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par MB » lun. 15 oct. 2007, 19:10
Re
Pour en rester au débat. On peut voir, comme l'a remarqué Metazet, à quel point la question du sexe est "clivante" et provoque toutes sortes de crispations... beaucoup plus que les autres, c'est, semble-t-il, LE sujet de disccussion (ou d'insultes) qui fait que le monde occidental européen rejette l'Eglise. Quand on observe finement la substance réelle, le substrat, des arguments lancés par nombre d'adversaires de l'Eglise, on s'aperçoit, au fond, que tout tourne autour du sexe. Le reste fait en général objet de consensus ; mais quand on polémique, sur quelque sujet que ce soit, la toile de fond, soyons honnêtes, c'est l'existence ou non du "droit au sexe".
J'avais vu le site d'un prêtre qui donnait des conseils en discernement, et qui livrait, désolé, les réflexions suivantes : dans le sexe, il y a deux aspects, l'un sérieux, lié à la procréation, à la morale, aux enjeux graves de ces choses, et l'autre léger, lié aux roucoulades des amoureux, à la tendresse entre gens qui s'aiment, et au plaisir qui s'ensuit en général. Le léger avait autant sa place que le sérieux ; malheureusement, la société ne parlait que du léger, et d'après lui, trop longtemps l'Eglise n'avait parlé que du sérieux. D'où cette espèce d'énervement permanent, de part et d'autre. On le voit ici...
- Bon, alors essayons de suivre une autre voie - puisque les actuelles mènent à la crispation - afin de voir pourquoi il est légitime d'associer des enjeux moraux, et pourquoi pas des interdits, à toutes ces questions, et pourquoi l'Eglise a quelque chose à dire à ce sujet. Non ?
Tiens, un exemple précis. Il y a des femmes qui apprécient particulièrement une situation sexuelle de domination machiste ; sans aller jusqu'au SM (ça, c'est une autre question), elles sont titillées par le côté "gorille hautain" de certains hommes qui eux, sont ravis d'en profiter. Certains hommes sont odieux ; et certaines femmes savent les apprécier. A priori, tout va bien, les deux sont consentants. Circulez, y a rien à voir.
A ce problème près que les comportements mis en jeu ici sont particulièrement pénibles. Dans l'exemple donné (je précise bien que c'est un exemple précis, et pas une généralité sur les rapports homme-femme), d'un côté, l'homme en question satisfait ses pulsions de domination et d'humiliation (il se permet donc de traiter sa partenaire comme une serpillère - "ben quoi, c'est ce qu'elle veut") ; de l'autre côté, la femme en question recherche chez le mâle ce qu'il y a de pire en lui et ne s'intéresse pas au reste. Chacun utilise l'autre comme un outil de son propre plaisir. Supposons que ce plaisir soit réel et réellement obtenu ; reste quand même un malaise, on peut l'avouer.
Le problème de cette situation précise, finalement, n'est pas spécifiquement sexuel : c'est qu'on a affaire à deux personnes qui, dans un contexte donné, se servent chacune de l'autre comme d'un kleenex, sans égard à sa personnalité, sans égard à sa dignité et à ses vraies qualités. On ne cultive pas les qualités les plus élevées du partenaire, c'est le moins qu'on puisse dire : on recherche même les pires. En restreignant à la masturbation, on sera très mahonnête en affirmant qu'elle ne s'accompagne pas, chez le "sujet agissant", d'images et de fantasmes où l'on rêve d'un(e) partenaire pour le seul service sexuel qu'i-elle pourrait offrir, indépendamment de sa vie, de sa personne, de ses aspirations...
Et c'est là qu'est le péché. Quand on y réfléchit, peu importe qu'une telle situation arrive dans un couple marié ou non ; ici ou là, il y a exploitation et asservissement du prochain. Dans l'exemple que j'ai donné, cela se produit en contexte sexuel ; mais cela se pourrait produire dans n'importe quel autre contexte. Première conclusion (sur laquelle je reviendrai), il n'y a donc pas de spécificité sexuelle du péché : il y a des moments où l'on fait le mal car on méprise le prochain. Cela peut être au lit, mais n'importe quand dans la vie également. Donc la vie sexuelle est - au même titre que les autres aspects de la vie - le lieu d'un jugement moral possible, voire indispensable.
- Mais revenons sur la première conclusion ("pas de spécificité sexuelle du péché"), et nuançons-la fortement. Car si, on a beau dire, quelque chose est spécifique au sexe : c'est qu'il s'agit d'une question de vie et de mort : un petit être peut en résulter, une vie se peut créer à partir de cela. Et là - mais vous en conviendrez, Métazêt - il y a quand même un élément supplémentaire à prendre en compte dans le jugement sur toutes ces choses-là..
Quand on parle de responsabilité des amants, on a raison ; en un moment d'égarement, on risque d'engager sa vie par le fait de la naissance d'un enfant. C'est une lourde responsabilité pour les partenaires. Mais le point de vue des partenaires n'est quand même pas le seul à devoir être pris en compte ! Car l'existence d'une vie supplémentaire, c'est un fait objectif qui ne saurait se réduire au sentiment subjectif de "responsabilité", si important soit-il, de ceux qui l'ont conçue ! Et c'est la présence de ce fait objectif qui impose d'avoir une morale touchant spécifiquement toutes ces questions-là.
Nous pouvons, après, discuter de bien des choses ; acceptez-vous du moins celles que je viens de dire ?
Amicalement
MB