Philippe Pétain

Anthropologie - Sociologie - Histoire - Géographie - Science politique
Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » sam. 02 juin 2012, 3:57

Sous l'Occupation

«... le Reich façonne la révolution nationale en réquisitionnant des biens, des services et de la main d'oeuvre en proportion toujours plus grande. La Kollaboration c'est la botte. Les ressources sont drainées vers l'Allemagne par plusieurs canaux, le plus large étant les frais d'occupation. Aux termes de l'article 18 de la convention d'armistice, la France prend à sa charge les frais d'entretien des troupes d'occupation. Ils sont fixés en août 1940 à 400 millions de francs par jour (20 millions de marks, au taux de change imposé) payable rétroactivement depuis le 25 juin 1940. Ce chiffre maintenu jusqu'au 10 mai 1941, passe alors à 300 millions, puis à 500 millions le 11 novembre 1942 quand le pays tout entier est occupé. Jusqu'au 3 septembre 1944, la France paie au total 631 866 000 000 de francs, ce qui représente 58% du revenu national entre 1940 et 1944; il faut y ajouter les frais de cantonnement et le coût du déficit de change extérieur avec l'Allemagne, qui augmente d'un quart la somme totale.

En outre, des accords partiels prévoient la livraison de denrées alimentaires et des matières premières stratégiques, sans compter qu'un nombre d'usines françaises travaillent sous contrat de guerre. Au début de 1944, la France a livré 4 127 tonnes de magnésium et 518 684 tonnes de bauxite à l'Allemagne [...] un peu plus de 10% des produits coloniaux - phosphates, huiles végérales, café, etc. - vont au Reich. L'ennemi utilise l'argent des frais d'occupation pour faire de gros achats sur le marché agricole français, si bien qu'en 1944 la ponction annuelle est passée de 6 à 8 millions de quintaux de céréals, de 2 à 3 millions d'hectolitres de vin et de 135 000 à 227 000 tonnes de viande. Les Allemands ont emmené 4 320 des 16 000 locomotives du parc ferroviaire.

Avec les francs en surplus, ils ont pris des parts dans les compagnies françaises et d'outre-mer équivalant à 121 millions de marks. Franz Richard Hemmen, chef de la délégation économique allemande à la Commission d'armistice, peut dire en janvier 1942 : «Les Français employés dans l'industrie, les chemins de fer, la navigation fluviale et la majeure partie de la marine marchande travaillent presque exclusivement pour le Reich. Aucun autre pays d'Europe, signale-t-il dans son rapport, ne compte pour une aussi large part dans les armements et même les marchandises importées. Les commandes allemandes sont le facteur déterminant de l'économie française.»

La France est étranglée économiquement et épuisée financièrement par la saignée que lui impose l'Allemagne. La ''révolution nationale'' est donc tout simplement, dans l'un de ses aspects, une économie de guerre particulièrement sévère.

p.147




Révolution moral

«... la légion française des combattants dénonce les méfaits du «Swing» et parvient à empêcher André Gide, ce prophète de l'hédonisme, de faire à Nice, en mai 1941, une conférence sur Henri Michaux. Les chantiers de jeunesse, ces camps obligatoires de travail en forêt, prêchent l'austérité à des jeunes citadins blasés, autour d'un millier de feux.

Vichy promulgue des textes réglementaires sévères contre l'alcoolisme, dont certains sont toujours en vigueur. Les «pinardiers», les «betteraviers» et les bouilleurs de cru ont été intouchables sous la IIIe République. Le privilège des bouilleurs de cru est supprimé le 7 août 1940. Le 24, les apéritifs titrant à plus de 16° sont interdits; interdiction également d'en servir à des jeunes de moins de 20 ans. Plus tard, on n'a pas le droit d'entrer dans un café si l'on a pas 14 ans. [...] le Temps souligne que le Français s'était beaucoup mieux porté quand la consommation de boissons fortes était limitée (comme en 1913-1919), et, à son avis, «le fait qu'il y avait en France un café pour 20 habitants contre 270 en Allemagne, 430 en Grande-Bretagne et 3 000 en Suède, n'est pas étranger à la défaite.»





On sait beaucoup moins par contre

«... difficile de se rappeller avec quel fièvre on échaffauda des projets. D'aucun le firent avec la joie qu'apporte la vengeance : la République honnie, la «gueuse» était morte.

Cependant, les anti-républicains de toutes sortes n'étaient pas les seuls à s'épanouir; d'autres, et ils furent nombreux, furent heureux d'être délivrés de procédures sclérosées et de l'immobilisme politique. Il avait fallu plus de deux cents projets de loi entre 1871 et 1901 pour que l'impôt sur le revenu fût voté le 15 juillet 1914. Vingt-quatre autres, sur la retraite des vieux travailleurs, avaient été déposés depuis 1936, dont le dernier, adopté à la chambre le 14 mars 1939, avait été repoussé par le Sénat. Il était vraiment plus facile que le maréchal Pétain publiât tout simplement un décret le 14 mars 1941, en disant : «Nous tenons nos promesses, même celles des autres.»

La réforme est dans l'air, écrivait en 1941 Louis Rivière, magistrat à la cour de Rouen. «La révolution nationale a fait en un an ce que le régime précédent n'avait pas réussi à faire en plus d'un siècle», notait Nesmes-Desmarets, professeur de droit à la faculté de Montpellier. «Nous accusions à juste titre l'ancien régime de faire obstacle aux réformes», écrivait Georges Ripert, professeur de droit à Paris, dans la Revue de Droit commercial. Pour d'autres encore, c'était un enivrant ferment de progrès techniques, «l'insertion du futur dans le présent», comme le dit Jean Bichelonne, secrétaire d'État à la production industrielle sous Laval et partenaire enthousiaste d'Albert Speer lorsqu'une intégration franco-allemande fut envisagée en 1943.

