Re: La Théocratie
Publié : ven. 04 juin 2021, 16:18
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Tout à fait, Prodigal, vous me mettez à l'esprit une phrase qui a été dite à Catherine de Suède lorsqu'elle s'est convertie au catholicisme et dont j'ai oublié l'auteur, j'en suis désolé. De mémoire : "Majesté, vous pouvez plus pour la cause catholique que tous les missionnaires réunis".
Cette réplique de thurar à Gaudens m'avait échappée. En y répondant, vous me permettez alors (merci !) de voir à mon tour ce qu'il aura bien voulu exprimer. Et il me semble que vous n'êtes pas juste avec lui.Riou
Bonjour,
Pardonnez mon jugement, mais je ne vois qu'une chose dans ce que vous dites : idolâtrie de la force. Vous confondez la puissance de l'amour avec la force de la contrainte. Beaucoup de traditionalistes sombrent dans une telle idolâtrie.
Pierre sort l'épée et le Christ lui dit de la ranger. Mais vous continuez de vouloir sortir l'épée.
L'Eglise est précisément la négation de l'idolâtrie de la force. Elle se fonde toute entière sur le refus de la toute puissance et de l'hégémonie politique temporelle. Elle n'est pas le maître qui domine, mais le maître qui est censée élever.
Sinon le Christ aurait accepté que Pierre fasse usage de son épée, et il aurait instauré un royaume politique de dominants.
Votre position nécessite un présupposé : le catholicisme doit être faux et l'Eglise doit se renier elle-même pour que vous ayez raison.
C'est la conséquence de la triste confusion entre l'Eglise et un parti politique lancé à la conquête du pouvoir, avec tout ce que la conquête du pouvoir implique dans ces conditions...
Bonjour prodigal,prodigal a écrit : ↑ven. 04 juin 2021, 17:19
Cher Riou, je trouve vraiment remarquable ce que vous avez écrit, et votre commentaire de la première demande du Pater est tout à fait pertinent et éclairant.
Tout ceci, bien entendu, appelant à étudier ce que peut faire et ce que doit faire un Etat pour favoriser le bien spirituel de ses membres. C'est selon moi la vraie question, la plus ardue. Car une fois qu'on a compris que l'Etat n'était pas chargé de conduire les âmes au salut, il n'en reste pas moins que son action politique peut avoir des effets spirituels collatéraux, si j'ose dire. Donc en bien ou en mal. C'est là qu'il faut être purs comme des colombes et prudents comme des serpents.
Bonjour Cinci,Cinci a écrit : ↑ven. 04 juin 2021, 19:22Salut Riou,
Vous répondez ceci à thurar
Cette réplique de thurar à Gaudens m'avait échappée. En y répondant, vous me permettez alors (merci !) de voir à mon tour ce qu'il aura bien voulu exprimer. Et il me semble que vous n'êtes pas juste avec lui.Riou
Bonjour,
Pardonnez mon jugement, mais je ne vois qu'une chose dans ce que vous dites : idolâtrie de la force. Vous confondez la puissance de l'amour avec la force de la contrainte. Beaucoup de traditionalistes sombrent dans une telle idolâtrie.
Pierre sort l'épée et le Christ lui dit de la ranger. Mais vous continuez de vouloir sortir l'épée.
L'Eglise est précisément la négation de l'idolâtrie de la force. Elle se fonde toute entière sur le refus de la toute puissance et de l'hégémonie politique temporelle. Elle n'est pas le maître qui domine, mais le maître qui est censée élever.
Sinon le Christ aurait accepté que Pierre fasse usage de son épée, et il aurait instauré un royaume politique de dominants.
Votre position nécessite un présupposé : le catholicisme doit être faux et l'Eglise doit se renier elle-même pour que vous ayez raison.
C'est la conséquence de la triste confusion entre l'Eglise et un parti politique lancé à la conquête du pouvoir, avec tout ce que la conquête du pouvoir implique dans ces conditions...
