L’interprétation de certains passages bibliques

« Alors il leur ouvrit l'esprit à l'intelligence des Écritures. » (Lc 24.45)
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Perlum Pimpum
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L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » mer. 22 nov. 2023, 14:57

Bonjour,

Anit a écrit :
dim. 12 nov. 2023, 13:09
Je n’attends pas un Dieu bisounours (encore qu’on aurait bien besoin de douceur) mais j’attends un Dieu non violent et juste ; ce qu’était Jésus.
Mais la justice vindicative de Dieu, c’est Dieu infligeant des peines en châtiment des transgressions à sa Loi. C’est parce que Dieu est juste qu’il punit. Et le fondement de cette justice, c’est l’amour, l’amour de Dieu pour Dieu.

Car Dieu n’est pas seulement créateur, il est aussi législateur, et entend se faire obéir. Tout d’abord, c’est Dieu qui nous assigne notre fin suprême, notre fin dernière surnaturelle absolue, qui consiste à aimer Dieu d’un amour spécifié au Ciel par la vision intuitive. Ensuite, le moyen de cette fin, c’est d’aimer ici-bas Dieu d’un amour spécifié par la foi. De L’aimer en actes, non en vaines paroles, en accomplissant les commandements de sa Loi : « Si vous m'aimez, gardez mes commandements. » Jn. XIV, 15. « Celui qui a mes commandements et qui les garde, c'est celui qui m'aime; et celui qui m'aime sera aimé de mon Père, je l'aimerai, et je me ferai connaître à lui. » Jn. XIV, 21. « Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, de même que j'ai gardé les commandements de mon Père, et que je demeure dans son amour. » Jn. XV 10. Ensuite, qu’est-ce que transgresser la Loi divine, sinon préférer sa volonté propre à celle de Dieu ? Et en ce choix, se détourner de Dieu pour se prétendre supérieur à Dieu. Et en cette prétention, un désamour de Dieu par amour de soi-même. Et en ce désamour, la cause des peines que Dieu inflige. Car enfin, Dieu seul est infiniment aimable. Aussi l’amour de Dieu pour Dieu est infini. C’est parce que Dieu est Amour, est Amour infini de Dieu pour Dieu, que tout désamour de Dieu lui est insupportable, lui est odieux, lui est abominable, et enflamme sa colère (= appelle le juste châtiment de Dieu sur les rebelles, les fils de perdition, les enfants de colère).

Et c’est Jésus qui inflige le châtiment de sa divine justice aux damnés.

« Pourquoi ce tumulte parmi les nations, ces vaines pensées parmi les peuples ? Pourquoi les rois de la terre se soulèvent-ils et les princes se liguent-ils avec eux contre l'Éternel et contre son Christ ? ‘‘Brisons leurs liens, délivrons-nous de leurs chaînes !’’ Celui qui siège dans les Cieux en rit, le Seigneur se moque d'eux. Puis il leur parle dans sa colère, Il les épouvante dans sa fureur : ‘‘C'est moi qui ai oint mon roi, sur Sion ma montagne sainte !’’ Je publierai le décret. L'Éternel m'a dit : ‘‘Tu es mon Fils ! Je t'ai engendré aujourd'hui. Demande-moi, et je te donnerai les nations pour héritage, les extrémités de la terre pour possession. Tu les briseras avec une verge de fer, tu les briseras comme le vase d'un potier. Et maintenant, rois, conduisez-vous avec sagesse ; juges de la terre, recevez instruction. Servez l'Éternel avec crainte, réjouissez-vous avec tremblement. Embrassez le Fils, de peur qu’il ne s'irrite, et que vous ne périssiez dans votre voie, car sa colère est prompte à s'enflammer. Heureux tous ceux qui se confient en lui ! » (Ps. II, 1-12). « Il jugera les pauvres avec équité, et il prononcera avec droiture sur les malheureux de la terre. Il frappera la terre de sa parole comme d'une verge, et du souffle de ses lèvres il fera mourir le méchant. » (Is. XI, 4). « Car l’Éternel m’a oint pour porter la bonne nouvelle aux malheureux. Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux captifs la liberté, et aux prisonniers la délivrance. Pour publier une année de grâce de l'Éternel, et un jour de vengeance de notre Dieu. » (Is. LXI, 1-2). « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits sera coupé et jeté au feu. » (Mt. III, 10). « Car il est de la justice de Dieu de rendre l’affliction à ceux qui vous affligent, et de vous donner, à vous qui êtes affligés, du repos avec nous, lorsque le Seigneur Jésus apparaîtra du Ciel avec les anges de sa puissance, au milieu d’une flamme de feu, pour punir ceux qui ne connaissent pas Dieu et ceux qui n’obéissent pas à l’Évangile de notre Seigneur Jésus. Ils auront pour châtiment une ruine éternelle, loin de la face du Seigneur et de la gloire de sa force, lorsqu’il viendra pour être, en ce jour-là, glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux qui auront cru, car notre témoignage auprès de vous a été cru. C’est pourquoi aussi nous prions continuellement pour vous, afin que notre Dieu vous juge dignes de la vocation, et qu’il accomplisse par sa puissance tous les desseins bienveillants de sa bonté, et l’œuvre de votre foi, pour que le nom de notre Seigneur Jésus soit glorifié en vous, et que vous soyez glorifiés en lui, selon la grâce de notre Dieu et du Seigneur Jésus-Christ. » (II Th. I, 6-12). Si donc « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que par lui le monde soit sauvé » (Jn. III, 17), n’en demeure pas moins que « celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu » (Jn. III, 18). « Car le Père ne juge personne, il a donné au Fils le jugement tout entier… lui a donné pouvoir d’exercer le jugement parce qu’il est Fils de l’homme. N’en soyez pas étonnés, car elle vient, l’heure, où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront sa voix et sortiront : ceux qui auront fait le bien pour une résurrection de vie, ceux qui auront fait le mal pour une résurrection de jugement… et mon jugement est juste, parce que je ne cherche pas ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé. » (Jn. V, 22-30). C’est donc le Christ, le Fils du Dieu Vivant, qui, conformément au donné formellement révélé, exercera de son humanité glorifiée (Mc. XVI, 19 ; Lc. XXII, 69 ; Hb. XII, 2) le Jugement, que Dieu lui a remis (Jn. V, 22 ; XIII, 32) parce qu’il est le Fils de l’homme (Jn. V, 27 ; Dn. VII, 13-14), Christ pantocrator, Juge des vivants et des morts. Il publiera le décret divin. Le Fils éternellement engendré, incarné pour le salut, ayant reçu en son humanité glorifiée le pouvoir de juger, brisera les impies à coups de barre de fer (Ps. II, 9). Ainsi parle le Christ : « Quant à mes ennemis, ceux qui n'ont pas voulu que je règne sur eux, amenez-les ici, et égorgez-les en ma présence. » (Lc. XIX. 27). « Retirez-vous de moi, maudits ; allez au feu éternel. » (Mt. XXV, 41).

Remarque sur le Sacré-Cœur miséricordieux de Jésus.

Nous savons tous que le Cœur de Jésus est empli de compassion, de bonté, de douceur ; que Jésus est notre frère, notre ami, notre consolation ; que son cœur empli d'amour ne veut que nous sauver, et que tout pécheurs que nous soyons, c'est avec confiance que nous nous tournons vers lui, certain de son pardon pour qui l'implore humblement. Bref nous savons que Dieu, voulant sauver tous les hommes, veut faire à tous miséricorde. Mais nous savons aussi que beaucoup en sont soustraits, soit pour l'avoir refusé, soit même seulement pour n'y avoir pas eu accès, rendant ainsi inopérant les desseins bienveillants de la bonté divine, qui supposent la libre coopération de la volonté créée spécifiée par la foi au dessein bienveillant du salut, selon qu'il est écrit : « nous prions continuellement pour vous, afin que notre Dieu vous juge dignes de la vocation, et qu’il accomplisse par sa puissance tous les desseins bienveillants de sa bonté et l’œuvre de votre foi ». Et nous savons encore que cet amour très réel du Christ-homme pour les hommes n'est qu'en dépendance de son amour pour Dieu. Et parce que la Providence divine a disposé qu'à notre mort sera notre jugement particulier, pour ceux trouvés à leur mort en état de péché mortel, en état de désamour de Dieu, du Cœur du Christ jaillira le feu de la colère divine. Plongeons-nous dans son amour tant qu'il est encore temps, de crainte d'en être à jamais séparés. Car du Sacré-Cœur procèdent « une année de grâce de l'Éternel et un jour de vengeance de notre Dieu ».


Anit a écrit :
dim. 12 nov. 2023, 13:09
C'est dans une séparation avec Dieu que Dieu punit .

Or, on nous parle entre autre dans l’AT d’un Dieu tantôt chef militaire, tantôt dictateur sanglant, qui va jusqu’à s'abaisser à demander à ce que du sang soit mis partout sur les murs en tournant dans les sens des aiguille d’une montre (je fais volontairement une caricature, ne cherchez pas la référence, mais on n’en est pas très loin) .

Nous avons un Dieu qui demande des massacres de peuple entier équivalent en tout point, mais à plus grande échelle , à ce que l'on a vécu le 7 octobre dernier.
Les peines temporelles sont pourtant moindres que les peines éternelles. Quoi donc est le châtiment le plus sévère, de l’extermination d’un peuple entier, et entièrement coupable jusqu’aux bambins marqués de la tâche du péché originel, ou de la damnation (peine de dam et peines de sens) de la plus grande part de l’humanité ? Les damnés sont torturés à perpétuité, d’une perpétuité sans fin. En comparaison de l’Enfer, les atrocités de ce bas-monde ne sont rien.



Anit a écrit :
dim. 12 nov. 2023, 13:09
Alors je sais parfaitement que l'on fait des métaphores, que l'on prend parfois ces récits au second degré ; il n'en reste pas moins que ça ne colle pas du tout avec Jésus , puisque si j'ai bien compris c'est lui qui a donné ces ordres, lui et le père ne faisant qu'un, étant entendu par ailleurs que Dieu ne s'inscrit pas dans le temps.

On constate pourtant que dans le NT Jésus semble reprendre ce qu’ il a dit dans l’ancien : « Vous avez appris qu'il a été dit… mais moi je vous dis… » ou « C'est à cause de la dureté de votre cœur que Moïse vous a donné ce précepte. » (alors que c’est lui qui l’a prescrit )

Comment ne pas être dans la confusion ?

Je me demande sincèrement si certains écrits ne sont pas totalement apocryphes, ou si, pire encore, ils n'ont pas été dictés par le malin pour nous tromper.

Oui, en ce sens je me pose des questions…
Vous ne pouvez nier que Dieu soit l’auteur de l’Écriture. Vous ne pouvez pas davantage nier le canon scripturaire. Vous pouvez seulement vous interroger sur le sens des textes inspirés. Relativement aux textes vétérotestamentaires relatifs aux guerres et aux massacres, vous avez plusieurs lectures possibles, selon le sens utilisé.

1. Sens littéraliste.
2. Sens littéral.
3. Sens plénier.



:arrow: Sur la distinction du sens littéraliste et du sens littéral.

(1) Le sens littéral et le sens littéraliste ont été pendant longtemps confondus. Mais ils doivent parfois être distingués. On les distinguera chaque fois que le sens littéraliste obvie du texte est irrecevable au regard des évidences rationnelles.

La Commission Biblique Pontificale, désormais CBP, en donne clairement la raison en son document L’interprétation de la Bible dans l’Église, désormais IBE. « Quand il s’agit d’un récit, le sens littéral ne comporte pas nécessairement l’affirmation que les faits racontés se sont nécessairement produits, car un récit peut ne pas appartenir au genre historique, mais être une œuvre d’imagination. » (IBE, II, B, 1). Ainsi, depuis la découverte de la rotation de la terre autour du soleil, Jos. X, 12-14 ne peut plus être lu au sens littéraliste : « Alors Josué parla à l'Éternel, le jour où l'Éternel livra les Amoréens aux enfants d'Israël, et il dit en présence d'Israël : Soleil, arrête-toi sur Gabaon, et toi, lune, sur la vallée d'Ajalon ! Et le soleil s'arrêta, et la lune suspendit sa course, jusqu'à ce que la nation eût tiré vengeance de ses ennemis. Cela n'est-il pas écrit dans le livre du Juste ? Le soleil s'arrêta au milieu du ciel, et ne se hâta point de se coucher, presque tout un jour. Il n'y a point eu de jour comme celui-là, ni avant ni après, où l’Éternel ait écouté la voix d'un homme ; car l'Éternel combattait pour Israël. » De sorte qu’au sens littéral distingué du sens littéraliste, le sens obvie du texte est seulement que Dieu accomplit ou peut accomplir un miracle pour donner la victoire à son peuple.

(2) Pour déterminer si le sens littéraliste doit s’assimiler ou se distinguer du sens littéral, l’étude du genre littéraire est primordial, puisqu’il permet de discerner l’intention de l’auteur inspiré.

