Les étapes ou l’ordre successif des six jours du récit de la création sont-ils historiques sur le plan chronologique ?Pneumatis a écrit : je reste toujours un peu à distance (légère, mais quand même) de votre lecture de la Bible, surtout quand vous dites :
Xavi a écrit:
Le premier récit nous raconte en six grands tableaux les étapes successives d’achèvement des principales réalités historiques avec au sommet la création de l’humain, mâle et femelle, qui apparaît au bout du récit.
Il me semble, encore une fois, que les étapes de la création ne traitent pas de réalités historiques, dont l'une seraient l'Homme, mais traitent des principes de création de l'Homme, création qui est achevée au sixième jour.
Pour le côté "historique", voyez par exemple ce commentaire très intéressant de Rachi (Rabbi Shlomo ben Itzhak HaTzarfati)
Je connais tout le sérieux de l’approche des réalités historiques dans la Bible par Pneumatis et la question ne concerne ici que l’ordre de la succession des six jours de la Genèse par rapport à l’ordre chronologique réel de l’histoire et non la réalité historique de la création des divers éléments du monde et, en particulier, des humains.
Il faut admettre que la numérotation de 1 à 6 des jours de la création ne peut être abordée qu’avec beaucoup de prudence par rapport à une compréhension chronologique qui n’est qu’une approche parmi d’autres.
On peut penser, par exemple, à une approche graduelle en importance ou à une autre approche symbolique.
Et, même dans une approche chronologique, le point de vue peut se référer à des critères qui nous échappent par rapport à la chronologie historique. C’est ce qui a déjà été relevé dans le sujet précité lorsque la création de l’homme est évoquée avant celle des animaux.
La Parole de Dieu a été donnée pour toutes les générations aux connaissances scientifiques fort différentes.
Il est fort risqué d’y chercher un détail scientifique, mais il est téméraire d’affirmer sans réserve ou absolument une contradiction avec la vérité scientifique ou historique.
Il ne faut jamais oublier, lorsque nous rapprochons la science et la foi en présence d’un texte biblique, qu’un tel texte nous donne toujours une révélation non seulement sur la réalité terrestre mais aussi sur la réalité spirituelle. Un certain flou, comme à travers un voile, protège le lecteur d’une lecture trop terrestre par la seule intelligence cérébrale, séparée de sa nécessaire lecture spirituelle éclairée par l’Esprit Saint.
Le meilleur modèle pour comprendre cette double lecture simultanée requise par un texte biblique, qui doit englober tant la réalité incarnée la plus concrète que la réalité spirituelle qui ne peut être connue que par l’esprit, c’est probablement les textes sur la résurrection et les apparitions du Christ ressuscité.
Leur réalité historique est solidement attestée mais d’une manière qui échappe à nos tentatives de reconstruction matérielle d’un point de vue exclusivement terrestre. Il n’est pas là, puis il est là. Il mange. Il disparaît. Etc…
Cela me fait penser aux pixels de nos appareils photos numériques. Les récits historiques de l’Ecriture, y compris les récits du début de la Genèse, ne nous donnent-ils pas des perspectives comparables à des photographies de la réalité historique qui seraient en « 100 pixels » pour la Genèse ou en « 10.000 pixels » pour les Evangiles, et dont nous essayons souvent d’agrandir l’image pour qu’elle nous permette de voir les détails d’une photo en 3 ou 10 millions de pixels ?
Mais, comme sur nos écrans ou pour les vues par satellite sur Google Map, quand nous agrandissons l’image au delà des limites de ses précisions, nous cessons de voir de manière correcte.
Tout ce qui nous est possible, c’est la démarche inverse : nous disposons de photographies en « dix millions de pixels » qui nous sont fournies par les connaissances précises actuelles et nous pouvons essayer de comprendre la concordance des photos en « cent pixels » du texte de la Genèse.
Prenons garde aux dangers de la démarche inverse.
Si nous essayons de mettre dans le texte la précision que nous percevons aujourd’hui dans les photos de « dix millions de pixels » de la science, nous risquons beaucoup de démentis ou de contradictions lorsque nous aurons des photos de « cent millions de pixels ». Un concordisme de ce type peut apparaître à cet égard comme une vaine tentative d’enfermer le texte biblique dans des interprétations particulières.
Le nombre peu élevé de « pixels » des images et récits de la Bible nous protège de lectures trop uniquement terrestres qui ne donnent pas de place suffisante à la compréhension par le cœur et des inexactitudes que nous pouvons facilement y lire par nos interprétations, mais cela ne doit pas nous tromper cependant sur la vérité historique présente dans la Bible.
