Traduction : chez un excommunié comme Luther, l'état de grâce est perdu, la connexion est rompue, on parle d'un membre mort, il n'a plus la foi, la foi de l'Église, il ne reçoit plus la sève qui pourrait le vivifier et en faire un membre vivant du corps (ou un sarment vivant relié vraiment au cep, etc).Charité, inséparable de la grâce, la charité ou agapè créee de l'Église, est l'impression en elle de la charité incrée de Dieu; dans la mesure ou elle est christique et christoconformante, elle est l'âme créee inhérente de l'Église. Avant le Christ, sous la loi de nature et sous la loi mosaïque, elle est christique seulement initialement et par anticipation, en tant qu'elle est donnée en prévision du mérite futur du Christ en croix; depuis le Christ, sous la loi nouvelle, elle est christique pleinement, en tant qu'elle dérive jusqu'au monde par les sacrements du Christ et qu'elle est orientée par les directives du Christ; elle est l'empreinte de la charité et de la sainteté du Christ; modalité de la charité en tant que sacramentelle [...] en tant que sacramentelle, elle cause l'unité de connexion, qui commence l'unité de communion [...] la charité sacramentelle et orientée est présente de manière salutaire chez les membres justes, et d'une manière non salutaire chez les membres pécheurs
Ça, c'est la vision traditionnelle de l'Église catholique : ... saint Pie X, Léon XIII, Pie IX, Grégoire XVI ... etc.
versus
La pensée de Yves Jean-Marie Congar
"Ainsi l'Église, au contact des multiples ressources des personnes humaines, des diverses formations ethniques, culturelles, religieuses, loin de se diluer dans la masse de ces matériaux, cherche à s'en emparer, pour les transformer en elle. Mais, en retour, elle est stimulée par eux, elle trouve en eux l'occasion de donner corps à des virtualités qui lui sont propres, mais qui sans eux seraient restées inexercées, et qui, s'ils avaient paru dans un ordre différent, auraient pu être éveillées pour une part dans un ordre différent. Elle dépend pour autant du milieu qu'elle doit transformer, non comme d'une matière inerte, mais comme d'un excitant aussi divers et variable que l'homme et que l'histoire.
Les valeurs qui sont le trésor spirituel de l'Église reçoivent à telles ou telles époques, dans telles conditions, au sein de tel peuple ou de telle culture, enfin dans telle âme ou telle famille d'âmes, un développement spécial et qui du point de vue de la réalisation effective de ses capacités vivantes, enrichit véritablement l'Église et la révèle à elle-même : car l'Église, encore une fois, est un vivant, qui ne se connaît lui-même qu'en vivant et ne prend une connaissance explicite de sa propre loi et de ses possibilités qu'en les exerçant." (Yves J.-M. Congar, o.p., Chrétiens désunis, Principes d'un oecuménisme catholique, Paris, 1937. p. 317; opus cité par C. card. Journet )
Cette différence de conception des choses a à voir avec le libéralisme, soit d'un côté le refus de celui-ci ou la volonté de le tenir en laisse par les volontés conjuguées de l'Église et de l'État, ou bien son acceptation la plus large possible, cette volonté d'embrasser le monde à pleine bouche. Joseph Ratzinger fait sienne la pensée de Yves Jean-Marie Congar, comme la pensée des "catholiques libéraux" du XIXe siècle, comme il accepte les valeurs de la modernité qui auront été produites en dehors de l'Église, lors des deux derniers siècles.