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Poèmes en liberté

Publié : jeu. 05 oct. 2017, 20:48
par elenos
FRANCE - I

Je vous salue ma France ...
Louis ARAGON (1897-1982)

Lorsque vo (us reviendrez car il faut revenir
Il y aura des fleurs tant que vous en voudrez
Il y aura des fleurs couleur de l'avenir
Il y aura des fleurs lorsque vous reviendrez

Vous prendrez votre place où les clartés sont douces
Les enfants baiseront vos mains martyrisées
Et tout à vos pieds las redeviendra de mousse
Musique à votre coeur calme où vous reposer

Haleine des jardins lorsque la nuit va naître
Feuillages de l'été profondeur des prairies
L'hirondelle tantôt qui vint sur la fenêtre
Disait me semble-t-il Je vous salue Marie

oût-septembre 1943, Le Musée Grévin
Editions de Minuit sous le pseudonyme de François la Colère

____________________________________________________

Anna de NOAILLES (1876-1933)
Ma France
Anna de Noailles

Ma France, quand on a nourri son coeur latin
Du lait de votre Gaule,
Quand on a pris sa vie en vous, comme le thym,
La fougère et le saule,

Quand on a bien aimé vos forêts et vos eaux,
L'odeur de vos feuillages,
La couleur de vos jours, le chant de vos oiseaux,
Dès l'aube de son âge,

Quand amoureux du goût de vos bonnes saisons
Chaudes comme la laine,
On a fixé son âme et bâti sa maison
Au bord de votre Seine,

Quand on n'a jamais vu se lever le soleil
Ni la lune renaître
Ailleurs que sur vos champs, que sur vos blés vermeils,
Vos chênes et vos hêtres,

Quand jaloux de goûter le vin de vos pressoirs ;
Vos fruits et vos châtaignes,
On a bien médité dans la paix de vos soirs
Les livres de Montaigne,

Quand pendant vos étés luisants, où les lézards
Sont verts comme des fèves,
On a senti fleurir les chansons de Ronsard
Au jardin de son rêve,

Quand on a respiré les automnes sereins
Où coulent vos résines,
Quand on a senti vivre et pleurer dans son sein
Le coeur de Jean Racine,

Quand votre nom, miroir de toute vérité,
Émeut comme un visage,
Alors on a conclu avec votre beauté
Un si fort mariage

Que l'on ne sait plus bien, quand l'azur de votre oeil
Sur le monde flamboie,
Si c'est dans sa tendresse ou bien dans son orgueil
Qu'on a le plus de joie...

Poésie, poèmes

Publié : sam. 02 déc. 2017, 0:23
par elenos
Quinze .... vingt ans

Quinze ans ! ô Roméo ! l'âge de Juliette !
L'âge où vous vous aimiez ! où le vent du matin,
Sur l'échelle de soie, au chant de l'alouette,
Berçait vos longs baisers et vos adieux sans fin !
Quinze ans ! - l'âge céleste où l'arbre de la vie,
Sous la tiède oasis du désert embaumé,
Baigne ses fruits dorés de myrrhe et d'ambroisie,
Et, pour féconder l'air comme un palmier d'Asie,
N'a qu'à jeter au vent son voile parfumé !
Quinze ans ! - l'âge où la femme, au jour de sa naissance,
Sortit des mains de Dieu si blanche d'innocence,
Si riche de beauté, que son père immortel
............. en fit l'age éternel !

