L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

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Xavi
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L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » mer. 24 août 2011, 10:21

Dans un sujet plus particulier (L’humain créé avant les animaux ? / cf. viewtopic.php?f=91&t=18535 ), la question générale de l’ordre chronologique de la création est reposée et, pour ne pas se lancer dans un hors sujet, il me semble préférable d’ouvrir un nouveau fil de discussion.
Pneumatis a écrit : je reste toujours un peu à distance (légère, mais quand même) de votre lecture de la Bible, surtout quand vous dites :
Xavi a écrit:
Le premier récit nous raconte en six grands tableaux les étapes successives d’achèvement des principales réalités historiques avec au sommet la création de l’humain, mâle et femelle, qui apparaît au bout du récit.

Il me semble, encore une fois, que les étapes de la création ne traitent pas de réalités historiques, dont l'une seraient l'Homme, mais traitent des principes de création de l'Homme, création qui est achevée au sixième jour.

Pour le côté "historique", voyez par exemple ce commentaire très intéressant de Rachi (Rabbi Shlomo ben Itzhak HaTzarfati)
Les étapes ou l’ordre successif des six jours du récit de la création sont-ils historiques sur le plan chronologique ?

Je connais tout le sérieux de l’approche des réalités historiques dans la Bible par Pneumatis et la question ne concerne ici que l’ordre de la succession des six jours de la Genèse par rapport à l’ordre chronologique réel de l’histoire et non la réalité historique de la création des divers éléments du monde et, en particulier, des humains.

Il faut admettre que la numérotation de 1 à 6 des jours de la création ne peut être abordée qu’avec beaucoup de prudence par rapport à une compréhension chronologique qui n’est qu’une approche parmi d’autres.

On peut penser, par exemple, à une approche graduelle en importance ou à une autre approche symbolique.

Et, même dans une approche chronologique, le point de vue peut se référer à des critères qui nous échappent par rapport à la chronologie historique. C’est ce qui a déjà été relevé dans le sujet précité lorsque la création de l’homme est évoquée avant celle des animaux.

La Parole de Dieu a été donnée pour toutes les générations aux connaissances scientifiques fort différentes.

Il est fort risqué d’y chercher un détail scientifique, mais il est téméraire d’affirmer sans réserve ou absolument une contradiction avec la vérité scientifique ou historique.

Il ne faut jamais oublier, lorsque nous rapprochons la science et la foi en présence d’un texte biblique, qu’un tel texte nous donne toujours une révélation non seulement sur la réalité terrestre mais aussi sur la réalité spirituelle. Un certain flou, comme à travers un voile, protège le lecteur d’une lecture trop terrestre par la seule intelligence cérébrale, séparée de sa nécessaire lecture spirituelle éclairée par l’Esprit Saint.

Le meilleur modèle pour comprendre cette double lecture simultanée requise par un texte biblique, qui doit englober tant la réalité incarnée la plus concrète que la réalité spirituelle qui ne peut être connue que par l’esprit, c’est probablement les textes sur la résurrection et les apparitions du Christ ressuscité.

Leur réalité historique est solidement attestée mais d’une manière qui échappe à nos tentatives de reconstruction matérielle d’un point de vue exclusivement terrestre. Il n’est pas là, puis il est là. Il mange. Il disparaît. Etc…

Cela me fait penser aux pixels de nos appareils photos numériques. Les récits historiques de l’Ecriture, y compris les récits du début de la Genèse, ne nous donnent-ils pas des perspectives comparables à des photographies de la réalité historique qui seraient en « 100 pixels » pour la Genèse ou en « 10.000 pixels » pour les Evangiles, et dont nous essayons souvent d’agrandir l’image pour qu’elle nous permette de voir les détails d’une photo en 3 ou 10 millions de pixels ?

Mais, comme sur nos écrans ou pour les vues par satellite sur Google Map, quand nous agrandissons l’image au delà des limites de ses précisions, nous cessons de voir de manière correcte.

Tout ce qui nous est possible, c’est la démarche inverse : nous disposons de photographies en « dix millions de pixels » qui nous sont fournies par les connaissances précises actuelles et nous pouvons essayer de comprendre la concordance des photos en « cent pixels » du texte de la Genèse.

Prenons garde aux dangers de la démarche inverse.

Si nous essayons de mettre dans le texte la précision que nous percevons aujourd’hui dans les photos de « dix millions de pixels » de la science, nous risquons beaucoup de démentis ou de contradictions lorsque nous aurons des photos de « cent millions de pixels ». Un concordisme de ce type peut apparaître à cet égard comme une vaine tentative d’enfermer le texte biblique dans des interprétations particulières.

Le nombre peu élevé de « pixels » des images et récits de la Bible nous protège de lectures trop uniquement terrestres qui ne donnent pas de place suffisante à la compréhension par le cœur et des inexactitudes que nous pouvons facilement y lire par nos interprétations, mais cela ne doit pas nous tromper cependant sur la vérité historique présente dans la Bible.

Les contradictions sont souvent dans nos lectures. Pas dans la parole de Dieu elle-même. Elle rejoint l’homme dans toute sa réalité, tant terrestre que spirituelle. Elle le rejoint aussi dans sa réalité historique et scientifique, mais toujours en le rejoignant aussi et pleinement dans sa réalité spirituelle. Un défi permanent pour l’intelligence de la foi.

Aussi, de manière générale, penser que les récits du début de la Genèse ne parlent « absolument pas » de l’histoire réelle ou de la réalité scientifique, c’est limiter sa portée et sa valeur de révélation pour « toute » notre réalité humaine qui n’est pas que spirituelle, mais qui est aussi bien concrète, terrestre et matérielle.

Les multiples nuances et la compréhension de la réalité historique que nous révèle la Genèse sont susceptibles de beaucoup d’erreurs, mais ces erreurs sont seulement à corriger. Elles ne peuvent justifier le rejet de la Genèse en dehors de la réalité historique.

Il faut, par contre, veiller attentivement à ce que toute interprétation de la Genèse, comme celle des autres textes de l’Ecriture, ne s’aventure pas en dehors des principes d’interprétation de l’Eglise donnés à de multiples reprises par le Magistère, ni en dehors de l’enseignement de l’Eglise.

C’est sur ces bases qu’il convient de réfléchir à la question particulière de l’historicité chronologique de l’ordre successif des six jours de la Genèse.

Le sujet de l’ordre chronologique de la création a déjà été abordé à plusieurs reprises dans le forum et spécialement dans deux sujets qui se trouvent l’un, dans le sous-forum de l’Ecriture Sainte : « Interprétation de la Genèse » :

viewtopic.php?f=91&t=3751

et l’autre, dans le sous-forum des Savoirs – Sciences et techno : « La Bible et l’Univers » :

viewtopic.php?f=27&t=11186

Comment raisonne le rabbi Schlomo cité par Pneumatis ?

Je me permets d’écarter d’emblée son affirmation selon laquelle « Le monde a été créé pour la Tora ». Nous pensons bien sûr que la loi est faite pour l’homme et non l’inverse. Nous croyons que l’humain est le but de la création.
Rabbi Schlomo a écrit : Au commencement, Eloqim créa : Ce texte demande, en fait, à être explicité. C’est comme nos maîtres l’ont expliqué : … Israël (…) est appelé « le “commencement” de Sa moisson » (Yirmeya 2, 3). Mais si tu veux l’expliquer selon le sens littéral, fais-le ainsi : Au commencement de la création des cieux et de la terre, alors que la terre était tohou et vohou et que les ténèbres..., Eloqim a dit : « que la lumière soit ! » Ce texte ne vient pas nous donner l’ordre de la création, nous dire que ces éléments ont été créés en premier. Si tel était le cas, le texte aurait dû porter barichona (« en premier lieu »), car on ne rencontre jamais le mot réchith dans la Bible sans qu’il soit lié au mot suivant. Exemples : « Au commencement (beréchith) du règne de Yehoyaqim » (Yirmeya 26, 1), « le commencement (réchith) de son royaume » (infra 10, 10), « les prémices (réchith) de ton blé » (Devarim 18, 4). Ici, de même, tu dois expliquer : « Au commencement, Eloqim créa... », comme s’il était écrit : beréchith bero, « au commencement de l’acte de la création », à rapprocher de : « au commencement (te‘hilath) où Hachem parla à Hoché‘a » (Hoché‘a 1, 2), c’est-à-dire : « au commencement de la parole adressée par le Saint béni-Soit-Il à Hoché‘a, Hachem dit à Hoché‘a. ». Peut-être persisteras-tu à soutenir que ce qu’on nous apprend ici, c’est qu’ils [à savoir le ciel et la terre] ont été créés en premier, et que le texte veut dire : « au commencement de tout, Eloqim créa le ciel et la terre », car il arrive que certains textes bibliques, dans leur concision, omettent un mot, comme dans : « pour n’avoir pas tenu closes les portes du sein qui m’avait conçu » (Iyov 3, 10) où l’on ne précise pas qui les a fermées. « On emportera les richesses de Damas » (Yecha’ya 8, 4), où l’on ne dit pas qui les emportera. « Le laboure-t-on avec des bœufs ? » (‘Amos 6, 12), sans que l’on précise si c’est un homme qui laboure avec des bœufs. « Dès le début, j’annonce la fin » (Yecha’ya 46, 10), où l’on ne dit pas : « j’annonce dès le début des choses la fin des choses ».
Tout à fait d’accord sur la réflexion du rabbin concernant le mot « commencement ». Le « commencement » est un mot qui n’est pas un synonyme d’un « début » chronologique, historique. La « lumière » du premier jour n’est évidemment pas celle du soleil qui n’existe pas encore.

Mais, rien ne peut en être déduit nécessairement en ce qui concerne la chronologie ou l’absence de chronologie des faits relatés au début de la Genèse.

La réalité historique elle-même ne peut pas être étudiée en oubliant que le temps et l’espace de sa chronologie sont des instruments de mesure de notre cerveau terrestre. Impossible de parler en vérité de la création de Dieu en enfermant d’emblée l’histoire dans le cadre d’une approche humaine dans le temps.

Tout ne commence pas avec un début dans le temps mesuré par notre cerveau. Les instruments de mesure du temps et de l’espace qui nous sont donnés par Dieu portent en eux-mêmes une perspective éternelle et infinie qui empêche de saisir un « début » dans l’histoire. Notre cerveau, celui de tout scientifique et de tout historien, ne peut ni mettre une limite au temps ou l’espace, ni concevoir un début ou une fin : s’il conçoit un début, qu’y a-t-il juste avant ? s’il conçoit une fin, qu’y a-t-il juste après ?

Notre compréhension intellectuelle de la réalité historique du passé s’épuisera toujours inévitablement, en essayant de remonter le plus loin possible dans le temps, dans un tohu bohu inaccessible à notre seul cerveau qui ne peut dépasser clairement les mesures du temps et de l’espace.