Jean Berthelot, ingénieur des Chemins de fer et ministre des Communications, que des bureaucrates indécrottables avaient empêché de rationaliser les transports parisiens, juste avant la guerre, rappelait en 1968 quelle avait été sa satisfaction , en 1942, de pouvoir réaliser à sa guise l'unification des transports parisiens, qui procédait du simple bon sens technique. De hauts fonctionnaires, comme André Bisson, qui sera après la Libération président de la cour des comptes, se félicitaient que le budget était beaucoup plus facile à établir sans les commissions parlementaires pointilleuses - ce qu'auraient pu penser aussi mais sans le dire, certains présidents des États-Unis.

Les conservateurs ont eu sous Vichy des pouvoirs que le suffrage universel leur avait refusé depuis 1932, et les techniciens une puissance que les politiciens ne leur avaient jamais donnée. Ces possibilités ont fait naître un réel enthousiasme. Il faut le répéter aujourd'hui car bien des gens ont essayé de faire croire, après la guerre, que Vichy s'était contenté de maintenir «la présence».

Pétain lui-même a pu dire en juillet 1945, au cours de son procès : «la France peut changer les mots et les vocables. Elle construit, mais elle ne pourra construire utilement que sur les bases que j'ai jetées.»

La Résistance, pour sa part, était tout aussi déterminée à balayer ce que de Gaulle appelait : «les abus anarchiques d'un régime en décomposition». Léon Blum, dans une lettre du 15 mars 1943 lui disait comment les socialistes envisageaient la France future. «Elle doit être démocratique. Cela ne dignifie pas que la Constitution et les institutions d'avant-guerre doivent être restaurées dans leur intégrité, qu'après ce long intervalle la vieille machine doive purement et simplement reprendre sa marche.»

Source : Robert Paxton, id., p. 140

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » dim. 03 juin 2012, 3:20

D'autres éléments de synthèse pour complémenter le topo du professeur Guillemin


  • Vichy et le fascisme

    «... le mot fascisme correspond à une notion bien précise; ce n'est pas seulement une injure qu'on lance à la tête des conservateurs. Au sens exact du terme, c'est un mouvement de masse anti-libéral, anti-communiste, bien décidé à employer la force et vouant un mépris total aux valeurs des grands bourgeois; il se distingue non seulement de la gauche, son ennemie, mais de la droite traditionnelle, sa rivale. Alors que les conservateurs veulent une structure sociale hiérarchisée, les fascistes, avec leurs chemises uniformes, affichent un égalitarisme absolu devant le chef. Les conservateurs, hostiles à la participation du peuple qu'ils dédaignent, veulent être gouvernés par quelques grandes familles bien établies; les fascistes, qui montent à l'ère de la politique de masse et ne descendent pas de l'élitisme du XIXe siècle, se veulent l'affirmation de la volonté populaire. Ils préfèrent souvent l'énergie dyonisiaque du paganisme à l'immobilisme social des Églises établies. Ils tournent en dérision la mollesse, le conformisme, les manières compassées des conservateurs. N'ayant aucun attachement sentimental pour l'Europe moribonde de grand-papa, ils portent aux nues le dynamisme, le changement et l'ordre nouveau.

    Étudier le fascisme est d'autant plus difficile qu'il n'est jamais arrivé au pouvoir par ses propres moyens. Il y est toujours parvenu avec l'aide des conservateurs et dans des conditions telles que, faisant taire leurs divergences, les rivaux se sont trouvés unis par une même ambition : prendre le pouvoir et détourner la menace communiste.

    Les conservateurs ont souvent été heureux de trouver dans la masse organisée et les troupes fascistes un allié contre la gauche mais, dans bien des cas, ce sont les conservateurs qui ont tendu aux fascistes les clés du pouvoir. Mussolini fut financé par les industriels et les grands propriétaires terriens, quand ses squadristes décidèrent de battre les socialistes réformistes. C'est Victor-Emmanuel III, sur les conseils de leaders parlementaires, qui le chargea de former un gouvernement en 1922. Mussolini avait annoncé qu'il marcherait sur Rome, mais il y arriva en fait en wagon Pullman.

    Hitler reçut des conservateurs argent et soutien, et c'est von Papen qui encouragea le président Hindenburg à l'appeller au gouvernement. La phalange de Primo de Rivera ne joua qu'un rôle mineur dans la collusion des catholiques et de l'armée qui permit à Franco d'écraser la république espagnol. Tous ces chefs sont arrivés à leurs fins en prenant la tête des fascistes et des conservateurs coalisés pour s'emparer du pouvoir et éviter une révolution communiste. Qui plus est, tous se heurtèrent par la suite aux idéologues qui croyaient à un fascisme «pur et dur» et qui, par leur enthousiasme, les avaient aidés au début à attirer les masses. Mussolini eut des ennuis avec des squadristes de la première heure, comme Massimo Rocca; Hitler liquida, le 30 juin 1934 pendant la nuit des longs couteaux, Ernst Roehm et Gregor Strasser, en même temps que d'autres anciens alliés ou complices devenus gênants; Franco réduisit peu à peu la phalange au silence. Aucun fascisme homogène n'a jamais exercé le pouvoir.

    Il n'est pas inutile de parcourir l'éventail complet des régimes franchement de droite, en partant de ceux où les fascistes dominent pour arriver à ceux qui sont sous la coupe des conservateurs. L'Allemagne de Hitler est évidemment à l'une des extrémités. Le parti nazi, avec ses organisations paramilitaires, finit par annihiler jusqu'à l'élite des conservateurs : corps diplomatique et Wehrmacht. En Italie, au contraire, le roi, l'Église et l'armée gardent assez d'autonomie pour reprendre leur indépendance et balayer Mussolini afin de traiter avec les alliés en juillet 1943. A l'autre extrémité de l'éventail, on trouve le Portugal de Salazar, où le catholicisme rétrograde, intransigeant, ne laisse pratiquement aucune place à un autoritarisme de masse, antitraditionnel.



    La révolution nationale de Vichy se situe manifestement plus près du conservatisme que du fascisme. Pétain lui-même se trouve plus de points communs avec Salazar et Franco qu'avec Hitler. Avant la guerre, les conservateurs ont cherché une «troisième voie» entre le communisme et le fascisme, pour remplacer le parlementarisme et l'économie de marché qu'ils estimaient révolus; même des idéologues, tel Robert Brasillach, trouvaient les rassemblements nazis déconcertants pour un Français et un peu grotesques.

