La théologie en mouvement : les choses ont bougé

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La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Cinci » ven. 19 nov. 2021, 1:04

Bonjour,

Aperçu dans la revue canadienne des jésuites Relations : dans le numéro de l'automne 2021, on trouve un petit article faisant écho à l'état de la théologie dans le monde catholique de nos jours. En deux petites parties, je veux bien vous transmettre l'article. Pour vous, ce sera gratuit.

Source : Denise Couture, «Quelle théologie pour un temps post-religieux ?» dans Relations, no 814/automne 2021, p. 26



Quelle théologie pour un temps post-religieux ?

_______________________________________________________

Denise Couture
L'auteure, professeurs associée à l'Institut d'études religieuses
de l'université de Montréal, est présidente de la Société canadienne
de théologie et membre de la collectivité féministe et chrétienne
L'autre Parole

________________________________________________________


«La théologie étudie avant tout l'acte de croire. Elle prend pour objet la construction subjective (elle-même en mouvement) de ce à quoi l'on croit, et non pas seulement les contenus des croyances. On comprend dès lors qu'elle ait subi des changements majeurs ces 50 dernières années, mais aussi qu'elle ait pu s'ajuster avec assez de fluidité à la période contemporaine, celle de la religion devenue subjective.

Dans les années 1970, le grand théologien catholique allemand Karl Rahner pouvait encore dire qu'une condition d'exercice de la théologie chrétienne est de vivre dans une société chrétienne, ou du moins dans un environnement ou les représentations chrétiennes guident spontanément les existences. Pour lui, les discours théologiques partaient des interprétations des gens pour leur en offrir de nouvelles dans le cadre d'une grande conversation commune sur la signification du christianisme aujourd'hui.

Or, ces conditions n'existent clairement plus au Québec, hormis pour des groupes devenus minoritaires. On y observe non seulement le retrait de la religion de la sphère publique. mais aussi le recul des inscriptions dans les programmes de théologie universitaires. De plus, des transformations institutionnelles ont modifié les lieux ou l'on pratique désormais la théologie (que ce soit dans un département, une école ou un centre d'études plutôt que dans des facultés en bonne et due forme). Cette nouvelle situation force à réféléchir à nouveaux frais le travail de la théologie et son adaptation à ces conditions nouvelles.

Pour mieux comprendre la spiritualité des gens

La définition classique de la théologie, telle que la proposait le théologien Anselme de Cantorbéry au XIe siècle, est de «rechercher une intelligence de la foi», sous-entendu de la foi chrétienne. Traduite dans le contexte actuel, la théologie vise désormais une analyse de la façon dont les personnes spirituelles se comprennent elles-mêmes en tant que telles. Cette posture nouvelle lui ouvre un champ immense qui n'est pas si éloigné de ses tâches séculaires. Confessionnelle, elle peut continuer d'énoncer les significations de la foi chrétienne dans le temps présent. Lorsque catholique romaine, elle peut se situer plus ou moins proche des positions du magistère. Déconfessionnalisée et plus en phase avec les déplacements contemporains du phénomène religieux, elle peut se tourner vers l'étude des constructions multiples de vies spirituelles dans le temps présent. Une de ses spécificités n'en demeure pas moins l'étude de ce phénomène d'autocompréhension.

Cette transformation de la théologie se produit un peu partout dans le monde, y compris dans les universités québécoises. J'en traite dans mon livre Spiritualités féministes. Pour un temps de transformation des relations (PUM, 2021), ou je présente une synthèse de la théologie féministe en contexte québécois. J'y navigue entre une interprétation féministe des symboles chrétiens et une analyse des spiritualités post-religieuses féministes. Pour prendre la mesure de ce déplacement de la théologie, considérons les conditions du temps présent en ce qui concerne la religion et la spiritualité."

(voir la suite)

Cinci
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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Cinci » ven. 19 nov. 2021, 1:06

(suite)

Quelle religion subjective ? Quelles spiritualités ?