Musset
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Re: Poésie, poèmes

Publié : mar. 05 déc. 2017, 18:56
par elenos
J’ai dans le cœur ine fontaine
Un arbre un banc et ses secrets
Et le anglot qui vient après …
Quend les souvenirs se déchainent

….
Mais j’ai surtout un quai de gare
Où se brise un cœur de seize ans
Et le baiser que mai,tenant
Je donne aux cours qui se séparent

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Poèmes en liberté

Publié : jeu. 21 déc. 2017, 17:38
par elenos
SAGESSE (Paul Verlaine)

Sagesse d'un Louis Racine, je t'envie !
O n'avoir pas suivi les leçons de Rollin,
N'être pas né dans le grand siècle à son déclin,
Quand le soleil couchant, si beau, dorait la vie,

Quand Maintenon jetait sur la France ravie
L'ombre douce et la paix de ses coiffes de lin,
Et royale abritait la veuve et l'orphelin,
Quand l'étude de la prière était suivie,

Quand poète et docteur, simplement, bonnement,
Communiaient avec des ferveurs de novices,
Humbles servaient la Messe et chantaient aux offices

Et, le printemps venu, prenaient un soin charmant
D'aller dans les Auteuils cueillir lilas et roses
En louant Dieu, comme Garo, de toutes choses !

Poèmes en liberté

Publié : lun. 09 avr. 2018, 17:44
par elenos
C'est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, lèvre bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.


Arthur Rimbaud
octobre 1870

Poèmes en liberté

Publié : dim. 29 avr. 2018, 19:11
par elenos
On aime sa jeunesse, on veut la garder toute
Mais on en voit le but plus proche qu’on l’eut cru
Comme un enfant qui joue en courant sur la route
Et se tourne étonné du chemin parcouru.

Jean-Jacques Raymond -Les bouquets dispersés
(placer le titre en recherche sur le web)et de jol



Gérard de NERVAL (1808-1855)

La cousine
L'hiver a ses plaisirs ; et souvent, le dimanche,
Quand un peu de soleil jaunit la terre blanche,
Avec une cousine on sort se promener...
- Et ne vous faites pas attendre pour dîner,

Dit la mère. Et quand on a bien, aux Tuileries,
Vu sous les arbres noirs les toilettes fleuries,
La jeune fille a froid... et vous fait observer
Que le brouillard du soir commence à se lever.

Et l'on revient, parlant du beau jour qu'on regrette,
Qui s'est passé si vite... et de flamme discrète :
Et l'on sent en rentrant, avec grand appétit,
Du bas de l'escalier, - le dindon qui rôtit.

Re: Poèmes en liberté

Publié : lun. 30 avr. 2018, 1:49
par Cinci
La croix

Dans la croix est la vie
Et le réconfort.
Et l'unique chemin
Qui mène au ciel.

Sur la croix est le Seigneur
Du ciel et de la terre.
En elle on jouit d'une grande paix,
Même au milieu de la guerre,
Elle bannit tous les maux
D'ici-bas.
Elle est l'unique chemin
Qui mène au ciel.

De la croix, l'épouse dit
A son Bien-Aimé.
Qu'elle est le palmier précieux
Sur lequel il est monté;
Dont le fruit fut savouré
Par le Dieu du ciel.
Oui, elle est l'unique chemin
Qui mène au ciel.

Elle est un olivier précieux
La sainte croix
Qui nous oint de son huile,
Nous donne la lumière;
Ô mon âme, prends la croix
Avec grand réconfort,
Elle est l'unique chemin
Qui mène au ciel.


La croix est l'arbre verdoyant
Le désir
De l'épouse qui, à son ombre
s'est assise
Pour jouir de son Bien-Aimé,
Le Roi du ciel.
Elle est l'unique chemin
Qui mène au ciel.

Pour l'âme qui tout à Dieu
S'est soumise,
Et du monde vraiment
Est déprise,
La croix est l'arbre de vie
Et de réconfort;
Elle est un chemin de délices
Qui mène au ciel.

Depuis que s'est couché sur la croix
Le Sauveur,
Dans la croix est la gloire
Et l'honneur;
Et dans le support des douleurs,
Est la ve et le bonheur,
Et le chemin le plus sûr
Pour aller au ciel.

- Sainte Thérèse d'Avila

Re: Poèmes en liberté

Publié : ven. 25 mai 2018, 18:44
par elenos
La Vie antérieure
Charles Baudelaire

J’ai longtemps habité sous de vastes portiques
Que les soleils marins teignaient de mille feux,
Et que leurs grands piliers, droits et majestueux,
Rendaient pareils, le soir, aux grottes basaltiques.