    Après 1940, des théoriciens comme Thierry Maulnier répètent avec insistance que les solutions de Vichy sont authentiquement françaises et ne sont pas une imitation du vainqueur. Pétain, comme nous le verrons au chapitre suivant, recrute d'abord ses collaborateurs parmi les traditionnalistes. Ils perdent du terrain avec le temps, c'est entendu, mais ils sont remplacés, non par des fascistes, mais par des techniciens, des administrateurs de métier et des hommes d'affaires déjà influents sous la IIIe République. Les fascistes, certes, s'infiltrent à la propagande, inspirent l'antisémitisme officiel et, en 1944, la lutte armée contre la Résistance, mais ils n'occupent jamais les postes clés de la révolution nationale : Finance, Affaires étrangères, Défense.

    Ce rôle relativement effacé s'explique par plusieurs raisons.

    Tout d'abord les mouvements activistes de droite étaient trop morcelés avant la guerre pour avoir du poids. [...] Jacques Doriot est le plus compétent des chefs de file, si bien que tous ses rivaux l'empêchent de prendre une influence prépondérante après 1940. Deuxième raison : avec un Paris occupé séparé d'un Vichy autonome, les chefs des ligues d'avant-guerre doivent pour la plupart se contenter de situations confortables mais de pure façade dans les journaux subventionnés par les Allemands, et s'estimer heureux de mener la grande vie dans la capitale.

    Il faut aller plus loin cependant si l'on veut comprendre vraiment pourquoi les fascistes sont restés à la périphérie.

    Les nationalistes autoritaires, qui hésitent depuis toujours à s'inspirer du modèle nazi, deviennent encore plus réticents après la défaite. La France a une longue tradition d'unité dans la liberté et rien dans son histoire ne lui a démontré que la démocratie et la grandeur sont incompatibles. Elle a été moins secouée socialement par la crise mondiale que les autres pays industrialisés. L'agriculture familiale et le petit commerce ont été éprouvés mais ont survécu, et c'est grâce à ce rempart social que la classe moyenne est sortie de la tourmente, sous-employée mais intacte. Et surtout 1940 a été un effondrement national et non pas social, contrairement à ce qui s'est passé en Allemagne de 1928 à 1933, et en Italie de 1919 à 1922. La France a été suffisamment ébranlée pour rejeter la République, mais non pas assez pour vouloir la remplacer par un régime n'ayant aucune racine dans son histoire. Vichy est donc plus traditionnel que fasciste.

    La révolution nationale est plus proche du libéralisme éclairé du XIXe siècle que de la Restauration. A la Restauration et aux divagations romantiques sur l'ancien temps, elle emprunte le catholicisme traditionnel, la subordination de l'individu aux unités naturelles que sont la province et la famille [...] ses vraies valeurs, la révolution nationale les tient de la classe moyenne du siècle des Lumières, à commencer par l'harmonie sociale naturelle, que le parti radical a élevé au rang de doctrine en 1901. Les corporatistes comme les radicaux du début du XXe siècle croient qu'un bon gouvernement et une saine éducation suppriment la lutte des classes. Ils sont plus près au point de vue économique et social de la solidarité d'un Léon Bourgeois (1896) que du pessimisme d'un de Maistre. Le positivisme, hérité lui aussi de la bourgeoisie du XIXe siècle, sous-tend la vision des technocrates pour qui le progrès réside dans un meilleur fonctionnement d'une industrie mieux dirigée.

    La révolution nationale est une hérésie des doctrines libérales et progressistes de la IIIe République.

    Les dirigeants français continuent de croire aux valeurs de 1789 : la nation, la science, l'instruction du peuple, la prospérité générale. Mais à la différence de leurs pères, ils ne croient plus que le parlementarisme et l'économie du laissez-faire soient le moyen d'y parvenir; ce n'est pas tant la propagande monarchiste ressassée pendant un demi-siècle par Maurras qui a emporté la conviction (encore qu'elle y ait participé); ils estiments plutôt qu'on ne peut plus s'en contenter pour sortir des deux crises jumelles : la décadence et le désordre.»


    Source : Robert Paxton, op.cit., p. 224

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » mer. 06 juin 2012, 8:23

[une parenthèse ici concernant le 6 juin 44]

Un film d'archive de 1964 - le meilleur que j'ai jamais trouvé dans la catégorie.

http://archives.radio-canada.ca/guerres ... lips/7766/

Bernières et Saint-Aubin se rappellent

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » jeu. 07 juin 2012, 2:35

Une continuité à partir de Vichy d'après Paxton


«... Vichy a laissé des traces là où les traditionnalistes ont eu les coudées franches : la famille, la morale publique. La loi de 1941 sur les vieux travailleurs sera incorporée en bloc dans la législation sur la Sécurité sociale; ce fut, pour reprendre les mots de Pétain, une de ces promesses que les autres n'avaient pas tenues. Les allocations familiales restent à l'ordre du jour après la guerre [...] si l'expérience exceptionnelle et involontaire de désintoxication alcoolique disparaît avec la pénurie, on peut toujours voir dans les débits de boissons une pancarte interdisant de servir les adolescents n'ayant pas l'âge prescrit en 1940.
  • Cela dit, ce sont dans les rapports entre l'Église et l'État que l'influence des traditionnalistes de Vichy reste la plus vivace, par ricochet il est vrai. Le haut clergé s'est à ce point discrédité en soutenant le régime Pétain qu'on interdit au Cardinal Suhard, archevêque de Paris, d'assister au Te Deum célébré à Notre-Dame pour la Libération. Néanmoins, l'Église in corpore est moins malmenée par la IVe Républiquequ'elle ne l'avait été par la IIIe. L'anticléricalisme de règle avec un Gambetta, un Clémenceau, un Combes allait de pair avec la «République des camarades» chère aux francs-maçons. La gauche catholique marginale dans les années 30, devenue pétainiste en 40 parce que le régime s'opposait au grand capital et répudiait la démocratie athée, se trouve pour les mêmes raisons en harmonie avec le gouvernement de la France libérée. Bon nombre de prêtres et de fidèles ont évidemment fait de la résistance, à telle enseigne que l'union des communistes et des curés devint l'un des clichés de l'histoire des maquis. Le mouvement des prêtres ouvriers est sorti de ce creuset, mais aussi de l'anticapitalisme de ceux qui, tel le père Godin, se rallièrent au Pétain de la première heure, et de l'abnégation des abbés qui, sous les auspices du gouvernement, apportèrent volontairement le secours de leur ministère aux ouvriers français travaillant dans les usines allemandes.