Quatre-vingt-cinq pour cent de la population mondiale se dit religieuse, un pourcentage qui s'accroît annuellement et qui, d'après les prévisions de 2017 du Pew Research Centre de Washington, devrait continuer d'augmenter légèrement au cours des prochaines décennies. Si ces données sont percutantes, elles n'en cachent pas moins une forme de retrait de la religion sur le plan transnational, dû à une modification des manières de la vivre. Dans plusieurs pays, le rapport à la religion se transforme pour devenir subjectif et personnalisé. Le sociologue Reginald Bibby a proposé l'expression de «religion à la carte» pour décrire le phénomène. Cela veut dire que les individus qui s'identifient subjectivement comme religieux n'adoptent pas nécessairement la vision du monde proposée par un groupe religieux. Ils construisent plutôt leurs propres vues «à la carte», assez librement, retenant et rejetant à leur convenance les contenus proposés par les organisations religieuses. Dans ce sens, nous vivons dans un temps de post-religions organisées.

A ce phénomène s'ajoute celui des gens qu'on dit «spirituels», mais non religieux, qui situent leur vie spirituelle hors de tout cadre institutionnel. Ainsi, tout comme son objet, l'étude des spiritualités contemporaines ne peut être qu'éclatée. On trouve des dizaines de définitions de la spiritualité. Pour ma part, je propose de la concevoir comme la vie pleinement vécue. Comme une vie vécue au sein d'une toile de relations, non pas comme fuite du monde, mais dynamisée par une énergie vitale qui comprend la joie, la souffrance, des abus, leur reconnaissance et leur refus, la construction de soi. Ainsi, la théologie du temps présent prend la forme d'une étude culturelle de l'acte de croire ou de l'acte de construire sa vie pleinement vécue.

J'ai commencé à faire de la théologie à la fin des années 1970. Depuis cette époque, le champ disciplinaire a bien changé. Il a subi des mutations majeures provoquées par les transformations socioculturelles. Renouvelée tout en restant elle-même, comme le serpent qui perd sa couche de peau desséchée, la théologie demeure ainsi à mes yeux un domaine de pensée passionnant et pertinent.

________

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Thurar » ven. 19 nov. 2021, 3:33

Je ne comprends rien !

Cinci
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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Cinci » ven. 19 nov. 2021, 15:18

Écoutez ...

Ce n'est pourtant pas compliqué. Un - Je ne partage nullement les idées qui sont véhiculées la plupart du temps dans cette revue crée par les jésuites. Et - deux - cette revue jouit quand même d'une certaine notoriété chez nous (80 ans quand même ... la revue) Il m'arrive d'en lire certains numéros par ci, par là, question de vérifier un peu la position défendue par ceux du groupe et associés.

Dans ce dernier numéro que je lisais, il y avait également cet article d'une théologienne (pas une débutante) qui nous explique que l'objet de la théologie ne serait plus tout à fait le même que jadis. Ici attention c'est moi qui lance cette remarque. Je le fais, en dépit de ce qu'elle prenne bien la peine de se mettre à couvert, affirmant que si la théologie fait peau neuve, à l'instar du serpent de son illustration zoologique, ce serait pour rester égale à elle-même et ne pas trahir sa vocation, pourrait-on comprendre en filigrane : un fait demeure pour moi qui serait plutôt que l'objet de la théologie semble avoir changé. C'est comme si on disait que l'objectif était naguère de nous expliquer ou intelliger des vérités éternelles, aujourd'hui il s'agirait d'abord et avant tout de questionner l'homme. On dirait que nous aurions affaire à une subdivision de la philosophie qui se proposerait de questionner, sans vraiment conclure, le phénomène de la croyance présent dans l'humanité; avec encore - peut-être en guise de préalable ? - l'idée que rien ne serait vraiment "si" sûr (cf. doctrines, dogmes, grandes vérités ...). Tout serait sur la table, susceptible d'être re-brasser, déconstruit et reconstruit différemment. L'arrivée de nouvelles pratiques, postures ou l'émergence d'une autre mentalité ouvrirait la porte à un changement de compréhension, de soi, du monde, Dieu et tout.

On pourrait croire facilement qu'un, une ou des théologiens du genre verseraient plus souvent qu'autrement dans la vaine curiosité, le plaisir de mener une belle carrière et de s'écouter parler, au lieu de se percevoir eux-mêmes comme des agents devant être essentiellement et fondamentalement au service du développement de la foi chez les baptisés; voire qu'au service d'une véritable apologétique qui devrait viser ceux d'en dehors.