Quand l’auteur inspiré utilise le genre du fabliau, son intention n’est pas d’affirmer la véracité du fabliau, mais d’user du fabliau pour transmettre une vérité. Dieu étant l’auteur de l’Écriture divinement inspirée, le fabliau est d’abord voulu par Dieu comme moyen d’enseignement d’une vérité ainsi révélée. Comme plus tard les paraboles, les fabliaux sont dits par Dieu, et par l’auteur inspiré dont Dieu use comme d’un instrument intelligent et libre conditionné par sa culture et son langage, afin de transmettre l’enseignement que Dieu entend faire passer. « Le sens littéral de l’Écriture est celui qui a été exprimé directement par les auteurs humains. Étant le fruit de l’inspiration, ce sens est aussi voulu par Dieu, auteur principal. On le discerne grâce à une analyse précise du texte, situé dans son contexte littéraire et historique. La tâche principale de l’exégèse est de mener à bien cette analyse, en utilisant toutes les possibilités des recherches littéraires et historiques, en vue de définir le sens littéral des textes bibliques avec la plus grande exactitude possible. À cette fin, l’étude des genres littéraires anciens est particulièrement nécessaire. » (IBE, II, B, 1). C’est ainsi que le livre de Jonas use d’un fabliau, d’une historiette, pour transmettre un enseignement inspiré. Le sens littéral n’est donc pas ici que Jonas a vécu trois jours dans le ventre d’un gros poisson, mais que Dieu peut toujours intervenir pour sauver miraculeusement ses fidèles du péril de mort. De même encore les contradictions dans les généalogies du Christ n’attentent aucunement à l’inerrance biblique, généalogies dont Dieu auteur de l’Écriture use indistinctement, par les écrivains inspirés, pour affirmer l’ascendance dividique et la messianité de Jésus.

(3) Le sens littéral est toujours le sens premier du texte inspiré. Là où le sens littéraliste doit être distingué du sens littéral, faire du sens littéraliste le sens littéral est dévoyer l’Écriture en tombant dans le fondamentalisme.

« Le fondamentalisme fuit l’étroite relation du divin et de l’humain dans les rapports avec Dieu. Il refuse d’admettre que la Parole de Dieu inspirée à été exprimée en langage humain, et qu’elle a été rédigée sous l’inspiration divine par des auteurs humains dont les capacités et les ressources étaient limitées. Pour cette raison, il tend à traiter le texte biblique comme s’il avait été dicté mot à mot par l’Esprit, et n’arrive pas à reconnaître que la Parole de Dieu a été formulée dans un langage et une phraséologie conditionnés par telle ou telle époque. Il n’accorde aucune attention aux formes littéraires et aux façons humaines de penser présentes dans les textes bibliques… » (Commission Biblique Pontificale, IBE, I, F).
[+] Texte masqué

La proposition ci-avant mise en italiques est irrecevable en tant qu’elle laisse supposer que Dieu ne serait pas l’auteur de la totalité du texte inspiré. Il l’est !

« En effet, tous les livres entiers que l’Église a reçus comme sacrés et canoniques dans toutes leurs parties, ont été écrits sous la dictée de l'Esprit-Saint. Tant s'en faut qu'aucune erreur puisse s'attacher à l'inspiration divine, que non seulement celle-ci par elle-même exclut toute erreur, mais encore l'exclut et y répugne aussi nécessairement que nécessairement Dieu, souveraine vérité, ne peut être l'auteur d'aucune erreur. Telle est la croyance antique et constante de l’Église, définie solennellement par les Conciles de Florence et de Trente, confirmée enfin et plus expressément exposée dans le Concile du Vatican, qui a porté ce décret absolu : "Les livres entiers de l'Ancien et du Nouveau Testament, dans toutes leurs parties, tels qu'ils sont énumérés par le décret du même Concile de Trente, et tels qu'ils sont contenus dans l'ancienne édition vulgate en latin, doivent être regardés comme sacrés et canoniques. L’Église les tient pour sacrés et canoniques non parce que, rédigés par la seule science humaine, ils ont été ensuite approuvés par l'autorité de ladite Église ; non parce que seulement ils renferment la vérité sans erreur, mais parce que, écrits sous l'inspiration du Saint-Esprit, ils ont Dieu pour auteur (Sess. III, cap. II, De Revel.)." On ne doit donc presque en rien se préoccuper de ce que l'Esprit-Saint ait pris des hommes comme des instruments pour écrire, comme si quelque opinion fausse pouvait être émise non pas certes par le premier auteur, mais par les écrivains inspirés. En effet, lui-même les a, par sa vertu, excités à écrire, lui-même les a assistés tandis qu'ils écrivaient, de telle sorte qu'ils concevaient exactement, qu'ils voulaient rapporter fidèlement et qu'ils exprimaient avec une vérité infaillible tout ce qu'il leur ordonnait et seulement ce qu'il leur ordonnait d'écrire... Les docteurs ont été unanimes à croire que ces Livres, et dans leur ensemble et dans leurs parties, sont également d'inspiration divine, que Dieu lui-même a parlé par les auteurs sacrés, et qu'il n'a rien pu énoncer d'opposé à la vérité. » (Léon XIII, Providentissimus Deus).

Ou encore : « Les réalités divinement révélées, que contiennent et présentent les livres de la Sainte Écriture, y ont été consignées sous l’inspiration de l’Esprit Saint. Notre sainte Mère l’Église, de par la foi apostolique, tient pour sacrés et canoniques tous les livres tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, avec toutes leurs parties, puisque, rédigés sous l’inspiration de l’Esprit Saint (cf. Jn 20, 31 ; 2 Tm 3, 16 ; 2 P 1, 19-21 ; 3, 15-16), ils ont Dieu pour auteur et qu’ils ont été transmis comme tels à l’Église elle-même. Pour composer ces livres sacrés, Dieu a choisi des hommes auxquels il a eu recours dans le plein usage de leurs facultés et de leurs moyens, pour que, lui-même agissant en eux et par eux, ils missent par écrit, en vrais auteurs, tout ce qui était conforme à son désir, et cela seulement. Dès lors, puisque toutes les assertions des auteurs inspirés ou hagiographes doivent être tenues pour assertions de l’Esprit Saint, il faut déclarer que les livres de l’Écriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consignée dans les Lettres sacrées pour notre salut. C’est pourquoi ''toute Écriture inspirée de Dieu est utile pour enseigner, réfuter, redresser, former à la justice, afin que l’homme de Dieu se trouve accompli, équipé pour toute œuvre bonne.'' (2 Tm 3, 16-17 grec). » (Dei Verbum, 11).

La proposition n’est recevable qu’à condition d’affirmer que Dieu est l’auteur de la totalité du texte dont l’écrivain inspiré est aussi totalement l’auteur ; les conditionnements et limites et libres-choix rédactionnels de la cause seconde étant ceux dont Dieu use instrumentalement dans l’inspiration même. Dans IVES, 5-6, la CBP précisera ce qu’elle voulait ici dire : « L’inspiration concerne spécifiquement les livres de la Sainte Écriture. Dei Verbum affirme que Dieu est "inspirateur et auteur des livres de l’un et l’autre Testament"(DV, 16), et, de manière plus précise : "Pour composer les livres sacrés, Dieu a choisi des hommes auxquels il a eu recours dans le plein usage de leurs facultés et de leurs moyens, pour que, lui-même agissant en eux et par eux, ils missent par écrit, en vrais auteurs, tout ce qui était conforme à son désir, et cela seulement" (DV, 11). L’inspiration, comme activité divine, concerne donc directement les auteurs humains : ceux-ci sont personnellement inspirés, et les écrits de leur composition sont ensuite déclarés inspirés (DV, 11-14). Nous avons vu que Dieu est l’unique auteur de la révélation, et que les livres de la Sainte Écriture, qui permettent la transmission de la révélation divine, sont inspirés par Lui. Dieu est "auteur" de ces livres (DV, 16), mais à travers des hommes qu’Il a choisis. Ceux-ci n’écrivent pas sous la dictée mais sont de "vrais auteurs" (DV, 11) qui utilisent leurs propres facultés et leur propre talent. Le numéro 11 de Dei Verbum ne précise pas en détails en quoi consiste la relation entre ces hommes et Dieu, même si les notes (18-20) renvoient à une explication traditionnelle basée sur la causalité principale et la causalité instrumentale. »

Ce que rejette la CBP n’est donc pas le dogme que Dieu est l’auteur de la totalité de l’Écriture, de sorte que toute l’Écriture doive être dite dictée par Dieu, mais l’idée selon laquelle les auteurs divinement inspirés seraient dans une pure passivité à la motion par laquelle le Saint Esprit les inspire. Loin d’être des instruments purement passifs, ils sont des instruments actifs, donc « de vrais auteurs », ce alors même que tout ce qu’ils écriront au terme de leurs labeurs et selon leurs conditionnement culturels propres le sera par l’efficace de la grâce d’inspiration, raison pourquoi « Dieu est l’unique auteur de la révélation ».
« La lecture fondamentaliste part du principe que la Bible, étant parole de Dieu inspirée et exempte d’erreur, doit être lue et interprétée littéralement en tous ses détails. Mais par « interprétation littérale » elle entend une interprétation primaire, littéraliste, c'est-à-dire excluant tout effort de compréhension de la Bible qui tienne compte de sa croissance historique et de son développement. Elle s’oppose donc à l’utilisation de la méthode historico-critique, comme de toute autre méthode, pour l’interprétation de l’Écriture… Bien que le fondamentalisme ait raison d’insister sur l’inspiration divine de la Bible, l’inerrance de la Parole de Dieu, et les autres vérités bibliques… elle exige une adhésion sans défaillance à des attitudes doctrinaires rigides et impose… une lecture de la Bible qui refuse tout questionnement et toute recherche critique. Le problème de base de cette lecture fondamentaliste est que, refusant de tenir compte du caractère historique de la révélation… [elle] n’arrive pas à reconnaître que la Parole de Dieu a été formulée dans un langage humain et une phraséologie conditionnée par telle ou telle époque. Il n’accorde aucune attention aux formes littéraires et aux façons humaines de penser présentes dans les textes bibliques… Le fondamentalisme insiste aussi d’une manière indue sur des détails dans les textes bibliques, spécialement en matière de faits historiques ou de prétendues vérités scientifiques… » (IBE, I, F).

(4) Remarquez enfin qu'en chaque cas où le sens littéraliste doit être dissocié du sens littéral, le sens affirmé comme littéral doit être homogène au texte.

« Il ne s’en suit pas qu’on puisse attribuer à un texte biblique n’importe quel sens, en l’interprétant de façon subjective. Il faut, au contraire, rejeter comme inauthentique toute interprétation qui serait hétérogène au sens exprimé par les auteurs humains dans leur texte écrit. Admettre des sens hétérogènes équivaudrait à couper le message biblique de sa racine, qui est la Parole de Dieu communiquée historiquement, et ouvrir la porte à un subjectivisme incontrôlable. » (IBE, II, B, 1).



:arrow: Sur le sens plénier dans son rapport au sens littéral.

(1) La distinction du sens littéral et du sens spirituel s’insère dans la doctrine des quatre sens de l’Écriture : littéral, tropologique, allégorique, anagogique.

Le sens littéral est le sens premier, celui directement exprimé par le texte. Les autres sens sont des sens figurés, hors le cas où le sens spirituel s’assimile au sens littéral. En rhétorique le sens figuré est nommé tropologique, mais en théologie le sens tropologique n’est qu’un des sens figurés, le sens moral figuré par delà le sens littéral. L’autre sens figuré est le sens analogique, subdivisé plus ou moins artificiellement en allégorique, typologique, anagogique. L’anagogie est d’ordre spirituel ou mystique. « On nomme anagogie l'interprétation figurée d'un fait ou d'un texte des saintes Écritures, le passage d'un sens naturel et littéral à un sens spirituel et mystique : par exemple, les biens temporels promis aux observateurs de la Loi sont, dans le sens anagogique, l'emblème des biens éternels réservés dans la vie future aux hommes vertueux. ».

(2) Le sens plénier de l’Écriture consiste, comme l'antique Tradition nous l'apprend, à considérer la personne du Christ en son incarnation historique comme la clé des Écritures.

« Relativement récente, l’appellation de « sens plénier » suscite des discussions. On définit le sens plénier comme un sens plus profond du texte, voulu par Dieu, mais non clairement exprimé par l’auteur humain. On en découvre l’existence dans un texte biblique, lorsqu’on étudie celui-ci à la lumière d’autres textes bibliques qui l’utilisent ou dans son rapport avec le développement interne de la révélation… En définitive, on pourrait considérer le « sens plénier » comme une autre façon de désigner le sens spirituel d’un texte biblique, dans le cas où le sens spirituel se distingue du sens littéral. » (IBE, II, B, 3).

(3) Lorsque le sens plénier se distingue du sens littéral, il s’y adosse pour y surajouter une plénitude de sens. C’est pourquoi est strictement impossible que le sens plénier soit hétérogène au sens littéral : le sens plénier complète le sens littéral, il ne le nie pas : exciper du sens plénier pour nier le sens littéral n’est pas catholique.

« Il y a lieu, cependant, de ne pas prendre « hétérogène » en un sens étroit, contraire à toute possibilité d’accomplissement supérieur. L’événement pascal, mort et résurrection de Jésus, a mis en place un contexte historique radicalement nouveau, qui éclaire de façon nouvelle les textes anciens et leur fait subir une mutation de sens… Dans les cas de ce genre, on parle de « sens spirituel », compris selon la foi chrétienne, comme le sens exprimé par les textes bibliques, lorsqu’on les lit sous l’influence de l’Esprit Saint dans le contexte du mystère pascal du Christ et de la vie nouvelle qui en résulte. Ce contexte existe effectivement. Le Nouveau Testament y reconnaît l’accomplissement des Écritures. Il est donc normal de relire les Écritures à la lumière de ce nouveau contexte, qui est celui de la vie dans l’Esprit. De la définition donnée on peut tirer plusieurs précisions utiles sur les rapports entre sens spirituel et sens littéral. Contrairement à une opinion courante, il n’y a pas nécessairement distinction entre ces deux sens. Lorsqu’un texte biblique se rapporte directement au mystère pascal du Christ ou à la vie nouvelle qui en résulte, son sens littéral est un sens spirituel… Lorsqu’il y a distinction, le sens spirituel ne peut jamais être privé de rapports avec le sens littéral. Celui-ci reste la base indispensable. Autrement, on ne pourrait pas parler d’ "accomplissement" de l’Écriture. Pour qu’il y ait accomplissement, en effet, un rapport de continuité et de conformité est essentiel. » (IBE, II, B, 2).