    Le vide laissé par la hiérarchie conservatrice déconsidérée donne à un clergé de gauche énergique l'occasion de jouer un rôle prédominant après la guerre. En outre, l'évolution politique permet à l'Église de s'assurer une place moins contestée qu'on aurait pu le penser . La main tendue aux catholiques, par Maurice Thorez en avril 1936, à la veille de la victoire du Front populaire, reste offerte pendant que les communistes font partie du gouvernement, c'est à dire jusqu'en 1947. Le MRP, axé à gauche, se partage les suffrages des électeurs avec les socialistes et les communistes, les deux autres grands partis de la Résistance. Cela étant, un glissement du pouvoir au sein de l'Église tient lieu d'épuration. Il est de toute façon impossible de faire totalement litière des avantages concédés par Vichy. Sept évêques sont destitués discrètement. En 1951, le Parlement accordera à nouveau des subventions aux écoles libres.


C'est dans l'administration publique, dans la modernisation et la planification économique que les mesures - et le personnel - de Vichy se perpétuent avec le plus d'évidence. [...] l'évolution que nous avons constatée de 1940 à 1944 - abandon des conceptions traditionnalistes au profit d'une gestion de spécialistes et d'une modernisation planifiée - correspond aux tendances à long terme de la politique et de l'économie.

La liaison est particulièrement étroite, comme il se doit, dans les domaines techniques : rationnement et contrôle des prix. Le facteur fondamental, la pénurie, impose sa logique propre aux administrateurs de Vichy, puis de la IVe République, jusqu'en 1951-52 [...] même lorsque disparaissent les exigences d'une économie de pénurie, il est manifeste que les techniciens ne perdront jamais le terrain qu'ils ont arraché, sous Pétain, aux représentants élus. [...]

Autre survivance de Vichy : la réorganisation régionale. [...] C'est en 1941 que, pour la première fois, la circonscription administrative n'est plus le département de l'an VIII. Les super-préfets dont les pouvoirs spéciaux en matière de police et de ravitaillement s'étendaient à tout une région répondaient à une nécéssité pratique. Le Conseil de la Libération dans son ordonnance du 10 janvier 1944 nommant les commissaires de la République appelés à devenir chacun responsable d'une région dès qu'elle sera libérée, suit le découpage des super-préfectures [...]

La rationalisation et la concentration industrielle ont sans doute progressé entre 1940 et 1944, bien qu'il soit difficile de trouver des chiffres sur ce plan.

Il est néanmoins manifeste que les Allemands avaient pour principe de donner des contrats de guerre aux entreprises ayant le plus haut rendement et de fermer les moins efficaces, dont les ouvriers pouvaient êtres recrutés pour le Service du Travail Obligatoire (STO). On peut penser que les S-Betriebe, ces usines qu'Albert Speer protégeait du STO, ont été choisies pour leur forte productivité. Les efforts déployés par Pierre Laval pour étendre ce système à toute la France s'inspiraient de la même préoccupation. Alors que les dirigeants des petites entreprises pestaient contre le favoritisme dont le régime faisait preuve à l'égard des trusts, le grand patronat et les technocrates de Vichy poussaient à la rationalisation et à la concentration. «L'Europe doit s'organiser contre le défi que nous lance la puissance économique grandissante des États-Unis», disait en février 1941 François Lehideux, ministre de l'Équipement national, aux brillants sujets de l'École libre des Sciences politiques. C'est lui qui fit adopter un plan décennal pour le développement de la productivité.

C'est sous Vichy que les chantres de la croissance, d'isolés qu'ils étaient, sont devenus la voix du peuple. Le ministre de la Production industrielle à Vichy s'apparentait plus aux expansionnistes de 1960 qu'aux protectionnistes des années 30. La productivité est un nouvel article de foi, écrivait en 1946 le directeur de l'INSEE, «des pélerinages s'organisent vers les rives inspirées des États-Unis où la productivité a été révélée aux hommes».

[...]

C'est vers 1955 en effet que les chiffres de la consommation, de la production, de la population attestent le changement. Il s'explique en partie par le choc de 1940 et les quatre années de Vichy. [...] C'est alors qu'une génération de techniciens et de patrons ont acquis une expérience nouvelle et un pouvoir nouveau. C'est alors qu'on se mit à avoir plus d'enfants. [...] le courant profond s'y est amorcé et allait se mêler à un autre courant issu de la Résistance, pour former la France nouvelle. François Lehideux aurait pu écrire lui-même le premier chapitre du bestseller de J.-J. Servan Schreiber, le Défi américain.

p. 332




«... au reste, les hommes de Vichy, et non des moindres, ne se tiennent pas pour battus. On voit revenir à la surface des figures connues. Des défenseurs et collaborateurs de Pétain, dont Jacques Isorni, son avocat, et Roger de Saivre, chef adloint de son cabinet civil, sont élus à la Chambre en 1951. [...] Quatorze dignitaires de Vichy siègent au Parlement en 1958. René Coty, élu président de la République en 1953 a voté «oui» en juillet 1940. La même année 1958, deux personnalités du régime de Pétain entrent au gouvernement : André Boutemy, ancien préfet, a le protefeuille de la Santé et Camille Laurent, responsable de la Corporation paysanne sous Pétain, celui de l'Agriculture. Pour n'être pas en reste, l'Académie française [...] qui a exclu Abel Bonnard en 1945 et laissé vacant les sièges de Pétain et de Maurras jusqu'à leur mort, élit Thierry Maulnier (1955) et Henri Massis (1960). Jean Louis Tixier-Vignancour, directeur de la Radio en 1940, est élu député en 1966 et recueille plus d'un million de voix lors de l'élection présidentielle de décembre 1965.

