne reste donc rien. Tout devient incertain. Donc, oui, je pense que c'est d'une gravité incomparable.
Gaudens a écrit :
mer. 04 oct. 2023, 10:40
je précise bien qu'il s'agit ici de l'ordination au presbytérat. L'"ordination" éventuelle de femmes dans un ordre spécifique des diaconesses revivifié ne saurait y être assimilé et relèverait d'un changement disciplinaire acceptable;mais il s'agirait d'ailleurs peut-être plus d'une consécration que d'une ordination...
Ordinatio Sacerdotalis ne porte que sur l'ordination sacerdotale et, implicitement mais nécessairement, sur l'ordination épiscopale, de telle sorte que la question peut être regardée comme ouverte s'agissant de l'ordination diaconale.
Perlum Pimpum a écrit :
mer. 04 oct. 2023, 10:51
La question n’est pas celle du magistère ordinaire ou extraordinaire mais celle du magistère faillible ou infaillible.
Parfaitement d'accord. C'est ce que j'avais à l'esprit, à défaut de le préciser explicitement, ce qui, vous le savez désormais, est l'un de mes défauts...
Perlum Pimpum a écrit :
mer. 04 oct. 2023, 10:51
Je suis de nouveau en désaccord. Car quoi fait qu’un Concile est Œcuménique sinon l’approbation du Pape ? Le synode romain peut donc être élevé au rang de Concile Œcuménique si le Pape en manifeste l’intention. Il ne semble pas qu’il veuille le faire, mais il pourrait à raison même de son office (du moins s’il est encore formellement Pape, ce qui est une autre question, des plus casse-gueules). Mais même à ce qu’il élève le synode au rang de Concile Œcuménique, les assertions synodales ne seront pas du fait même revêtues d’infaillibilité (cf, 1). Même remarque s’il ne fait que les approuver en forme spécifique.
Je ne pense pas que nous soyons en désaccord puisque je me suis borné à pointer le fait qu'au regard des normes communicationnelles en usage à l'heure actuelle au Saint Siège, il n'est pas exclu qu'il soit malencontreusement omis de préciser que la valeur des conclusions ne résident pas dans leurs rédacteurs mais dans l'approbation pontificale, et que l'impression soit donnée que c'est à raison de leur "synodalité" que ces conclusions ont une valeur (au corps défendant de toute personne impliquée, naturellement).

Quant à ce que l'infaillibilité ne puisse par principe intervenir, rien ne me semble permettre de l'exclure de manière absolue selon la formulation adoptée par les conclusions synodales ou, le cas échéant, l'approbation pontificale. A supposer, pour les besoins du raisonnement, que ce soit le cas, alors ce qui serait revêtu de l'infaillibilité ne pourrait être contraire à quelqu'autre point de doctrine ayant la même autorité.

Quand à savoir si Jorge Mario Bergoglio est toujours formellement pape à ce jour, cela ne me semble pas une question particulièrement délicate. Personne ne conteste qu'il soit le légitime évêque de l'Eglise de Rome. Cela me semble donc à ce jour suffisant pour le regarder comme étant le légitime Souverain Pontife de l'Eglise universelle et, ne lui en déplaise, le Vicaire ici-bas de Notre Seigneur.

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Perlum Pimpum » mer. 04 oct. 2023, 17:55

Bonsoir Olivier,
Enseigner ex cathedra avec toutes les formes de l'infaillibilité que l'Eglise a le pouvoir d'admettre une femme aux ordres sacrés, ce serait encore plus grave puisqu'en réalité, il ne serait même plus possible de dire qu'il s'agit d'un péché puisque tout l'édifice du dépôt de la foi s'écroulerait
Si par « ordres sacrés » vous entendez le sacerdoce, est strictement impossible que l’ordination d’une femme aux ordres sacrées puisse être infailliblement enseignée. Si donc se trouvait demain un enseignement pontifical revêtu des formes de l’infaillibilité, une définition ex cathedra par exemple, la définition prouvera que son auteur n’est pas pape, soit qu’il ne l’ait jamais été, soit qu’il ait cessé de l’être (Dieu l’ayant déposé avant qu’il ne définisse).