Les contradictions sont souvent dans nos lectures. Pas dans la parole de Dieu elle-même. Elle rejoint l’homme dans toute sa réalité, tant terrestre que spirituelle. Elle le rejoint aussi dans sa réalité historique et scientifique, mais toujours en le rejoignant aussi et pleinement dans sa réalité spirituelle. Un défi permanent pour l’intelligence de la foi.
Aussi, de manière générale, penser que les récits du début de la Genèse ne parlent « absolument pas » de l’histoire réelle ou de la réalité scientifique, c’est limiter sa portée et sa valeur de révélation pour « toute » notre réalité humaine qui n’est pas que spirituelle, mais qui est aussi bien concrète, terrestre et matérielle.
Les multiples nuances et la compréhension de la réalité historique que nous révèle la Genèse sont susceptibles de beaucoup d’erreurs, mais ces erreurs sont seulement à corriger. Elles ne peuvent justifier le rejet de la Genèse en dehors de la réalité historique.
Il faut, par contre, veiller attentivement à ce que toute interprétation de la Genèse, comme celle des autres textes de l’Ecriture, ne s’aventure pas en dehors des principes d’interprétation de l’Eglise donnés à de multiples reprises par le Magistère, ni en dehors de l’enseignement de l’Eglise.
C’est sur ces bases qu’il convient de réfléchir à la question particulière de l’historicité chronologique de l’ordre successif des six jours de la Genèse.
Le sujet de l’ordre chronologique de la création a déjà été abordé à plusieurs reprises dans le forum et spécialement dans deux sujets qui se trouvent l’un, dans le sous-forum de l’Ecriture Sainte : « Interprétation de la Genèse » :
viewtopic.php?f=91&t=3751
et l’autre, dans le sous-forum des Savoirs – Sciences et techno : « La Bible et l’Univers » :
viewtopic.php?f=27&t=11186
Comment raisonne le rabbi Schlomo cité par Pneumatis ?
Je me permets d’écarter d’emblée son affirmation selon laquelle « Le monde a été créé pour la Tora ». Nous pensons bien sûr que la loi est faite pour l’homme et non l’inverse. Nous croyons que l’humain est le but de la création.
Tout à fait d’accord sur la réflexion du rabbin concernant le mot « commencement ». Le « commencement » est un mot qui n’est pas un synonyme d’un « début » chronologique, historique. La « lumière » du premier jour n’est évidemment pas celle du soleil qui n’existe pas encore.Rabbi Schlomo a écrit : Au commencement, Eloqim créa : Ce texte demande, en fait, à être explicité. C’est comme nos maîtres l’ont expliqué : … Israël (…) est appelé « le “commencement” de Sa moisson » (Yirmeya 2, 3). Mais si tu veux l’expliquer selon le sens littéral, fais-le ainsi : Au commencement de la création des cieux et de la terre, alors que la terre était tohou et vohou et que les ténèbres..., Eloqim a dit : « que la lumière soit ! » Ce texte ne vient pas nous donner l’ordre de la création, nous dire que ces éléments ont été créés en premier. Si tel était le cas, le texte aurait dû porter barichona (« en premier lieu »), car on ne rencontre jamais le mot réchith dans la Bible sans qu’il soit lié au mot suivant. Exemples : « Au commencement (beréchith) du règne de Yehoyaqim » (Yirmeya 26, 1), « le commencement (réchith) de son royaume » (infra 10, 10), « les prémices (réchith) de ton blé » (Devarim 18, 4). Ici, de même, tu dois expliquer : « Au commencement, Eloqim créa... », comme s’il était écrit : beréchith bero, « au commencement de l’acte de la création », à rapprocher de : « au commencement (te‘hilath) où Hachem parla à Hoché‘a » (Hoché‘a 1, 2), c’est-à-dire : « au commencement de la parole adressée par le Saint béni-Soit-Il à Hoché‘a, Hachem dit à Hoché‘a. ». Peut-être persisteras-tu à soutenir que ce qu’on nous apprend ici, c’est qu’ils [à savoir le ciel et la terre] ont été créés en premier, et que le texte veut dire : « au commencement de tout, Eloqim créa le ciel et la terre », car il arrive que certains textes bibliques, dans leur concision, omettent un mot, comme dans : « pour n’avoir pas tenu closes les portes du sein qui m’avait conçu » (Iyov 3, 10) où l’on ne précise pas qui les a fermées. « On emportera les richesses de Damas » (Yecha’ya 8, 4), où l’on ne dit pas qui les emportera. « Le laboure-t-on avec des bœufs ? » (‘Amos 6, 12), sans que l’on précise si c’est un homme qui laboure avec des bœufs. « Dès le début, j’annonce la fin » (Yecha’ya 46, 10), où l’on ne dit pas : « j’annonce dès le début des choses la fin des choses ».