Sur un plan purement humain, un grand nombre de fonctionnaires qui ont servi sous Pétain restent en place. [...] Les techniciens, les hommes d'affaires, les administrateurs se tirent pratiquement indemnes de la tourmente. Ce qu'on appelle pompeusement la révolution administrative n'a en fin de compte que peu de répercussions sur le personnel en place.

Les annuaires des grands corps de l'État font apparaître une continuité impressionnante entre 1939 et 1946, par-delà les tempêtes. Le plus stable est la Cour des comptes. Sur les membres en service en 1942, 98% figurent dans l'annuaire de 1946 et 99% dans celui de 1949; deux des présidents qui avaient servis sous l'Occupation y étaient mentionnés à nouveau comme présidents honoraires. Qui plus est, ceux qui y étaient entrés du temps de Vichy y demeurent après la guerre, sans avoir perdu, semble-t-il, aucun de leurs droits à l'ancienneté.

A l'Inspection des Finances, 97% des inspecteurs généraux en activité en 1948 l'étaient déjà en 1942.

Tous ces grands corps, et c'est là un fait frappant, résistent à l'entrée d'outsiders qui leur seraient imposés pour des raisons politiques. Les annuaires montrent que les postes rendus vacants du fait de Vichy ou de la Libération, sont pourvus par promotion interne.»

p.317

Et la magistrature

«... les hommes qui avaient pendant quatre ans mis en application les lois de Vichy, continuent sous la IVe République à rendre la justice du haut d'un fauteuil auguste qui semble avoir conservé sa pureté olympienne. Aussi, les procès de l'après-guerre seront-ils fertiles en épisodes cocasses. Le vieil André Mornet, par exemple, qui avait recquis la condamnation de Mata-Hari, sort de sa retraite pour instrumenter contre Laval et Pétain avec une ferveur angélique, criant «qu'il y avait trop d'Allemands dans cette salle», quand la foule proteste contre la parodie de jugement infligé à Pierre Laval. La noble colère de Mornet descend de deux tons lorsqu'on lui rappelle au procès de Pétain qu'il avait lui aussi prêté serment au maréchal, qu'il avait été désigné pour siéger à la cour de Riom qui condamna les dirigeants de la IIIe République. [...]

Le corps diplomatique, pour près des deux tiers, reste le même sous Vichy et pendant la IVe République.»

p.322

Jacques Isorni. cf video du programme-débat en présence de Guillemin.

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » jeu. 07 juin 2012, 2:54

Note : J'ai voulu mettre le petit vidéo à propos de ''ceux de Bernières et Saint Aubin qui se rappellent'', parce qu'il fait un bien fou d'avoir le portrait de gens honnêtes à l'occasion, tout en contraste d'avec des trucs politiques moins reluisants.

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: La thèse de Guillemin à propos du maréchal

Message non lu par Cinci » jeu. 07 juin 2012, 20:00

  • Colombey, lundi le 5 août 1946

    Mme de Gaulle est à Paris. Je suis seul ce soir, avec lui. Après le dîner, nous gagnons la bibliothèque : il s'essaie à une réussite, distraitement, cependant que son cigar se consume. Nous sommes assis de part et d'autre de la table de bridge, dans deux fauteuils de couleurs claires. Dans mon dos, divers objets sur les rayons : la pipe de Bourbaki creusée dans une énorme racine, cette médaille du Pape qui fait pendant à une médaille de Charles de Gaulle par A. Rivaud. Autour de la maison, la nuit sur la campagne... Pas un bruit.

    Comme après sa réussite, la conversation vient à languir, je cherche une question à lui poser. Palewski m'a justement suggéré, avant-hier, de lui poser celle-ci :

    «Paul Reynaud, qui écrit ses Mémoires, a compulsé le procès-verbal britannique de la séance du Conseil suprême du 13 juin 1940, celui de Tours. Ce procès-verbal affirme que vous auriez assisté à une partie de l'entretien Churchill-Reynaud. Comme ce dernier n'a conservé aucun souvenir de votre présence et que Roland de Margerie - consulté sur ce point - n'a pu le fixer, il a demandé à Palewski si vous pourriez, par son entremise, l'éclairer...»

    Le général interrompt sa réussite et s'anime soudain prodigieusement : «Reynaud plaisante !... Il n'a pu oublier le fait, car son intention était que je n'assiste pas à cette séance du Conseil suprême! A tel titre qu'il se garda bien de me convoquer... C'est par un coup de téléphone de Margerie, qui était alors son chef de cabinet diplomatique, que j'eus connaissance de la rencontre projetée. Je m'y précipitai. Margerie, plus encore que Reynaud, ne peut avoir un pareil trou de mémoire.

    -Êtes-vous arrivé à temps à ces entretiens ?
    -Suffisamment à leurs débuts pour prendre part au débat. [...]

    Du premier coup d'oeil, j'ai compris pourquoi Reynaud ne m'avait pas convoqué : il était en train d'expliquer à Churchill qu'il avait câblé à Roosevelt et que, si sa réponse n'était pas favorable, alors lui, Reynaud, eh bien serait peut-être obligé de se tourner vers les Anglais pour leur demander de délier la France de l'accord du 6 mars...
    -Que répondit Churchill ?
    - Churchill était très fatigué ce jour-là, il balançait la tête et marmonait sa réponse, que le Général mime : «Je comprends votre position... Ces événements sont terribles pour la France... il y a la flotte... «Car c'est tout ce qui préoccupait Churchill : s'assurer que la flotte ne serait pas barbottée».

    Le général de Gaulle lève les bras au ciel devant cette attitude de Churchill.

