La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

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La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 13:34

J'ouvre ce fil à partir de la discussion actuelle sur l'évolutionnisme. Un intervenant s'appuie sur l'introduction à la Bible des Peuples, qui a reçu l'imprimatur, pour affirmer que le péché originel ne serait plus un dogme de l'Église catholique, mais un "mythe".

Voici le texte en question, dont les parties en gras interpellent particulièrement :
BIBLE DES PEUPLES, NOTES

Genèse : cela veut dire : commencement. Nous ne chercherons pas dans les premiers chapitres un document sur les origines de l'univers ou sur un péché qu’aurait commis le premier ancêtre. Mais, dès les premières pages, nous allons retrouver, sous des images, tout ce qui est important pour nous.

Il y aura comme trois parties dans ce livre.

Les chapitres 1—11 essayent de tendre une chaîne à travers ces temps énormes qui se sont écoulés depuis le début de la création jusqu’aux premiers “pères de la foi” dont le nom est resté dans les mémoires, et le premier, bien sûr, c’est Abraham.
(...)

La Bible s’ouvre sur un hymne au Dieu créateur. Le premier chapitre de la Genèse est une composition rythmique, avec ses répétitions et sa forme liturgique, qui sert de préface et d’ouverture à toute la Bible.

Il nous faut un effort pour jeter sur cette première page un regard simple. Il y a eu trop de discussions depuis cent cinquante ans sur le thème “la création selon la Bible et selon la science”, problème très mal posé, encore plus mal résolu, et qui habituellement nous laisse mal à l’aise. Nous ne chercherons pas ici des données historiques ou scientifiques ; ceux qui ont rédigé ce chapitre avaient bien d’autres choses à nous dire, et Dieu avait le droit de contresigner leur travail même s’ils voyaient le ciel comme une voûte d’azur où quelqu’un a épinglé les étoiles. Ni l’auteur de ces pages ni ses lecteurs, il y a quelque vingt-cinq siècles, ne partageaient notre curiosité, ils nous parlent de leur expérience de Dieu et du sens que la foi donne à la vie humaine, à l’histoire et au monde.

Il y a donc là une parole de Dieu, mais ne lisons pas non plus ce texte comme s’il y avait là toute la compréhension chrétienne de l’univers. Ce récit biblique est le plus important de ceux qui nous parlent de l’ordre établi dans le monde par le Créateur, mais il faut préciser deux points :

— Cette préface de la Bible n’est pas la partie la plus ancienne, comme le croient certaines personnes qui voudraient l’attribuer à nos plus lointains ancêtres, elle a été écrite au 5ème siècle avant le Christ, après le retour d’Exil.

— Cette page écrite avant le Christ ne peut pas nous donner toute la compréhension chrétienne de l’univers. Il y a bien plus à dire et la Bible le dit là où beaucoup ne chercheraient pas, c’est-à-dire dans le Nouveau Testament : voir Jean 1 et Éphésiens 1.

Mais que voulait dire l’auteur ? Que Dieu a tout fait ? Bien sûr. Dieu, un seul, distinct de cet univers qu’il créait, et antérieur à cet univers. Mais ce que l’auteur voulait avant tout, c’était de montrer que Dieu est infiniment au-delà de cette création qui nous émerveille ou nous écrase, au-delà d’une nature si riche et si dominatrice que facilement nous nous laissons emporter par ses pulsions.

(...)

À la suite de la “mise en ordre du monde” qui occupe le premier chapitre de la Genèse, la Bible nous présente un récit beaucoup plus ancien : l’homme et la femme dans le paradis terrestre. Pour nous c’est comme le rêve d’un bonheur perdu, mais ce n’est pas ainsi que l’entendait son auteur. En ce temps on ne disait pas : Où allons-nous ? On pensait que dans le passé, au commencement, Dieu, ou les dieux, avaient établi toutes choses comme elles devaient être, et c’est alors que tout allait bien. Cette histoire du premier couple était donc comme le miroir où l’on voulait retrouver l’homme présent, ses choix et son avenir.

Ne rêvons donc pas d’un premier homme du genre Adam-Tarzan, dont le gros péché aurait valu à l’humanité toutes ses épreuves. Certains des premiers “Pères de l’Église”, comme Saint Irénée, voyaient plus juste quand ils regardaient l’histoire humaine comme conduite par la pédagogie de Dieu dont toute l’ambition était de faire grandir “Adam”, c’est-à-dire l’Humanité, et l’amener à son âge adulte (Éphésiens 4.13).
Ma question :

Le dogme a-t-il changé depuis Vatican II ? Est-ce que l'Église enseigne réellement que le péché originel n'est qu'un mythe, et que le couple Adam et Ève n'ont pas personnellement existé, et ne seraient que des "images" ?