:arrow: Application aux guerres et massacres vétérotestamentaires.

Trois lectures.

1. Vous pouvez d’abord considérer que la narration de ces épisodes est celle de faits historiques, pour assimiler ici le sens littéral au sens littéraliste.

2. Mais les données de l’archéologie biblique laissent assez clairement entendre que cette narration est an-historique. Cette considération amène logiquement à conclure qu’il faut ici dissocier le sens littéral du sens littéraliste, au moins pour certains de ces épisodes, et conséquemment conclure, en une interprétation homogène à la lettre de ces textes, que ces textes ne sont pas la narration historique de faits passés, mais des textes porteurs d’une théologie de l’histoire : d’une théologie inspirée, puisque toute la Bible a Dieu pour auteur ; d’une théologie affirmant Dieu légitime à ordonner les massacres, et ses fidèles légitimes à les accomplir. Ce disant, vous écarterez la lecture littéraliste-fondamentaliste du texte biblique tout en donnant, en une interprétation homogène à la lettre du texte, son sens littéral.

3. Vous pouvez enfin, contre toute logique, nier le sens littéral au nom du sens plénier. Dans cette perspective, vous lirez les textes litigieux en un sens exclusivement tropologique ou anagogique, comme signifiant seulement l’obligation assignée à chaque chrétien de se livrer au combat spirituel. Tout le problème de cette troisième lecture est qu’elle sacrifie le sens littéral au sens spirituel, en oubliant que le sens littéral est toujours le sens premier, et que là où le sens spirituel et plénier se distingue du sens littéral, il s’adosse sur lui, non pour le nier, mais pour le dépasser en lui donnant un complément de sens. « On définit le sens plénier comme un sens plus profond du texte, voulu par Dieu, mais non clairement exprimé par l’auteur humain. On en découvre l’existence dans un texte biblique, lorsqu’on étudie celui-ci à la lumière d’autres textes bibliques qui l’utilisent ou dans son rapport avec le développement interne de la révélation… En définitive, on pourrait considérer le sens plénier comme une autre façon de désigner le sens spirituel d’un texte biblique, dans le cas où le sens spirituel se distingue du sens littéral. » Mais si le sens plénier se distingue du sens littéral, tant le sens littéral que le sens plénier sont voulus par Dieu, auteur de l’Écriture. « Le sens littéral de l’Écriture est celui qui a été exprimé directement par les auteurs humains. Étant le fruit de l’inspiration, ce sens est aussi voulu par Dieu, auteur principal. » De sorte que « Lorsqu’il y a distinction, le sens spirituel ne peut jamais être privé de rapports avec le sens littéral. Celui-ci reste la base indispensable. Autrement, on ne pourrait pas parler d’accomplissement de l’Écriture. Pour qu’il y ait accomplissement, en effet, un rapport de continuité et de conformité est essentiel. » Or ici, en cette troisième lecture, de toute évidence, non seulement le sens spirituel prétendu plénier se distingue du sens littéral, mais il le nie, puisque il ne s’agit pas seulement de dire que le sens spirituel de ces textes serait relatif au combat ascétique que les chrétiens doivent livrer contre les puissances préternaturelles sataniques et contre la triple concupiscence héritée d’Adam, mais de nier purement et simplement le sens littéral au nom du sens spirituel, en excluant toute théologie de l’histoire affirmant Dieu légitime à ordonner les massacres, et ses fidèles légitimes à les perpétrer.


:arrow: Dignitatis Humanæ et 60 ans de magistère post-conciliaire.

C’est sur le fondement de cette théologie scripturaire divinement inspirée de l’histoire que prospèrera l’augustinisme politique qui, tirant toutes les conséquences politiques de l’absolue souveraineté de Dieu sur le créé, proclamait le devoir des États à être catholiques, et leur légitimité à user de la violence légale pour réprimer ce qui devait l’être, fortement incités à utiliser la force par l’Église, qui durant des siècles légiféra en matière inquisitoriale et prêcha les croisades. Une assertion telle que « tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens », prononcée au XI°siècle par le légat pontifical Arnaud Amaury, aujourd’hui scandaleuse aux mentalités façonnées par la modernité - modernité dont la caractéristique principale est l’évacuation de Dieu de la sphère publique, et dont le libéralisme politique est l’expression principale - n’était que l’expression du sensus fidei médiéval.

Ce n’est que depuis peu que l’Église a répudié sa doctrine, brûlant ce qu’elle adorait pour adorer ce qu’elle brûlait. Le point de bascule fut la déclaration conciliaire Dignitatis Humanæ, certes susceptible d’être lue en une herméneutique de stricte continuité à la doctrine des siècles passés, mais lue par le magistère post-conciliaire en une herméneutique de réforme dans la continuité, qui n’est jamais qu’une herméneutique de rupture plus modérée que l’extrémiste, wojtyliens et ratzinguériens n’étant que des progressistes (façon Communio) faussement colloqués comme conservateurs par comparaison à plus progressistes qu’eux (façon Concilium).


1. Une expression majeure de cette rupture doctrinale a été donnée en le document Mémoire et réconciliation de la Commission Théologique Internationale (CTI).

À l’inverse de la Congrégation pour la doctrine de la foi, à laquelle la Commission théologique internationale s’articule, cette Commission, comme aussi la Commission biblique pontificale, n’est pas un organe magistériel, ni donc ses documents des documents du magistère, sauf à être approuvés en forme spécifique par le pape ou par le cardinal préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi. En définitive la CTI est l’instrument par lequel le magistère fait évoluer la doctrine de l’Église sans engager formellement sa propre autorité doctrinale. L’importance de ce document, jamais dénoncé par les autorités romaines, est dans son parallélisme aux actes de repentance du pape Jean-Paul II. On peut dire qu’il est, en l’état, le témoignage de la pensée romaine post-conciliaire sur le sujet.
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Extraits choisis : « Purifier la mémoire signifie éliminer de la conscience personnelle et collective toutes les formes de ressentiment et de violence laissées par l’héritage du passé, sur la base d’un nouveau et rigoureux jugement historico-théologique, lui-même fondement d’un comportement moral renouvelé. » « Au contre-témoignage de la division entre chrétiens, il faut ajouter celui des diverses occasions où, au cours du millénaire passé, des moyens douteux ont été utilisés pour obtenir des fins justes telles que la prédication de l’Évangile ou la défense de l’unité de la foi : "Il y a un autre chapitre douloureux sur lequel les fils de l’Église ne peuvent pas ne pas revenir en esprit de repentir : le consentement donné, surtout en certains siècles, à des méthodes d’intolérance et même de violence dans le service de la vérité[126]." Nous faisons allusion aux formes d’évangélisation qui ont employé des instruments impropres pour annoncer la vérité révélée, ou qui n’ont pas opéré un discernement évangélique adapté aux valeurs culturelles des peuples, ou qui n’ont pas respecté les consciences des personnes à qui la foi était présentée, ainsi qu’aux formes de violence exercées dans la répression et la correction des erreurs. »
[126] : Citation de Jean-Paul II, Lettre apostolique Tertio millennio adveniente, n° 35.

2. Ce refus de la violence légitime apparaît encore dans les soubresauts du n° 2267 du Catéchisme de l’Église catholique.

Ce numéro, relatif à la peine de mort, connu pas moins de trois versions successives, la troisième attentant manifestement à l’enseignement traditionnel.
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Première version : « 2266 : Préserver le bien commun de la société exige la mise hors d’état de nuire de l’agresseur. À ce titre l’enseignement traditionnel de l’Église a reconnu le bien fondé du droit et du devoir de l’autorité publique légitime de sévir par des peines proportionnés à la gravité du délit, sans exclure dans des cas d’une extrême gravité la peine de mort. Pour des raisons analogues les détenteurs de l’autorité ont le droit de repousser par les armes les agresseurs de la cité dont ils ont la charge… 2267 : Si les moyens non sanglants suffisent à défendre les vies humaines contre l’agresseur et à protéger l’ordre public et la sécurité des personnes, l’autorité s’en tiendra à ces moyens, parce que ceux-ci correspondent mieux aux conditions concrètes du bien commun et sont plus conformes à la dignité de la personne humaine. »

Seconde version : « 2267 : L’enseignement traditionnel de l’Église n’exclut pas, quand l’identité et la responsabilité du coupable sont pleinement vérifiées, le recours à la peine de mort, si celle-ci est l’unique moyen praticable pour protéger efficacement de l’injuste agresseur la vie d’êtres humains. Mais si des moyens non sanglants suffisent à défendre et à protéger la sécurité des personnes contre l’agresseur, l’autorité s’en tiendra à ces moyens, parce que ceux-ci correspondent mieux aux conditions concrètes du bien commun et sont plus conformes à la dignité de la personne humaine. Aujourd’hui, en effet, étant donné les possibilités dont l’État dispose pour réprimer efficacement le crime en rendant incapable de nuire celui qui l’a commis, sans lui enlever définitivement la possibilité de se repentir, les cas d’absolue nécessité de supprimer le coupable "sont désormais assez rares, sinon même pratiquement inexistants"[1]. »
[1] Jean-Paul II, Evangelium vitæ, 56.

Troisième version : « 2267 : Pendant longtemps, le recours à la peine de mort de la part de l’autorité légitime, après un procès régulier, fut considéré comme une réponse adaptée a la gravité de certains délits, et un moyen acceptable, bien qu’extrême, pour la sauvegarde du bien commun. Aujourd’hui on est de plus en plus conscient que la personne ne perd pas sa dignité, même après avoir commis des crimes très graves. En outre, s’est répandue une nouvelle compréhension du sens de sanctions pénales de la part de l’État. On a également mis au point des systèmes de détention plus efficaces pour garantir la sécurité à laquelle les citoyens ont droit, et qui n’enlèvent pas définitivement au coupable la possibilité de se repentir. C’est pourquoi l’Église enseigne, à la lumière de l’Évangile, que "la peine de mort est inadmissible car elle attente à l’inviolabilité et à la dignité de la personne"[1] et elle s’engage de façon déterminée, en vue de son abolition partout dans le monde. »
[1] François, Discours aux Participants à la Rencontre organisée par le Conseil Pontifical pour la Promotion de la Nouvelle Évangélisation, 11 octobre 2017.
La seconde version faisait déjà tiquer, puisque relativement aux moyens de l’État moderne, ceux-ci diffèrent radicalement selon l'état de sa société. Qui pourrait penser que la politique pénale des pays les plus pauvres confrontés à des vagues de criminalité massive devrait s'équiparer à celle des pays les plus développés. Et quant à ces derniers, certains événements, tels l'insurrection armée, les meurtres de masse, etc, seront à même de légitimer une répression féroce.

Quant à la version bergoglienne du CEC 2267, elle attente manifestement à la doctrine traditionnelle de l’Église, comme les anciennes versions du CEC 2267 l’indiquent clairement. De plus, Dieu ayant prescrit, en la Loi mosaïque, la peine de mort pour certains crimes, contester le principe même de la peine de mort au nom de l’Évangile, c’est contester la révélation divine au nom de la révélation divine, et sombrer dans une forme larvée de marcionisme. Bref, c’est dire que Dieu se contredit Lui-même, et ainsi blasphémer.


3. Cette volonté de contredire l’Écriture pour satisfaire à une idéologie pseudo-, para-, et post- catholique, se retrouve dans la tentative de biffer de l’Écriture tous les passages relatifs aux guerres et massacres vétérotestamentaires, en cherchant à tordre le sens des textes.

C’est ainsi que, sous le pontificat de Benoit XVI, la Commission biblique pontificale, alors présidée par le pseudo-conservateur cardinal Müller, s’est livrée en son document Inspiration et vérité de l’Écriture Sainte (désormais IVES), a de très pénibles contorsions.
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« Un autre défi est lié au fait que bien des textes bibliques se révèlent remplis de violence. Nous pouvons prendre comme exemple les Psaumes imprécatoires, ou encore l’ordre donné par Dieu à Israël d’exterminer des populations entières. Les lecteurs chrétiens sont choqués et désorientés par de tels textes. De plus, il y a des lecteurs non chrétiens qui reprochent aux chrétiens d’avoir dans leurs textes sacrés des sections terribles, et les accusent de professer et de diffuser une religion inspiratrice de violence. La troisième partie du document se propose se propose d’affronter, entre autres, ces défis de l’interprétation, en montrant, d’une part, comment dépasser le fondamentalisme (cf. Commission Biblique Pontificale, L’Interprétation de la Bible dans l’Église, 1993, I. F), et, d’autre part, comment éviter le scepticisme. Une fois ces obstacles franchis, on peut espérer que sera ouverte la possibilité d’une réception réfléchie et appropriée de la Parole de Dieu » (IVES, Introduction générale, 3).