En ce qui concerne le commencement, la citation du rabbin Schlomo ne concerne pas seulement la réalité historique et ce que les six jours de la création nous en disent, mais la création « du ciel et de la terre », ce qui vise ici le monde spirituel, y compris les anges, et le monde matériel (pas seulement notre planète terre, mais toute la réalité matérielle de l’univers).

Comme dans toute l’Ecriture Sainte, il y a ici une double réalité (spirituelle et matérielle) qui échappe à notre seul cerveau qui perçoit tout dans le temps et l’espace, selon ses instruments de mesure et de perception de la réalité.

N’est-il pas normal, dans ces conditions, d’utiliser un mot particulier pour essayer de nous révéler le « commencement » ou l’origine de la réalité de la création tant spirituelle que matérielle d’une manière qui transcende la seule approche de notre cerveau terrestre, la notion réductrice d’un « début » qui ne correspond pas vraiment à la vérité sur le passé ?

N’est-il pas inévitable de constater que la notion de chronologie est déjà un point de vue uniquement terrestre qui doit être transcendé pour exprimer ce « commencement » en vérité ?

C’est bien plus qu’un simple début chronologique, qu’un moment saisi par notre cerveau terrestre. Le ciel, la réalité spirituelle, échappe à une compréhension par notre seul cerveau, à la mesure du temps qu’il utilise.

Il me semble qu’il n’y a pas de désaccord sur ce point.

Pour la suite, par contre, le rabbin raisonne de manière non convaincante.
Rabbi Schlomo a écrit : tu devrais être toi-même étonné, car les eaux ont précédé la terre, puisqu’il est écrit : « et le souffle de Eloqim planait sur la face des eaux » (verset 2), alors que le texte ne nous a pas encore révélé quand les eaux ont été créées. Il faut donc en conclure que les eaux ont existé avant la terre. En outre, les cieux (chamayim) ont été formés à partir du feu (éch) et de l’eau (mayim) ('Haguiga 12a). Force est donc d’admettre que le texte ne nous enseigne absolument pas l’ordre chronologique de la création (Beréchith raba 1, 6, Wayiqra raba 36,4).
Ce mode de raisonnement est souvent utilisé pour écarter l’historicité de nombreux récits bibliques. Il prend une interprétation littérale « au pied de la lettre », il constate une contradiction avec nos connaissances, et, au lieu de corriger l’interprétation, il en déduit une conclusion générale : le texte est étranger aux réalités historiques !

Le raisonnement ne manifeste-t-il pas d’emblée sa faiblesse par le mot excessif de « absolument ». Qui peut prétendre exclure « absolument » la portée de la vérité de la révélation par la Parole de Dieu ?

En fait, il faut constater que le raisonnement du rabbin se base entièrement sur une interprétation stricte et univoque des mots « eaux », « terre », et « cieux » que rien n’impose et tire des conclusions que rien n’impose davantage.

Il observe avec exactitude que le texte biblique ne révèle pas « quand les eaux ont été créées », mais il n’explique, ni ne justifie en rien pourquoi il soutient devoir en « conclure » « que les eaux ont existé avant la terre », ni en quoi cela présenterait une contradiction incompatible avec une chronologie historique parce que les eaux ne pourraient exister avant la création de la terre. Comment le souffle de Dieu peut-il planer sur les « eaux » alors que les eaux ne sont pas encore créées ? Comment séparer les eaux des eaux ?

Le rabbin Schlomo ne semble pas prendre en compte ici les divers sens des mots quand il évoque les « eaux » et la « terre ».

Nulle part, il n’est dit que les « eaux » sont créées « après » la « terre ».

Attention ! Dans le commencement de la création du premier verset de la Genèse, quand Dieu crée « le ciel et la terre », le mot terre vise toute la réalité matérielle y compris l’eau ainsi que toute l’étendue de l’univers créé et non notre seule planète.

Dès le second verset et jusqu’à la fin du troisième jour, les eaux se distinguent de l’étendue du ciel et de la terre. Ici, le mot terre vise le solide, le sec, comme le texte le dit expressément. Ce n’est pas non plus exclusivement notre planète. Le mot ciel paraît viser désormais tout l’univers de la création matérielle et non plus la réalité spirituelle.

L’exactitude scientifique de ce qui est relaté est assez étonnante.

On peut imaginer de l’eau en forme gazeuse dès avant le big bang et avant la formation de la terre matérielle, voire de toutes les planètes, de tous les éléments solides de l’univers.

Les constituants chimiques qui forment l’eau (qui n’est qu’un composé d’hydrogène et d’oxygène) sont bien plus élémentaires que la richesse complexe de la terre et de la plupart de ses composants.

De manière moins précise que le sens moderne, le mot « eaux » peut viser des réalités plus étendues que l’eau de nos rivières ou des mers. Rien n’impose de donner au mot « eaux » le sens restrictif du même mot dans le sens actuel.

La science ne conteste pas que des eaux ou d’autres composés simples ont pu précéder dans un état gazeux la création des éléments solides de l’univers, ni que des masses gazeuses ont pu se séparer avant que du solide n’apparaisse en plusieurs d’entre elles pour former des planètes ou d’autres éléments solides dans l’univers.

Il faut relever aussi les incertitudes du mot « cieux » dans le raisonnement du rabbin Schlomo. C’est déjà par une interprétation incertaine du début de la Genèse que le rabbin Schlomo affirme que les cieux sont formés à partir du feu et de l’eau. Mais, la réflexion du rabbin mélange surtout des sens différents du mot « cieux ». Il ne faut pas confondre ce mot, tel qu’il est utilisé par le Christ lorsqu’il nous dit « Le royaume des cieux est parmi vous » ou qu’il nous invite à prier notre Père « qui est aux cieux », ce qui vise la réalité spirituelle (au commencement, Dieu créa les cieux et la terre), avec le même mot lorsqu’il est utilisé pour désigner les nuages dans le « ciel » ou l’espace immense de l’univers avec les galaxies, les étoiles, les planètes (le second jour, Dieu créa du sec, du solide appelé « terre » et appela l’étendue « ciel »).

Il faut éviter des interprétations littérales dans un sens contredit par le texte lui-même. Les mots « lumière » et « nuit », comme les mots « eaux », « ciel » et « terre » ne peuvent se référer, dans l’ordre chronologique contesté, à la lumière qui nous vient du soleil avant sa création ou à l’eau qui provient des nuages et qui coule dans ses rivières de la planète terre avant sa création.

Ce qui me semble devoir être compris et corrigé ici c’est le sens des mots utilisés et non nécessairement l’ordre chronologique. Les premiers versets du récit de la Genèse nous parlent d’une réalité antérieure à nos connaissances historiques. Les mots utilisés sont inévitablement des images par rapport à nos connaissances et pour notre intelligence puisqu’ils nous parlent d’une réalité qui dépassent nos perceptions dans le temps.

Le texte nous conduit de l’origine, qui échappe à la perception dans le temps, à la création des humains qui peut être située dans le temps. Le récit passe de ce qui est en dehors de la perception chronologique de l’histoire à ce que nous pouvons percevoir dans l’histoire.

Les mots nous introduisent dans la réalité historique en passant d’un sens vers l’autre. On passe du ciel de la réalité spirituelle au ciel de l’étendue de l’univers. On passe de la terre de la réalité matérielle à la terre solide qui se sépare des eaux, puis à la planète terre. On passe des eaux dans l’univers aux eaux qui se rassemblent pour former des rivières et des mers.

En négligeant ces changements de sens et l’évolution de notre univers qu’ils expriment, le rabbin Schlomo ne peut que constater une impasse pour une approche historique dans le temps. Mais l’impasse ne se trouve que dans les prémisses non justifiées de son raisonnement.

Le temps ne peut pas saisir la réalité spirituelle des cieux. Mais, en considérant que les mêmes mots ont des sens différents, le raisonnement du rabbin et son rejet de l’historicité perdent leur justification.

En acceptant les sens différents donnés aux mots utilisés, nous pouvons constater qu’il n’y a pas de contradiction entre une compréhension chronologique des jours de la Genèse et les connaissances scientifiques les plus pointues.

La réalité physique de la lumière comme celle du feu, aussi évoquée par le rabbin Schlomo, est aux limites de nos connaissances. On peut constater que le Big Bang, qui semble l’événement majeur de la réalité la plus lointaine actuellement perçue, a certainement dégagé une lumière et un feu intenses.

Ceci étant dit, il faut rester très prudent, car les connaissances scientifiques ne cessent d’évoluer et il serait téméraire de prétendre déduire une affirmation scientifique du texte biblique, car ce serait confondre une interprétation particulière du texte avec le texte lui-même.

On peut cependant admirer la concordance, même si la prudence doit rester très grande par rapport aux reconstructions de nos interprétations selon nos connaissances actuelles.

En fait, affirmer que l’ordre chronologique des six jours du récit de la Genèse ne concerne absolument pas l’ordre chronologique historique paraît surtout une affirmation a priori, parce que rien dans le texte, ni dans les connaissances scientifiques et historiques actuelles ne l’impose.

Au contraire.

Les étapes (dans le sens de l’apparition de « formes » nouvelles ou d’une présence de créatures à un stade de l’histoire non présentes sous une forme particulière à un stade plus ancien) sont des réalités historiques certaines.

Prenez un chien. Si vous remontez dans sa lignée biologique, vous trouverez, il y a un milliard d’années, des ancêtres biologiques de ce chien qui ne ressemblaient guère aux chiens actuels.

Si vous remontez de plusieurs milliards d’années, vous ne trouverez peut-être que des ancêtres de type aquatiques, voire des ensembles cellulaires chimiques plus proches de nos végétaux que de nos animaux.

Dans la réalité historique comme dans une approche scientifique, on peut situer des « étapes chronologiques » même si celles-ci n’émergent pas brusquement, comme beaucoup l’ont imaginé jadis, mais apparaissent progressivement dans la continuité.

Il en est ainsi de l’humain. L’athée comme le croyant affirment sans hésitation qu’il n’y avait pas d’humain il y a un milliard d’années. Il est donc correct tant pour la lecture biblique que pour la lecture de l’histoire ou par la science de considérer la présence d’humains comme une étape dans l’histoire du monde.

La Genèse nous parle de la réalité historique, mais elle le fait en vérité, selon le point de vue de Dieu, et non selon un point de vue purement humain, dans un but scientifique.

La science ne parle qu’à notre cerveau, la Parole de Dieu parle à notre être entier, selon ses besoins essentiels. Elle ne se contente pas de dire un pourquoi des choses, elle nous dit aussi le comment, mais seulement dans la mesure réellement nécessaire et en considérant toute la réalité, terrestre mais aussi spirituelle.