    Deux jours plus tard, à Londres, je lui ai dit qu'il aurait dû barrer la route aussitôt à Reynaud en refusant de le délier de l'accord de mars, et qu'en liant la question de cet accord à celle de la flotte, il avait fait avancer d'un pas les partisans de l'armistice.

    [...]



    Et d'observer :

    Il est vrai que je n'ai conservé nulle preuve de ce que j'affirme, sinon cette preuve morale : la lettre de démission que j'écrivis à Reynaud après le Conseil suprême du 13 juin. Cette lettre, je la possède encore. (il fait mine de se lever pour aller la chercher, puis y renonce d'un geste impatient.)

    -Votre lettre de démission, Reynaud l'a refusée ?
    -Non, il ne l'a jamais reçue... Car avant de la lui faire tenir, ja la fis lire à Mandel, qui me déconseilla de démissionner.
    -Quels arguments Mandel employa-t-il ?
    - Il insista sur la nécéssité de ne pas dégarnir les rangs du petit nombre d'hommes qui - dans l'entourage de Reynaud - constituaient le camp de la continuation de la lutte.

    Il sa tait un instant, puis revient à Reynaud :

    «Ce jour-là, Reynaud, auquel je l'ai d'ailleurs dit à l'époque, facilita la voie de l'armistice. La vérité, je la dis clairement : Reynaud, qui ne voulait pas faire l'armistice, cherchait déjà un moyen de déposer le fardeau. Quand j'y repense, cet homme, qui était honnête, profondément patriote et qui avait de la valeur, a été incapable de se dresser à la hauteur des événements, resseré qu'il était par un entourage qui n'y croyait pas : Devaux, Leca, Hélène de Portes, et tant d'autres... Au moment de la formation de son ministère, je me trouvais à Paris : eh bien, le Palais-Bourbon suintait le défaitisme, on y souhaitait ouvertement l'armistice.»

    - Un armistice sans combat, ou la capitulation après combat ?
    -Non, l'armistice... Or quelle était la situation véritable ? Il était clair que si Reynaud n'obtenait pas un ordre du jour de confiance, le gouvernement serait confié à Pétain et Laval. On savait déjà et on disait clairement - je n'invente rien ! - que Pétain ce serait l'armistice.

    p.90

    «... comme le Général me parlait de Pétain depuis quelques minutes, j'observe :

    «Pris en main par Laval, qui voulait le conduire à Montoire, alors que ses autres ministres le tiraient en sens opposé, il donne l'impression d'être un vélléitaire...»

    Le Général me regarde, étonné :

    -Que voulez-vous dire ?
    -... une girouette...
    -Détrompez-vous; Pétain voulait aller à Montoire.
    - Vous ne pensez pas, mon Général, qu'il y a été traîné ?
    -On ne traînait pas Pétain; on n'avait pas d'influence sur lui. En dernier ressort, c'est toujours lui qui décidait.

    -Pourtant, mon Général, quelques jours plus tard, à propos du retour des cendres du duc de Reichstadt, Labarthète raconte qu'au début de l'offensive verbale conduite par Laval pour le décider au voyage, Pétain rétorqua : «Alors quoi ? Toujours la carte forcée, comme à Montoire ?» Mais deux minutes plus tard, Laval tenant bon, Pétain capitulait par ces mots : «Eh bien, soit !... Quand partons-nous ?» Mais une heure plus tard encore, après une contre-offensive de Baudouin et Peyrouton, Pétain revenait sur sa décision d'aller à Paris, déclarant que Laval le trahissait et qu'il allait lui dire... Voilà ce que j'appelle une girouette.

    Le Général sourit, comme on sourit à beaucoup de candeur, et me dit : «Pétain était un acteur remarquable. Il ne livrait jamais le fond de sa pensée.»

    p.98


    «... Weygand a décrit la visite qu'il fit à Pétain dès l'annonce du débarquement en Afrique du Nord. Il engagea le Maréchal à prendre l'avion pour Alger et à y reprendre, aux côté des Alliés, la place qui revenait à la France dans la poursuite de la lutte. Malgré les objurgations de Weygand, l'homme de l'armistice refusa...

    Il me regarde et juge, comme à contrecoeur : «Ainsi jusqu'au bout devait-il manquer à l'honneur ! Pétain n'a jamais imaginé qu'il pût faire autre chose que de rester en France.»

    Il a prononcé cela objectivement, sans dureté, comme un homme qui se penche sur un phénomène singulier.

    Court silence, le regard perdu dans le carrelage noir et blanc de la bibliothèque. Puis il relève la tête et pose dans mes yeux un regard extraordinnairement ému mais nuancé d'humour.

    -Imaginez, non mais, imaginez ce qui serait arrivé par la suite, si Pétain s'étant alors rendu aux arguments de Weygand, avait atteri en Afrique du Nord pour s'emparer du glaive ! Imaginez notre situation : nous n'aurions pu que l'approuver et nous placer sous son commandement. Quel spectacle ! Dorénavant son nom eût été célébré comme celui d'un homme qui avait préparé la reprise du combat depuis la première minute... Sans compter qu'il mouillait la flotte française en rade d'Alger !»


    Source : Claude Guy, En écoutant de Gaulle. Journal 1946-1949, Paris, Grasset, 1996, 520 p.




Note : Claude Guy fut l'aide de camp de de Gaulle pour toute la durée de la guerre, et ce, à partir des journée à Londres en 1940 et jusqu'à la Libération. Il est mort en 1992. Son journal ne fut publié qu'en 1996. Ainsi, Henri Guillemin n'avait pas accès à ce journal en 1980. Dans le journal de l'aide de camp, il y est rapporté des propos et confidences très libres de la part du Général, n'étant pas en démonstration à ce moment-là mais simplement occupé à faire causette avec un familier, sans non plus s'attendre à une quelconque publication de ses propos. C'est intéressant de découvrir là-dedans que les dires du Général viennent donner raison à Guillemin comme a posteriori.