Les houles, en roulant les images des cieux,
Mêlaient d’une façon solennelle et mystique
Les tout-puissants accords de leur riche musique
Aux couleurs du couchant reflété par mes yeux.

C’est là que j’ai vécu dans les voluptés calmes,
Au milieu de l’azur, des vagues, des splendeurs
Et des esclaves nus, tout imprégnés d’odeurs,

Qui me rafraîchissaient le front avec des palmes,
Et dont l’unique soin était d’approfondir
Le secret douloureux qui me faisait languir.

Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal

Re: Poèmes en liberté

Publié : mer. 30 mai 2018, 23:29
par Amandina
  • L'heure du berger

    La lune est rouge au brumeux horizon ;
    Dans un brouillard qui danse, la prairie
    S'endort fumeuse, et la grenouille crie
    Par les joncs verts où circule un frisson ;

    Les fleurs des eaux referment leurs corolles ;
    Des peupliers profilent aux lointains,
    Droits et serrés, leurs spectres incertains ;
    Vers les buissons errent les lucioles ;

    Les chats-huants s'éveillent, et sans bruit
    Rament l'air noir avec leurs ailes lourdes,
    Et le zénith s'emplit de lueurs sourdes.
    Blanche, Vénus émerge, et c'est la Nuit.

    Paul Verlaine

Re: Poèmes en liberté

Publié : jeu. 14 juin 2018, 18:02
par elenos
VENI, VIDI, VIXI

J’ai bien assez vécu, puisque dans mes douleurs
Je marche, sans trouver de bras qui me secourent,
Puisque je ris à peine aux enfants qui m’entourent,
Puisque je ne suis plus réjoui par les fleurs ;

Puisqu’au printemps, quand Dieu met la nature en fête,
J’assiste, esprit sans joie, à ce splendide amour ;
Puisque je suis à l’heure où l’homme fuit le jour ;
Hélas ! et sent de tout la tristesse secrète ;

Puisque l’espoir serein de mon âme est vaincu ;
Puisqu’en cette saison des parfums et des roses,
O ma fille ! j’aspire à l’ombre où tu reposes,
Puisque mon coeur est mort, j’ai bien assez vécu.

Je n’ai pas refusé ma tâche sur la terre.
Mon sillon ? Le voilà. Ma gerbe ? La voici.
J’ai vécu souriant, toujours plus adouci,
Debout, mais incliné du côté du mystère.


J’ai fait ce que j’ai pu ; j’ai servi, j’ai veillé,
Et j’ai vu bien souvent qu’on riait de ma peine.
Je me suis étonné d’être un objet de haine,
Ayant beaucoup souffert et beaucoup travaillé.

Dans ce bagne terrestre où ne s’ouvre aucune aile,
Sans me plaindre, saignant, et tombant sur les mains,
Morne, épuisé, raillé par les forçats humains,
J’ai porté mon chaînon de la chaîne éternelle.

Maintenant, mon regard ne s’ouvre qu’à demi ;
Je ne me tourne plus même quand on me nomme ;
Je suis plein de stupeur et d’ennui, comme un homme
Qui se lève avant l’aube et qui n’a pas dormi.

Je ne daigne plus même, en ma sombre paresse,
Répondre à l’envieux dont la bouche me nuit.
O seigneur ! ouvrez-moi les portes de la nuit
Afin que je m’en aille et que je disparaisse !

Victor Hugo a 46 ans avril 1848

Re: Poésie, poèmes

Publié : jeu. 14 juin 2018, 19:43
par elenos
J’ai dans le cœur une fontaine
Un arbre un banc et ses secrets
Et le anglot qui vient après …
Quend les souvenirs se déchainent

….
Mais j’ai surtout un quai de gare
Où se brise un cœur de seize ans
Et le baiser que mai,tenant
Je donne aux cours qui se séparent

Jean-Jacques Raymond toutes librairies en ligne)


Les écrits de Jean-Jacques Raymond :
http://www.sa-autrement.com/97828121113 ... ues-raymon

Re: Poésie, poèmes

Publié : jeu. 14 juin 2018, 19:48
par elenos

Re: Poèmes en liberté

Publié : dim. 17 juin 2018, 22:03
par elenos
: Arthur Rimbaud (1854-1891)
Recueil : Poésies (1870-1871).