Dans l’hypothèse que vous envisagez, le dépôt de la foi restera inchangé. Ce qui changera, c’est le passage à l’hérésie de ceux corrompus par l’enseignement de l’anti-pape.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Olivier JC » jeu. 05 oct. 2023, 8:37

Bonjour,
Perlum Pimpum a écrit :
mer. 04 oct. 2023, 17:55
Si par « ordres sacrés » vous entendez le sacerdoce, est strictement impossible que l’ordination d’une femme aux ordres sacrées puisse être infailliblement enseignée. Si donc se trouvait demain un enseignement pontifical revêtu des formes de l’infaillibilité, une définition ex cathedra par exemple, la définition prouvera que son auteur n’est pas pape, soit qu’il ne l’ait jamais été, soit qu’il ait cessé de l’être (Dieu l’ayant déposé avant qu’il ne définisse).

Dans l’hypothèse que vous envisagez, le dépôt de la foi restera inchangé. Ce qui changera, c’est le passage à l’hérésie de ceux corrompus par l’enseignement de l’anti-pape.
Je me bornais à raisonner d'un point de vue purement théorique pour répondre à Gaudens qui s'étonnait qu'il puisse être plus grave d'enseigner que de faire.

Par ailleurs, aussi séduisante par son apparente simplicité que soit votre réponse, elle n'en est pas moins redoutablement complexe car il est constant que le Siège apostolique n'est jugé par personne. Y faudra-t-il un concile comme celui de Constance ? L'évolution de l'ecclésiologie depuis lors ne semble pas permettre d'accepter qu'un concile puisse déposer un pape et en élire un autre. Certes, un concile peut fort bien déposer un pape qui ne l'est pas/plus, précisément parce qu'il ne s'agit pas, en pareille hypothèse, de juger le Siège apostolique. Mais il faut bien, au préalable, juger que l'intéressé n'est plus pape. Et qui le fera légitimement ? L'étude de l'histoire des antipapes est assez édifiante à ce sujet, où l'on voit que finalement, les choses se font sans trop se poser de questions théoriques, et que ce n'est qu'après coup que l'on se rend compte que dans tout ce bazar, la Providence a fait son œuvre...

Dieu nous garde cependant de pareilles circonstances !

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Perlum Pimpum » jeu. 05 oct. 2023, 10:04

Bonjour Olivier,

Je ne réponds ici qu’au seul plan théorique, sans rien préjuger quant à l’actuel titulaire, réel ou apparent, du souverain pontificat.


1. La théorie conciliariste affirmait le primat du Concile sur le Pape. Cette thèse, qui a connu un grand succès lors du Grand Schisme d’Occident (qu’il fallait bien résoudre…), est aujourd’hui, suite au progrès dans l’explicitation doctrinale du donné formellement révélé, considérée comme contraire à la foi et à la divine constitution de l’Église, à raison de la plénitude de juridiction directe et immédiate du Pape sur l’ensemble de l’Église, infailliblement affirmée au Concile Œcuménique de Vatican I.


2. Mais remarquez qu’autre est d’affirmer le primat du Collège apostolique sur son chef, autre d’affirmer leur égalité de juridiction en affirmant que le Collège est lui aussi titulaire de la plénitude de juridiction directe et immédiate sur toute l’Église. Or, selon le Concile Œcuménique de Vatican II, Constitution Lumen Gentium, 22 : « L’ordre des évêques, qui succède au collège apostolique dans le magistère et le gouvernement pastoral, bien mieux dans lequel le corps apostolique se perpétue sans interruption constitue, lui aussi, en union avec le Pontife romain, son chef, et jamais en dehors de ce chef, le sujet du pouvoir suprême et plénier sur toute l’Église, pouvoir cependant qui ne peut s’exercer qu’avec le consentement du Pontife romain. »


3. Conséquemment :

Ceux donc qui affirment que le Pape hérétique est déposable - « Papa hereticus deponendum est » - devront dire que le Collège uni au Pape pris selon son office peut juger du Pape pris selon sa personne, le consentement du Pape à son jugement découlant de ce que jamais le Pape pris selon son office puisse légitimement refuser qu’un Pape hérétique soit déposé, de sorte que le Collège ait en tout état de cause le consentement qui lui est nécessaire pour juger de la personne du Pape, ce alors même que le Pape pris selon sa personne s’y opposerait.

Et ceux affirmant que le Pape hérétique est déjà déposé par Dieu - « Papa hereticus depositus est » - diront qu’ils ne déposent pas le Pape, ne faisant que déclarer Dieu l’avoir déjà déposé, de sorte que, Dieu l’ayant déjà déposé, l’ancien Pape, privé de sa plénitude de juridiction par sa déposition-même, est illégitime à s’opposer au jugement déclaratif du Collège exerçant la plénitude de juridiction directe et immédiate en union à la chaire vacante de saint Pierre.