« La présence dans la Bible, et particulièrement dans l’Ancien Testament, de multiples récits de violence et de cruauté, constitue l’un des obstacles majeurs à sa réception comme texte inspiré. Et ceci d’autant plus que, souvent, la violence et la cruauté sont ordonnées par Dieu, ou encore habitent les prières adressées à Dieu, parfois enfin Lui sont directement attribuées par les auteurs sacrés. Le malaise des lecteurs contemporains ne doit pas être minimisé. Il a en effet induit chez certains une attitude de rejet des textes vétérotestamentaires, considérés comme dépassés et incapables de nourrir la foi. La hiérarchie catholique a elle-même perçu les enjeux pastoraux du problème, prenant la décision que, dans la liturgie publique, des passages entiers ne soient pas lus, et que soient systématiquement omis les versets qui se révéleraient choquants pour la sensibilité chrétienne. On pourrait en déduire de manière erronée qu’une partie de la Sainte Écriture ne jouit pas du charisme de l’inspiration, ne se révélant pas « utile pour enseigner, dénoncer le mal, redresser, éduquer dans la justice » (2 Tm 3,16). Il apparaît donc indispensable d’indiquer quelques axes d’interprétation permettant une approche plus juste de la tradition biblique, particulièrement des textes qui font problème, qui doivent, quoi qu’il en soit, être interprétés dans le contexte global de l’Écriture, c’est-à-dire à la lumière du message évangélique d’amour, y compris à l’égard des ennemis (cf. Mt 5,38-48). » (IVES, Troisième partie, 125).

« Pour permettre la connaissance du bien qu’il faut accomplir (cf. Rm 3,20), et pour favoriser le processus de conversion, l’Écriture proclame la Loi de Dieu, qui constitue un frein à l’expansion de l’injustice. Non seulement, la Torah du Seigneur indique la voie de la justice que chacun est appelé à suivre loyalement, mais elle prescrit également la conduite à tenir face au coupable, afin que le mal soit extirpé (cf. Dt 17,12 ; 22,21.22.24 ; etc..), que les victimes soient dédommagées, et que la paix soit établie. Un tel dispositif ne peut être condamné comme violent. La punition s’avère nécessaire, non seulement pour mettre en évidence l’iniquité et la dangerosité du crime, mais au-delà de la mise en place d’une juste rétribution, elle a pour objectif l’amendement du coupable, et, induisant la peur de la peine, elle aide la société et l’individu à se garder du mal. Abolir totalement la punition équivaudrait à tolérer les méfaits, à en devenir les complices. Le système pénal, régulé par ce qu’il est convenu d’appeler la « loi du talion » (« œil pour œil, dent pour dent » : Ex 21,24 ; Lv 24,20 ; Dt 19,21), représente une manière raisonnable de promouvoir le bien commun. Même imparfait par ses aspects coercitifs, et les modalités de certaines de ses sanctions, un tel système a été assumé, avec des ajustements opportuns, par les systèmes judiciaires de toutes les époques et de tous les pays, parce qu’il est fondé d’une manière idéale sur la proportionnalité entre le délit et la sanction, entre le préjudice causé et le préjudice subi. À l’inverse d’une vendetta arbitraire, la mesure d’une juste réaction à un méfait y est fixée. On peut objecter que certaines règles punitives prévues par les codes de l’Ancien Testament peuvent sembler d’une cruauté insupportable (comme le fouet — cf. Dt 25,1-3 — ou la mutilation — Dt 25,11-12) ; de la même manière, la peine de mort, prévue pour les délits les plus graves, est aujourd’hui contestée. Le lecteur de la Bible, face à ces textes, doit d’une part reconnaître le caractère historiquement situé de la législation biblique, aujourd’hui dépassée par une meilleure compréhension des droits inaliénables de la personne, dans le cadre de l’exercice de la justice ; d’autre part, les prescriptions anciennes consignées dans la Bible ont également pour fonction d’alerter sur la gravité de certains crimes, qui exigent une réponse appropriée pour éviter la diffusion du mal. Lorsque l’Écriture Sainte attribue à Dieu et au juge humain une attitude de colère dans la mise en œuvre de la justice punitive, il ne s’agit donc pas d’un comportement inapproprié : le mal ne doit pas rester impuni, et il importe que les victimes soient secourues et dédommagées. Sur un autre plan, l’Écriture associe à la vision d’un Dieu garant de la justice celle d’un Dieu patient (cf. Ex 34,6 ; Nb 14,18 ; Ps 103,8 ; etc..), et surtout ouvert au pardon pour les coupables (cf. is 1,18 ; Gn 4,11), pardon consenti à ceux qui expriment leur repentir par leurs paroles et par leurs actes (cf. Gn 3,10 ; Ez 18,23). La Bible propose à l’homme, responsable de la justice et de la concorde sociale, le modèle divin, qui associe la rigueur et la discipline nécessaires à la perspective du pardon, pour qu’il puisse l’imiter. » (IVES, Troisième partie, 126).

« Nous lisons, entre autres dans le Deutéronome, que Dieu ordonne à Israël de renverser les nations cananéennes et de les vouer à l’interdit (cf. Dt 7,1-2 ; 20,16-18). L’ordre est fidèlement exécuté par Josué (cf. Jos 6-12) et également mis en oeuvre lors de la première époque monarchique (cf . 1 S 15). Ces textes s’avèrent problématiques, encore davantage que toutes les guerres et les massacres relatés par l’Ancien Testament. On ne peut accepter de se fonder sur eux pour légitimer un programme de politique nationaliste, justifiant la violence à l’égard des autres peuples : ceci fausserait en effet le sens de la page biblique. Il faut pour commencer faire remarquer que ces textes ne se présentent pas comme des récits historiques : dans une guerre véritable, les murs d’une ville ne s’écroulent pas au son de la trompette (cf. Jos 6,20), et on ne voit pas comment pourrait intervenir une répartition vraiment pacifique de la terre par tirage au sort (cf. Jos 14,2). D’autre part, la législation du Deutéronome, qui prescrit l’extermination des Cananéens, prend une forme écrite à une époque où ces populations n’existent plus sur la terre d’Israël. Il apparaît donc nécessaire de redéfinir soigneusement le genre littéraire de ces récits. Comme l’ont déjà suggéré les meilleurs interprètes de la tradition patristique, le récit de l’épopée de la conquête peut être compris comme une sorte de parabole, qui met en scène des personnages de valeur symbolique. La loi portant sur l’ « interdit » exige quant à elle une interprétation non littérale, à la manière du commandement du Seigneur invitant à se couper la main ou à s’arracher un œil s’ils sont occasions de scandale (cf. Mt 5,29 ; 18,9). Il nous faut donc indiquer comment orienter la lecture de ces pages difficiles. Un premier aspect controversé de la tradition littéraire qui vient d’être évoquée est celui de la conquête, comprise comme la destruction des habitants de lieu, permettant de s’y installer à leur place. Il n’est pas convaincant de recourir ici à la notion du « droit de Dieu » de distribuer la terre en privilégiant ses élus (cf. Dt 7,6-11 ; 32,8-9), car cela désavouerait les revendications légitimes des populations autonomes. D’autres pistes plus convaincantes d’explications sont apportées par le texte biblique. En premier lieu, le récit met en scène le conflit qui oppose deux groupes dont le statut économique et militaire est différent : celui des Cananéens, très puissant (cf. Dt 7,1 ; cf. également Nb 13,33 ; Dt 1,28 ; Am 2,9 ; etc..), et celui des Israélites, faibles et sans défense. Le récit ne relate donc pas — pour en faire un exemple — la victoire du plus puissant, mais, au contraire, le triomphe du petit, en conformité avec une « figure » bien attestée dans toute la Bible, jusqu’au Nouveau Testament (Lc 1,52 ; 1Co 1,27). Ceci correspond à une lecture prophétique de l’histoire, qui interprète la victoire des « doux », dans une guerre sainte, comme l’instauration du Royaume du Seigneur sur terre. En outre, selon le témoignage biblique, Dieu estime les Cananéens coupables de crimes gravissimes (cf. Gn 15,16 ; Lv 18,3.24-30 ; 20,23 ; Dt 9,4-5 ; etc..), parmi lesquels, celui de tuer leurs propres fils dans des rites pervers (cf. dt 12,31 ; 18,10-12). Le récit présente donc la mise en œuvre de la justice divine dans l’histoire. Et Josué se comporte comme le « serviteur du Seigneur » (Jos 24,29 ; Jg 2,8) dans la manière dont il assume cette mise en œuvre de la justice : ses victoires sont constamment attribuées au Seigneur et à sa puissance supra-humaine. Le motif littéraire de la justice vis-à-vis des nations apparaît dès les premiers récits bibliques puis, attesté chez les prophètes et dans les écrits apocalyptiques, il sera appliqué à des peuples variés, chaque fois que le Seigneur jugera qu’une nation — cela sera le cas d’Israël — mérite d’être sanctionnée. C’est dans cette acception qu’il convient de comprendre la loi de l’interdit, et son application consciencieuse par les fidèles du Seigneur. Une telle législation a pour base la définition du peuple de l’alliance comme peuple saint (cf . Dt 7,6), ce qui peut signifier, dans une perspective extrême, l’existence d’une différence radicale le mettant à part des autres peuples. Dieu ne donne certes pas l’ordre de procéder à des abus justifiés par des motifs religieux, mais il demande d’obéir à un devoir de justice, analogue à la poursuite, à la condamnation et à la mise à mort du coupable d’un crime capital — qu’il s’agisse d’un individu ou d’une collectivité. Avoir pitié du criminel, en l’épargnant, est considéré comme un acte de désobéissance et d’injustice (cf. Dt 13,9-10 ; 19,13.21 ; 25,12 ; 1 S 15,18-19 ; 1 R 20,42). Dans ce cas, l’acte apparemment violent est considéré comme zèle pour enlever le mal, et pour sauvegarder ainsi le bien commun. Ce courant littéraire et théologique est pondéré par d’autres — parmi lesquels l’écrit sacerdotal — qui, face à des faits identiques, suggèrent au contraire une orientation explicitement pacifique. Pour cette raison, il convient de comprendre l’événement entier de la conquête comme une sorte de symbole, analogue à ce que nous lisons dans certaine paraboles évangéliques traitant de la justice (cf. Mt 13,30.41-43.50 ; 25,30.41 ; etc…). Ce récit de la conquête fut relié à d’autres pages de la Bible qui expriment la compassion divine et son pardon — qui constituent l’horizon et la finalité de toute l’action historique du Souverain de toute la terre, et le modèle d’une action juste des êtres humains. » (IVES, Troisième partie, 127).
D'abord, qu'on doive écarter la lecture littéraliste de ces textes bibliques, pourquoi pas, encore que l'argument retenu soit particulièrement scabreux, puisqu'il nie la possibilité même du miracle : « dans une guerre véritable, les murs d’une ville ne s’écroulent pas au son de la trompette ».

Ensuite, sous couvert d'éviter le fondamentalisme, autrement dit le sens littéraliste là où il y a lieu de l'exclure, c'est au refus du sens littéral que nous sommes conviés : « La loi portant sur l'interdit exige quant à elle une interprétation non littérale ». Non littéraliste, peut-être ; non littérale, jamais. Que la CBP, qui connait le sens des termes pour les avoir employés dans IBE, les amalgame dans IVES, laisse présager du pire.

Ensuite, si « le lecteur de la Bible, face à ces textes, doit d’une part reconnaître le caractère historiquement situé de la législation biblique, aujourd’hui dépassée par une meilleure compréhension des droits inaliénables de la personne », il s'agit de partir « des droits inaliénables de la personne », autrement dit de lire les textes vétérotestamentaire à la lumière de Dignitatis humanæ. Mais DH affirme le devoir des États à être catholiques, et en ce devoir celui de conformer leurs législations à la Loi divine, et la légitimité des États à réprimer les comportements attentatoires à leur ordre public juste, juste si conforme à l'ordre moral objectif, autrement dit la Loi divine, qui réprouve l'infidélité et le blasphème. De sorte que, pour de justes motifs d'ordre public, et pour cette raison qu'ils sont d'ordre public juste, et non pour cette autre qu'ils sont aussi des motifs religieux puisque fondés sur la Loi divine de la conformité à laquelle ils tirent leur légitimité, la répression est légitime. Or nous savons que « Préserver le bien commun de la société exige la mise hors d’état de nuire de l’agresseur. À ce titre l’enseignement traditionnel de l’Église a reconnu le bien fondé du droit et du devoir de l’autorité publique légitime de sévir par des peines proportionnés à la gravité du délit, sans exclure dans des cas d’une extrême gravité la peine de mort ». Les droits inaliénables de la personne humaine ne s'opposent donc pas aux textes vétérotestamentaires.

Ensuite, on est stupéfait de lire, en opposition à l'exégèse médiévale, que « n’est pas convaincant de recourir ici à la notion du droit de Dieu de distribuer la terre en privilégiant ses élus (cf. Dt 7, 6-11 ; 32, 8-9), car cela désavouerait les revendications légitimes des populations autonomes ». Stupéfiant, car exciper des revendications prétendument légitimes des populations humaines pour les opposer au droit de Dieu, c'est nier à Dieu, Souverain maître de tout, le droit de distribuer ses dons comme il l'entend.