De telles philosophes diraient certainement être en recherche de la vérité, de la plus grande vérité. Peut-être ... et je ne serais pas disposé à mettre en question leur bonne foi, mais ce sera quand même une recherche ayant prit ses distances d'avec l'autorité ecclésiale, la fonction enseignante de l'Église institutionnelle. Et l'axe de la théologie n'est plus vraiment Dieu mais l'humanité. On a des hommes qui se questionnent sur eux-mêmes, sur la relativité de leurs représentations conceptuelles et tutti.

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Gaudens » ven. 19 nov. 2021, 18:49

"La théologie vise désormais une analyse de la façon dont les personnes spirituelles se comprennent elles-mêmes en tant que telles. "

Bref,pour cette supposée théologienne,sa discipline n'est plus le discours sur Dieu ni la connaissance de Dieu mais plutôt celle des personnes en situation de se positionner vis à vis de Dieu.
Déplacement bien sûr totalement inacceptable.Elle confond avec la pastorale.

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par prodigal » ven. 19 nov. 2021, 19:17

Cher Gaudens,
sans préjuger de la valeur des écrits de cette théologienne, dont j'ignorais tout, je crois pouvoir vous dire qu'elle n'est pas victime de la confusion que vous dénoncez. Ce que je crois pouvoir affirmer avec certitude, c'est ce qu'on appelle l'influence de la phénoménologie, mais peu importe, ce n'est pas, malgré les apparences, un gros mot! :D
Ce que je comprends est que le discours sur Dieu a tout à gagner (selon Denise Couture) à se centrer sur la relation à Dieu, et non à traiter Dieu comme un objet abstrait. Cette description de la relation à Dieu n'a a priori rien d'hérétique, d'autant qu'elle s'appuie sur "ce que comprennent les personnes spirituelles" (je cite).
Nous sommes donc invités, peut-être un peu fermement, à nous pencher sur la relation de l'âme à Dieu plutôt que sur Dieu comme objet d'étude. C'est ce que je comprends. La référence à saint Anselme de Cantorbéry prouve que dans l'esprit de Denise Couture il ne s'agit absolument pas d'oublier Dieu et de le remplacer par l'homme, mais bien au contraire de chercher l'intelligence par la foi selon la définition traditionnelle de la théologie.
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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Perlum Pimpum » dim. 21 nov. 2021, 1:48

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Dernière modification par Perlum Pimpum le mar. 14 juin 2022, 11:23, modifié 1 fois.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Cinci » dim. 21 nov. 2021, 17:23

Bonjour,

Merci à Prodigal, déjà, mais rien que pour avoir songé le premier à nous ramener la chose («la phénoménologie»), pour évoquer ce domaine des recherches dans les sciences humaines. Pour ma part, je n'y avais pas pensé. Cette évocation permet sans doute d'aider à clarifier les choses.


La phénoménologie

La phénoménologie est l'étude de phénomènes, étude dont la structure se fonde sur l’analyse directe de l’expérience vécue par un sujet. On cherche le sens de l’expérience à travers les yeux d’un sujet qui rend compte de cette expérience dans un entretien ou dans un rapport écrit.

La phénoménologie se classe donc fermement dans le paradigme constructiviste et suggère une vision du monde où la réalité est multiple. Cette méthode fait partie de l’approche qualitative. Le chercheur phénoménologique reconnaît dans sa poursuite d'une vérité vérifiable (concept pilier de la science) qu’il n’y a pas qu’une vérité (et seulement une). Cette méthode demande également au chercheur de rendre compte de la réalité du sujet sans chercher à interpréter. C’est une approche qui se veut la plus itérative possible bien que, dans sa réitération, le chercheur fasse inévitablement preuve d’une certaine interprétation.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9nom%C3%A9nologie

La phénoménologie de la religion

La phénoménologie de la religion est la description du fait religieux. Cette discipline se propose d'étudier la conscience du croyant, sa conception du monde, et éventuellement, sa perception des faits religieux.