Pour la science, qui s’inscrit de son point de vue dans une continuité du temps dans laquelle la notion d’achèvement n’a pas de sens (rien ne se crée, rien ne se perd), il n’y a pas d’achèvement au sens absolu, mais bien des étapes constatées.

Pour la foi, il y a bien, au delà des étapes (les six jours), un moment où la création par Dieu est achevée parce que le but est atteint et que ce but c’est l’humain. L’Humain est bien une étape historique.

C’est déjà vrai pour la science qui considère la présence de l’humain dans une continuité historique depuis le Big Bang. C’est aussi vrai du point de vue de la foi. Il n’y a pas toujours eu sur la terre des êtres dotés d’une âme immortelle. Il y a eu création à un moment et à un endroit bien précis dans l’histoire.

Et cette création a été achevée à un moment de l’ordre chronologique de l’histoire. Non soudainement, mais après une longue évolution qui a fait apparaître les diverses espèces de créatures que nous connaissons aujourd’hui.

Pourquoi contester cet ordre chronologique, tel qu’il nous est présenté pour l’essentiel dans la Genèse, lorsqu’on peut constater que son récit peut être interprété en concordance avec l’ordre chronologique que nous révèle la science ?

Epsilon
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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Epsilon » mer. 24 août 2011, 13:12

Cher Xavi

Avec tt les approximations nécessaires à cet « exercice » … si l’on « compresse » les 4,5 milliards d’années depuis le Big-bang jusqu’à nos jours en une journée de 24 heures nous pouvons dire … la terre s’est formée à 0h01 et la « vie » apparut à peu prés à 3h30 … suite à une longue période de progressions graduelles menant à l’émergence des organismes multicellulaires … l’explosion cambrienne eut finalement lieu à 21h00 … plus tard (dans la soirée) les dinosaures errèrent sur terre … leur extinction se produisit à 23h40 … moment à partir duquel les mammifères commencèrent à se développer … l’embranchement menant aux chimpanzés (qui est notre « cousin germain ») et aux humains ne se présenta qu’UNE minute et DIX-SEPT secondes avant la fin de la journée … et les hommes dotés de l’anatomie « moderne » n’apparurent que TROIS secondes avant la fin de cette même journée … la vie d’un homme d’aujourd’hui (vous, moi et consorts) d’age moyen (30 ans) ne remplirait que la DERNIERE MILLISECONDE (un millième de seconde) de la journée.

Avec une telle échelle du temps … il y a largement place à toutes les spéculations/imaginations possibles (entre autres celle de Genèse) concernant d’une manière générale « l’évolution ».

Au niveau de Genèse … le fait de dire : « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre » implique d’une part que Dieu est à la base de toute Création mais aussi qu’il a toujours existé … cette description est ici compatible, en utilisant de grosses mailles, avec ce que nous connaissons scientifiquement.

Pour le reste et notamment les « étapes » … nous pouvons dire tout et son contraire … pour ma part c’est une « compilation » de textes des pays limitrophes (notamment Mésopotamiens) … « adaptés » à la connaissance « scientifique » de l’auteur biblique au moment ou il écrit … « adaptés » aussi théologiquement à la « nature » même du Dieu qu’il veut nous faire connaître (Dieu Unique créateur de toutes choses et notamment des autres dieux) … comme je l’avais déjà signalé l’auteur utilise ici le nom divin d’Elohim (et non le nom divin de Yahvé qui est/sera le véritable Dieu d’Israël) … signe par là (du moins je suppose) que l’auteur biblique ne s’engage pas sur une qcqconque vérité scientifiques des récits/étapes qu’il nous relate.

Ne pas oublier que nous devons ABSOLUMENT pas tout relativiser … mettre sur le même pied les incompréhensions scientifiques du récit de Genèse et, par exemple, la Résurrection de Jésus … me semble une faute grave et contraire à l’Evangile.

Saint Augustin (dans son commentaire sur Genèse) dit :
« Or, rien ne serait plus honteux, plus déplorable et plus dangereux que la situation d'un chrétien, qui traitant de ces matières [Genèse I], devant les infidèles, comme s'il leur exposait les vérités chrétiennes, débiterait tant d'absurdités, qu'en le voyant avancer des erreurs grosses comme des montagnes, ils pourraient à peine s'empêcher de rire. Qu'un homme provoque le rire par ses bévues, c'est un petit inconvénient; le mal est de faire croire aux infidèles que les écrivains sacrés en sont les auteurs, et de leur prêter, au préjudice des âmes dont le salut nous préoccupe, un air d'ignorance grossière et ridicule. Comment en effet, après avoir vu un chrétien se tromper sur des vérités qui leur sont familières, et attribuer à nos saints Livres ses fausses opinions, comment, dis-je, pourraient-ils embrasser, sur l'autorité de ces mêmes livres, les dogmes de la résurrection des corps, de la vie éternelle, du royaume des cieux, quand ils s'imaginent y découvrir des erreurs sur des vérités démontrées par le raisonnement et l' expérience? On ne saurait dire l'embarras et le chagrin où ces téméraires ergoteurs jettent les chrétiens éclairés. Sont-ils accusés et presque convaincus de soutenir une opinion fausse, absurde, par des adversaires qui ne reconnaissent pas l'autorité de l'Écriture? on les voit chercher à s'appuyer sur l’Ecriture même, pour défendre leur assertion aussi présomptueuse que fausse, citer les passages les plus propres, selon eux, à prouver en leur faveur, et se perdre en de vains discours, sans savoir ni ce qu'ils avancent ni les arguments dont ils se servent pour l'établir ».


Cordialement, Epsilon

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Pneumatis » mer. 24 août 2011, 16:25

Bonjour Xavi,

Un rapide message avant de prendre peut-être plus le temps, pour un Mea Culpa : le commentaire de Rachi ne concerne que le premier verset, et pas tout l'Hexameron. J'ai surinterprété ce commentaire et vous ai induit en erreur du même coup.

Pour le reste, je reste très critique quant à votre démarche... nous aurons l'occasion d'en reparler : ça m'a pris un peu de temps avant de me délivrer des tentations de concordisme, et il me semble que malgré les mises en garde que vous répétez vous-mêmes, vous vous laissiez piéger encore par ladite tentation.
La Genèse nous parle de la réalité historique, mais elle le fait en vérité, selon le point de vue de Dieu, et non selon un point de vue purement humain, dans un but scientifique.
Je ne suis pas d'accord. La réalité historique nous parle de la réalité historique. La Genèse nous parle de la Genèse.
La réalité historique elle-même ne peut pas être étudiée en oubliant que le temps et l’espace de sa chronologie sont des instruments de mesure de notre cerveau terrestre. Impossible de parler en vérité de la création de Dieu en enfermant d’emblée l’histoire dans le cadre d’une approche humaine dans le temps.
Je suis d'accord... mais je ne comprends pas comment vous pouvez à la fois affirmer une telle chose, et vous lancer ensuite dans la démarche que vous exposez ici. C'est comme si vous vous disiez : "tant pis, c'est impossible, mais je vais le faire quand même". Je ne comprends pas...

Voilà, sur le commentaire de Rachi j'y reviendrai : mais, je vous en supplie, ne négligez pas l'exégèse rabbinique, surtout pas pour ce qui est du sens des mots. Sur tout un tas d'autres développements, oui, pourquoi pas, mais sur le sens des mots bibliques cette exégèse est sans doute la plus précieuse qui soit : elle tire le sens des mots de la révélation elle-même, par recoupements, comme seule une personne connaissant bien de bout en bout les Saintes Ecritures et la Tradition orale qui les a porté est capable de le faire. Dans bien des cas, c'est la Bible qui a donné le sens à certains mots, qu'on ne trouve nulle par ailleurs, et non le langage courant ou une quelconque culture qui défini le sens des mots de la Bible.

Alors vous imaginez, cher Xavi, à côté de ça, aller suggérer que les eaux bibliques pourraient signifier quelques composés gazeux, je suis désolé, mais c'est juste absurde. Vous vous rendez-compte, j'espère, à quel point c'est scientifico-centré comme interprétation ? D'autant que le mots mayim, en hébreu, qu'on traduit par "les eaux" se traduit encore plus couramment par "les mers". Et oui en hébreu, le mot "les cieux" est formé de deux mots, dont l'un signifie "le feu" et l'autre "les eaux (les mers)" et ça n'a rien d'anecdotique. Surtout quand on pense que c'est ainsi qu'Israël, par Moïse lui-même, l'a reçu et l'a transmis. Mais c'est déjà hors sujet.

Je reviendrai plus tard pour vous expliciter ma vision des limites liées au concordisme, encore une fois.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013

Epsilon
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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Epsilon » mer. 24 août 2011, 17:17

Il est évident que pour l'antiquité, bien avant la Bible, l'eau est à la base de tout ... eau de mer, eau de pluie et surtout eau douce.

En Gn (1,2) : il est question de « l’Abime » (tehôm) … vient du babylonien et de l’assyrien « tiam-at » (mer) … personnifiée aux origines en Tiamat … élément féminin qui avec l’Apsout (qui est la personnalisation de l’eau douce) … donne naissance aux dieux primitifs.

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » mer. 24 août 2011, 18:06

Hello Pneumatis,

Le désaccord très léger semble se recreuser.

Vous avez évidement bien raison d’insister sur l’apport rabbinique et ma critique de la réflexion du commentaire du rabbin Schlomo (que je ne connais pas) ne porte que sur le court extrait publié et sur son sens dans votre message. Ce que vous en dites est très juste, même s’il faut rester prudent avec des commentaires exprimés en dehors de la lumière de l’Evangile.

L’incompréhension se creuse lorsque vous écrivez que « La réalité historique nous parle de la réalité historique. La Genèse nous parle de la Genèse ». Cette double phrase me semble avoir peu de sens sauf pour exprimer par un condensé « poétique » votre réaction critique. Il est difficile de la commenter. Que voulez-vous exprimer ? La réalité historique ne parle pas. C’est un fait dont la science nous donne une connaissance plus ou moins détaillée. La Genèse ne parle pas de la Genèse, mais d’une réalité dont nous discutons l’historicité d’un point particulier.

Je suis assez surpris que votre réaction négative commence dès le principe de mon exposé lorsque j’écris que la Genèse nous parle de la réalité historique. Vous écrivez de suite : pas d’accord.

Si c’est une contestation générale de toute la Genèse, cela devient très difficile, mais je suppose que vos propos ne concernent ici que le (ou les) premier(s) chapitre(s).

Comme le Magistère n’a cessé de l’enseigner, c’est bien au commencement de « l’histoire » de l’homme que s’est produit le péché originel des premiers humains (CEC 390). C’est bien dans la réalité historique qu’ont été créés les premiers humains, nommés Adam et Eve. C’est bien dans l’histoire que le péché originel se produit. Nous descendons tous historiquement de ce premier couple. J’espère que nous restons d’accord sur ces points et que les réflexions sur le mot « commencement » ne vous font pas abandonner le mot « histoire », toute réalité historique.