Et sinon, comment expliquer qu'un texte pareil ait reçu l'imprimatur ?

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 14:58

Suroît, comme je n'ai pas une heure devant moi, auriez-vous la gentillesse de me montrer l'endroit très précis où Benoît XVI dit : le péché originel est uniquement une réalité mystérique, et pas du tout un fait historique, et Adam et Ève n'ont pas existé personnellement, mais sont des figures mythiques.

J'ai regardé rapidement, notamment le parties surlignées, à aucun moment, de ce que j'ai lu, le pape ne va jusqu'à dire cela. Mais j'ai peut-être manqué le passage.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 15:31

Non, pas du tout. Je crois que vous faites un énorme raccourci. Ce qu'il qualifie d'image, c'est la façon dont ça s'est déroulé : les deux arbres, le serpent, les feuilles de figuier. Et là dessus, je crois que tout le monde est d'accord jusqu'à saint Augustin lui-même.

Il ne va pas jusqu'à dire que l'histoire, sous une forme ou une autre, N'A PAS EU LIEU, et n'a pas concerné PERSONNELLEMENT Adam et Ève.

Voilà ce que le pape NE DIT PAS.

Et c'est le CŒUR de la question.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par prodigal » lun. 21 oct. 2019, 15:34

Qu'il n'ait jamais existé de serpent qui parle, enroulé autour d'un arbre de vie porteur de fruits vénéneux, n'implique absolument pas la négation du péché originel.
Que celui-ci témoigne d'une chute réelle, consécutive à la faute du couple originel, n'est en revanche, il me semble, ni affirmé ni nié par ce texte très intéressant de Benoit XVI.
Que nous soyons porteurs du péché originel, cependant, nous pouvons le constater, et telle en est la plus grande preuve que nous en ayons. Enfin, nous avons besoin de la révélation chrétienne pour le comprendre. Voilà ce que j'ai retenu du texte de Benoit XVI, si toutefois je ne l'ai pas lu trop vite.
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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par prodigal » lun. 21 oct. 2019, 15:52

Il n'est pas impossible que, dans l'esprit de Benoit XVI, le personnage d'Adam soit la figure du premier homme et que celui-ci (le premier homme) ait réellement existé, et ait commis la faute entraînant la chute. Il me semble d'ailleurs qu'une telle opinion serait tout à fait orthodoxe.
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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 16:10

Suroît a écrit :
lun. 21 oct. 2019, 15:34
Carhaix

L'homme pécheur fait clairement partie des images dont parle Benoit XVI, avec l'arbre, le serpent, etc...

C'est bien ce que je disais, vous refusez de le voir, clairement. Il pourrait vous dire "Adam n'a pas existé", que vous ne l'entendriez pas, pour trouver un autre sens.

Pourquoi ne le dit-il pas comme cela? Parce qu'il se doute bien qu'une partie des catholiques ne peuvent pas entendre cela.

Ce texte est pourtant clair. Je n'ai plus de temps à passer là dessus.
Vous interprétez. Il dit : "on l'a représenté avec de grandes images". On a représenté quoi ? De quoi parle-t-on ? Du péché originel, du mal, de l'entrée du mal dans l'histoire de l'humanité. Il y a bien un début. Le récit, en lui-même, est imagé, oui : l'homme pécheur dans un joli jardin avec un arbre, et un serpent présentant le fruit. Ça, c'est la mise en scène. C'est cela qui est imagé.

Pas le péché originel *en lui-même*.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 16:50

Suroît a écrit :
lun. 21 oct. 2019, 16:11
Prodigal,

Il ne me semble pas. Je pense que c'est un faux problème qui veut sauver les meubles. L'essence du texte du pape émérite n'est pas là, et ce n'est pas la question qu'il pose. Il ne faut pas poser cette question au texte, car le récit de la Genèse ne se pose pas du tout à l'intérieur de ce questionnement. Ce questionnement, c'est nous qui le plaquons sur le texte, d'où le malentendu.

D'ailleurs, le pape Benoit XVI dit explicitement qu'on ne peut pas même le raconter comme un fait. C est une maniére très très clair de dire que la question factuelle, posée à ce texte, est hors sujet. Ce n'est pas une question d'orthodoxie.