Pour jouer le rôle de "facilitateur", il faudra bien, d'une manière ou d'une autre, intégrer l'appareil d'Etat. Vous connaissez fort bien les oppositions d'une telle intégration, car l'appareil d'Etat, c'est le pouvoir. Il faudra donc se lancer dans le sinistre jeu politique de la conquête du pouvoir : il faudra communiquer en conséquence, faire du marketing, toucher des secteurs de la société ciblés, user des moyens de propagande que vous dénoncez pour contrer la propagande adverse; il faudra donner des coups et pas seulement en recevoir; il faudra faire des alliances, négocier, passer des arrangements, faire des compromis douteux, avoir une esprit de parti, se rapprocher d'un parti, etc. Il faudra aussi faire taire son prochain, prendre toute la place possible, s'assurer une presse favorable, gagner en influence, s'acooquiner avec les grands de ce monde pour se faciliter la tâche, etc. Or tout cela risque de produire une certaine dégradation spirituelle qui ne peut éviter de confondre l'Eglise avec un parti politique, quel qu'il soit.Cinci
J'en vois maintenant qui se hasardent (ah les coquins !) à oser imaginer une "certaine" collaboration du pouvoir civil avec l'Église en terme de facilitateur. Eh oui, «faciliter» : cela reste ce qu'un gouvernement pourrait faire. Il ne s'agit pas d'autre chose. Puis c'est bien ce dont il aura toujours été question. Faciliter, aider, rendre possible ... non pas écraser, non pas dominer comme un tyran.
Je trouve invraisemblable que les gens dans ce fil se prennent à cauchemarder tout seul de "conducator", de "grand timonier", comme si cela devait être le rêve secret obscène des autres interlocuteurs catholiques dans ce fil.
L'intention de mon message désignait plutôt un processus d'inspiration pascalienne : il y a trois ordres distincts du réel, l'ordre de la chair où règne les grandeurs d'établissement de toutes sortes, avec les rapports de force inévitables qui surgissent, avec pour mobile d'action la crainte; l'ordre de l'esprit, domaine de l'entendement et de la connaissance, où le critère d'adhésion est la conviction rationnelle et nécessairement non violente; et l'ordre du coeur, dont l'exigence fondamentale est la charité. Il ne s'agit pas de dire que ces ordres n'entretiennent aucun rapports entre eux, mais de souligner ce que souligne Pascal : ces rapports sont souvent conflictuels, et ce conflit se nomme précisément "tyrannie" : la domination universelle hors de son ordre.Perlum Pimpum a écrit : ↑ven. 04 juin 2021, 15:07
Loin de confondre l’amour avec la force de la contrainte, qui en l’occurrence relève moins de la vertu de force que de celle de justice, la contrainte légale reposant sur l’autorité des magistrats, je les distingue. Mais qu’il s’agisse de la vertu cardinale de force ou de celle de justice, elles ont chacune à être vivifiées par la charité. La charité ne s’oppose ni à la force ni à la justice : elle les couronne et les produit.
Et si cela suffit à être idolâtre, l’Église l’est, qui pendant 1500 ans s’appuyait sur la force du Prince.
La tyrannie consiste au désir de domination universel et hors de son ordre.
Diverses chambres, de forts, de beaux, de bons esprits, de pieux, dont chacun règne chez soi, non ailleurs, et quelquefois ils se rencontrent. Et le fort et le beau se battent sottement à qui sera le maître l’un de l’autre, car leur maîtrise est de divers genre. Ils ne s’entendent pas. Et leur faute est de vouloir régner partout. Rien ne le peut, non pas même la force. Elle ne fait rien au royaume des savants. Elle n’est maîtresse que des actions extérieures.
Tyrannie.
La tyrannie est de vouloir avoir par une voie ce qu’on ne peut avoir que par une autre. On rend différents devoirs aux différents mérites : devoir d’amour à l’agrément, devoir de crainte à la force, devoir de créance à la science.
On doit rendre ces devoirs‑là, on est injuste de les refuser, et injuste d’en demander d’autres.
Ainsi ces discours sont faux et tyranniques. « Je suis beau, donc on doit me craindre. Je suis fort, donc on doit m’aimer. Je suis... » Et c’est de même être faux et tyrannique de dire : « Il n’est pas fort, donc je ne l’estimerai pas. Il n’est pas habile, donc je ne le craindrai pas ».