Enfin, à dissocier le sens littéraliste du sens littéral, le sens littéral est bien celui signifié par la CBP : « C’est dans cette acception qu’il convient de comprendre la loi de l’interdit, et son application consciencieuse par les fidèles du Seigneur. Une telle législation a pour base la définition du peuple de l’alliance comme peuple saint (cf . Dt 7,6), ce qui peut signifier, dans une perspective extrême, l’existence d’une différence radicale le mettant à part des autres peuples. Dieu ne donne certes pas l’ordre de procéder à des abus justifiés par des motifs religieux, mais il demande d’obéir à un devoir de justice, analogue à la poursuite, à la condamnation et à la mise à mort du coupable d’un crime capital — qu’il s’agisse d’un individu ou d’une collectivité. Avoir pitié du criminel, en l’épargnant, est considéré comme un acte de désobéissance et d’injustice (cf. Dt 13,9-10 ; 19,13.21 ; 25,12 ; 1 S 15,18-19 ; 1 R 20,42). Dans ce cas, l’acte apparemment violent est considéré comme zèle pour enlever le mal, et pour sauvegarder ainsi le bien commun. »

Mais hélas, sitôt affirmé, le sens littéral est sinon nié du moins fortement escamoté au profit d'un sens spirituel qui ne peut aucunement être le sens spirituel de tels textes : « Ce courant littéraire et théologique est pondéré par d’autres — parmi lesquels l’écrit sacerdotal — qui, face à des faits identiques, suggèrent au contraire une orientation explicitement pacifique. Pour cette raison, il convient de comprendre l’événement entier de la conquête comme une sorte de symbole, analogue à ce que nous lisons dans certaine paraboles évangéliques traitant de la justice (cf. Mt 13,30.41-43.50 ; 25,30.41 ; etc…). Ce récit de la conquête fut relié à d’autres pages de la Bible qui expriment la compassion divine et son pardon — qui constituent l’horizon et la finalité de toute l’action historique du Souverain de toute la terre, et le modèle d’une action juste des êtres humains. »

L'atténuation du sens littéral est dans l'affirmation qu'il « convient de comprendre l’événement entier de la conquête comme une sorte de symbole », en pondérant le sens littéral porteur d'une théologie de l'histoire en laquelle Dieu est légitime à ordonner les conquêtes et les massacres, par d'autres lignes théologiques divinement inspirées. Qu'on pondère autant qu'on voudra, n'en demeurera pas moins que : « Lorsqu’il y a distinction, le sens spirituel ne peut jamais être privé de rapports avec le sens littéral. Celui-ci reste la base indispensable. Autrement, on ne pourrait pas parler d’accomplissement » de l’Écriture. Pour qu’il y ait accomplissement, en effet, un rapport de continuité et de conformité est essentiel. » (IBE, II, B, 2). En d'autres termes,s'il faut rechercher le sens spirituel par delà le sens littéral, le sens spirituel ne renvoie pas ici à « la compassion divine et son pardon », mais à la justice vindicative de Dieu damnant ceux trouvés en état de péché mortel au jour de leur jugement particulier. S'imaginer que le sens spirituel des récits relatifs aux massacres serait celui de la compassion et du pardon, c'est postuler un sens spirituel totalement hétérogène au sens littéral. Et en cette hétérogénéité, une négation du sens littéral sous couvert de lui donner son sens plénier.

Et d’ailleurs, à ce compte là, on pourrait tout autant user de la même technique pour nier les passages néotestamentaires affirmant formellement que c’est Dieu qui damne les damnés = qui inflige les peines de l’Enfer éternel en châtiment des péchés dont l’homme est seul responsable. Et ainsi, attenter à l’autorité de l’Écriture au gré d’une subjectivité incontrôlable. « Il faut rejeter comme inauthentique toute interprétation qui serait hétérogène au sens exprimé par les auteurs humains dans leur texte écrit. Admettre des sens hétérogènes équivaudrait à couper le message biblique de sa racine, qui est la parole de Dieu communiquée historiquement, et ouvrir la porte à un subjectivisme incontrôlable. » ((IBE, II, B, 1).


4. Tuer au nom de Dieu est-il toujours satanique ?

« Comme il serait bon que toutes les confessions religieuses proclament que tuer au nom de Dieu est satanique. » (François, messe en hommage au père Jacques Hamel, 14/09/2016). « Dire qu’on peut tuer au nom de Dieu est un blasphème. » (François, méditation matinale, 22/05/2013).

La règle de la foi est essentiellement l’autorité de Dieu révélant les vérités de foi divine. L’Église n’est règle de la foi que subalternée à l’autorité de Dieu révélant, pour expliciter infailliblement le donné formellement révélé. Les titulaires de l’office magistériel ne sont donc jamais légitimes à exciper de leur fonction pour contredire la révélation en des assertions non marquées d'infaillibilité. C’est l’évidente limite au magistère suprême simplement authentique ; et avec elle la nécessaire limite à l’assentiment religieux et prudent à leurs énoncés non marqués d’infaillibilité.

C’est le meurtre de l’innocent qui est pervers, pas celui du coupable. Prétendre que tuer les impies au nom du Dieu de la foi théologale serait intrinsèquement satanique est une négation de l’autorité de Dieu révélant, une imputation de satanisme faite à Dieu-même, ainsi qu’une injure à l’Église médiévale autant qu’à l’Église d’avant l’Église. Dieu, Moïse, Josué, Phinéas, Élie, et les autres, étaient-ils sataniques en ordonnant ou en accomplissant des massacres ? Les écrivains inspirés étaient-ils sataniques quand, sous l’inspiration divine, ils rédigeaient des textes bibliques porteurs au sens littéral d’une théologie légitimant la mise à mort au nom de Dieu ? Et quand saint Pierre expédia Ananias et Saphira au Tribunal de Dieu (Ac. V, 1-11), était-il mû par l’Esprit Saint ou par un esprit satanique ? De même, était-ce que les plus grandes autorités doctrinales du catholicisme latin, tels saint Augustin, saint Bernard de Clervaux, saint Thomas d’Aquin, blasphémaient Dieu en des assertions sataniques ? Sataniques encore les Papes ayant prêché la croisade ou légiféré en matière inquisitoriale ? Sataniques enfin les moines-soldats mourant martyrs au combat, mourant au nom du Christ et par amour de Lui en agissant selon la règle de leur ordre approuvée par l’Église ?

Ou serait-ce que soient sataniques ceux taxant Dieu et ses saints de satanisme ? Et comment être un saint en taxant Dieu de satanisme ?
Dernière modification par Perlum Pimpum le jeu. 23 nov. 2023, 11:55, modifié 2 fois.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Olivier JC » jeu. 23 nov. 2023, 11:19

Bonjour,
Perlum Pimpum a écrit :
mer. 22 nov. 2023, 14:57
2. Mais les données de l’archéologie biblique laissent assez clairement entendre que cette narration est an-historique. Cette considération amène logiquement à conclure qu’il faut ici dissocier le sens littéral du sens littéraliste, au moins pour certains de ces épisodes, et conséquemment conclure, en une interprétation homogène à la lettre de ces textes, que ces textes ne sont pas la narration historique de faits passés, mais des textes porteurs d’une théologie de l’histoire : d’une théologie inspirée, puisque toute la Bible a Dieu pour auteur ; d’une théologie affirmant Dieu légitime à ordonner les massacres, et ses fidèles légitimes à les accomplir. Ce disant, vous écarterez la lecture littéraliste-fondamentaliste du texte biblique tout en donnant, en une interprétation homogène à la lettre du texte, son sens littéral.
Soutenir comme vous le faites qu'il ressort des textes bibliques une théologie affirmant Dieu légitime à ordonner les massacres et ses fidèles légitimes à les accomplir, j'ai quelques réserves en ce sens que cela revient à placer in fine la source de la violence en Dieu Lui-même dès lors qu'Il ordonne à l'homme de l'être.

Il me semble plutôt que la violence humaine étant un donné, inévitable en l'état post-lapsaire ainsi que l'histoire le montre pour le passé et les Ecritures pour l'avenir, Dieu doit bien faire avec.

Prenez par exemple DT 20.
[+] Texte masqué
01 Lorsque tu partiras en guerre contre tes ennemis et que tu verras des chevaux, des chars, un peuple plus nombreux que toi, tu ne les craindras pas, car le Seigneur ton Dieu est avec toi, lui qui t’a fait monter du pays d’Égypte.

02 Quand vous serez sur le point de combattre, le prêtre s’avancera et parlera au peuple.

03 Il lui dira : « Écoute, Israël ! Vous êtes aujourd’hui sur le point de combattre vos ennemis. Que votre courage ne faiblisse pas ! N’ayez pas peur, ne vous affolez pas, ne tremblez pas devant eux,

04 car le Seigneur votre Dieu marche avec vous, afin de combattre pour vous et de vous sauver ! »

05 Ensuite les scribes parleront au peuple en ces termes : « Y a-t-il un homme qui a construit une maison neuve et ne l’a pas encore inaugurée ? Qu’il s’en aille et retourne chez lui, de peur qu’il ne meure au combat et qu’un autre n’inaugure sa maison.

06 Y a-t-il un homme qui a planté une vigne et n’en a pas profité ? Qu’il s’en aille et retourne chez lui, de peur qu’il ne meure au combat et qu’un autre n’en profite.

07 Y a-t-il un homme qui a choisi une fiancée et ne l’a pas encore épousée ? Qu’il s’en aille et retourne chez lui, de peur qu’il ne meure au combat et qu’un autre ne l’épouse. »

08 Les scribes diront encore au peuple : « Y a-t-il un homme qui a peur et dont le courage faiblit ? Qu’il s’en aille et retourne chez lui, de peur que le courage de ses frères à cause de lui ne fonde comme le sien. »

09 Quand les scribes auront fini de parler, ils placeront des officiers à la tête du peuple.

10 Lorsque tu t’approcheras d’une ville pour la combattre, tu lui proposeras la paix.

11 Si elle accepte la paix et t’ouvre ses portes, toute la population qui s’y trouve sera astreinte à la corvée et te servira.

12 Mais si elle refuse la paix et engage le combat, tu l’assiégeras.

13 Le Seigneur ton Dieu la livrera entre tes mains, et tu passeras tous les hommes au fil de l’épée.

14 Quant aux femmes, aux enfants, au bétail, tout ce qui se trouve dans la ville, tout le butin, tu t’en saisiras ; tu te nourriras du butin pris aux ennemis que le Seigneur ton Dieu t’aura livrés.

15 Tu agiras ainsi envers toutes les villes très éloignées de toi, villes qui n’appartiennent pas aux nations que voici.

16 Dans les seules villes des peuples que le Seigneur ton Dieu te donne en héritage, tu ne laisseras subsister aucun être vivant.

17 En effet, tu dois vouer à l’anathème le Hittite, l’Amorite, le Cananéen, le Perizzite, le Hivvite et le Jébuséen, selon l’ordre du Seigneur ton Dieu,

18 afin qu’ils ne vous apprennent pas à pratiquer toutes les abominations qu’ils pratiquent envers leurs dieux : ce serait pécher contre le Seigneur votre Dieu.

19 Lorsque tu assiégeras une ville pendant de longs jours, en combattant contre elle pour la conquérir, tu ne brandiras pas la hache sur les arbres pour les abattre, car c’est eux qui te nourriront. Tu ne les couperas donc pas : l’arbre des champs est-il un homme pour que tu le traites en assiégé ?

20 Seul l’arbre que tu reconnaîtras comme n’étant pas un arbre fruitier, tu pourras l’abattre, le couper, et tu en feras des machines de guerre contre la ville que tu combats, jusqu’à sa reddition.
Il n'est pas contraire au sens littéral du texte de retenir que Dieu n'ordonne pas au peuple d'Israël de partir en guerre contre ses ennemis, mais qu'Il fixe des règles à respecter pour cette hypothèse : exempter certains personnes des combats, proposer la paix avant d'attaquer, ne tuer personne si elle est acceptée et ne tuer que les hommes si elle est refusée...

Dieu met ainsi des limites à la violence des hommes, tout en se servant de celle-ci, en tant qu'elle est inévitable, pour poursuivre ses desseins. En ce sens, toute violence n'est pas nécessairement peccamineuse. S'agissant par exemple de la peine de mort que Dieu ordonne d'infliger pour certains péchés, il faut à mon sens encore la comprendre comme une limite : "si telle personne commet tel crime, Je sais que vous aurez spontanément envie de tuer toute sa famille : Je vous ordonne de ne tuer que lui".

Dieu pose ainsi des limites, et dès lors qu'il respecte ces limites, l'acte commis ne sera pas regardé comme un péché par Dieu. Par conséquent, dire que Dieu est légitime à ordonner des massacres me semble une manière critiquable de présenter les choses, et il serait à mon sens préférable de dire que Dieu est légitime à encadrer la violence de ses fidèles et que ceux-ci sont légitimes à être violents tant qu'ils respectent le cadre posé par Dieu.

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » jeu. 23 nov. 2023, 11:58

Olivier JC a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 11:19

Soutenir comme vous le faites qu'il ressort des textes bibliques une théologie affirmant Dieu légitime à ordonner les massacres et ses fidèles légitimes à les accomplir, j'ai quelques réserves en ce sens que cela revient à placer in fine la source de la violence en Dieu Lui-même dès lors qu'Il ordonne à l'homme de l'être.