Par ailleurs, les données exégétiques, les travaux sur les manuscrits, etc, appuie complètement les propos de Benoit XVI sur cette question. Les preuves sont accablantes.

Ceci explique pourquoi la Bible des peuples a recu l'imprimatur.
Deux choses :

D'abord, encore une fois, nous ne parlons pas de l'exégèse de la Bible, mais de la formulation du dogme. Ce n'est pas du tout le même sujet. Vous revenez sans cesse à la Bible, comme si l'Église catholique était fondée toute entière sur le Livre, ce qui n'est pas vrai.

Du coup vous cultivez l'ambiguïté. Car en effet, lorsqu'on étudie la Bible, forcément on a affaire à un moment donné à plusieurs niveaux complexes de lecture pour différents détails du texte. Mais si le début de la Genèse est fortement imagé, et à ne surtout pas recevoir dans son sens littéral uniquement, cela ne veut pas dire que le Dogme serait vague et indéterminé, sujet à diverses et obscures interprétation. Le dogme, c'est le dogme, et il est très clair.

Arrêtons de tout mélanger.

Ensuite, la phrase exacte, c'est : Nous ne pouvons pas raconter [le péché originel] comme un fait à côté d'un autre. Je ne sais pas trop ce que veut dire "à côté d'un autre", en tout cas cela ne dit pas qu'Adam n'a pas existé, mais que l'"histoire" s'est déroulée d'une façon obscure qui nous échappe. En somme, il ne nie pas le processus, ni l'existence d'Adam. Il y a un processus (l'entrée du mal dans l'humanité) dont les contours sont indéfinis et inconnus. Il ne va pas plus loin que cela. Que cela ne soit pas un "fait", soit un évènement qui survient à un moment précis, ne change rien fondamentalement. Il ne dit pas, par exemple, que le processus se serait répandu progressivement à travers plusieurs générations. Ou collectivement.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 18:41

Baissez d'un ton, Suroît, je ne suis pas votre ennemi. Et vous recommencez à projeter sur moi vos idées toutes faites. Vous ne m'avez jamais lu en train de rechercher des traces biologiques d'Adam. Je suis obligé de répéter que ce n'est pas ce qui m'intéresse.

La personne d'Adam, en tant qu'individu est affirmé par le dogme. On peut le lire au catéchisme, par exemple (dans la dernière édition). À aucun moment Benoît XVI n'écrit qu'Adam n'a pas existé en personne. Votre Bible des peuples prend cette liberté, en revanche. Je me contente de juxtaposer ces trois éléments. Je ne m'investis pas personnellement dans une quelconque position. Je regarde seulement ce que dit l'Église. Pas qu'il faut aller chercher la molaire gauche du mandibule inférieur d'Adam, ou le fémur droit d'Eve. Arrêtez d'être insultant cinq minutes.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » lun. 21 oct. 2019, 18:43

Ce qui est prodigieux, c'est qu'on n'est pas loin de penser la même chose, et que la discussion pourrait se passer courtoisement... C'est ça qui est marrant.

Mais vous avez besoin de parler au réac sola scripturiste scientiste que je ne suis pas, alors voilà.

Une bonne part de ce que je dis est inaudible à cause de vos préjugés de départ sur les individus devant forcément entrer dans des cases. Mais le monde n'est pas binaire...

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par prodigal » lun. 21 oct. 2019, 18:59

Cher Carhaix, êtes-vous sûr que le catéchisme affirme la réalité de la personne d'Adam?
Il me semble qu'il y a une confusion à ce sujet depuis le début de cette discussion. Selon ce que j'ai appris depuis bien longtemps, l'Eglise catholique affirme le monogénisme. Il y a donc bien eu un couple primordial, dont nous descendons tous, sans exception. Et donc, il y a eu un premier homme et une première femme.
Le reste est conté sur le registre du mythe, au début de la Genèse.
Le catéchisme dirait-il quelque chose qui s'opposât à cela?
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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Cinci » lun. 21 oct. 2019, 19:10

Cher Carhaix,

Je vous assure que ce que vous écrivez est très lisible et facile à comprendre. Je ne vois aucune difficulté avec ce que ce que vous expliquez. Le dogme de l'Église correspond bien à ce que vous signalez. Et il en va de même pour vos observations sur le fait que le dogme n'impose en rien un quelconque fondamentalisme littéraire des textes.