Mais, rien ne peut en être déduit nécessairement en ce qui concerne la chronologie ou l’absence de chronologie des faits relatés au début de la Genèse.
La réalité historique elle-même ne peut pas être étudiée en oubliant que le temps et l’espace de sa chronologie sont des instruments de mesure de notre cerveau terrestre. Impossible de parler en vérité de la création de Dieu en enfermant d’emblée l’histoire dans le cadre d’une approche humaine dans le temps.
Tout ne commence pas avec un début dans le temps mesuré par notre cerveau. Les instruments de mesure du temps et de l’espace qui nous sont donnés par Dieu portent en eux-mêmes une perspective éternelle et infinie qui empêche de saisir un « début » dans l’histoire. Notre cerveau, celui de tout scientifique et de tout historien, ne peut ni mettre une limite au temps ou l’espace, ni concevoir un début ou une fin : s’il conçoit un début, qu’y a-t-il juste avant ? s’il conçoit une fin, qu’y a-t-il juste après ?
Notre compréhension intellectuelle de la réalité historique du passé s’épuisera toujours inévitablement, en essayant de remonter le plus loin possible dans le temps, dans un tohu bohu inaccessible à notre seul cerveau qui ne peut dépasser clairement les mesures du temps et de l’espace.
En ce qui concerne le commencement, la citation du rabbin Schlomo ne concerne pas seulement la réalité historique et ce que les six jours de la création nous en disent, mais la création « du ciel et de la terre », ce qui vise ici le monde spirituel, y compris les anges, et le monde matériel (pas seulement notre planète terre, mais toute la réalité matérielle de l’univers).
Comme dans toute l’Ecriture Sainte, il y a ici une double réalité (spirituelle et matérielle) qui échappe à notre seul cerveau qui perçoit tout dans le temps et l’espace, selon ses instruments de mesure et de perception de la réalité.
N’est-il pas normal, dans ces conditions, d’utiliser un mot particulier pour essayer de nous révéler le « commencement » ou l’origine de la réalité de la création tant spirituelle que matérielle d’une manière qui transcende la seule approche de notre cerveau terrestre, la notion réductrice d’un « début » qui ne correspond pas vraiment à la vérité sur le passé ?
N’est-il pas inévitable de constater que la notion de chronologie est déjà un point de vue uniquement terrestre qui doit être transcendé pour exprimer ce « commencement » en vérité ?
C’est bien plus qu’un simple début chronologique, qu’un moment saisi par notre cerveau terrestre. Le ciel, la réalité spirituelle, échappe à une compréhension par notre seul cerveau, à la mesure du temps qu’il utilise.
Il me semble qu’il n’y a pas de désaccord sur ce point.
Pour la suite, par contre, le rabbin raisonne de manière non convaincante.
Ce mode de raisonnement est souvent utilisé pour écarter l’historicité de nombreux récits bibliques. Il prend une interprétation littérale « au pied de la lettre », il constate une contradiction avec nos connaissances, et, au lieu de corriger l’interprétation, il en déduit une conclusion générale : le texte est étranger aux réalités historiques !Rabbi Schlomo a écrit : tu devrais être toi-même étonné, car les eaux ont précédé la terre, puisqu’il est écrit : « et le souffle de Eloqim planait sur la face des eaux » (verset 2), alors que le texte ne nous a pas encore révélé quand les eaux ont été créées. Il faut donc en conclure que les eaux ont existé avant la terre. En outre, les cieux (chamayim) ont été formés à partir du feu (éch) et de l’eau (mayim) ('Haguiga 12a). Force est donc d’admettre que le texte ne nous enseigne absolument pas l’ordre chronologique de la création (Beréchith raba 1, 6, Wayiqra raba 36,4).
Le raisonnement ne manifeste-t-il pas d’emblée sa faiblesse par le mot excessif de « absolument ». Qui peut prétendre exclure « absolument » la portée de la vérité de la révélation par la Parole de Dieu ?
En fait, il faut constater que le raisonnement du rabbin se base entièrement sur une interprétation stricte et univoque des mots « eaux », « terre », et « cieux » que rien n’impose et tire des conclusions que rien n’impose davantage.