Heureusement que nous nous retrouvons pleinement d’accord pour affirmer, à la base de notre réflexion, qu’il est « impossible de parler en vérité de la création de Dieu en enfermant d’emblée l’histoire dans le cadre d’une approche humaine dans le temps » et cela vous permet de situer directement la difficulté en écrivant : « je ne comprends pas comment vous pouvez à la fois affirmer une telle chose, et vous lancer ensuite dans la démarche que vous exposez ici. C'est comme si vous vous disiez : "tant pis, c'est impossible, mais je vais le faire quand même". Je ne comprends pas... ».

Vous touchez bien, ici, à l’essentiel de la démarche et de la difficulté. Je ne pense pas du tout « tant pis, c'est impossible, mais je vais le faire quand même ».

Je ne peux que confirmer que la Parole de Dieu nous parle simultanément de la réalité spirituelle et de la réalité terrestre. L’incarnation est le sommet de la même démarche qui nous rejoint dans toute notre humanité. Non, la Genèse ne parle pas « que » de la réalité spirituelle. Elle nous parle aussi de toute notre humanité, de toute notre réalité y compris terrestre et historique, mais la vérité c’est que notre réalité n’est pas que de ce monde terrestre, mais participe aussi à la réalité spirituelle de Dieu dont le péché originel nous a coupé.

Vous revenez sur un détail, d’une manière qui fait écho à la citation de St Augustin donnée par Epsilon (qui dit beaucoup de choses exactes dans es deux messages, même s’il exprime un désaccord sans élément nouveau auquel je puisse répondre, mais je le salue au passage). Vous écrivez : « aller suggérer que les eaux bibliques pourraient signifier quelques composés gazeux, je suis désolé, mais c'est juste absurde. Vous vous rendez compte, j'espère, à quel point c'est scientifico-centré comme interprétation ? ».

Malgré la violence verbale, il faut constater que votre affirmation d’une absurdité n’est en rien justifiée. En quoi serait-ce absurde ? Vous semblez ne vous baser que sur votre rejet de toute concordance considérée a priori comme du concordisme non acceptable.

Dans la poésie imagée du début de la Genèse, le croyant peut y reconnaître ce que la science et l’histoire lui apprennent lorsque c’est raisonnable.

J’ai indiqué toute la prudence qu’il faut garder et il ne me semble pas que l’on puisse exprimer une certitude pour des interprétations du début de la Genèse. Elle permettent cependant de dire avec fermeté qu’il n’y pas de contradiction avec la science et d’admettre que la révélation prend en compte toute notre réalité concrète dans l’histoire.

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Pneumatis » mer. 24 août 2011, 23:00

Bonsoir Xavi,
Xavi a écrit :J’ai indiqué toute la prudence qu’il faut garder et il ne me semble pas que l’on puisse exprimer une certitude pour des interprétations du début de la Genèse. Elle permettent cependant de dire avec fermeté qu’il n’y pas de contradiction avec la science et d’admettre que la révélation prend en compte toute notre réalité concrète dans l’histoire.
Je suis entièrement d'accord avec vous sur ces points, et j'applaudis à ce que vous dites.
Xavi a écrit :L’incompréhension se creuse lorsque vous écrivez que « La réalité historique nous parle de la réalité historique. La Genèse nous parle de la Genèse ». Cette double phrase me semble avoir peu de sens sauf pour exprimer par un condensé « poétique » votre réaction critique. Il est difficile de la commenter. Que voulez-vous exprimer ?
Je veux exprimer que quand on écoute une "parole" il faut l'accueillir pour ce qu'elle dit et non pour ce qu'on attend ou qu'on veut qu'elle dise. Je m'explique...
Xavi a écrit :La réalité historique ne parle pas. C’est un fait dont la science nous donne une connaissance plus ou moins détaillée.
Si, bien sur que si. Saint Bonaventure qualifiait même la Création de second verbe de Dieu, il me semble. Bien sur que la création, et l'histoire dans laquelle le Seigneur intervient, est parole de Dieu : elle dit quelque chose. Il est donc bon de se demander quoi. Le même Saint Bonaventure en a développé sa fameuse théologie symbolique (à laquelle j'ai d'ailleurs pu indirectement me confronter expérimentalement par les enseignements d'un anthropologue, professeur catholique d'hébreu et d'anthropologie biblique dont j'ai déjà parlé sur ce forum, et qui a mis au point des exercices consistant, en très résumé, en la contemplation de réalités terrestre évoquées dans la Bible et en élevant par cette contemplation, cette analyse, vers la symbolique intrinsèque de cette réalité terrestre.)
Xavi a écrit :La Genèse ne parle pas de la Genèse, mais d’une réalité dont nous discutons l’historicité d’un point particulier.
La Genèse, Bereshit dans son nom hébreu, parle de Bereshit : du principe. Du principe de quoi ? Du principe de ce sur quoi porte toute la révélation : notre salut en Dieu. Il y a donc évidemment des éléments historiques qui servent de support à cette révélation, y compris dans la phase principielle du salut en Dieu, puisque nous ne cheminons pas vers ce salut hors de l'histoire, précisément. Mais ce qui est intéressant, précisément dans l'analyse de Rachi, c'est que lorsqu'un récit est de typologie historique, le langage utilisé permet de l'identifier. Et le même langage utilisé permet d'identifier quand un récit n'est pas de typologie historique. Ce point est aujourd'hui assez largement admis au plan exégétique d'ailleurs : les Saintes Ecritures sont très explicites lorsqu'elles évoquent un temps dans l'histoire. Ce n'est pas le cas dans les premiers chapitres de la Genèse, point. La difficulté pour nous c'est que nous héritons d'une culture biblique largement simplifiée, corrompue même, qui nous a laissé penser pendant des siècles que tout se passait comme si on pouvait avoir une lecture littéralement historique de la Genèse du début à la fin. Avec l'évolution des sciences de la cosmogenèse et de l'anthropogenèse, on a commencé déjà à mettre des bémols, sur les notions de jours, par exemple... Il y a un moment il faut peut-être réussir à s'en détacher vraiment et revenir à une véritable herméneutique en lien avec la foi (cf. Dei Verbum).
Xavi a écrit :Comme le Magistère n’a cessé de l’enseigner, c’est bien au commencement de « l’histoire » de l’homme que s’est produit le péché originel des premiers humains (CEC 390)
Précisément ! Et c'est ce qui fait par exemple considérer comme légitime les hypothèses théologiques aujourd'hui qui considèrent que l'Histoire commence à partir du péché originel. C'est d'ailleurs ce que dit la suite du paragraphe que vous citez :
La Révélation nous donne la certitude de foi que toute l’histoire humaine est marquée par la faute originelle librement commise par nos premiers parents.
Ce qui invite largement à penser que l'événement de la chute est comme l'articulation, le fameux big bang qui fait entrer l'Homme dans l'Histoire. La question que certains se poseront, légitimement, sur laquelle je suis par ailleurs assez d'accord avec les réponses que vous y apportez, c'est de savoir : qu'en est-il de l'histoire de l'univers AVANT l'Homme ? Je crois que la réponse a assez peu d'importance si on songe que l'histoire de l'univers est tout entière anthropocentrée. Aussi, on peut affirmer que l'Histoire commence avec le péché originel, mais que l'homme déchu n'apparait que tardivement dans sa propre histoire. Et dans sa pré-histoire, il est là comme en gestation le temps que la Création soit prête à l'accueillir.
Xavi a écrit :Non, la Genèse ne parle pas « que » de la réalité spirituelle.
Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que comme toute la révélation, elle est une partie d'un enseignement qui doit délivrer l'homme de sa chute, le réhabiliter, le sauver ; enseignement totalement achevé avec la Résurrection du Christ, si on met entre parenthèse l'épilogue entre sa Résurrection et son Ascension.

En somme, oui la révélation peut utiliser certains récits historiques pour cet enseignement, mais elle n'enseigne pas l'histoire. Je sais que la nuance entre les deux n'est pas facile à saisir. Il vous est peut-être arrivé de raconter à vos enfants une expérience que vous avez fait pour leur donner une leçon de vie, comme par exemple un jour où vous avez rencontré une épreuve et comment vous avez dû vous battre... Par ailleurs, il vous est sans doute arrivé aussi de raconter certains de vos souvenirs d'enfance à vos enfants, juste pour leur parler un peu de vous et leur faire partager vos souvenirs... Vous voyez bien que les deux démarches sont complètement différentes. Vous me direz que dans la premier cas, votre récit fait alors double emploi puisqu'il donne à vos enfants une double information : une leçon de vie, et des éléments de votre passé que vous partagez. C'est vrai uniquement si vous précisez bien à vos enfants que cette histoire vous est vraiment arrivée.

Si, par contre, vous racontez à vos enfants une fable, un récit imagé, même en vous l'appropriant, alors si vos enfants recherchent une réalité historique précise vous concernant autre que la leçon de vie que vous aurez vous-même reçu et que vous souhaitez transmettre, vous conclurez qu'ils seront à côté de la plaque sur ce coup-là, pour fait court.

Pour la Genèse, le texte explicite clairement quand il prend pour support de l'enseignement divin un élément historique. Pour le récit de la Chute, la catéchisme, ce paragraphe que vous avez vous-même cité est explicite : "Le récit de la chute (Gn 3) utilise un langage imagé". Le paragraphe poursuit en disant "mais il affirme un événement primordial" : oui, il la Chute est un événement primordial de l'Histoire de l'humanité, puisqu'il est le principe même, le commencement, pas seulement comme début, mais comme origine "ontologique", si j'ose dire, de l'histoire de l'humanité.

Et cela, je ne crois pas que ce soit opposable ni à la Tradition, ni aux Saintes Ecritures. Ceci dit, nous sommes là en Genèse 3, et il faudrait sans doute refaire la démonstration pour les deux chapitres précédents. J'avoue : j'ai un peu la flemme, mais je crois que ce n'est pas une abominable simplification de considérer que ce qui précède procède d'un récit qui transcende l'histoire de l'Humanité, en précédent dans l'ordre de la révélation son origine (la chute).

Voilà pourquoi je suis d'accord pour dire qu'il n'y a pas de contradictions entre la science et la Genèse, qu'il peut même y avoir des ressemblances entre la cosmogenèse et le récit des premiers chapitres de la Genèse, comme si Dieu parlait aussi à l'Homme par un autre chemin que celui de la révélation mosaïque. Et je suis d'autant plus d'accord avec ce constat, que la contradiction est impossible tant ces deux paroles que sont la cosmogenèse d'une part, et les 2 premiers chapitres de la Genèse d'autre part, si elles enseignent quelque chose de semblable sur l'Homme et sur Dieu, ne parlent pas l'une de l'autre. La Genèse (les 2 premiers chapitres) ne parlent pas de préhistoire, pas plus que la préhistoire ne parle d'ailleurs de la Genèse. Les deux parlent d'une chose, un sujet d'enseignement qu'on peut volontiers considérer comme commun (la nature de l'Homme, en particulier), mais avec deux pédagogies, deux langages différents : l'un est la Création (l'univers et son histoire), l'autre est la révélation biblique.