Noirs dans la neige et dans la brume,
Au grand soupirail qui s'allume,
Leurs culs en rond,

A genoux, cinq petits, - misère ! -
Regardent le Boulanger faire
Le lourd pain blond.

Ils voient le fort bras blanc qui tourne
La pâte grise et qui l'enfourne
Dans un trou clair.

Ils écoutent le bon pain cuire.
Le Boulanger au gras sourire
Grogne un vieil air.

Ils sont blottis, pas un ne bouge,
Au souffle du soupirail rouge
Chaud comme un sein.

Quand pour quelque médianoche,
Façonné comme une brioche
On sort le pain,

Quand, sous les poutres enfumées,
Chantent les croûtes parfumées
Et les grillons,

Que ce trou chaud souffle la vie,
Ils ont leur âme si ravie
Sous leurs haillons,

Ils se ressentent si bien vivre,
Les pauvres Jésus pleins de givre,
Qu'ils sont là tous,

Collant leurs petits museaux roses
Au treillage, grognant des choses
Entre les trous,

Tout bêtes, faisant leurs prières
Et repliés vers ces lumières
Du ciel rouvert,

Si fort qu'ils crèvent leur culotte
Et que leur chemise tremblote
Au vent d'hiver.

Arthur Rimbaud.

Re: Poèmes en liberté

Publié : jeu. 19 juil. 2018, 13:48
par elenos
Félix Arvers, (1806-1850) ami de Ch. Nodie et de V.Hugo, oète du dix-neuvième siècle, est devenu célèbre par ce seul poème, un sonnet évoquant le mystère d'un amour caché pour une femme inconnue. Une expérience douloureuse de la passion s'y exprime dans le registre lyrique, tandis que s'y dessine une image particulière de l'amour et de la femme.

SONNET D'ARVERS

Mon âme a son secret, ma vie a son mystère:
Un amour éternel en un moment conçu.
Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû le taire,
Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su.

Hélas! j’aurai passé près d’elle inaperçu,
Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire,
Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre,
N’osant rien demander et n’ayant rien reçu.

Pour elle, quoique Dieu l’ait faite douce et tendre,
Elle ira son chemin, distraite, et sans entendre
Ce murmure d’amour élevé sur ses pas;

A l’austère devoir pieusement fidèle,
Elle dira, lisant ces vers tout remplis d’elle:
«Quelle est donc cette femme?» et ne comprendra pas.

Félix Arvers

Suvent mos en musique il fur chanté vers 1980 par Serge Gainsbourg
[url]
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sonnet_d%27Arvers[/url]

Re: Poèmes en liberté

Publié : dim. 29 juil. 2018, 18:17
par elenos
Des dames se plaisaient à faire réciter par un garçon de 6 ans ce ooème de
Théophile Gauthier (1811-1872)
.
Ce n'est pas vous, non, madame, que j'aime,
Ni vous non plus, Juliette, ni vous,
Ophélia, ni Béatrix, ni même
Laure la blonde, avec ses grands yeux doux.

Celle que j'aime, à présent, est en Chine ;
Elle demeure, avec ses vieux parents,
Dans une tour de porcelaine fine,
Au fleuve jaune, où sont les cormorans ;

Elle a des yeux retroussés vers les tempes,
Un pied petit, à tenir dans la main,
Le teint plus clair que le cuivre des lampes,
Les ongles longs et rougis de carmin ;

Par son treillis elle passe sa tête,
Que l'hirondelle, en volant, vient toucher,
Et, chaque soir, aussi bien qu'un poète,
Chante le saule et la fleur du pêcher.

Théophile Gautier (1811-1872)