Je suis d'accord avec vous pour ce point-là. S'il fallait s'en tenir à l'expression littérale telle que vue ici, il me faudrait penser que notre ami thurar serait une sorte de brute, animé encore par le désir de louanger le principe selon lequel «la raison du plus fort serait toujours la meilleure».Riou :
La possibilité d'un jugement erroné sur le propos d'un contributeur n'est jamais à exclure. L'expression "idolâtrie de la force" pour qualifier le message se basait essentiellement sur cette affirmation qu'on trouve dans le message en question : " Moi je ne crois qu'à la loi du plus fort". Il m'a semblé voir un credo : l'univers serait un champ de forces aveugles, et les sociétés humaines n'échapperaient pas à une telle loi d'airain. Or, être catholique, me semble-t-il, c'est précisément ne pas croire seulement en la loi du plus fort, et c'est voir que dans la matière, il y a déjà un équilibre des forces qui produit des harmonies, et le cœur de l'homme désire une béatitude qui lui donne un instinct de justice capable de rompre le déchaînement de la force brute. Le grain de sénevé est tout l'inverse de la loi du plus fort.
Je ne suis pas du tout d'accord avec ce que vous écrivez ici. J'ignore quel est le sortilège qui règne dans ce forum mais sitôt qu'on aborde ce sujet. Car, en dehors de vous-même, Riou, je trouverais plusieurs autres intervenants qui ne parviennent pas à s'en tenir simplement au principe qui fut toujours celui de l'Église catholique. Au lieu de s'en tenir au principe, l'on préfère embrayer aussitôt sur une peu infondée et selon laquelle la revendication serait de fusionner l'Église avec l'État. Maintenant, vous évoquerez le spectre d'une confusion entre l'Église et un parti politique. Vous vous exprimez comme s'il devait être question que des évêques entrent au parlement ou que des prêtres aillent en bras de chemise fabriquer eux-mêmes les lois de la cité. Il n'est pourtant pas question de cela.Pour jouer le rôle de "facilitateur", il faudra bien, d'une manière ou d'une autre, intégrer l'appareil d'Etat. Vous connaissez fort bien les oppositions d'une telle intégration, car l'appareil d'Etat, c'est le pouvoir. Il faudra donc se lancer dans le sinistre jeu politique de la conquête du pouvoir : il faudra communiquer en conséquence, faire du marketing, toucher des secteurs de la société ciblés, user des moyens de propagande que vous dénoncez pour contrer la propagande adverse; il faudra donner des coups et pas seulement en recevoir; il faudra faire des alliances, négocier, passer des arrangements, faire des compromis douteux, avoir une esprit de parti, se rapprocher d'un parti, etc. Il faudra aussi faire taire son prochain, prendre toute la place possible, s'assurer une presse favorable, gagner en influence, s'acooquiner avec les grands de ce monde pour se faciliter la tâche, etc. Or tout cela risque de produire une certaine dégradation spirituelle qui ne peut éviter de confondre l'Eglise avec un parti politique, quel qu'il soit.
Les dirigeants de l'État doivent concourir aux intérêts de la communauté. Et parmi tous ces intérêts se trouve le premier d'entre tous, le plus élevé, le plus important : la faculté d'atteindre à l'éternelle félicité. C'est un devoir pour les chefs d'État de veiller à protéger cette religion catholique.LIBERTAS PRAESTANTISSIMUM
LETTRE ENCYCLIQUE
DE SA SAINTETÉ LE PAPE LÉON XIII
SUR LA LIBERTÉ HUMAINE
[...]
Mais pour mieux mettre en lumière ces vérités, il est bon que nous considérions séparément les diverses sortes de libertés que l'on donne comme des conquêtes de notre époque.
Et d'abord, à propos des individus, examinons cette liberté si contraire à la vertu de religion, la liberté des cultes, comme on l'appelle, liberté qui repose sur ce principe qu'il est loisible à chacun de professer telle religion qu'il lui plaît, ou même de n'en professer aucune. Mais, tout au contraire, c'est bien là sans nul doute, parmi tous les devoirs de l'homme, le plus grand et le plus saint, celui qui ordonne à l'homme de rendre à Dieu un culte de piété et de religion. Et ce devoir n'est qu'une conséquence de ce fait que nous sommes perpétuellement sous la dépendance de Dieu, gouvernés par la volonté et la Providence de Dieu, et que, sortis de lui, nous devons retourner à lui.
Il faut ajouter qu'aucune vertu digne de ce nom ne peut exister sans la religion, car la vertu morale est celle dont les actes ont pour objet tout ce qui nous conduit à Dieu considéré comme notre suprême et souverain bien; et c'est pour cela que la religion, qui "accomplit les actes ayant pour fin directe et immédiate l'honneur divin" (S. Th. II - II, qu. LXXXI, a. 6.), est la reine à la fois et la règle de toutes les vertus.