Et j'insiste : le fait de dire que le début de la Genèse ne parle pas de réalités historiques ne veut pas dire qu'elle se cantonne à la dimension spirituelle du monde ou de l'homme. Il parle de l'Homme globalement, y compris en insistant bien sur le fait que l'Homme est fait de la terre. Il dit que l'homme s'inscrit dans l'Histoire et en explique surtout le pourquoi, il dit que ce n'est pas un hasard, ni une illusion, ni une fin, mais ne raconte pas cette histoire. Voilà la nuance.
Xavi a écrit :Malgré la violence verbale, il faut constater que votre affirmation d’une absurdité n’est en rien justifiée.
Je suis désolé si mon propos vous a paru violent, ce n'était pas du tout l'intention, et c'était donc très maladroit de ma part. L'absurdité était pour dire qu'il y avait une forme d'incohérence, si vous préférez, dans la démarche.
Xavi a écrit :En quoi serait-ce absurde ? Vous semblez ne vous baser que sur votre rejet de toute concordance considérée a priori comme du concordisme non acceptable.
Non, je ne considère par toute concordance comme du concordisme. Je considère le fait de rechercher une concordance comme du concordisme. Là encore, je tiens à cette nuance. Je l'ai dit plusieurs fois, qu'il y ait des similitudes, partant du principe que la cosmogenèse et le début de la Genèse enseignent sans doute sur une même chose précise, comme deux langages différents délivrant le même message, il y a inévitablement des similitudes. Mais c'est le fait de rechercher ces concordances pour prêter à l'un les règles de langage de l'autre qui est du concordisme.

Enfin quand même, je n'arrive pas encore à y croire : comment pouvez-vous considérer une seule seconde que les mayim de la Genèse pourraient désigner une réalité protocosmique de type composé gazeux ? Il y a un tel gouffre entre cette lecture scientifique et le substrat biblique, sur lequel nous devons nous appuyer. Contemplez les mers, les océans, imaginez même pour cela les mers telles qu'elles pouvaient être à l'époque de Moïse, et dites-moi combien d'hommes dans l'histoire de l'humanité peuvent faire le lien cognitif entre ça et un composé gazeux ?

A l'inverse, je me dois de vous le dire : aujourd'hui vous ne pouvez affirmer que tel composé gazeux peut être appelé "eau" que parce qu'un certain modèle et jargon scientifique, qui n'a rien d'universel et qui aurait pu choisir maintes autres désignations (d'ailleurs, il y en a au moins une commune qu'on appelle la vapeur), vous le permet. Ainsi c'est un flagrant délit de projection culturelle sur le récit biblique que vous nous donnez là. Exit, là-dedans, le substrat culturel à préserver pour la compréhension du texte biblique.
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » jeu. 25 août 2011, 17:38

Merci, cher Pneumatis, pour votre longue réponse qui clarifie le débat.

Merci pour les précisions sur le sens de vos propos. Vous écrivez : « Je veux exprimer que quand on écoute une "parole" il faut l'accueillir pour ce qu'elle dit et non pour ce qu'on attend ou qu'on veut qu'elle dise… Bien sur que la création, et l'histoire dans laquelle le Seigneur intervient, est parole de Dieu : elle dit quelque chose. » D’accord.

La Genèse nous parle du principe (la genèse), du commencement, de l’origine. D’accord.

Sur un plan plus exégétique, vous écrivez que « lorsqu'un récit est de typologie historique, le langage utilisé permet de l'identifier. Et le même langage utilisé permet d'identifier quand un récit n'est pas de typologie historique. Ce point est aujourd'hui assez largement admis au plan exégétique d'ailleurs ».

Par la force des choses, les textes du début de la Genèse ne racontent pas des faits vécus par des hommes et ne peuvent, à cet égard, présenter les caractéristiques de textes historiques. Ils ont une base intuitive et sont largement imagés.

Il ne s’agit pas d’avoir « une lecture littéralement historique de la Genèse du début à la fin » comme s’il s’agissait d’un reportage journalistique moderne. Le texte est rempli d’images et de symboles qui imposent la plus grande prudence par rapport aux hypothèses de compréhension concrète qui s’inspirent de nos connaissances actuelles. Mais, il ne faut pas oublier que images et symboles n’excluent pas la présence d’une parole sur la réalité historique.

Dans cette perspective, il me semble que vous écrivez avec beaucoup de justesse que « partant du principe que la cosmogenèse et le début de la Genèse enseignent sans doute sur une même chose précise, comme deux langages différents délivrant le même message, il y a inévitablement des similitudes…
Voilà pourquoi je suis d'accord pour dire qu'il n'y a pas de contradictions entre la science et la Genèse, qu'il peut même y avoir des ressemblances entre la cosmogenèse et le récit des premiers chapitres de la Genèse… »

Vous donnez, à cet sujet, une bonne échelle de mesure de ce qui est admissible : « c'est le fait de rechercher (des) concordances pour prêter à l'un les règles de langage de l'autre qui est du concordisme ». C’est exact.

Voilà des réflexions qui me semblent équilibrées et justes.

Elles ne permettent pas de rejeter toute constatation d’une concordance possible sur tel ou tel point, ni même de les rechercher dans la mesure possible. Considèrer le fait de rechercher une concordance comme du concordisme dans tous les cas, c’est ignorer qu’il est possible de rechercher des concordances sans confondre les règles des langages respectifs de la science et de la Bible.

Il me semble, dès lors, contradictoire d’écrire : « comment pouvez-vous considérer une seule seconde que les mayim de la Genèse pourraient désigner une réalité protocosmique de type composé gazeux ? Il y a un tel gouffre entre cette lecture scientifique et le substrat biblique, sur lequel nous devons nous appuyer ». Ce n’est pourtant que l’observation d’une similitude que vous admettez par ailleurs.

La science démontre des faits. Si nous envisageons une concordance entre les formations gazeuses des planètes selon la science et la séparation des eaux et des formes solides relatées par la Genèse, ce n’est clairement qu’une hypothèse, l’observation d’une possibilité. Il ne s’agit pas d’aboutir à une conviction religieuse ferme de type scientifique, par une confusion des deux approches, mais seulement de soutenir la foi de ceux qui croient que, même si elle échappe largement à toute certitude précise de type scientifique sur ce qu’elle nous relate, la Genèse nous donne bien une image correcte de ce que fut l’essentiel de la réalité historique de la création.

La fin de votre message me semble préciser la base de notre divergence dans le cas particulier des « eaux » des trois premiers versets de la Genèse : « dites-moi combien d'hommes dans l'histoire de l'humanité peuvent faire le lien cognitif entre ça et un composé gazeux ? »

A part quelques uns à notre époque, probablement aucun à l’époque de la rédaction des textes bibliques. Et vous en déduisez : « c'est un flagrant délit de projection culturelle sur le récit biblique que vous nous donnez là. Exit, là-dedans, le substrat culturel à préserver pour la compréhension du texte biblique. »

Nous touchons ici à un point essentiel.

La parole de Dieu de la Bible est aussi une parole humaine. Elle n’est en rien issue d’une dictée surnaturelle sous quelle que forme que ce soit. Ce sont des hommes qui l’ont écrite avec toutes les caractéristiques de leurs connaissances, de leurs aspirations, de leur culture et de leur langage. Comme vous le dites bien : c’est le substrat culturel à préserver pour la compréhension du texte biblique. Mais, attention, il ne faut pas oublier qu’il s’agit ici de la compréhension correcte du sens que les auteurs humains de la Bible ont voulu eux-mêmes donner à leurs écrits.

Epsilon, dans ce même fil, relève avec pertinence les influences et les traditions dans lesquelles les récits de la Genèse ont été écrits. L’exégèse, avec le secours de toutes les sciences, ne cesse de mieux comprendre le vrai sens littéral des Ecritures souvent comprises de manière caricaturale et erronée. Nous ne cesserons de comprendre de mieux en mieux ce que les hommes qui ont écrit ces textes sacrés ou les ont rassemblés, ont réellement voulu exprimer.

Mais, la foi de l’Eglise ajoute aussitôt que, sous l’inspiration de l’Esprit Saint, cette parole pleinement humaine, vrai produit d’hommes, est aussi parole de Dieu. Pleinement divine autant que pleinement humaine. Tout comme le verbe fait chair est vrai Dieu et vrai homme.

Sous l’inspiration de l’Esprit Saint, les textes sacrés expriment et révèlent bien davantage que ce que leurs auteurs humains ont voulu consciemment y mettre. C’est ici une question de foi et de conviction. Ce qu’une parole de l’Ecriture dit ne se limite pas à ce que son auteur humain a voulu dire.

Les développements de l’exégèse moderne de plus en plus détaillés sur les fondements humains des textes bibliques ne doivent pas faire oublier la foi dans leur portée surnaturelle, dans ce que l’Esprit Saint a inspiré bien au delà des pensées humaines.

Pour la Genèse comme pour les autres écritures, y compris celles du Nouveau Testament, la compréhension du texte ne se limite pas à ce que les auteurs humains ont voulu exprimer et leurs écrits contiennent bien davantage de sens et de portée que ceux de leurs intentions conscientes.

Nous pouvons lire la Parole de Dieu avec et dans notre culture différente de celle des auteurs humains de la Bible et la Parole de Dieu a une capacité d’inculturation illimitée pour toute les générations successives.

Reconnaître un fait connu actuellement dans un texte sacré ancien, est-ce un flagrant délit de projection culturelle sur le récit biblique ? N’est-ce pas un don du ciel, de pouvoir lire, non seulement le récit de la Genèse, mais tous les autres textes de la Genèse, avec notre culture actuelle, découvrir des sens nouveaux pour nous aujourd’hui, des significations adaptées à notre situation, à nos connaissances.

Il ne s’agit pas de projeter nos pensées pour transformer le sens qu’un texte avait pour son auteur et qui doit rester la base d’une bonne compréhension, mais de découvrir que le texte sacré peut éclairer nos pensées actuelles, que nous pouvons l’aborder avec notre culture, nos pensées, nos connaissances, pour permettre à la Parole de Dieu de les éclairer dans l’ensemble de l’histoire du salut.