Largement tributaire de l'herméneutique religieuse — c'est-à-dire de l'analyse et de l'interprétation des textes bibliques —, la phénoménologie tente d'articuler la compréhension du fait religieux autour des différents sens des textes sacrés

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9n ... a_religion

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par prodigal » dim. 21 nov. 2021, 18:47

Puis-je me permettre de compléter un peu? Je trouve ces citations de Wikipedia un peu obscures! Il est vrai que la phénoménologie n'est pas chose facile à aborder.
Ce qu'il faut comprendre avant tout, c'est que la phénoménologie n'est pas une théorie, mais une méthode.
on voudra bien excuser le ton professoral, mais c'est pour la bonne cause :-D .
Cette méthode se veut différente des méthodes qualifiées ordinairement de scientifiques, mais tout aussi rigoureuse. Le point essentiel, c'est de partir du sujet conscient et de sa manière d'appréhender le réel. Il y a différentes manières d'appréhender le réel, on les appelle chez les phénoménologues des intentionnalités. Ainsi désirer, percevoir, se souvenir, scruter, etc; sont des intentionnalités. Il ne s'agit pas de leur accorder une valeur de vérité, mais de les analyser et de les décrire. Justement, cela peut servir d'exemples, le souvenir d'une chose la vise comme absente, le désir d'une chose la vise comme potentiellement susceptible d'échapper, or l'absence et la possibilité d'échapper ne sont pas des caractéristiques du vrai, comme le confirme d'ailleurs une phénoménologie de la compréhension du vrai! j'espère que tout le monde suit :D
Dans le domaine religieux cette approche est évidemment très prometteuse, et ne s'oppose en rien en elle-même à la tradition. Par exemple, une phénoménologie de la prière mérite d'exister. On peut certes faire des statistiques à propos de la prière, ou chercher son origine, selon des méthodes plus ou moins empruntées à la science. On peut aussi décrire les différentes intentionnalités de la prière, telle que vécue par l'orant. A priori, ce n'est pas défendu.
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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Perlum Pimpum » dim. 21 nov. 2021, 19:58

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Dernière modification par Perlum Pimpum le mar. 14 juin 2022, 11:31, modifié 1 fois.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Gaudens » dim. 21 nov. 2021, 23:35

Cher Prodigal,

Je manque de compétence philosophique et théologique pour juger de l'adaptabilité de la méthode phénoménologique à la théologie catholique et par ailleurs,je n'ai pas encore pris le temps de lire les développements de Perlim Pimpum ci-dessus.

Mais il me semble que si la citation que j'avais mise en exergue ci-dessus* représente validement le projet de cette personne,il ne s'agit pas d'étudier la relation de l'âme à Dieu , ce qui repréenterait bien une sorte de développement adventice de la théologie mais dune réflexion entièrement centré sur l'homme, sur "les personnes spirituelles"(curieux concept d'ailleurs, qui mériterait d'être éclairci).
Je crains fort que PP n'ait raison dans son appréciation de dernier paragraphe (primat du féminisme,subvertissant la notion même de théologie,etc...).
Qu'en pensez vous, à la relecture de tout cela ?

*" La théologie vise désormais une analyse de la façon dont les personnes spirituelles se comprennent elles-mêmes en tant que telles. "

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par prodigal » lun. 22 nov. 2021, 11:09