Et si l'on demande, parmi toutes ces religions opposées qui ont cours, laquelle il faut suivre à l'exclusion des autres, la raison et la nature s'unissent pour nous répondre: celle que Dieu a prescrite et qu'il est aisé de distinguer, grâce à certains signes extérieurs par lesquels la divine Providence a voulu la rendre reconnaissable, car, dans une chose de cette importance, l'erreur entraînerait des conséquences trop désastreuses.
C'est pourquoi offrir à l'homme la liberté dont Nous parlons, c'est lui donner le pouvoir de dénaturer impunément le plus saint des devoirs, de le déserter, abandonnant le bien immuable pour se tourner vers le mal : ce qui, nous l'avons dit, n'est plus la liberté, mais une dépravation de la liberté et une servitude de l'âme sans l'abjection du péché.
Envisagée au point de vue social, cette même liberté veut que l'Etat ne rende aucun culte à Dieu, ou n'autorise aucun culte public; que nulle religion ne soit préférée à l'autre, que toutes soient considérées comme ayant les mêmes droits, sans même avoir égard au peuple, lors même que ce peuple fait profession de catholicisme.
Mais pour qu'il en fût ainsi, il faudrait que vraiment la communauté civile n'eût aucun devoir envers Dieu, ou qu'en ayant, elle pût impunément s'en affranchir; ce qui est également et manifestement faux. On ne saurait mettre en doute, en effet, que la réunion des hommes en société ne soit l'oeuvre de la volonté de Dieu, et cela qu'on la considère dans ses membres, dans sa forme qui est l'autorité, dans sa cause ou dans le nombre et l'importance des avantages qu'elle procure à l'homme. C'est Dieu qui a fait l'homme pour la société et qui l'a uni à ses semblables, afin que les besoins de sa nature, auxquels ses efforts solitaires ne pourraient donner satisfaction, pussent la trouver dans l'association. C'est pourquoi la société civile, en tant que société, doit nécessairement reconnaître Dieu comme son principe et son auteur et, par conséquent, rendre à sa puissance et à son autorité l'hommage de son culte.
Non, de par la justice; non, de par la raison, l'État ne peut être athée, ou, ce qui reviendrait à l'athéisme, être animé à l'égard de toutes les religions, comme on dit, des mêmes dispositions, et leur accorder indistinctement les mêmes droits. - Puisqu'il est donc nécessaire de professer une religion dans la société, il faut professer celle qui est la seule vraie et que l'on reconnaît sans peine, au moins dans les pays catholiques, aux signes de vérité dont elle porte en elle l'éclatant caractère.
Cette religion, les chefs de l'État doivent donc la conserver et la protéger, s'ils veulent, comme ils en ont l'obligation, pourvoir prudemment et utilement aux intérêts de la communauté. Car la puissance publique a été établie pour l'utilité de ceux qui sont gouvernés, et quoiqu'elle n'ait pour fin prochaine que de conduire les citoyens à la prospérité de cette vie terrestre, c'est pourtant un devoir pour elle de ne point diminuer, mais d'accroître, au contraire, pour l'homme, la faculté d'atteindre à ce bien suprême et souverain dans lequel consiste l'éternelle félicité des hommes, ce qui devient impossible sans la religion.
https://www.vatican.va/content/leo-xiii ... ertas.html
Bonjour Cinci,Cinci a écrit : ↑dim. 06 juin 2021, 0:03
Les dirigeants de l'État doivent concourir aux intérêts de la communauté. Et parmi tous ces intérêts se trouve le premier d'entre tous, le plus élevé, le plus important : la faculté d'atteindre à l'éternelle félicité. C'est un devoir pour les chefs d'État de veiller à protéger cette religion catholique.
L'esprit de cette religion devrait informer la législation civile du pays. Ce serait une situation de loin préférable à celle d'être soumis à une gouverne de dirigeants athées.
Un pareil programme n'exige pas le retour des chemises noires, ne réclame pas que ce soit des prêtres qui forment le gouvernement et n'a pas pour conséquence non plus le regroupement en camp d'internement des gens mal pensant, les Juifs ou les homosexuels. Non, mais c'est juste qu'il en irait d'un plus grand intérêt pour le bon peuple en vérité (le peuple français, avec son histoire). Mieux. Parce que facilitant davantage l'accés de tous à cette religion qui est la vraie; offrant ainsi plus de garantie pour qu'un plus grand nombre de citoyens puissent arriver à bon port dans l'éternité.