Il me semble magnifique et heureux de pouvoir, aujourd’hui encore, « projeter » tout ce que nous sommes, tout ce que nous connaissons, tout ce que nous vivons, dans la lecture des textes sacrés pour découvrir, de manière toujours nouvelle et adaptée, le sens que cette parole peut prendre pour chacun de nous, de manière actualisée, et la lumière qu’elle peut nous apporter dans tout ce que nous vivons.

La Parole de Dieu n’est pas un texte fermé dont le sens serait épuisé par la compréhension qu’en avaient les auteurs humains, ni a fortiori les générations antérieures. La Tradition de l’Eglise en renouvelle sans cesse le sens pour les générations successives sous la conduite du Magistère.

Vous me demandez : « Comment pouvez-vous considérer une seule seconde que les mayim de la Genèse pourraient désigner une réalité protocosmique de type composé gazeux ? »

Mais, parce que la réalité protocosmique de type composé gazeux est un fait vraisemblable de l’histoire. Je me contente de constater (il n’est pas question ici de conviction ou de certitude, mais seulement d’une proposition scientifique qui est une éventualité possible) que lorsque la Genèse nous dit que des eaux ont été séparées d’autres eaux, puis qu’ensuite des eaux ont été rassemblées pour faire surgir du sol sec dans l’étendue du ciel, cela ressemble de manière étonnante à ce que la science actuelle nous dit de la formation des galaxies dans l’étendue de l’univers. Rien de plus.

Bien sûr qu’il est plus que probable que l’auteur du récit n’avait aucune idée de ce type, mais l’Esprit Saint qui l’a inspiré a pu donner au texte une portée qui rejoint la science d’aujourd’hui.

N’y a-t-il aucune historicité à trouver dans la Genèse pour ce qui précède la création de l’homme ? Je suis convaincu, au contraire, que, par l’inspiration de l’Esprit Saint, la rédaction humaine de la Genèse a pu donner une vision correcte de l’essentiel de l’histoire réelle, y compris de la préhistoire C’est, bien sûr, de l’ordre de la foi.

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » ven. 26 août 2011, 13:18

Cher Epsilon,

Je n’ai pas encore eu l’occasion de répondre à vos interventions qui me paraissent fort intéressantes et éclairantes pour ce sujet particulier.
Epsilon a écrit : Avec tt les approximations nécessaires à cet « exercice » … si l’on « compresse » les 4,5 milliards d’années depuis le Big-bang jusqu’à nos jours en une journée de 24 heures nous pouvons dire … la terre s’est formée à 0h01 et la « vie » apparut à peu prés à 3h30 … suite à une longue période de progressions graduelles menant à l’émergence des organismes multicellulaires … l’explosion cambrienne eut finalement lieu à 21h00 … plus tard (dans la soirée) les dinosaures errèrent sur terre … leur extinction se produisit à 23h40 … moment à partir duquel les mammifères commencèrent à se développer … l’embranchement menant aux chimpanzés (qui est notre « cousin germain ») et aux humains ne se présenta qu’UNE minute et DIX-SEPT secondes avant la fin de la journée … et les hommes dotés de l’anatomie « moderne » n’apparurent que TROIS secondes avant la fin de cette même journée … la vie d’un homme d’aujourd’hui (vous, moi et consorts) d’age moyen (30 ans) ne remplirait que la DERNIERE MILLISECONDE (un millième de seconde) de la journée.

Avec une telle échelle du temps … il y a largement place à toutes les spéculations/imaginations possibles (entre autres celle de Genèse) concernant d’une manière générale « l’évolution ».

Au niveau de Genèse … le fait de dire : « Au commencement, Dieu créa les cieux et la terre » implique d’une part que Dieu est à la base de toute Création mais aussi qu’il a toujours existé … cette description est ici compatible, en utilisant de grosses mailles, avec ce que nous connaissons scientifiquement.

Pour le reste et notamment les « étapes » … nous pouvons dire tout et son contraire … pour ma part c’est une « compilation » de textes des pays limitrophes (notamment Mésopotamiens) … « adaptés » à la connaissance « scientifique » de l’auteur biblique au moment ou il écrit … « adaptés » aussi théologiquement à la « nature » même du Dieu qu’il veut nous faire connaître (Dieu Unique créateur de toutes choses et notamment des autres dieux) … comme je l’avais déjà signalé l’auteur utilise ici le nom divin d’Elohim (et non le nom divin de Yahvé qui est/sera le véritable Dieu d’Israël) …
Merci pour cette excellente approche avec laquelle je me sens tout à fait en accord.

Il y a, en effet, « largement » place pour toutes les imaginations possibles et « entre autres celle de la Genèse ». Sur le plan de sa rédaction humaine, c’est un écrit d’hommes semblable aux autres. En l’absence de témoignages historiques, c’est bien dans son imagination et dans les traditions de son époque que l’auteur du premier chapitre de la Genèse a dû plonger pour imaginer et raconter ce qu’il pensait avoir été le passé historique des humains et de toute la création.

Mais, comme croyants, nous pensons qu’à travers et avec les pensées humaines, l’Esprit Saint a agi simultanément pour nous donner une parole vraie sur ce passé historique.

Vous concluez votre excellente réflexion par une supposition.
Epsilon a écrit : comme je l’avais déjà signalé l’auteur utilise ici le nom divin d’Elohim (et non le nom divin de Yahvé qui est/sera le véritable Dieu d’Israël) … signe par là (du moins je suppose) que l’auteur biblique ne s’engage pas sur une qcqconque vérité scientifiques des récits/étapes qu’il nous relate.
Si vous voulez dire qu’il ne tire pas son texte d’une étude ou d’une approche de type scientifique, d’une observation objective, on ne peut qu’être d’accord.

Il est certain que l’auteur humain ne s’engage pas sur une quelconque vérité scientifique précise.

L’historicité dont nous parlons dans ce sujet doit être bien située.

La réalité historique est un fait que la science nous fait connaître de mieux en mieux. L’extrême imprécision du texte largement poétique et imagé de la Genèse ne permet pas d’y trouver un enseignement utilisable sur le plan scientifique.

Le seul fait qu’il provienne de l’imagination et de l’intuition ne suffit cependant pas pour l’exclure du champ scientifique dont les découvertes proviennent souvent de l’imagination et des intuitions parfois spéculatives des chercheurs, mais, comme vous le dites très bien, on peut presque lui faire dire tout et son contraire.

Je trouve tout-à-fait juste de dire que, dans le récit des six jours de la Genèse, la « description est ici compatible, en utilisant de grosses mailles, avec ce que nous connaissons scientifiquement ».

Pas davantage.

La suite de votre message me semble troublée.
Epsilon a écrit : Ne pas oublier que nous devons ABSOLUMENT pas tout relativiser … mettre sur le même pied les incompréhensions scientifiques du récit de Genèse et, par exemple, la Résurrection de Jésus … me semble une faute grave et contraire à l’Evangile.
Ne pas oublier que nous devons absolument pas … me semble une faute ?

Je suppose qu’il y a un excès de négations par distraction et que vous voulez dire « Oublier que nous ne pouvons pas tout relativiser … me semble une faute » et que vous estimez qu’il est gravement fautif de « mettre sur le même pied les incompréhensions scientifiques du récit de Genèse et, par exemple, la Résurrection de Jésus ».

Il y a évidemment des différences essentielles puisque la résurrection de Jésus est un fait attesté par des témoignages directs historiques de multiples faits précis.

On ne peut pas mettre l’historicité du début de la Genèse et celle de la résurrection du Christ « sur le même pied ».

Cela n’exclut cependant pas des rapprochements. Les évènements en cause ont en commun que tous deux concernent non seulement la réalité historique, mais nous introduisent aussi au delà de cette réalité, par des récits qui, dans les deux cas, nous relatent des faits qui passent au delà des limites de la réalité historique

Ce que nous dit la Parole de Dieu du passage de la réalité éternelle et spirituelle de Dieu à la présence d’une création dans le temps et l’espace que nous connaissons (c’est le début de la Genèse) peut être rapproché de ce qu’elle nous dit du passage inverse du Christ par sa résurrection.

Vous terminez votre premier message, cher Epsilon, par une citation fort pertinente de St Augustin concernant les dangers des absurdités que l’on peut écrire sur la création.

J’espère que nous n’en voyez pas trop dans ce dialogue et dans mes propos. A défaut, il vous reste … la poubelle évoquée ailleurs dans un autre sujet…

Quoi qu’il en soit, merci pour votre intervention ici.

Merci aussi pour la contribution complémentaire de votre second message qui aide à comprendre le sens du texte.

Par ailleurs, j’ai repensé à la belle contribution de Pneumatis et il est utile de relever encore une synthèse particulièrement bonne dans ses réflexions.
Pneumatis a écrit : l'événement de la chute est comme l'articulation, le fameux big bang qui fait entrer l'Homme dans l'Histoire. La question que certains se poseront, légitimement, sur laquelle je suis par ailleurs assez d'accord avec les réponses que vous y apportez, c'est de savoir : qu'en est-il de l'histoire de l'univers AVANT l'Homme ? Je crois que la réponse a assez peu d'importance si on songe que l'histoire de l'univers est tout entière anthropocentrée. Aussi, on peut affirmer que l'Histoire commence avec le péché originel, mais que l'homme déchu n'apparait que tardivement dans sa propre histoire. Et dans sa pré-histoire, il est là comme en gestation le temps que la Création soit prête à l'accueillir.
Excellent !

Oui, il n’y a pas que le big bang que la science nous indique au début de l’univers. La création de l’homme est aussi un big bang après une longue gestation. Bien plus fameux encore. Un événement cosmique bien plus grand encore.
Pneumatis a écrit : partant du principe que la cosmogenèse et le début de la Genèse enseignent sans doute sur une même chose précise, comme deux langages différents délivrant le même message, il y a inévitablement des similitudes. Mais c'est le fait de rechercher ces concordances pour prêter à l'un les règles de langage de l'autre qui est du concordisme.
C’est aussi particulièrement clair et juste.

Où reste donc la divergence critique ?

La réflexion particulière concernant les « eaux » reste, et doit rester, dans les limites de l’observation d’une similitude respectant les limites des langages différents de la science et de la révélation.

La difficulté n’est-elle pas, dès lors, uniquement dans le sens que chacun donne aux mots « réalité historique » ?

Dans mes messages et ma réflexion, j’appelle « réalité historique », ce qui s’est passé dans le temps et dans l’espace, les faits, exactement les mêmes que ceux qui intéressent les historiens et les scientifiques.

La langage de la Bible n’est certes pas celui des historiens, ni celui des scientifiques.

Mais, avec un autre langage, la Bible nous parle aussi de la même réalité historique.

C’est, bien sûr sans la précision de la science actuelle, et en acceptant les limites de l’approche imagée et symbolique du texte sacré, que nous pouvons retrouver, de manière étonnante, l’ordre chronologique historique que nous indique la science dans les six jours successifs de la Genèse.