Avatar de l’utilisateur
ledisciple
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 590
Inscription : lun. 19 déc. 2011, 5:54

Philippe Pétain

Message non lu par ledisciple » lun. 25 mars 2013, 21:16

Aldoüs a écrit :
ledisciple a écrit :Oui, vraiment, comme disait le Maréchal Pétain : "Français, vous avez la mémoire courte."
Ah oui je vois vos références... Quelle tristesse... (il devrait pas avoir droit à être cité sur un forum chrétien celui-là)
Cette phrase est historique, universitaire, et souvent reprise sans tomber dans la paranoïa et votre haine (voir votre commentaire très agité). De plus, vous avez une inculture de base qui ne me surprend plus, effectivement. En effet, le général de Gaulle était si admiratif de Pétain qu'il donna à son fils son prénom : Philippe. C'est encore De Gaulle qui le gracia.
Vous lisant, j'ajoute donc, mémoire courte et sélective, ce qui fait le fond du révisionnisme par excellence. Le passé s'assume, avec le bon , le moins bon et le mauvais. C'est en conservant le mauvais qu'on ne retombe pas dans ses pièges. C'est la base élémentaire de tout historien.
Aldoüs a écrit :(il devrait pas avoir droit à être cité sur un forum chrétien celui-là)
Pour les internautes, Philippe Pétain a plus écrit sur le christianisme qu'aucun autre homme politique au XX siecle. Lisez sur Jeanne d'Arc, mais l'autre ne doit pas non plus connaître cet autre personnage historique que par des racontards.
Oremus.

Avatar de l’utilisateur
Aldous
Barbarus
Barbarus

Philippe Pétain

Message non lu par Aldous » lun. 25 mars 2013, 21:26

Je sais tout ça. ça n'efface pas à ce que je sache aux yeux de l'histoire sa responsabilité à la déportation (assumez ça, vous plaisantez?). Il a été condamné à mort et frappé d'indignité nationale pour cela si je ne me trompe... A mes yeux ça suffit largement pour qu'il n'est aucunement sa place à être évoqué sur un forum chrétien.

(mon commentaire n'est pas agité. Indigné oui!) (L'autre c'est vous)

Avatar de l’utilisateur
ledisciple
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 590
Inscription : lun. 19 déc. 2011, 5:54

Philippe Pétain

Message non lu par ledisciple » lun. 25 mars 2013, 22:25

Cher Aldoüs,
Nous devons assumer notre Histoire, c'est la base. Les chinois ne l'ont pas encore fait et Mao est toujours un héros pour les jeunes générations. Les allemands ont fait leur deuil, et ils ne sont pas nazis parce qu'ils essayent de comprendre leur histoire. Vous condamnez surtout De Gaulle qui a gracié Pétain, et je ne suis pas d'accord avec votre attitude.

Vous mélangez tout, c'est votre probleme, et vos réponses sont simplistes. D'abord, c'est René Bousquet qui fut responsable de la rafle du Vel' d'hiv, derriere Laval. Et en amitié imperturbable pour René Bousquet, l'artisan de la rafle des Juifs au Vél' D'Hiv pour le compte des nazis, voyez Mitterrand d'abord...

Je propose en lecture pour les internautes, de Jean-Claude Milner, Les penchants criminels de l'Europe démocratique, Verdier, 2003.

Et je propose en lecture en ligne Le Vichy de Pétain, le Vichy de Laval pour ne pas rester simpliste, réducteur et dangereusement superficiel. Lisez aussi Raul Hilberg,
Et puis, surtout, lisez Lénine, des historiens sérieux car c'est bien lui l'inventeur et le premier concepteur des camps de concentrations, bien avant Staline et Mao, et la soeur de Nietzsche...
Voici que point le danger terrifiant : l'ignorance et le parti pris des idées réductrices toutes faites. Manque de chance, c'est beaucoup plus compliqué. Il faut beaucoup lire, étudier toute sa petite vie, rencontrer sur les sites, écouter.

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Philippe Pétain

Message non lu par Cinci » lun. 25 mars 2013, 23:09

ledisciple,

C'est que vous aviez produit deux phrases contradictoires en apparence. Il ne s'agit pas d'ignorance comme il s'agit d'être surpris un peu par le résultat à l'écran, ne pas être tellement sûr de ce que vous auriez voulu dire. Il suffit de clarifier. Sur un forum, Aldous a quand même le droit de vérifier ce que vous auriez voulu dire au juste. Vous êtes chanceux. La plupart du temps c'est l'indifférence qui prime. Compris ou mal compris le propos ou l'idée : les gens ne demandent rien et ne veulent pas savoir non plus si vous allez bien (sourire).

:p

Hégésippe
Ædilis
Ædilis
Messages : 48
Inscription : jeu. 24 mai 2012, 3:07

Re: L'ignorance du catholicisme

Message non lu par Hégésippe » mar. 26 mars 2013, 3:51

ledisciple a écrit :Pour les internautes, Philippe Pétain a plus écrit sur le christianisme qu'aucun autre homme politique au XX siecle. Lisez sur Jeanne d'Arc, mais l'autre ne doit pas non plus connaître cet autre personnage historique que par des racontards.
Oremus.
Quels sont donc ces livres ecris par le Marechal Petain? Je ne savais pas qu'il avait ecrit sur Ste Jeanne d'Arc.
Aldoüs a écrit :(il devrait pas avoir droit à être cité sur un forum chrétien celui-là)
Ce qui est "amusant" si vous me passez l'expression, c'est qu'on trouve des rues et places "Marechal-Petain" un peu partout dans le monde (et surtout aux Etats-Unis) mais pas en France. On trouve meme une montagne nommee en la memoire du Marechal.

Avatar de l’utilisateur
ledisciple
Rector provinciæ
Rector provinciæ
Messages : 590
Inscription : lun. 19 déc. 2011, 5:54

Re: L'ignorance du catholicisme

Message non lu par ledisciple » mar. 26 mars 2013, 5:20

Chère Cinci,
Ce sujet traite de la méconnaissance du catholicisme et vous recevez ce boumerang en retour que vous croyez me jeter. Car enfin, vous en faites une parfaite illustration, avec un déni de mémoire & d'indifférence, ce qui est peut-être pire encore.
Hégésippe a écrit :Je ne savais pas qu'il avait ecrit sur Ste Jeanne d'Arc.
Lisez au moins "Cette flamme d'idéal qui brûle dans l'âme française" de Philippe Pétain. C'est autre chose que le "Jeanne d'Arc" de Michelet !