4. Conséquemment :

Sauf à ce que la réprobation ecclésiale du Pape/ex-Pape soit unanime ou quasi-unanime, celui-ci rassemblera ses partisans et opposera à ses adversaires.

À ceux voulant le déposer, il opposera qu’il est encore Pape, donc encore sujet de la plénitude de juridiction, et à ce titre chef visible de l’Église, pour conséquemment réputer ses adversaires schismatiques, et leur Concile un synode de Satan. Lesquels répliqueront qu’en l’occurrence les seuls schismatiques sont le Pape (en tant le schisme est une rupture de la communion au pontife et au collège qui lui est uni, et que le pape pris selon sa personne peut tomber dans le schisme chaque fois que, n’agissant pas selon son office, il attente à la communion ecclésiale) ; et conséquemment réputeront hérétiques et schismatiques les partisans d’un tel Pape. Bref, un nouveau grand schisme…

À ceux voulant déclarer Dieu l’avoir déposé, il opposera ne l’être pas, d’où donc les mêmes conséquences.


5. La question devient lors, pour ceux estimant devoir déposer ou déclarer déposé, s’il vaut.mieux précipiter un schisme afin de purger l’Église, en réputant schismatiques ceux s’opposant à la déposition ou à la déclaration. Tout dépendra de leur degré d’exaspération, de leur nombre, et de leur degré d’organisation.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Du synode allemand au synode sur la synodalité

Message non lu par Gaudens » jeu. 05 oct. 2023, 12:02

Je pense que vos deux lectures,Olivier et PP, sont exactes en théorie (et en pratique pour le point 5 de PP ci-dessus, avec une question de ma part sur le point 3*).
Cependant je crains que l’évolution prévisible du cours du synode et de ses suite ne les rendent inopérantes. Faut-il le craindre, d’ailleurs, puisque la perspective de déchirements et de schismes n’a rien d’attrayant ?
En effet l’ensemble des propos et discours ayant peu ou prou trait à la doctrine de la part du pape François et , plus récemment, de l’intarissable Mgr Fernandez,nouveau chef du Dicastère (ex Congrégation) pour la doctrine de la foi, montrent qu’ils se garderont bien de toute définition marquée de l’infaiilibilté.A la fois par tactique (Olivier a bien montré que ce serait le meilleur moyen d’être pris en flagrant délit de contradiction formelle justifiant des procédures de déposition menant au schisme ) et aussi par conviction sur la notion même de doctrine. Celle-ci semble être devenue tellement labile pour eux qu’à l’extrême elle est appelée à se confondre avec la pastorale elle-même. La lettre de mission du pape à Mgr Fernandez disait bien que « ces questions -doctrinales ndt- se convertissent en instrument d’évangélisation parce qu’elles nous permettent d’entrer en conversation avec le contexte actuel dans ce qu’il tient d’inédit pour l’histoire de l’humanité » (tradutionlibre par mes soins ). Cette curieuse formulation (entrer en conversation avec un contexte) , sans doute inspirée par de bons sentiments, montre bien que l’on est là bien au-delà du faillible ou de l’infaillible. A ce compte là ,il n’y aura peut-être bientôt plus de doctrine mais bien sûr cela ne serait jamais énoncé et moins encore solennellement proclamé comme tel.Simplement oublié car on parlerait constamment d’autre chose. On serait dans un autre monde.

*Je crois vaguement comprendre le sens du paragraphe ci-dessous mais il est assez incompréhensible pour un individu normal (et il le serait encore plus dans le « monde d’après » que je viens d’esquisser) :


« 3. Conséquemment :

Ceux donc qui affirment que le Pape hérétique est déposable - « Papa hereticus deponendum est » - devront dire que le Collège uni au Pape pris selon son office peut juger du Pape pris selon sa personne, le consentement du Pape à son jugement découlant de ce que jamais le Pape pris selon son office puisse légitimement refuser qu’un Pape hérétique soit déposé, de sorte que le Collège ait en tout état de cause le consentement qui lui est nécessaire pour juger de la personne du Pape, ce alors même que le Pape pris selon sa personne s’y opposerait. »
Dernière modification par Gaudens le jeu. 05 oct. 2023, 17:28, modifié 1 fois.

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