Epsilon
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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Epsilon » ven. 26 août 2011, 21:03

Cher Xavi

D’une part vous dites :
« En l’absence de témoignages historiques, c’est bien dans son imagination et dans les traditions de son époque que l’auteur du premier chapitre de la Genèse a dû plonger pour imaginer et raconter ce qu’il pensait avoir été le passé historique des humains et de toute la création »

Et d’autre part :
« Mais, comme croyants, nous pensons qu’à travers et avec les pensées humaines, l’Esprit Saint a agi simultanément pour nous donner une parole vraie sur ce passé historique. »

Pourquoi MAIS dans votre deuxième phrase … pourquoi une « lecture croyante » devrait nous faire lire un même passage différemment … passage portant sur des notions de cosmologie qui me semble n’ont pas un caractère « croyant » ???

Et quand bien même « l’Esprit saint a agi » (ce qui est le c as) … pourquoi voulez-vous qu’il fasse écrire une « réalité » des choses qui serait absolument incompréhensible aux premiers lecteurs (c'est pour cela qu'il utilise les connaissances d'époques) ... et que ses lecteur qcq 2000 ans après (notamment vous-même) cherchent un sens « caché » pour tenter une qcqconque concordance avec ce que nous enseigne la science ???

Vous dites :
« Il est certain que l’auteur humain ne s’engage pas sur une quelconque vérité scientifique précise. »

Ce n’est pas exactement qu’il ne « s’engage pas » puisqu’il n’en sait strictement rien … et qu’il est convaincu (avec les doutes d’usages) que ce qu’il lit sur le sujet dans d’autres traditions que la sienne reflète la « vérité » de son époque.

Vous dites :
« L’extrême imprécision du texte largement poétique et imagé de la Genèse ne permet pas d’y trouver un enseignement utilisable sur le plan scientifique. »

Ici aussi pour l’auteur biblique il ne saurait y avoir de « l’imprécision » dans ce texte … et qu’il est parfaitement convaincu d’être dans la réalité « scientifique » de son époque … mais n’ayant pas d’a priori par lui-même (les Hébreux étaient de parfait ignares la matière) il copie sur d’autres textes ce qu’il croit être la « vérité ».

Vous dites :
« Le seul fait qu’il provienne de l’imagination et de l’intuition ne suffit cependant pas pour l’exclure du champ scientifique »

Absolument … ce qui « l’exclu du champ scientifique » est la conséquence de ce que nous savons depuis lors … c’est pour cela (pour retomber sur nos pieds) que nous cherchons un « autre sens » !!!

Non non … les « grosse mailles » (du moins dans ce que je dis) sont UNIQUEMENT pour le premier verset de Genèse … et absolument pas pour la « chronologie des six jours » !!!

Ma phrase est peut-être mal construite … ce que je veux dire c’est que nous ne devons pas mettre le même pieds … les incertitudes scientifiques qui ressortent de Genèse ayant pour conséquences un rejet de ce texte en tant que description scientifique des évènements qu’il relate … avec, par exemple, la Résurrection qui aboutirait (suivant votre raisonnement initial) à aussi la rejeter en tant que « réalité » même sur le plan scientifique.

Ce que d’ailleurs vous semblez convenir dans ce deuxième message … mais vous poursuivez en disant :
« Cela n’exclut cependant pas des rapprochements. Les évènements en cause ont en commun que tous deux concernent non seulement la réalité historique, mais nous introduisent aussi au delà de cette réalité, par des récits qui, dans les deux cas, nous relatent des faits qui passent au delà des limites de la réalité historique. »

Il n’empêche que l’Eglise ne vous demande pas de « croire » à la réalité scientifique de la Création … alors que ce n’est pas le cas concernant la Résurrection … c’est dans cette optique que je dis (mais bon je m’aventure là ou je n’ai pas droit) qu’il y a « faute » !!!

De plus je vous ferais remarquer que des « résurrections » existent (en dehors de celle de Jésus) même au niveau de l’AT.

J’ai fait un topo (à partir d’un livre servant de trame) sur la Résurrection de Jésus … si cela vous (ou d’autres) intéresse faites moi signe.

Je m’excuse pour la fameuse « poubelle » !!!

Pour la fin de votre message … qu’il y ait une « réalité historique » dans le Big-Bang/Création (et autre Commencement des choses) … ne pose bien sûr aucun problème … là ou il y a problème (puisque chaque peuple veut décrire/définir son propre « commencement/origine ») c’est dans l’approche/description que les uns et autres font de ces évènements … et là nous devons nous interroger si, à la lumière de NOS connaissances ces descriptions décrivent oui/non ce qui c’est RÉELLEMENT passé.


Cordialement, Epsilon

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » sam. 27 août 2011, 20:41

Bonsoir Epsilon,

Merci pour votre message attentif d’un grand intérêt.
Epsilon a écrit : D’une part vous dites : « En l’absence de témoignages historiques, c’est bien dans son imagination et dans les traditions de son époque que l’auteur du premier chapitre de la Genèse a dû plonger pour imaginer et raconter ce qu’il pensait avoir été le passé historique des humains et de toute la création »
Et d’autre part : « Mais, comme croyants, nous pensons qu’à travers et avec les pensées humaines, l’Esprit Saint a agi simultanément pour nous donner une parole vraie sur ce passé historique. »
Pourquoi MAIS dans votre deuxième phrase … pourquoi une « lecture croyante » devrait nous faire lire un même passage différemment … passage portant sur des notions de cosmologie qui me semble n’ont pas un caractère « croyant » ???
La lecture « croyante » ouvre des sens cachés de l’auteur même. La psychanalyse moderne constate déjà des sens cachés dans toute parole humaine ordinaire, alors, a fortiori, la Parole de Dieu contient plus que ce que ses auteurs humains ont voulu consciemment y mettre.

Mais, ici, je n’ai pas d’arguments à présenter. C’est une conviction de l’Eglise que je partage. La Bible est vraiment la Parole de Dieu alors même qu’elle a été écrite entièrement par des hommes, de manière entièrement humaine.

Dans les Evangiles, on constate l’accomplissement de beaucoup de prophéties de l’Ancien Testament. Mais, il est plus que probable que les auteurs de ces prophéties n’imaginaient pas les évènements précis des Evangiles.

Ainsi par exemple, chacun peut constater la concordance entre le psaume 22 (21) et la crucifixion du Christ, or ni ce supplice, ni son application au Christ n’étaient probablement connus ou imaginables pour le psalmiste.

C’est le fait connu (la crucifixion du Christ) qui a révélé le sens du psaume.

Nos connaissances actuelles peuvent révéler des sens des textes de l’Ecriture non connus jadis.
Epsilon a écrit : Et quand bien même « l’Esprit saint a agi » (ce qui est le cas) … pourquoi voulez-vous qu’il fasse écrire une « réalité » des choses qui serait absolument incompréhensible aux premiers lecteurs (c'est pour cela qu'il utilise les connaissances d'époques) ... et que ses lecteur qcq 2000 ans après (notamment vous-même) cherchent un sens « caché » pour tenter une qcqconque concordance avec ce que nous enseigne la science ???
Les précisions scientifiques n’ont guère d’importance.

Pendant des siècles, les croyants d’autres générations ont pu trouver que le récit de la Genèse concordait avec leur vision scientifique. Ils retenaient l’essentiel : Dieu a créé tout ce qui existe.

Aujourd’hui, la science a apporté beaucoup de connaissances précises, et nous pouvons constater que cela concorde toujours aussi bien.

Ce qui compte, ce sont les traits essentiels de l’histoire de la création. Penser que Adam a été façonné en un instant avec de la glaise lors d’un sixième jour de 24 heures ou penser que la création du monde et de l’humanité s’est réalisée dans une durée de milliards d’années durant lesquelles diverses évolutions ont réalisé progressivement ce qu’est notre corps humain actuel, cela n’a pas d’importance pour la vie des humains, pour leur communion avec Dieu.

Ce qui a beaucoup d’importance c’est la création de Dieu et notre vocation éternelle, la révélation de ce que nous sommes et de ce que Dieu nous offre.

Et pour cela, il est de première importance de savoir que Dieu nous rejoint pleinement dans l’histoire. Bien sûr, par le Christ, mais aussi par la création, par son action dans le temps et dans l’espace. Nous ne sommes pas les fruits du hasard.
Epsilon a écrit : Vous dites : « Il est certain que l’auteur humain ne s’engage pas sur une quelconque vérité scientifique précise. »
Ce n’est pas exactement qu’il ne « s’engage pas » puisqu’il n’en sait strictement rien … et qu’il est convaincu (avec les doutes d’usages) que ce qu’il lit sur le sujet dans d’autres traditions que la sienne reflète la « vérité » de son époque.
Vous dites : « L’extrême imprécision du texte largement poétique et imagé de la Genèse ne permet pas d’y trouver un enseignement utilisable sur le plan scientifique. »
Ici aussi pour l’auteur biblique il ne saurait y avoir de « l’imprécision » dans ce texte … et qu’il est parfaitement convaincu d’être dans la réalité « scientifique » de son époque … mais n’ayant pas d’a priori par lui-même (les Hébreux étaient de parfait ignares la matière) il copie sur d’autres textes ce qu’il croit être la « vérité ».
Vos précisions me semblent correctes. C’est bien cela.
Epsilon a écrit : Vous dites : « Le seul fait qu’il provienne de l’imagination et de l’intuition ne suffit cependant pas pour l’exclure du champ scientifique »
Absolument … ce qui « l’exclu du champ scientifique » est la conséquence de ce que nous savons depuis lors … c’est pour cela (pour retomber sur nos pieds) que nous cherchons un « autre sens » !!!
Ce qui est exclu du champ scientifique, c’est la conception humaine des auteurs de l’époque actuellement dépassée, mais je ne peux que redire ici la conviction que la Parole de Dieu révèle bien davantage que les pensées humaines des auteurs humains des textes sacrés.
Epsilon a écrit : Non non … les « grosse mailles » (du moins dans ce que je dis) sont UNIQUEMENT pour le premier verset de Genèse … et absolument pas pour la « chronologie des six jours » !!!
Il me semble que notre dialogue démontre que ce n’est qu’un a priori que rien ne démontre.