Le procès que l'ami Suroît n'a cesse de tenter de vous faire n'a pas de fondement.

:fleur:

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Cinci » lun. 21 oct. 2019, 19:28

C'est le premier canon du concile de Trente :

Si quelqu'un ne confesse pas que le premier homme, Adam, après avoir transgressé le commandement de Dieu dans le paradis

a) a immédiatement perdu la sainteté et la justice originelle dans lesquelles il avait été établi
b) et a encouru, par l'offense que constituait cette prévarication, la colère et l'indignation de Dieu et, par suite, la mort dont il avait été auparavant menacé par Dieu, et avec la mort la captivité sous le pouvoir de celui qui ensuite a eu l'empire de la mort, c'est à dire le diable (He 2,14) :
c) et que par l'offense que constituait cette prévarication d'Adam tout entier dans son corps et dans son âme a été changé en un état pire
qu'Il soit anathème



Le dogme de l'Église catholique touchant le péché originel c'est que nous sommes tous enfermés dans la désobéissance à raison d'une première révolte contre Dieu ayant pu être le fait du premier homme. C'est ce que réaffirmait le concile de Trente en son temps, comme c'était déjà ce qu'affirmait saint Paul au Ier siècle. Et ni le concile Vatican II ni le pape émérite Benoit XVI viendront changer quelque chose à cette trame de fond.

Le dogme ne nous dit pas qu'il faudrait prendre le récit biblique à la lettre, en le sens que le décor planté dans le récit devrait nécessairement correspondre à un instantané, une peinture factuelle exacte d'un fait précis et ayant dû très fidèlement s'être produit dans le passé de la seule manière suggérée, avec un premier homme qui serait appelé Adam pour vrai, une Ève ayant dû dialoguer pour vrai avec un vrai serpent sur patte et en mesure lui-même de s'exprimer (en hébreu ou je ne sais quelle langue) et qu'ensuite la femme aurait dû croquer dans un vrai fruit comme sur nos étals de marchands de fruits et légumes, un fruit arraché à un véritable arbre de la connaissance planté dans un jardin.

Le dogme de l'Église ne va pas si loin et comme à devoir nous enfoncer dans un carcan mental de représentation comme on en trouve chez les fondamentalises des textes ! D'ailleurs, c'est Augustin lui-même (et Carhaix l'a évoqué) qui autorisait le principe d'une possible lecture différenciée des textes, l'idée que quatre chrétiens différents pourraient légitimement se représenter la réalité de la chose de quatre différentes façons.

Le dogme nous assure seulement qu'à l'origine le premier homme aura bien fini par se constituer pécheur, par sa faute (mea maxima culpa) et parce qu'il y a eu aussi la tentation diabolique. Aucun pape ne remet ça en question.

Puis ...

Les images ou les "représentations du texte qui nous suggèrent" chez Benoit XVI ne font pas que lui-même ou n'importe quel baptisé aurait le droit d'aller nier la réalité du péché dans nos vies, dans celles de nos ancêtres, remontant jusqu'au premier chef.

Si le premier homme fut déjà pécheur, mais ce n'est pas parce que Dieu l'aurait crée tel. Non, c'est parce que le premier aura péché lui-même à un moment donné. Il y va de l'unité du genre humain.

Participant tous, en tant que descendants d'Adam, nous tous qui venons après, d'une même condition humaine qui fut bien celle du premier, nous participons tous alors de la même aventure, étant tous sujets à subir les mêmes impacts d'injustices consécutifs à la faute, et ce, même et y compris quand on y serait soi-même innocent comme un nouveau-né d'une quelconque injustice commises par d'autres.

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Cinci » lun. 21 oct. 2019, 20:06

Enfin

De ce que j'ai pu voir de la note insérée dans l'édition de la Bible des peuples, je n'aime pas beaucoup cette remarque à l'effet que nous ne recherchons pas le péché commis par un premier homme dans les premiers chapitres de la Genèse. Ben voyons ! Ce n'est pas pour rien si l'épisode du péché d'Adam se trouve narré au début de la Genèse. La chose a son importance assez fondamentale quant à l'anthropologie chrétienne. La remarque est ainsi rédigée que l'on dirait que cette histoire de péché importerait à rien pour personne. Détail insignifiant ? Mais voyons ...

Dans les notes de n'importe quelle Bible, il arrivera toujours que quelques remarques seront douteuses. Je ne pense que de ces notes boiteuses il faille en tirer la conclusion qu'une sorte de magistère infaillible de l'évêque du cru nous assurerait que la note la plus discutable du lot viendrait traduire maintenant à la perfection ce qui serait le point de vue de l'Église universelle (!)