Il observe avec exactitude que le texte biblique ne révèle pas « quand les eaux ont été créées », mais il n’explique, ni ne justifie en rien pourquoi il soutient devoir en « conclure » « que les eaux ont existé avant la terre », ni en quoi cela présenterait une contradiction incompatible avec une chronologie historique parce que les eaux ne pourraient exister avant la création de la terre. Comment le souffle de Dieu peut-il planer sur les « eaux » alors que les eaux ne sont pas encore créées ? Comment séparer les eaux des eaux ?
Le rabbin Schlomo ne semble pas prendre en compte ici les divers sens des mots quand il évoque les « eaux » et la « terre ».
Nulle part, il n’est dit que les « eaux » sont créées « après » la « terre ».
Attention ! Dans le commencement de la création du premier verset de la Genèse, quand Dieu crée « le ciel et la terre », le mot terre vise toute la réalité matérielle y compris l’eau ainsi que toute l’étendue de l’univers créé et non notre seule planète.
Dès le second verset et jusqu’à la fin du troisième jour, les eaux se distinguent de l’étendue du ciel et de la terre. Ici, le mot terre vise le solide, le sec, comme le texte le dit expressément. Ce n’est pas non plus exclusivement notre planète. Le mot ciel paraît viser désormais tout l’univers de la création matérielle et non plus la réalité spirituelle.
L’exactitude scientifique de ce qui est relaté est assez étonnante.
On peut imaginer de l’eau en forme gazeuse dès avant le big bang et avant la formation de la terre matérielle, voire de toutes les planètes, de tous les éléments solides de l’univers.
Les constituants chimiques qui forment l’eau (qui n’est qu’un composé d’hydrogène et d’oxygène) sont bien plus élémentaires que la richesse complexe de la terre et de la plupart de ses composants.
De manière moins précise que le sens moderne, le mot « eaux » peut viser des réalités plus étendues que l’eau de nos rivières ou des mers. Rien n’impose de donner au mot « eaux » le sens restrictif du même mot dans le sens actuel.
La science ne conteste pas que des eaux ou d’autres composés simples ont pu précéder dans un état gazeux la création des éléments solides de l’univers, ni que des masses gazeuses ont pu se séparer avant que du solide n’apparaisse en plusieurs d’entre elles pour former des planètes ou d’autres éléments solides dans l’univers.
Il faut relever aussi les incertitudes du mot « cieux » dans le raisonnement du rabbin Schlomo. C’est déjà par une interprétation incertaine du début de la Genèse que le rabbin Schlomo affirme que les cieux sont formés à partir du feu et de l’eau. Mais, la réflexion du rabbin mélange surtout des sens différents du mot « cieux ». Il ne faut pas confondre ce mot, tel qu’il est utilisé par le Christ lorsqu’il nous dit « Le royaume des cieux est parmi vous » ou qu’il nous invite à prier notre Père « qui est aux cieux », ce qui vise la réalité spirituelle (au commencement, Dieu créa les cieux et la terre), avec le même mot lorsqu’il est utilisé pour désigner les nuages dans le « ciel » ou l’espace immense de l’univers avec les galaxies, les étoiles, les planètes (le second jour, Dieu créa du sec, du solide appelé « terre » et appela l’étendue « ciel »).
Il faut éviter des interprétations littérales dans un sens contredit par le texte lui-même. Les mots « lumière » et « nuit », comme les mots « eaux », « ciel » et « terre » ne peuvent se référer, dans l’ordre chronologique contesté, à la lumière qui nous vient du soleil avant sa création ou à l’eau qui provient des nuages et qui coule dans ses rivières de la planète terre avant sa création.
Ce qui me semble devoir être compris et corrigé ici c’est le sens des mots utilisés et non nécessairement l’ordre chronologique. Les premiers versets du récit de la Genèse nous parlent d’une réalité antérieure à nos connaissances historiques. Les mots utilisés sont inévitablement des images par rapport à nos connaissances et pour notre intelligence puisqu’ils nous parlent d’une réalité qui dépassent nos perceptions dans le temps.
Le texte nous conduit de l’origine, qui échappe à la perception dans le temps, à la création des humains qui peut être située dans le temps. Le récit passe de ce qui est en dehors de la perception chronologique de l’histoire à ce que nous pouvons percevoir dans l’histoire.
Les mots nous introduisent dans la réalité historique en passant d’un sens vers l’autre. On passe du ciel de la réalité spirituelle au ciel de l’étendue de l’univers. On passe de la terre de la réalité matérielle à la terre solide qui se sépare des eaux, puis à la planète terre. On passe des eaux dans l’univers aux eaux qui se rassemblent pour former des rivières et des mers.