J’espère que vous pourrez cependant vous réjouir à l’occasion des concordances objectivement constatées.
Epsilon a écrit : nous ne devons pas mettre le même pieds … les incertitudes scientifiques qui ressortent de Genèse ayant pour conséquences un rejet de ce texte en tant que description scientifique des évènements qu’il relate … avec, par exemple, la Résurrection qui aboutirait (suivant votre raisonnement initial) à aussi la rejeter en tant que « réalité » même sur le plan scientifique.
Ce que d’ailleurs vous semblez convenir dans ce deuxième message … mais vous poursuivez en disant : « Cela n’exclut cependant pas des rapprochements. Les évènements en cause ont en commun que tous deux concernent non seulement la réalité historique, mais nous introduisent aussi au delà de cette réalité, par des récits qui, dans les deux cas, nous relatent des faits qui passent au delà des limites de la réalité historique. »
Il me semble qu’ici, nous sommes d’accord, même si vous ajoutez :
Epsilon a écrit : Il n’empêche que l’Eglise ne vous demande pas de « croire » à la réalité scientifique de la Création … alors que ce n’est pas le cas concernant la Résurrection … c’est dans cette optique que je dis (mais bon je m’aventure là ou je n’ai pas droit) qu’il y a « faute » !!!
Votre réflexion est importante.

L’Eglise ne demande pas de croire aux détails de la réalité scientifique de la création d’abord parce que la Parole de Dieu n’en dit rien, et surtout parce que le texte très succinct et imagé de la Genèse est susceptible de multiples interprétations qui excluent actuellement toute certitude.

Mais, l’Eglise demande cependant de croire à certains faits qui sont objectivement de nature scientifique. Par exemple, le fait que nous descendons tous d’un premier couple humain (le monogénisme).

Même si une reconstruction de type scientifique de la résurrection et des apparitions du Christ nous échappe aussi largement, vous avez évidemment raison de relever que les faits historiques de la résurrection sont néanmoins incomparablement plus précis et que ne pas en tenir compte dans une comparaison avec la Genèse serait critiquable.
Epsilon a écrit : qu’il y ait une « réalité historique » dans le Big-Bang/Création (et autre Commencement des choses) … ne pose bien sûr aucun problème … là ou il y a problème (puisque chaque peuple veut décrire/définir son propre « commencement/origine ») c’est dans l’approche/description que les uns et autres font de ces évènements … et là nous devons nous interroger si, à la lumière de NOS connaissances ces descriptions décrivent oui/non ce qui c’est RÉELLEMENT passé.
Nos connaissances peuvent être éclairées par la Parole de Dieu.

Le texte biblique en hébreu est tellement riche d’images et de symboles au début de la Genèse, qu’il faut d’abord surtout vérifier si à la lumière de nos connaissances, de l’exégèse et de l’enseignement de l’Eglise, une interprétation contredite par la science ne doit pas être corrigée.

Ne prenons pas trop vite les descriptions que nous croyons lire et comprendre en lisant notre traduction française de la Genèse comme étant « la » bonne interprétation authentique.

Cherchons plutôt à lire les textes bibliques avec nos connaissances en même temps qu’à la lumière de la foi, fermement attachés à la conviction qu’il n’y a pas de contradiction entre les vérités de la foi et celles de la raison bien éclairée.

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Epsilon » dim. 28 août 2011, 16:01

Cher Xavi

Donc « en gros » nous sommes d’accord … ce qui nous sépare semble être, pour vous, un sens « caché » que vous attribuez à ces versets de Genèse … un peu comme une prophétie qui serait révélée que plus tard.

Et à juste titre vous mentionnez certaines prophéties de l’AT qui n’ont vue leur aboutissement/compréhension que suite au NT … aussi vous avez raison d'écrire: « Mais, il est plus que probable que les auteurs de ces prophéties n’imaginaient pas les évènements précis des Evangiles ».

Je vous répondrais que c’est le « principe » même des prophéties/oracles d’avoir plusieurs sens … voire même un sens « caché » qui ne sera révélé que sur le tard … mais est-ce la cas de nos versets de Genèse ???

En fait la question est pourquoi 6 jours et le 7ième Dieu se « repose » ??? pourquoi pas 3 ; 9 voire n’importe quel autre chiffre ???

Pour moi la réponse est « simple » … car une des rares choses « révolutionnaire » que nos ancêtres Hébreux nous ont légués se retrouve dans ce chiffre ... car même le Monothéisme, ne peut entièrement leur être imputé, du fait qu'il ne sera effectif que sur le tard ... dans un premier temps c’était plutôt de l’Hénothéisme ... qui consiste à donner une place prééminente à UN seul dieu sans pour autant nier l’existence d’autres dieux ou les dieux des autres peuples.

Pour qu’il y ait Monothéisme au sens strict … non seulement Dieu doit être Unique mais en plus il doit être Universel … cette deuxième condition ne commencera à être effective, dans le Judaïsme, qu’au retour de l’Exil notamment par les écrits du Deutero-Isaïe (et d’autres).

Donc pour revenir à cette chose « révolutionnaire » du Judaïsme archaïque c’est bien le Sabbat … au sens du repos « hebdomadaire » (nb. La décomposition de la semaine en 7 jours existait déjà chez les Mésopotamiens) … et pour mieux faire accepter qcqchose par le peuple rien ne vaut que d'en faire « remonter » la pratique jusqu’à Dieu c’était courant dans l'antiquité (voire même de nos jours !!!) … d’où le récit des 6 jours et le « repos » de Dieu le 7ième .

C’est pour cela, que pour moi, dés le départ ce récit n’a aucune assise scientifique … il n’est là que pour introduire (et donc faire accepter) le Sabbat.

Concernant le « monogénisme » vous avez raison au sujet de l’Eglise … mais il y a un mais (faut bien discuter).

La science actuellement est plus orientée vers le monogénisme que vers le polygénisme … ttfois il existe DEUX monogénismes … un au sens strict (un seul couple originaire) … et un au sens large (un seul phylum évolutif, mais qui toucherait un berceau spatio-temporel, commun à toute l’humanité) … dans les deux cas nous avons l’hypothèse monophylétique (qui garantie l’unicité de la race humaine).

En me référent au livre que j'ai déjà mentionné : « de la génétique à Dieu » de F. S. Collins ... le nombre de « fondateurs » (pour que statistiquement parlant l’émergence de l’homme moderne ait peu avoir lieu) est estimé à une population de 10.000 individus vivant il y a 100.000 à 150.000 ans en Afrique de l'Est.


Cordialement, Epsilon

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Re: L’ordre des six jours de la création est-il historique ?

Message non lu par Xavi » dim. 28 août 2011, 16:37

Hello Epsilon,

Merci pour vos précisions sur votre point de vue.

Il me semble que nous avons fait un large tour de la question.

Nous sommes d'accord sur beaucoup, mais nous gardons des approches différentes sur la question du sujet de ce fil.
Epsilon a écrit :c’est le « principe » même des prophéties/oracles d’avoir plusieurs sens …
pour moi, dés le départ ce récit n’a aucune assise scientifique … il n’est là que pour introduire (et donc faire accepter) le Sabbat.
Accepter plusieurs sens, puis continuer à exclure le sens historique et à opter pour un seul sens exclusivement ("que pour...")... ne permet guère d'avancer davantage.

[14 janvier 2012 : L’ensemble de mes messages de ce fil ont été revus et intégrés dans un ensemble de réflexions sur l’évolution, la création et l’incarnation intitulé « Adam et Eve : quelle réalité concrète ? » dont le document de travail actuel est disponible dans le sous-forum de l’Ecriture Sainte :
viewtopic.php?f=91&t=20369]

Ombiace
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Re: "Combien" Dieu nous aime -t-il ?

Message non lu par Ombiace » ven. 16 déc. 2022, 0:00

Didyme a écrit :
jeu. 15 déc. 2022, 21:09
Ombiace a écrit :
jeu. 15 déc. 2022, 18:45
Bonsoir DidymeFormons nous un tout avec Lui ?
Le verset suivant me semble répondre à la question :

"Tout a été créé par lui et pour lui. Il est avant toutes choses, et toutes choses subsistent en lui." (1 Colossiens 16-17)
Oui, c'est sans doute plus complet que ma formulation :)
Didyme a écrit :
jeu. 15 déc. 2022, 21:41
Xavi a écrit :
jeu. 15 déc. 2022, 20:46
Vous avez raison d’observer un achèvement que le récit biblique indique lui-même et aussi que ce qui est achevé n’est pas statique. Il reste, en effet, un développement par les créatures elles-mêmes et, particulièrement, par l’humain chargé de dominer tous les autres êtres de la création.

Rien ne permet, pour autant, de penser que Dieu cesse d'intervenir. Bien au contraire, puisqu'il s'est fait homme et nous fait bénéficier sans cesse de ses bienfaits. Il nous invite en toutes choses à agir en communion avec Lui.
Je pense surtout que Dieu nous créé à chaque instant.
Ce n'est pas comme s'il nous avait créé à un instant t et qu'ensuite nous avions l'existence en nous-même.
Dieu n'a pas cessé d'être Créateur.
Comment expliquez vous l'achèvement dont parle Gn2, 2

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Re: "Combien" Dieu nous aime -t-il ?

Message non lu par Didyme » ven. 16 déc. 2022, 1:21

Ombiace a écrit :Comment expliquez vous l'achèvement dont parle Gn2, 2
C'est-à-dire qu'on appréhende ce récit en terme de temporalité. Or, cela ne semble pas convenir à la divinité.

Je ne sais pas, serait-il incorrect de penser que l'achèvement de la création adviendra à la fin des temps ? Comme si, dans le temps, nous étions toujours dans l'activité créatrice. Le repos advenant dans l'éternité, à la fin des temps, le septième jour.
L'autre est un semblable.

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Re: "Combien" Dieu nous aime -t-il ?

Message non lu par Ombiace » ven. 16 déc. 2022, 8:09

Didyme a écrit :
ven. 16 déc. 2022, 1:21
C'est-à-dire qu'on appréhende ce récit en terme de temporalité. Or, cela ne semble pas convenir à la divinité.
Oui, si effectivement on en extrait que la dimension temporelle. Le texte parle bien de manière à incrémenter les jours les uns par rapport aux autres, mais il parle aussi d'un achèvement au 6ème jour. Il me semble par ailleurs que "divinité" ne suppose pas non plus la création d': "oeuvres perpétuellement inachevées"
Peut-être Xavi ou quelqu'un d'autre aurait le fin mot, car votre explication
Didyme a écrit :
ven. 16 déc. 2022, 1:21
Le repos advenant dans l'éternité, à la fin des temps, le septième jour.
signifierait des jours de 1000 ans ou plus.. ou j'ai mal compris.. Je ne peux cependant l'exclure, mais je trouve qu'elle fait moins "sens" que ma version
Ombiace a écrit :
jeu. 15 déc. 2022, 18:42
Dieu intervient Il Lui-même dans cette évolution créatrice, ou bien se contente t il d'apporter la croissance depuis le 8ème jour, et non plus de réalisation créées ? L'activité créatrice de Dieu serait terminée au profit de l'activité : "croître", dans laquelle Il ferait "traduire" sa dimension créatrice au travers du développement de la créature .. Je ne sais pas si ça tient debout. Qu'en pensez vous, svp ?
, et je ne sais pas si l'Eglise se prononce sur le sujet

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