Des évêques décernent des imprimatur parce qu'ils auraient pu juger plus ou moins sommairement qu'un ouvrage ne véhicule pas d'erreurs grossières ou des hérésies réellement manifestes. Une certaine marge de tolérance peut tout le temps jouer quant à certains expressions un peu discutables ou mention de quelque hypothèses exégétiques en discussion. En partant de la note de la Bible des peuples en tout cas, je ne crois pas qu'un catholique pourrait s'autoriser en toute bonne justice de nier le péché originel ou nier le fait que le dogme de l'Église concerne bien la faute des premiers parents (peu importe le lieu, la date, le mode d'expression réelle de la chose).

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Altior » lun. 21 oct. 2019, 20:59

Bonjour, Carhaix !

Je vais essayer de donner ma réponse à vos deux questions:
Carhaix a écrit :
lun. 21 oct. 2019, 13:34

Le dogme a-t-il changé depuis Vatican II ? Est-ce que l'Église enseigne réellement que le péché originel n'est qu'un mythe, et que le couple Adam et Ève n'ont pas personnellement existé, et ne seraient que des "images" ?
Négatif. La dogme n'a pas changé pour la simple raison qu'elle ne peut pas changer. Les dogmes sont immuables. Elles sont immuables parce que ce sont des vérités révélés par Dieu. Or, Dieu ne change pas. Dieu est celui qui est, il n'est pas celui qui change.

Pourtant, ce principe (de mon point de vue, je dirais cette évidence) de l'immuabilité des Dogmes est lui-même mis en question par les modernistes. On voit bien que les modernistes mettent en question les dogmes (TOUS les dogmes), le principe-même de l'immuabilité des dogmes, tout comme la fiabilité des sources de la foi. L'inerrance de la Bible, tout comme les autres (Tradition, magistère, liturgique). Vous voyez bien qu'il y des catholiques qui disent et le répètent que la Génèse est un poème. Sans doute, pour eux, le livre de Jonah est une fable. L'arche de Noah est une image, allons, ne faut pas penser qu'il s'agit d'un navire réel, nous sommes à la maternelle ou quoi ? Les Evangiles contiennent des exagérations, sinon franchement des mensonges, comme par exemple les milliers d'enfants tués par Hérode. Ainsi de suite. Non, cher frère en Christ, rassurez-vous. Il n'y a aucun problème avec les dogmes. Pourtant, il y a un gros problème avec la foi. Une grande partie (une majorité ?) de ceux qui se disent catholiques et vont à l'église le dimanche ont perdu la foi. Ou bien ils ne l'ont jamais eu. D'ailleurs, c'est normal: si on ne croit plus que la boue a été transformé en homme une fois, il y a longtemps, comment croire que le pain et le vin sont transformés en Dieu vivant, et cela encore à toutes les Messes, dans des dizaines de milliers de lieux de culte par jour ? Si on ne croit plus que la première femme a été créé de la côte du premier homme, comment croire que l'Église soit intimement liée à la côte de Notre Sauveur ? Par ailleurs, si le péché originel est une figure de style, de quel sauveur on parle, il nous a sauvé de quoi ?
Et sinon, comment expliquer qu'un texte pareil ait reçu l'imprimatur ?
À mon avis, la Bible est infaillible, pas les imprimatur. Avez-vous entendu parler du Catéchisme hollandais ? Eh bien, les «Notes» de la «Bible des Peuples (sic!!)» sont un monument d'orthodoxie par rapport à ce catéchisme. L'histoire est ici.


Sursum corda!

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Re: La remise en cause du dogme peut-elle recevoir l'imprimatur ?

Message non lu par Carhaix » mar. 22 oct. 2019, 1:24

C'est votre interprétation. Mais si je veux dire que la Genèse délivre un récit imagé, donc mettant en scène des images, des figures, cela ne veut pas dire pour autant qu'en elles-mêmes ces figures n'ont jamais existé. Le fossé est énorme entre une formulation, une expression pour commenter - encore une fois - le texte écrit, et formuler de façon explicite une vérité de la Foi.

Bref. Je vais arrêter là pour ma part.

Petit détail : je croyais que Adam voulait dire : [tiré de la] glèbe. Chouraqui traduit même : "le glébeux". Ce qui n'exclut en rien que l'on parle du "premier homme".

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