Il me semble plutôt que la violence humaine étant un donné, inévitable en l'état post-lapsaire ainsi que l'histoire le montre pour le passé et les Ecritures pour l'avenir, Dieu doit bien faire avec.
Vous connaissez déjà, cher Olivier, ma réponse. :)

Vous partez du principe que toute violence serait peccammineuse, ce qui est impossible. Car si Dieu peut permettre le péché, sa volonté ne portera aucunement sur le péché, mais seulement sur sa permission : Dieu ne veut ni directement ni indirectement le péché. Mais si Dieu ne veut aucunement le mal de faute (péché), il veut le mal de peine (châtiment), indirectement, en voulant le bien qu’est la justice. Peut importe qu’il s’agisse de peines temporelles ou éternelles, et peu importe qu’il les inflige par lui-même ou par l’intermédiaire de ceux qu’il instrumentalise ou missionne à cette fin. Vous avez même ces cas limites où l’action des causes secondes est simultanément permise (en tant qu’elle est peccamineuse) et voulue indirectement (en tant qu’elle est afflictive dans ses effets) : des cas où l’action des bourreaux n’est aucunement voulue sous sa raison de péché quoiqu’elle soit indirectement voulue sous sa raison de châtiment : des cas où le péché des coupables sert au châtiment d’autres coupables. Vous avez déjà l’exemple des démons tourmentant les damnés sur ordre de Dieu, et sur le plan temporel, les assyriens frappant israël….
[+] Texte masqué
«  En conséquence le mal de faute qui prive la créature de son ordination au bien, Dieu ne le veut en aucune manière. Mais le mal qui est une déficience de la nature, ou le mal de peine, Dieu le veut en voulant quelque bien auquel est lié un tel mal. Par exemple, en voulant la justice, il veut la peine du coupable, et en voulant que soit gardé l’ordre de nature, il veut que par un effet de nature certains êtres soient détruits. » (saint Thomas d’Aquin, ST, I, 19, 9, co).
La violence du châtiment que Dieu inflige repose donc ultimement en Dieu-même, comme exigence de sa justice vindicative, qui découle elle-même de l’amour infini de Dieu pour Dieu.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Olivier JC » jeu. 23 nov. 2023, 12:59

Perlum Pimpum a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 11:58
Vous connaissez déjà, cher Olivier, ma réponse. :)

Vous partez du principe que toute violence serait peccammineuse, ce qui est impossible. Car si Dieu peut permettre le péché, sa volonté ne portera aucunement sur le péché, mais seulement sur sa permission : Dieu ne veut ni directement ni indirectement le péché. Mais si Dieu ne veut aucunement le mal de faute (péché), il veut le mal de peine (châtiment), indirectement, en voulant le bien qu’est la justice. Peut importe qu’il s’agisse de peines temporelles ou éternelles, et peu importe qu’il les inflige par lui-même ou par l’intermédiaire de ceux qu’il instrumentalise ou missionne à cette fin. Vous avez même ces cas limites où l’action des causes secondes est simultanément permise (en tant qu’elle est peccamineuse) et voulue indirectement (en tant qu’elle est afflictive dans ses effets) : des cas où l’action des bourreaux n’est aucunement voulue sous sa raison de péché quoiqu’elle soit indirectement voulue sous sa raison de châtiment : des cas où le péché des coupables sert au châtiment d’autres coupables. Vous avez déjà l’exemple des démons tourmentant les damnés sur ordre de Dieu, et sur le plan temporel, les assyriens frappant israël….
Et vous n'avez pas vu que je réponds à votre objection :) La violence a une origine peccamineuse, cela ne signifie pas nécessairement que son usage soit toujours et en toutes circonstances peccamineux dès lors que la qualification de péché dépend in fine de la Volonté divine, à laquelle il est loisible de décréter qu'un acte donné, bien qu'en soi contraire à la loi naturelle, n'en est pas pour autant peccamineux dès lors que certaines conditions sont respectées (un exemple typique pouvant être la répudiation).

Que la violence trouve son origine dans le péché des hommes, et non en Dieu, cela ressort de votre argument même : la justice vindicative ne se manifeste qu'en conséquence du péché. Pas de péché, pas de violence et pas de péché, pas de justice vindicative. Supposons, pour les besoins du raisonnement, que le péché originel n'eut pas été commis : il est évident qu'il n'y aurait jamais eu de guerres, de meurtres, de viols, etc. Il ne serait jamais venu à l'esprit des descendants d'Adam et Eve, en pareille hypothèse, de se massacrer les uns les autres.

Ainsi, la lecture littérale de l'Ancien Testament ne peut faire abstraction d'une circonstance fondamentale : l'Ancien Testament retrace au premier chef la dynamique de la Révélation qui se saisit des hommes à une époque où il apparaissait normal d'exterminer toute la tribu de celui qui s'était cru autorisé à voler le bien d'une autre.

Enfin, je pense que soutenir, avec S. Thomas, que "le mal qui est une déficience de la nature, ou le mal de peine, Dieu le veut en voulant quelque bien auquel est lié un tel mal", n'est pas tout à fait équivalent à soutenir votre assertion première, à savoir que Dieu serait légitime à ordonner des massacres...

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Olivier JC » jeu. 23 nov. 2023, 16:53

Prenons un autre exemple, le chapitre 7 du Livre de Josué où l'on peut lire que Dieu demande à Josué de brûler Achan et toutes ses possessions :
[+] Texte masqué
1 Or les enfants d’Israël violèrent la défense qui leur avait faite, et ils prirent pour eux de ce qui avait mis sous l’anathème. Car Achan, fils de Carmi, fils de Zabdi, fils de Zaré de la tribu de Juda, déroba quelque chose de l’anathème; et le Seigneur S’irrita contre les enfants d’Israël.
2 En même temps, Josué envoya de Jéricho des hommes contre Haï qui est près de Béthaven, à l’orient de la ville de Béthel; et il leur dit: Allez, et reconnaissez le pays. Ils firent ce qui leur avait été commandé, et reconnurent la ville de Haï.
3 Et, étant revenus, ils lui dirent: Qu’on ne fasse pas marcher tout le peuple; mais qu’on envoie deux ou trois mille hommes pour détruire cette ville. Qu’est-il nécessaire de fatiguer inutilement tout le peuple contre un si petit nombre d’ennemis?
4 Trois mille hommes marchèrent donc en armes contre Haï. Mais ayant tourné le dos aussitôt,
5 ils furent chargés par ceux de la ville d’Haï, et il y en eut trente-six de tués. Les ennemis les poursuivirent depuis leur porte jusqu’à Sabarim, et tuèrent ceux qui s’enfuyaient vers la descente. Alors le coeur du peuple fut saisi de crainte, et devint comme de l’eau qui s’écoule.
6 Mais Josué déchira ses vêtements, se jeta visage contre terre devant l’arche du Seigneur, et demeura prosterné jusqu’au soir, avec tous les anciens d’Israël; et ils se mirent de la poussière sur la tête.
7 Et Josué dit: Hélas, Seigneur mon Dieu! avez-Vous donc voulu faire passer à ce peuple le fleuve du Jourdain pour nous livrer entre les mains des Amorrhéens, et pour nous perdre? Il eût été à souhaiter que nous fussions demeurés au delà du Jourdain, comme nous avions commencé de le faire.
8 Que dirai-je? ô Dieu mon Seigneur, en voyant Israël prendre la fuite devant ses ennemis?
9 Les Chananéens et tous les habitants du pays l’entendront dirent; et, s’unissant ensemble, ils nous envelopperont et extermineront notre nom de dessus la terre; et alors que deviendra la gloire de Votre grand nom?
10 Le Seigneur dit à Josué: Levez-vous; pourquoi vous tenez-vous couché par terre?
11 Israël a péché, et il a traité que J’avais fait avec lui. Ils ont pris de ce qui était sous l’anathème; ils en ont dérobé, ils ont menti, et ils ont caché leur vol parmi les bagages.
12 Israël ne pourra plus tenir contre ses ennemis, et il fuira devant eux, parce qu’il s’est souillé de l’anathème. Je ne serai plus avec vous, jusqu’à ce que vous ayez exterminé celui qui est coupable de ce crime.
13 Levez-vous, sanctifiez le peuple, et dites-leur: Sanctifiez-vous pour demain; car voici ce que dit le Seigneur, le Dieu d’Israël: L’anathème est au milieu de vous, Israël. Vous ne pouvez soutenir l’effort de vos ennemis, jusqu’à ce que celui qui est souillé de ce crime ait été exterminé d’au milieu de vous.
14 Vous vous présenterez demain matin chacun dans votre tribu; et le sort étant tombé sur l’une des tribus, on passera de cette tribu aux familles qui la composent, des familles aux maisons, et de la maison à chaque particulier.
15 Et quiconque sera trouvé coupable de ce crime, sera brûlé avec tout ce qui lui appartient, parce qu’il a violé l’alliance du Seigneur, et qu’il a fait une chose détestable dans Israël.
16 Josué, se levant donc de grand matin, fit assembler Israël par tribus; et le sort tomba sur la tribu de Juda.
17 Lorsqu’elle se fut présentée avec toutes ses familles, le sort tomba sur la famille de Zaré. Cette famille s’étant présentée par maisons, le sort tomba sur la maison de Zabdi,
18 dont tous les membres s’étant présentés séparément, le sort tomba sur Achan, fils de Charmi, fils de Zabdi, fils de Zaré de la tribu de Juda.
19 Et Josué dit à Achan: Mon fils, rendez gloire au Seigneur, Dieu d’Israël. Confessez votre faute, et déclarez-moi ce que vous avez fait, sans en rien cacher.
20 Et Achan répondit à Josué: Il est vrai que j’ai péché contre le Seigneur, Dieu d’Israël; et voici tout ce que j’ai fait.
21 Ayant vu parmi les dépouilles un manteau d’écarlate qui était fort bon, et deux cents sicles d’argent, avec une règle d’or de cinquante sicles, je les convoitai, et, les ayant pris, je les cachai en terre au milieu de ma tente, et je cachai aussi l’argent dans une fosse que je fis.
22 Josué envoya donc des gens qui coururent à la tente d’Achan, et trouvèrent tout ce qui était caché, avec l’argent, à l’endroit qu’il avait indiqué.
23 Et, ayant tiré toutes ces choses hors de sa tente, ils les portèrent à Josué et à tous les enfants d’Israël, et les jetèrent devant le Seigneur.
24 Or Josué, et tout Israël qui était avec lui, ayant pris Achan, fils de Zaré, et l’argent, le manteau et la règle d’or, avec ses fils et ses filles, ses boeufs, ses ânes et ses brebis, et sa tente même et tout ce qui était à lui, les menèrent dans la vallée d’Achor,
25 où Josué lui dit: Parce que vous nous avez tous troublés, que le Seigneur vous trouble et vous extermine en ce jour-ci. Et tout Israël le lapida; et tout ce qui avait été à lui fut consumé par le feu.
26 Et ils amassèrent sur lui un grand monceau de pierres, qui est demeuré jusqu’à ce jour. Ainsi la fureur du Seigneur se détourna de dessus eux; et ce lieu fut appelé et s’appelle encore la vallée d’Achor.
Le sens fondamentaliste consiste à retenir qu'Achan a volé des biens devant revenir à Dieu, raison pour laquelle Celui-ci a puni Israël en accordant la victoire militaire à Aï. Sa colère est apaisée lorsque, sur Ses instructions précises, Achan est confondu et mis à mort, ainsi que ses enfants. Il s'ensuit, ce que l'on peut lire au chapitre suivant, la victoire d'Israël sur Aï.

A y regarder de plus près, nous pouvons cependant comprendre que Josué décide d'attaquer Aï en s'appuyant sur des rapports manifestement erronés quant aux forces en présence. Ainsi n'envoie-t-il qu'une armée de trois mille hommes, quant nous lisons au chapitre suivant qu'il en fallut dix fois plus, trente mille, pour venir à bout de cet adversaire. Ainsi, sans doute Achan a-t-il violé la loi divine en conservant par-devers lui une part du butin revenant à Dieu, mais il n'est nullement responsable de la défaite. Le responsable de la défaite, c'est Josué, qui a été imprudent en envoyant une armée trop faiblement dimensionnée pour espérer l'emporter. Le texte nous le suggère manifestement par l'écart entre la première armée envoyée, défaite, et la seconde, victorieuse.

Cette défaite a une incidence concrète : "Alors le cœur du peuple fut saisi de crainte, et devint comme de l’eau qui s’écoule". C'est que le texte, sans l'affirmer explicitement, laisse clairement entendre que ce fut un massacre et qu'aucun des hommes envoyés par Josué n'en réchappa. Le texte ajoute encore : "Que dirai-je ? ô Dieu mon Seigneur, en voyant Israël prendre la fuite devant ses ennemis ? Les Chananéens et tous les habitants du pays l’entendront dirent; et, s’unissant ensemble, ils nous envelopperont et extermineront notre nom de dessus la terre".

C'est là qu'il est question d'Achan, qui appartient à la tribu de Juda. Cette circonstance ne peut manquer d'intriguer puisque c'est de cette tribu que doit sortir le Messie, et c'est de cette tribu que sort effectivement Jésus. Et c'est bien Notre Seigneur cloué sur la Croix qui est la clef de compréhension de ce texte, qu'il convient de lire en gardant à l'esprit la parole de Caïphe : "il vaut mieux qu’un seul homme meure pour le peuple, et que l’ensemble de la nation ne périsse pas".

Et voici donc qu'Israël se déchaine sur Achan et qu'ainsi, "la fureur du Seigneur se détourna d'eux". La crainte est exorcisée, la confiance est revenue. Un innocent a été tué, non pas innocent sans doute d'avoir conservé une part du butin, mais innocent de la défaite qui a troublé Israël et l'a conduit à craindre pour sa survie.

Voilà le véritable sens littéral du texte, dans lequel Achan est une préfiguration de Jésus et sa lapidation une préfiguration du crucifiement.

Le terreau factuel est donc assez simple : Israël attaque Aï et se prend une branlée. Il cherche un coupable, le trouve en la personne d'Achan qui est sauvagement lynché par la foule. Ainsi ragaillardi, Israël repart à l'attaque et l'emporte. Une relecture de cet épisode dans un contexte archaïque considèrerait que la victime lynchée est à la fois responsable du désordre et responsable du retour à l'ordre, ce qui est le mécanisme de base du religieux archaïque. Or, ici, cela ne fonctionne pas dans la mesure où la responsabilité du désordre est explicitement imputée à Dieu, de même que le retour l'ordre ("le Seigneur S’irrita contre les enfants d’Israël" et "la fureur du Seigneur se détourna de dessus eux").

Il y a donc une distinction qui, dans le religieux archaïque, est une confusion. Cette distinction tend, de manière voilée, à mettre en évidence le mécanisme qui sera pleinement dévoilé par le Sacrifice de Notre Seigneur et explicité, à son corps défendant, par Caïphe.