Cher Gaudens,
je pense qu'il faut éviter les procès d'intention. Avant de juger la valeur des écrits de madame Denise Couture il me semble normal de se renseigner un peu, d'une part, et de postuler avec bienveillance que cette personne inconnue de moi ne dit peut-être pas forcément n'importe quoi.
Vous avez pris le soin de citer la phrase qui vous gêne. Je vous en remercie, cela paraît de bonne méthode pour qui souhaite une discussion de bonne foi. La revoici : " La théologie vise désormais une analyse de la façon dont les personnes spirituelles se comprennent elles-mêmes en tant que telles. "
Si cela vous agrée, je veux bien concéder que cette phrase est écrite dans un style qui me déplaît fortement, une sorte de langue de bois cléricale qui n'est pas de mon goût, et j'abhorre en particulier le "désormais" qui veut nous faire croire qu'une révolution extraordinaire s'est produite récemment en théologie, voire que l'ancien serait caduc. Mais peu importe. Encore une fois, évitons les procès d'intention. Admettons la forme, et voyons le fond.
Il y a deux dimensions dans cette phrase que vous avez reproduite. La première n'est pas développée mais esquissée. Une certaine manière de faire de la théologie, sans doute sous la forme d'une scolastique abstraite et desséchante, ne passe plus aujourd'hui, en raison de la déchristianisation. Ce pourrait être l'amorce d'une discussion. A vrai dire, ce point m'intéresse assez peu, je le trouve très idéologique, mais peu importent mes goûts.
La seconde est d'indiquer ce que la théologie peut être d'autre que cette vieille et vaine scolastique implicitement mais fermement rejetée par notre théologienne. Mme Denise Couture nous propose un autre style, inspiré (c'est ce que je comprends) de la phénoménologie, et qui a le mérite de faire sens.
Ce qui caractérise cette "nouvelle manière" c'est, comme vous le relevez, d'être centrée sur le sujet humain, mais pas du tout, contrairement à ce que vous craignez, dans l'oubli de Dieu, mais bien au contraire dans l'étude descriptive de la relation à Dieu. Cette démarche intègre nécessairement les formes de spiritualité non chrétiennes, ne serait-ce que parce que la question se pose, de savoir quelles sont les ressemblances et les différences vécues entre une spiritualité chrétienne et une spiritualité non chrétienne et sur la relation à Dieu que cela implique. Les contenus dogmatiques sont différents, c'est un point acquis (bien qu'il y ait aussi des ressemblances importantes), mais qu'en est-il des intentionnalités? La manière de viser Dieu par la prière est-elle identique chez un chrétien et un musulman (par exemple), ou bien similaire, ou bien totalement différente? Voici un exemple de champ de réflexion théologique qui ne me paraît pas devoir être jeté sur le bûcher par intempérance inquisitoriale.
Ceci dit il y a d'autres points qui peuvent hérisser les poils sensibles dans ce que nous a livrés Cinci, sur le féminisme en particulier, évoqué allusivement. Mais j'ai pour règle de ne traiter qu'une question à la fois, et j'espère vous avoir répondu de mon mieux.

PS : "personne spirituelle" est manifestement employé pour désigner toute personne en chemin vers Dieu abstraction faite de la religion dans laquelle elles font ce parcours. Du point de vue de l'exposé impersonnel des vérités de foi, s'intéresser aux spiritualités non chrétiennes est facultatif. Du point de vue de ce que vit le sujet qui se veut disciple du Christ, cela fait sens.
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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Perlum Pimpum » lun. 22 nov. 2021, 14:56

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Dernière modification par Perlum Pimpum le mar. 14 juin 2022, 11:31, modifié 1 fois.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Riou » lun. 22 nov. 2021, 19:18

Bonjour,

J'ose ajouter qu'en matière de phénoménologie, sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, alias Edith Stein, était une disciple de Husserl et ne s'est pas empêchée de penser la foi à partir de la méthode phénoménologique. Car c'est effectivement une méthode, qui consiste à décrire l'objet qui se donne à la conscience. La phénoménologie est donc une réflexion méthodique sur la donation, ce qui n'en fait pas une philosophie uniquement axée sur le sujet, mais sur la corrélation sujet/"objet", avec au cœur de sa réflexion la description des intentionalités qui visent le réel et permettent une analyse des différents modes de donation des choses.
C'est pourquoi sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix voyait dans la phénoménologie une véritable ascèse de l'intelligence, avec pour vertu une "humble soumission au donné". Il y aurait donc une piété de la pensée phénoménologique capable d'apporter des choses bénéfiques en théologie. Son centre de réflexion premier était la compassion.
Pour ce qui est de la théologienne dont il est question dans ce fil, j'ignore tout de cette personne, donc je ne me prononce pas sur le sujet.

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Re: La théologie en mouvement : les choses ont bougé

Message non lu par Perlum Pimpum » lun. 22 nov. 2021, 22:51

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Dernière modification par Perlum Pimpum le mar. 14 juin 2022, 11:30, modifié 1 fois.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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