Bonjour et merci de votre accueil Christophe.
[align=justify]Je vais tâcher comme promis de détailler la thèse selon laquelle la canonisation n'est pas un acte qui entraîne l'infaillibilité de l'Eglise, sans faire trop long, et même si à titre personnel je précise que lorsque l'Eglise reconnaît une apparition j'y crois de même que lorsque une personne est canonisée j'estime qu'elle est réellement au Paradis et qu'à ce titre je peux lui rendre un culte.
Tout d'abord, ne sont pas considérées comme infaillibles naturellement les canonisations non effectuées dans les règles (canonisation vient bien sûr de canon qui signifie "règle"), c'est à dire non proclamées par le Saint Père après enquête sérieuse: sont visées essentiellement les canonisations ayant eu lieu avant le XIIe siècle (hormis bien sûr les canonisations transmises par la Tradition telles que celles des Apôtres ou du bon larron par Jésus lui-même), à partir duquel le Pape commença à s'arroger le droit d'être le seul à canoniser une personne et surtout uniquement après une enquête sérieuse.
Pour les canonisations actuelles il n'est pas question pour ma part de les remettre en question, cependant la question de cette infaillibilité de la canonisation a été récemment débattue à cause du nombre élevé de canonisations effectuées par Jean Paul II et la rapidité de certaines.
Inutile - Charles
Pour faire simple, il y a deux sortes d'infaillibilité dans l'Eglise:
- l'infaillibilité subjective ou personnelle: il n'y en a qu'une seule, celle du Pape, qui lui est conférée uniquement s'il remplit les conditions "ex cathedra".
- l'infaillibilité objective ou magistère ordinaire et universel: c'est l'enseignement professé et pratiqué depuis toujours, par tous les évêques catholiques, partout dans l'Eglise catholique. Condition requise:
l'enseignement doit être porté au titre de vérité révélée .
- Si l'on prend l'exemple particulier de l'infaillibilité du Pape ou infaillibilité personnelle, reconnue officiellement par Pie IX lors du concile Vatican I, elle ne s'est exercée qu'une fois en réalité depuis ( certain disent deux fois en comptant cette proclamation de l'infaillibilité pontificale), lors de la proclamation par Pie XII du dogme de l'Assomption de la Très Sainte Vierge Marie. Pour ce dernier, c'est Pie XII lui-même qui a précisé dans sa proclamation que chacun était tenu d'y croire sous peine de ne plus être catholique.
La canonisation ne rentre donc pas dans les critères de l'infaillibilité subjective.
- La canonisation engage-t-elle l'infaillibilité de l'Eglise en tant qu'infaillibilité objective ?
"Cette infaillibilité, dont le divin Rédempteur a voulu pourvoir son Eglise pour définir la doctrine concernant la foi et les moeurs, s'étend aussi loin que le dépôt lui-même de la Révélation divine à conserver saintement et à exposer fidèlement. De cette infaillibilité le Pontife romain, chef du Collège des évêques, jouit du fait même de sa charge quand, en tant que pasteur et docteur suprême de tous les fidèles et chargé de confirmer ses frères dans la foi (Cf Luc 23,32) il proclame un point de doctrine touchant la foi et les moeurs."[/align]
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Extrait de la constitution Lumen Gentium, n° 25[/align]
[align=justify][Dire qu'une canonisation entraîne son infaillibilité parce que l'Eglise y engage son autorité n'est nullement une preuve: par comparaison, elle engage aussi son autorité lorsqu'elle excommunie une personne, or l'excommunication n'est pas infaillible (Sainte Jeanne d'Arc est morte excommuniée).]
Dire qu'une canonisation entraîne son infaillibilité parce que l'Eglise y engage son autorité lorsqu'elle reconnaît les miracles d'un Saint n'est pas plus une preuve. Un miracle n'est pas une Révélation s'il n'appartient pas à l'Ancien ou au Nouveau Testament.
Ainsi l'Eglise dit clairement que ce n'est jamais un acte de foi que de croire aux apparitions mariales par exemple, quand bien même elles seraient reconnues solennellement, comme c'est le cas pour Lourdes, Fatima, Pontmain... [/align]
" Au fil des siècles il y a eu des révélations dites "privées", dont certaines ont été reconnues par l'autorité de l'Eglise. Elles n'appartiennent cependant pas au dépôt de la foi. Leur rôle n'est pas d'"améliorer" ou de "compléter" la Révélation définitive du Christ, mais d'aider à en vivre plus pleinement à une certaine époque de l'histoire. Guidé par le Magistère de l'Eglise, le sens des fidèles sait discerner et accueillir ce qui dans ces révélations constitue un appel authentique du Christ ou de ses saints à l'Eglise. "
[align=right]Catéchisme de l'Eglise catholique[/align]
[align=justify]Il n'y a donc pas obligation pour un catholique d'y croire, même si c'est
fortement conseillé...
Ceci simplement parce que la Révélation s'est achevée avec Saint Jean, et qu'il n'y en aura plus d'autre après. L'infaillibilité de l'Eglise ne peut donc concerner que des vérités qu'elle a toujours enseignée. Proclamer un dogme par exemple ce n'est en fait que définir solennellement ce qu'elle a toujours dit.
Evidemment canoniser un Saint n'est pas professer une nouvelle doctrine, cependant dans l'absolu ce n'est pas non plus transmettre un enseignement de toujours de l'Eglise dans lequel on est obligé de croire.
La canonisation ne rentre donc pas dans les critères de l'infaillibilité objective du magistère ordinaire et universel.
En outre il me semble (à vérifier)qu'il est prévu par le droit canon la possibilité d'annuler une canonisation en cas de vice de procédure (par exemple si on apprend qu'il y a eu faux témoignage lors du procès): difficile de parler d'infaillibilité si l'Eglise reconnaît qu'elle peut se tromper... Alors que par exemple lorsqu'un dogme est proclamé, on peut être sûr que c'est une vérité révélée et que jamais il ne pourra être contredit à l'avenir.
Et voici pour conclure ce qu'en dit L'Encyclopédie Catholicisme:
"Il faut limiter le domaine de l'assistance divine à la vérité évangélique, elle n'embrasse pas tout le domaine de la vie chrétienne. Ce qui est d'ordre législatif, administratif, du droit canonique ou public, demeure donc hors de l'infaillibilité de l'Église ".
" Il y a lieu de mentionner le domaine des réalités ecclésiales qui sont garanties par l'assistance divine, sans pour autant qu'elles soient l'objet de sanctions infaillibles : ainsi l'oecuménicité de tel concile, la légitimité ou la dissidence de tel évêque, de tel pape. la reconnaissance de tel rite ou telle législation, la promulgation d'une loi universelle. l'approbation d'un ordre religieux, la canonisation d'un saint et la confirmation de son invocation dans la liturgie,... "
" Il faut ici rappeler le principe : l'infaillibilité de l'Eglise n'appelle la foi divine que pour les articles relativement auxquels il y a eu révélation, et pour les choses nécessaires au salut. L'Église n'a pas reçu du Christ la promesse d'infaillibilité pour affirmer l'héroïcité des vertus de Saint François d'Assise, celle-ci fût-elle éminemment visible ".
" Tout ce qui dépend en soi d'une connaissance historique demeure hors de la capacité d'affirmation infaillible de l'Eglise".
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