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » jeu. 23 nov. 2023, 17:31

Olivier JC a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 12:59
Et vous n'avez pas vu que je réponds à votre objection :)
Voyons ça. :)

Olivier JC a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 12:59

Que la violence trouve son origine dans le péché des hommes, et non en Dieu, cela ressort de votre argument même : la justice vindicative ne se manifeste qu'en conséquence du péché. Pas de péché, pas de violence et pas de péché, pas de justice vindicative. Supposons, pour les besoins du raisonnement, que le péché originel n'eut pas été commis : il est évident qu'il n'y aurait jamais eu de guerres, de meurtres, de viols, etc. Il ne serait jamais venu à l'esprit des descendants d'Adam et Eve, en pareille hypothèse, de se massacrer les uns les autres.
Que la justice vindicative de Dieu ne trouve à s’exercer qu’en conséquence d’un péché commis ne contredit aucunement qu’elle a son origine en Dieu. Il ne devrait pas vous échapper que la justice vindicative de Dieu est Dieu agissant ad extra pour châtier le coupable. Il ne devrait donc pas vous échapper que l’agir divin ad extra est un agir formellement immanent quoique virtuellement transitif. Et en cette immanence, qui n’est autre que l’être de Dieu, l’origine même de l’effet virtuellement transitif, le châtiment. Et donc, pour répondre à votre argument, le pêché de l’homme n’est qu’une cause dispositive à l’exercice par Dieu de sa justice vindicative, laquelle, en tant qu’elle est un agir formellement immanent, est Dieu. C’est donc en Dieu même que se trouve l’origine du châtiment. Et cette origine ne relève pas seulement de la causalité efficiente, en tant que Dieu châtie, mais encore de la causalité formelle, en tant que l’acte divin formellement immanent est l’être et l’essence de Dieu. Et donc, pour finir de répondre à votre argument, la sainteté divine est cause formelle des peines vindicatives que Dieu prononce, de sorte que même si n’était aucun péché à châtier d’une peine vindicative, l’origine divine de la justice vindicative, savoir la sainteté de Dieu, serait intacte, puisqu’elle est son être.

;)


Olivier JC a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 12:59

La violence a une origine peccamineuse, cela ne signifie pas nécessairement que son usage soit toujours et en toutes circonstances peccamineux dès lors que la qualification de péché dépend in fine de la Volonté divine, à laquelle il est loisible de décréter qu'un acte donné, bien qu'en soi contraire à la loi naturelle, n'en est pas pour autant peccamineux dès lors que certaines conditions sont respectées (un exemple typique pouvant être la répudiation).
Nous sommes en désaccord quant à l’origine. L’origine de la violence vindicative de Dieu est Dieu, comme démontré ci-avant. Mais nous sommes d’accord quand à l’usage. Car si la raison atteste qu'il peut exister des objets de l'acte humain qui, ne pouvant aucunement être ordonnés à Dieu, sont intrinsèquement mauvais par leur objet, parce qu'ils sont en contradiction radicale avec la volonté divine (et non avec bien de la personne humaine, si vous voyez à quelle erreur je réfère ici…), elle atteste encore que la bonne moralité de l’objet de l’acte humain est toute entière dans la possibilité d'ordonner l’acte ainsi spécifié à Dieu. Et puisque Dieu ne peut jamais ordonner la commission d’un péché, puisque de sa nature même le péché est une transgression de la volonté divine, reste que l’exécution par l’homme de l’ordre vindicatif donné par Dieu est constitutif d’un acte moralement bon par son objet : non pas mauvais mais bon, puisque conforme à la volonté signifiée de Dieu.

Olivier JC a écrit :
jeu. 23 nov. 2023, 12:59

Enfin, je pense que soutenir, avec S. Thomas, que "le mal qui est une déficience de la nature, ou le mal de peine, Dieu le veut en voulant quelque bien auquel est lié un tel mal", n'est pas tout à fait équivalent à soutenir votre assertion première, à savoir que Dieu serait légitime à ordonner des massacres...
Vous avez en mon premier § la réponse à votre remarque.

:cyrano:

[+] Texte masqué

Je n’avais pas vu votre autre message.

Le sens fondamentaliste consiste…
Le sens littéraliste… Pour le réputer fondamentaliste, il faut d’abord montrer qu’il ne peut s’assimiler au sens littéral.

Voilà le véritable sens littéral du texte, dans lequel Achan est une préfiguration de Jésus et sa lapidation une préfiguration du crucifiement.
Certainement pas. Le sens que vous proposez ne peut d’aucune manière s’assimiler au sens littéral. Ce n’est possiblement que le sens spirituel, qui ici, de toute évidence, est distinct du sens littéral.

Le sens littéral est, a minima, que Dieu punit sévèrement les transgressions de l’anathème.

A y regarder de plus près, nous pouvons cependant comprendre que Josué décide d'attaquer Aï en s'appuyant sur des rapports manifestement erronés quant aux forces en présence. Ainsi n'envoie-t-il qu'une armée de trois mille hommes, quant nous lisons au chapitre suivant qu'il en fallut dix fois plus, trente mille, pour venir à bout de cet adversaire. Ainsi, sans doute Achan a-t-il violé la loi divine en conservant par-devers lui une part du butin revenant à Dieu, mais il n'est nullement responsable de la défaite. Le responsable de la défaite, c'est Josué, qui a été imprudent en envoyant une armée trop faiblement dimensionnée pour espérer l'emporter. Le texte nous le suggère manifestement par l'écart entre la première armée envoyée, défaite, et la seconde, victorieuse.
Ce n’est guère convaincant. Ou serait-ce que Dieu ne puisse donner la victoire à une troupe en faiblesse numêrique ?

Le terreau factuel est donc assez simple : Israël attaque Aï et se prend une branlée. Il cherche un coupable, le trouve en la personne d'Achan qui est sauvagement lynché par la foule. Ainsi ragaillardi, Israël repart à l'attaque et l'emporte. Une relecture de cet épisode dans un contexte archaïque considèrerait que la victime lynchée est à la fois responsable du désordre et responsable du retour à l'ordre, ce qui est le mécanisme de base du religieux archaïque. Or, ici, cela ne fonctionne pas dans la mesure où la responsabilité du désordre est explicitement imputée à Dieu, de même que le retour l'ordre ("le Seigneur S’irrita contre les enfants d’Israël" et "la fureur du Seigneur se détourna de dessus eux"). Il y a donc une distinction qui, dans le religieux archaïque, est une confusion. Cette distinction tend, de manière voilée, à mettre en évidence le mécanisme qui sera pleinement dévoilé par le Sacrifice de Notre Seigneur et explicité, à son corps défendant, par Caïphe.
Je ne considère pas que la doctrine girardienne soit conforme à la foi catholique, ni donc qu’elle puisse servir à l’intelligence de la règle de foi qu’est l’Écriture.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Gaudens » ven. 24 nov. 2023, 18:35

Voilà des semaines que je résistais à écrire – ou ré-écrire- ce que je pense de l’invasion des fils de ce forum plus ou moins dédiés à la théologie par un adepte de la scholiastique médiévale que je ne nommerai pas pour éviter un tour trop personnel à mon message d’aujourd’hui.
Dans le flot - ininterrompu ces dernières semaines- de ses contributions (où parfois on peut trouver des réflexions de qualité et acceptables par tous les catholiques), se devine constamment en creux le profil d’un dieu plus que rigide, colérique et vengeur, auteur ,justificateur et promoteur de la violence la plus mortifère.
Je prie le Ciel pour que ces longs propos indigestes , peut-être lus en entier par un très petit nombre de lecteurs de la Cité,ne tombent pas sous les yeux de personnes en recherche, tentées par les grâces que peut proposer l’Eglise. Ellefuiraient certainement à toute vitesse et repartiraient avec une vision effrayante de celle-ci et des catholiques. Pour ma part certains propos me scandalisent tellement qu’ils réveillent en moi des doutes enfouis sur la doctrine de l’Eglise .Et s’il disait vrai ? Pensée horrible que je m’efforce de chasser avec un résultat variable. Mais non, il ne dit pas vrai et surtout pas la pensée de l’Eglise telle que je crois la connaitre.
Pour donner deux ou trois exemples,je retiens les formulations suivantes :
« la bonne moralité de l’objet de l’acte humain est toute entière dans la possibilité d'ordonner l’acte ainsi spécifié à Dieu. … l’exécution par l’homme de l’ordre vindicatif donné par Dieu est constitutif d’un acte moralement bon par son objet : non pas mauvais mais bon, puisque conforme à la volonté signifiée de Dieu ».
Traduction concrète :puisque Dieu m’ordonne de mettre à mort les hérétiques « tuons les tous,Il reconnaitra les siens ! ».Effarant : avec ce genre de raisonnement vicié et vicieux ,n’importe quel clerc ,scholiaste ou qui on voudra qui se croit investi de la volonté divine se trouvera béni dans sa volonté » de meurtre, collectif éventuellement.Le Hamas ou Daesh ne diraient pas mieux .

Ce genre de propos tient sa source dans une lecture fixiste et acrobatique de documents conciliaires ( car on ne veut pas avoir l’air de tomber dans un refus hérétique des décisions d’un Concile Oecuménique,infaillible dans ses principales décisions) au prix de contorsions inimaginables sauf aux scoliastes,êtres très imaginatifs autant que rébarbatifs. Cela serait presque drôle si le propos n’était pas de détruire,non seulement la doctrine théologique du dernier Concile mais aussi les apports tant théologiques que pastoraux des deux derniers papes, Saint Jean-Paul II et Benoit XVI, de vénérée mémoire . Je cite encore :
« Ce n’est que depuis peu que l’Église a répudié sa doctrine, brûlant ce qu’elle adorait pour adorer ce qu’elle brûlait. Le point de bascule fut la déclaration conciliaire Dignitatis Humanæ, certes susceptible d’être lue en une herméneutique de stricte continuité à la doctrine des siècles passés, mais lue par le magistère post-conciliaire en une herméneutique de réforme dans la continuité, qui n’est jamais qu’une herméneutique de rupture plus modérée que l’extrémiste, wojtyliens et ratzinguériens n’étant que des progressistes (façon Communio) faussement colloqués comme conservateurs par comparaison à plus progressistes qu’eux (façon Concilium)».
Le pire est que ces affirmations sont justifiées par une supposée impassibilité de Dieu,qui ne serait que volonté pure. Qui connait pourtant l’intime de Dieu pour affirmer cela (voir Romains,XI,34) ? Les scholiastes sans doute et eux seuls ...Un Dieu qui nous a révélé être Amour pur,en particulier pour ses créatures, amour poussé jusqu’à souffrir la Passion (justement !) n’est certainement pas impassible, quelles que soient les affirmations de scolastiques en ce sens.

Là-dessus me vient heureusement à l’esprit une réflexion du cardinal Sarah, présentant un ouvrage théologique à Rome ces jours derniers
« Les évêques et les prêtres « semblent se contredire » et imposer leurs opinions personnelles « comme s’il s’agissait d’une certitude », et il en résulte, « confusion, ambiguïté, apostasie. Une grande désorientation, un profond désarroi et des incertitudes dévastatrices ont été inoculés dans l’âme de nombreux croyants chrétiens ».
Tout est dit .
Et Pour en finir, d’une manière portant davantage à l’espérance,je confie à la réflexion de tous une autre pensée , émanant d’un théologien espagnol,prix Ratzinger de Théologie 2023 :
« L’autre (apport particulier de Benoit XVI à la théologie contemporaine) est sa volonté de dialoguer avec la pensée séculière. Cela a déjà commencé avec Jürgen Habermas en 2004 et s’est poursuivi avec la formule de la Cour des Gentils. Il s’est rendu dans un environnement hostile comme La Sapienza [il VOULAIT s’y rendre, et avait répondu à une invitation, mais il en a été empêché par des intellectuels sectaires et bornés] et, même en tant que pape émérite, il a débattu avec Odifreddi ou Marcello Pera. Il a toujours eu cette volonté de chercher les graines de la vérité dans l’option lointaine et d’identifier les différences et les lieux d’intersection. Il me semble que cela est plus nécessaire que jamais. Nous avons tendance à polariser, à penser de manière dichotomique, binaire et manichéenne ».
‘Pablo Blanco(Saragosse,1964)

On n'est plus là dans le monde fermé de la scholiastique mais dans l’esprit vivifiant de l’Evangile.

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » ven. 24 nov. 2023, 20:01

Le pire est que ces affirmations sont justifiées par une supposée impassibilité de Dieu
:-D
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Ombiace » ven. 24 nov. 2023, 23:43

Perlum Pimpum a écrit :
mer. 22 nov. 2023, 14:57
le fondement de cette justice, c’est l’amour, l’amour de Dieu pour Dieu.
Bonjour Perlum Pimpum,

Pourriez vous m'indiquer, car je ne le sais pas, (ou ne le comprends pas), comment, du point de vue de la justice, l'amour de Dieu pour Dieu est moral et bien considéré, quand l'amour de la créature pour elle-même le semble moins, que l'on pourrait probablement taxer d'égoïsme nombriliste ? Question de lien trinitaire, peut-être ?

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » sam. 25 nov. 2023, 2:26

Bonsoir Ombiace,

L’amour de Dieu pour Dieu est fondé sur l’amabilité divine, elle même fondée sur l’infinie perfection de Dieu, autrement dit la bonté divine au sens entitatif du mot. Dieu est infiniment aimable parce qu’il est infiniment beau, parfait, sublime… Aussi Dieu ne serait-il pas Dieu s’il ne s’aimait pas infiniment, à proportion de son amabilité infinie.