En négligeant ces changements de sens et l’évolution de notre univers qu’ils expriment, le rabbin Schlomo ne peut que constater une impasse pour une approche historique dans le temps. Mais l’impasse ne se trouve que dans les prémisses non justifiées de son raisonnement.
Le temps ne peut pas saisir la réalité spirituelle des cieux. Mais, en considérant que les mêmes mots ont des sens différents, le raisonnement du rabbin et son rejet de l’historicité perdent leur justification.
En acceptant les sens différents donnés aux mots utilisés, nous pouvons constater qu’il n’y a pas de contradiction entre une compréhension chronologique des jours de la Genèse et les connaissances scientifiques les plus pointues.
La réalité physique de la lumière comme celle du feu, aussi évoquée par le rabbin Schlomo, est aux limites de nos connaissances. On peut constater que le Big Bang, qui semble l’événement majeur de la réalité la plus lointaine actuellement perçue, a certainement dégagé une lumière et un feu intenses.
Ceci étant dit, il faut rester très prudent, car les connaissances scientifiques ne cessent d’évoluer et il serait téméraire de prétendre déduire une affirmation scientifique du texte biblique, car ce serait confondre une interprétation particulière du texte avec le texte lui-même.
On peut cependant admirer la concordance, même si la prudence doit rester très grande par rapport aux reconstructions de nos interprétations selon nos connaissances actuelles.
En fait, affirmer que l’ordre chronologique des six jours du récit de la Genèse ne concerne absolument pas l’ordre chronologique historique paraît surtout une affirmation a priori, parce que rien dans le texte, ni dans les connaissances scientifiques et historiques actuelles ne l’impose.
Au contraire.
Les étapes (dans le sens de l’apparition de « formes » nouvelles ou d’une présence de créatures à un stade de l’histoire non présentes sous une forme particulière à un stade plus ancien) sont des réalités historiques certaines.
Prenez un chien. Si vous remontez dans sa lignée biologique, vous trouverez, il y a un milliard d’années, des ancêtres biologiques de ce chien qui ne ressemblaient guère aux chiens actuels.
Si vous remontez de plusieurs milliards d’années, vous ne trouverez peut-être que des ancêtres de type aquatiques, voire des ensembles cellulaires chimiques plus proches de nos végétaux que de nos animaux.
Dans la réalité historique comme dans une approche scientifique, on peut situer des « étapes chronologiques » même si celles-ci n’émergent pas brusquement, comme beaucoup l’ont imaginé jadis, mais apparaissent progressivement dans la continuité.
Il en est ainsi de l’humain. L’athée comme le croyant affirment sans hésitation qu’il n’y avait pas d’humain il y a un milliard d’années. Il est donc correct tant pour la lecture biblique que pour la lecture de l’histoire ou par la science de considérer la présence d’humains comme une étape dans l’histoire du monde.
La Genèse nous parle de la réalité historique, mais elle le fait en vérité, selon le point de vue de Dieu, et non selon un point de vue purement humain, dans un but scientifique.
La science ne parle qu’à notre cerveau, la Parole de Dieu parle à notre être entier, selon ses besoins essentiels. Elle ne se contente pas de dire un pourquoi des choses, elle nous dit aussi le comment, mais seulement dans la mesure réellement nécessaire et en considérant toute la réalité, terrestre mais aussi spirituelle.
Pour la science, qui s’inscrit de son point de vue dans une continuité du temps dans laquelle la notion d’achèvement n’a pas de sens (rien ne se crée, rien ne se perd), il n’y a pas d’achèvement au sens absolu, mais bien des étapes constatées.
Pour la foi, il y a bien, au delà des étapes (les six jours), un moment où la création par Dieu est achevée parce que le but est atteint et que ce but c’est l’humain. L’Humain est bien une étape historique.
C’est déjà vrai pour la science qui considère la présence de l’humain dans une continuité historique depuis le Big Bang. C’est aussi vrai du point de vue de la foi. Il n’y a pas toujours eu sur la terre des êtres dotés d’une âme immortelle. Il y a eu création à un moment et à un endroit bien précis dans l’histoire.
Et cette création a été achevée à un moment de l’ordre chronologique de l’histoire. Non soudainement, mais après une longue évolution qui a fait apparaître les diverses espèces de créatures que nous connaissons aujourd’hui.
Pourquoi contester cet ordre chronologique, tel qu’il nous est présenté pour l’essentiel dans la Genèse, lorsqu’on peut constater que son récit peut être interprété en concordance avec l’ordre chronologique que nous révèle la science ?