Pétain semble diabolisé dans ce forum francophone par quelques intervenants qui s'illustrent sur leur propre ignorance du catholicisme. Pourquoi ne pas en rapporter sur Pascal, à partir de son livre "Les provinciales", & d'en faire un janséniste dès lors, et le condamner dans une égale damnatio memoriae ?

L'ignorance du catholicisme commence par celle du rituale romanum et du missale romanum. Elle se poursuit dans l'ignorance du saint sacrifice de la messe dont chaque geste fut canonisé par le pape Pie V. Elle se découvre encore par la perte de l'historique du rosaire à 6 dizaines de Sainte Brigitte bien avant la naissance de l'Islam. En ce temps de Carême final dans la semaine sainte, faisons notre examen de conscience, chacun en prière.
Oremus

Avatar de l’utilisateur
Aldous
Barbarus
Barbarus

Re: L'ignorance du catholicisme

Message non lu par Aldous » mar. 26 mars 2013, 8:44

ledisciple a écrit :Cher Aldoüs,
Nous devons assumer notre Histoire, c'est la base.
Assumer l'Histoire, oui. Assumer la trahison de Pétain, non. (c'est pourquoi je vous ai dit pas question d'assumer la responsabilité de Pétain dans la déportation). Assumer est un mot dont le sens peut glisser jusque "supporter", "accepter", "assurer" voire même jusque "ne pas regretter", "approuver"... Quand quelqu'un dit: j'assume ce que j'ai dit même si cela a de fâcheuses conséquences ça peut vouloir dire: envers et contre tout je confirme ce que j'ai dit et je l'approuve.
Donc assumer l'Histoire dans le sens où il faut bien reconnaître que ça a eu lieu, c'est indélébile, et qui veut dire assumer de regarder l'Histoire telle qu'elle a eu lieu, oui... Mais l'assumer dans le sens, j'approuve que l'Histoire a eu lieu ainsi, non.
ledisciple a écrit :Vous condamnez surtout De Gaulle qui a gracié Pétain, et je ne suis pas d'accord avec votre attitude.
Je ne condamne pas De Gaulle d'avoir gracié Pétain, je condamne qu'on cite quelqu'un qui a collaboré à envoyer des milliers de personnes dans les camps de concentration. Que De Gaulle ait gracié Pétain ne fait pas de lui (Pétain) une personne fréquentable... (Qu'un président gracie un criminel, ça ne fait pas de lui un non criminel)
ledisciple a écrit :Vous mélangez tout, c'est votre probleme, et vos réponses sont simplistes. D'abord, c'est René Bousquet qui fut responsable de la rafle du Vel' d'hiv, derriere Laval. Et en amitié imperturbable pour René Bousquet, l'artisan de la rafle des Juifs au Vél' D'Hiv pour le compte des nazis, voyez Mitterrand d'abord...
Je ne mélange pas tout car c'est trés simple (et non simpliste): Pétain a été condamné à mort et déchu de sa dignité française pour collaboration, intelligence avec l'ennemi, haute trahison pendant la deuxième guerre et quel ennemi (qui exterminait des gens), c'est suffisant à mes yeux pour qu'il ne soit pas citable sur un forum chrétien.
(il aurait écrit des bibliothèques entières sur Jeanne d'Arc, ça ne le réhabilite pas...)
ledisciple a écrit :Pétain semble diabolisé dans ce forum francophone par quelques intervenants qui s'illustrent sur leur propre ignorance du catholicisme.
Et alors où est le problème?? Un parfait connaisseur du catholicisme pourrait tout aussi bien diaboliser Pétain. (tandis qu'à l'inverse je ne vois pas trop la compatibilité entre un individu qui a une responsabilité dans la déportation et le catholicisme). Enfin si pour vous est ignorance du catholicisme tout ce qui a trait à Vatican II, ça fait beaucoup d'ignorants du catholicisme...

bonne journée,

Cinci
Tribunus plebis
Tribunus plebis
Messages : 11765
Inscription : lun. 06 juil. 2009, 21:35
Conviction : catholique perplexe

Re: Philippe Pétain

Message non lu par Cinci » mar. 26 mars 2013, 17:09

ledisciple
[...]
Les messages ont été déplacés.

Mon intervention visait simplement la contradiction apparente de deux phrases. Vous n'avez pas remarqué que j'agissais amicalement dans le but de vous réconcilier avec Aldous, si possible, au sujet de cette broutille cf Que disiez-vous au juste à propos de l'Église ? elle fait des erreurs ou pas ? C'est parce que je voyais cette arrête de sardine menacer bientôt de se changer en os de chameau. C'est juste ça.

Sinon, je ne vous lance pas de flèche pour vous blesser, un boomerang dans l'espoir secret de vous assommer. Un émoticone espiègle posé par moi à la fin d'un message a pour fin de vous signaler mon affection.

:oops:

Je ne sais pas de quoi vous parler maintenant avec une affaire de « ... déni de mémoire ou d'indifférence.» Regardez plus haut dans ce fil. Il me semble que je m'intéresse assez aux affaires de mémoire.

Avatar de l’utilisateur
Fée Violine
Consul
Consul
Messages : 12387
Inscription : mer. 24 sept. 2008, 14:13
Conviction : Catholique ordinaire. Laïque dominicaine
Localisation : France
Contact :

Re: Pétain et les Juifs

Message non lu par Fée Violine » mer. 27 mars 2013, 0:54

[J'ai fusionné trois fils : le vôtre sur Guillemin, un autre sur Pétain et les juifs, et un hors sujet extrait du fil sur l'ignorance du catholicisme. Pour que tout ça aille ensemble, j'ai donc dû mettre un titre plus général. Voilà !]

Répondre

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 40 invités