Cet amour infini de Dieu pour Dieu étant pleinement proportionné à l’amabilité divine, cet amour n’est aucunement déréglé, ni donc pathologique ou peccamineux. Mieux, pour ceux des théologiens qui assimilent en l’homme la charité et la grâce sanctifiante, la charité étant essentiellement un amour pour Dieu, la transposition logique est que la sainteté divine est conceptuellement identique à l’amour de Dieu pour Dieu.

Et parce que Dieu seul est infiniment aimable, le péché de l’homme est de préférer à Dieu toute autre chose que Dieu. D’où donc le premier commandement, celui d’aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force. Le péché de l’homme n’est pas d’aimer les créatures, mais de les aimer de manière déréglée, en les préférant à Dieu infiniment aimable.

La mesure d’aimer Dieu est de l’aimer sans mesure.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » sam. 25 nov. 2023, 2:29

[+] Texte masqué
Voilà des semaines que je résistais à écrire – ou ré-écrire- ce que je pense de l’invasion des fils de ce forum plus ou moins dédiés à la théologie par un adepte de la scholiastique médiévale que je ne nommerai pas pour éviter un tour trop personnel à mon message d’aujourd’hui.
Voici un préambule bien étrange. De qui voulez-vous parlez ? :-D

Pour ma part certains propos me scandalisent tellement qu’ils réveillent en moi des doutes enfouis sur la doctrine de l’Eglise .Et s’il disait vrai ? Pensée horrible que je m’efforce de chasser avec un résultat variable.
Quel effroi ! Il serait en effet scandaleux que le Dieu de la foi catholique ne soit pas tel que vous le pensez.

Effarant : avec ce genre de raisonnement vicié et vicieux ,n’importe quel clerc ,scholiaste ou qui on voudra qui se croit investi de la volonté divine se trouvera béni dans sa volonté » de meurtre, collectif éventuellement.Le Hamas ou Daesh ne diraient pas mieux .
À défaut que vous argumentiez, sérieusement si possible, la seule preuve que le raisonnement soit vicié, c’est qu’il est vicié, puisqu’il contredit votre opinion. Et souscrire au raisonnement que vous abominez n’implique pas d’approuver la conclusion délirante que vous en tirez. Car voyez-vous, ce ne sont pas les théologiens qui instituèrent l’inquisition et décrétèrent les croisades, mais les papes, dotés de la juridiction idoine.

Ce genre de propos tient sa source dans une lecture fixiste et acrobatique de documents conciliaires ( car on ne veut pas avoir l’air de tomber dans un refus hérétique des décisions d’un Concile Oecuménique,infaillible dans ses principales décisions) au prix de contorsions inimaginables
D’une, les « contorsions » sont celles de l’herméneutique de stricte continuité ; libre à chacun d’y préférer une herméneutique de rupture suffisamment honteuse d’elle-même pour se prétendre dans la continuité.

De deux, quelles seraient les principales décisions infaillibles du concile de Vatican II ? Vous ignorez manifestement qu’en les conciles œcuméniques seuls les anathèmes doctrinaux et les définitions solennelles engagent l’infaillibilité. Il y a encore un cas limite, puisque si le magistère ordinaire et universel des évêques dispersés peut s’exercer de manière synchronique, il importe peu qu’il s’exerce de manière ordinaire ou extraordinaire, mais si extraordinaire, à la triple condition que tous les évêques soient présents au concile, qu’ils soient unanimes dans leur vote, et qu’ils précisent vouloir engager l’infaillibilité. Bref, en un mot comme en cent, la particularité du concile œcuménique de Vatican II est qu’en aucun de ses documents l’infaillibilité a été engagée.

Cela serait presque drôle si le propos n’était pas de détruire,non seulement la doctrine théologique du dernier Concile mais aussi les apports tant théologiques que pastoraux des deux derniers papes, Saint Jean-Paul II et Benoit XVI
Dit celui qui n’a de cesse de s’opposer aux apports tant théologiques que pastoraux du saint-père François… :rire:

Le pire est que ces affirmations sont justifiées par une supposée impassibilité de Dieu... Un Dieu qui nous a révélé être Amour pur,en particulier pour ses créatures, amour poussé jusqu’à souffrir la Passion (justement !) n’est certainement pas impassible
J’en ris encore. L’impassibilité divine est l’autre nom de l’immutabité divine, fondée sur la simplicité divine. Nier l’impassibilité de Dieu, c’est nier sa simplicité, et ainsi son éternité ainsi que sa divinité. La chose vous échappe. Tout scolastique pourrait vous l’expliquer… Mais puisque vous êtes réfractaire à l’argument de raison, celui d’autorité :
« Ainsi donc, étant maintenues sauves les propriétés de l'une et l'autre nature réunies dans une seule personne, l'humilité a été assumée par la majesté, la faiblesse par la force, la mortalité par l'éternité, et, pour acquitter la dette de notre condition, la nature inviolable s'est unie à la nature passible, en telle sorte que, comme il convenait à notre guérison, un seul et même " médiateur de Dieu et des hommes, l'homme Christ Jésus. 1Tm 2,5, fût tout à la fois capable de mourir d'une part, et de l'autre incapable de mourir. C'est donc dans la nature intacte d'un homme vrai que le vrai Dieu est né, complet dans ce qui lui est propre, complet dans ce qui nous est propre. Par " ce qui nous est propre ", nous voulons dire la condition dans laquelle le créateur nous a établis au commencement et qu'il a assumée pour la restaurer ; car de ce que le trompeur a apporté et que l'homme trompé a accepté, il n'y a nulle trace dans le Sauveur...Il a assumé la forme du serviteur sans la souillure du péché, enrichissant l'humain sans diminuer le divin, parce que cet anéantissement par lequel l'invisible s'est rendu visible, été inclination de sa miséricorde, non déficience de sa puissance.

« Voici donc que le Fils de Dieu entre dans ces lieux les plus bas du monde, descendant du trône céleste sans pourtant quitter la gloire de son Père, engendré dans un nouvel ordre, par une nouvelle naissance. Un nouvel ordre parce que invisible en ce qui est sien, il a été rendu visible en ce qui est nôtre ; infini il a voulu être contenu ; subsistant avant tous les temps, il a commencé d'exister dans le temps ; Seigneur de l'univers, il a voilé d'ombre l'immensité de sa majesté, il a pris la forme de serviteur ; Dieu impassible, il n'a pas dédaigné d'être homme passible, immortel, de se soumettre aux lois de la mort. Engendré par une naissance nouvelle, parce que la virginité inviolée, sans connaître la concupiscence, a fourni la matière de la chair. De la mère du Seigneur fut assumée la nature, non la faute, et dans le Seigneur Jésus Christ engendré du sein d'une vierge, la merveilleuse naissance ne fait pas que sa nature soit différente de la nôtre. Car celui qui est vrai Dieu est, le même, vrai homme. Dans cette unité il n'y a pas de mensonge, dès lors que l'humilité de l'homme et l'élévation de la divinité s'enveloppent l'une l'autre. Car de même que Dieu n'est pas changé par la miséricorde, de même l'homme n'est pas absorbé par la dignité. Car chacune des deux formes accomplit sa tâche propre dans la communion avec l'autre, le Verbe opérant ce qui est du Verbe, la chair effectuant ce qui est de la chair. Un des deux resplendit de miracles, l'autre succombe aux outrages. Et de même que le Verbe ne cesse pas d'être en égalité de gloire avec le Père, de même la chair ne se dérobe pas à la nature de notre race. »

Léon I, Lettre Lectis dilectionis tuæ, chapitres 3 et 4.
:siffle:
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Ombiace » sam. 25 nov. 2023, 5:19

Perlum Pimpum a écrit :
sam. 25 nov. 2023, 2:26
Bonsoir Ombiace,

Cet amour infini de Dieu pour Dieu étant pleinement proportionné à l’amabilité divine, cet amour n’est aucunement déréglé, ni donc pathologique ou peccamineux. Mieux, pour ceux des théologiens qui assimilent en l’homme la charité et la grâce sanctifiante, la charité étant essentiellement un amour pour Dieu, la transposition logique est que la sainteté divine est conceptuellement identique à l’amour de Dieu pour Dieu.
Bonjour Perlum Pimpum,
Je me doutais un peu de cela, sans avoir les mots pour le dire. Merci..

Cependant, je m'interroge encore :
Ombiace a écrit :
ven. 24 nov. 2023, 23:43
l'amour de la créature pour elle-même (le) semble moins (moral), que l'on pourrait probablement taxer d'égoïsme nombriliste
Comment l'amour de Dieu pour Dieu, lui, (cet amour), échappe t il à ce "classement" péjoratif ?
Qu'en diriez vous, svp ?

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » sam. 25 nov. 2023, 9:20

Bonjour Ombiace,

C’est le dérèglement de l’amour qui est malsain, pas l’amour-même. Le dérèglement est dans l’inadéquation de l’acte à son objet.

Ainsi, il est normal qu’un père aime son fils, mais anormal qu’il préfère son fils à Dieu (cf. Mt. X, 37). De même, il est normal de s’aimer soi-même = d’aimer en soi les biens reçus de Dieu (cf. I Cor. IV, 7), mais anormal de préférer ces biens à Celui qui les dispense. L’amabilité de Dieu outrepassant infiniment la nôtre, s’aimer jusqu’à se préférer à Dieu est s’aimer d’un amour profondément déréglé, et ainsi profondément malsain. L’amabilité de Dieu étant infinie, n’est aucun dérèglement à ce que Dieu s’aime infiniment ; tout au contraire : l’amour infini de Dieu pour Dieu est une exigence de sa nature divine. Dieu ne serait pas Dieu s’il ne s’aimait à l’infini.

Il est naturel de s’aimer soi-même. La coloration péjorative du terme nombriliste induit la réponse à votre question. Le nombrilisme n’est pas de s’aimer soi-même mais de s’aimer d’un amour déréglé. Quant à l’égocentrisme, et à prendre le mot en bonne part, il est naturel à tout être ayant conscience de soi : vous êtes vous-même, vos actes sont vos actes, vos choix engagent votre existence : vous, vous, vous. La connotation péjorative du terme n’est qu’en le dérèglement de la conscience de soi, quand on s’attribue une valeur supérieure à la sienne propre,. Vous n’êtes pas le centre du monde, Dieu si. Dieu est légitime à se penser supérieur à tout, parce qu’il l’est ; légitime à tout référer à Lui-même, rien de distinct à Dieu pouvant être si Dieu ne le veut ou le permette. Dieu n’est-il pas créateur, conservateur, concourant, provident, fin dernière absolue de tout ce qui est ? Il l’est. À Lui la gloire.

:adoration:
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Ombiace » sam. 25 nov. 2023, 10:11

Perlum Pimpum a écrit :
sam. 25 nov. 2023, 9:20
C’est le dérèglement de l’amour qui est malsain, pas l’amour-même. Le dérèglement est dans l’inadéquation de l’acte à son objet.

Ainsi, il est normal qu’un père aime son fils, mais anormal qu’il préfère son fils à Dieu (cf. Mt. X, 37). De même, il est normal de s’aimer soi-même = d’aimer en soi les biens reçus de Dieu (cf. I Cor. IV, 7), mais anormal de préférer ces biens à Celui qui les dispense. L’amabilité de Dieu outrepassant infiniment la nôtre, s’aimer jusqu’à se préférer à Dieu est s’aimer d’un amour profondément déréglé, et ainsi profondément malsain. L’amabilité de Dieu étant infinie, n’est aucun dérèglement à ce que Dieu s’aime infiniment ; tout au contraire : l’amour infini de Dieu pour Dieu est une exigence de sa nature divine. Dieu ne serait pas Dieu s’il ne s’aimait à l’infini.

Il est naturel de s’aimer soi-même. La coloration péjorative du terme nombriliste induit la réponse à votre question. Le nombrilisme n’est pas de s’aimer soi-même mais de s’aimer d’un amour déréglé. Quant à l’égocentrisme, et à prendre le mot en bonne part, il est naturel à tout être ayant conscience de soi : vous êtes vous-même, vos actes sont vos actes, vos choix engagent votre existence : vous, vous, vous. La connotation péjorative du terme n’est qu’en le dérèglement de la conscience de soi, quand on s’attribue une valeur supérieure à la sienne propre,. Vous n’êtes pas le centre du monde, Dieu si.
Je suis d'accord avec cela
Perlum Pimpum a écrit :
sam. 25 nov. 2023, 9:20
Dieu est légitime à se penser supérieur à tout, parce qu’il l’est ; légitime à tout référer à Lui-même, rien de distinct à Dieu pouvant être si Dieu ne le veut ou le permette. Dieu n’est-il pas créateur, conservateur, concourant, provident, fin dernière absolue de tout ce qui est ? Il l’est. À Lui la gloire.
Je suis d'accord aussi, mais cela me pose encore question : Ne pourrait-on insensiblement s'autoriser à penser que la créature fait preuve d'une forme d'abnégation à laquelle Dieu ne participe en rien ? Je veux dire : Cette abnégation qui lui fait renoncer à ce statut (enviable?) de "centre du monde".

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Re: L’interprétation de certains passages bibliques

Message non lu par Perlum Pimpum » sam. 25 nov. 2023, 10:29

Ici encore, c’est affaire de définition. Si par « abnégation » vous entendez le sacrifice d’un bien que vous êtes en droit de posséder, n’est aucune abnégation à renoncer à l’orgueil pour choisir d’être humble. Si par contre vous entendez le mot au sens d’un dépouillement du péché (cf. Eph. IV, 21-22), il y a abnégation.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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