En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » jeu. 17 févr. 2022, 13:27

Altior a écrit :
jeu. 17 févr. 2022, 8:56
Je vais essayer un peu de synthèse de ce qu'on peut conclure sur ce qu'on a discuté (et disputé) sur ce fil jusqu'ici :

1. On ne peut pas soutenir que, généralement parlant, la République soit incompatible par nature avec le catholicisme.
2. S'il y a une incompatibilité, il s'agit d'une spécificité française, où l'adversité de la République contre l'Église a des causes historiques.
3. Pourtant, la monarchie semble plus organiquement une forme de gouvernement favorable au christianisme.
4. Une monarchie où le chef de l'État n'a pas de pouvoir réel ne fait aucunement mieux qu'une république.
5. La légitimité d'un gouvernement ne vient pas de la manière dont il accède au gouvernement (voire à une forme de gouvernement), mais de la conformité de ses actions (ou non-actions) aux lois de Dieu.

D'accord sur ces points ?
Merci Altior pour ces éclaircissements. Je suis d'accord avec les deux premiers points.
Je conteste en revanche le point 3. Il y a eu des républiques chrétiennes dans l'histoire.
Les deux derniers points me semblent assez discutables, mais pas foncièrement erronés. Une monarchie limitée comme celle de Belgique par exemple n'est pas forcément mauvaise (les Belges sont dans l'ensemble très attachés à leur roi). Et la légitimité d'un gouvernement vient aussi, entre autres choses, du consentement du peuple.
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Altior » jeu. 17 févr. 2022, 20:31

Socrate d'Aquin a écrit :
jeu. 17 févr. 2022, 13:27
Je conteste en revanche le point 3. Il y a eu des républiques chrétiennes dans l'histoire.
Sans doute, Socrate. Mais les républiques chrétiennes citées (dont la liste n'est pas longue: Venise, Florence ...) étaient organiquement créés. Puis, elle étaient petites. D'ailleurs, plus généralement parlant, les républiques qu'on donne pour exemples de succès furent de taille humaine. Même Athènes dans son apogée, pendant Périclès, avait un corps électoral de 40 000 personnes. À cette taille là, on arrive facilement à connaître, sinon directement, au moins à deuxième main ceux qui demandent le suffrage. Arrivé en France, j'ai noté que le suffrage démocratique fonctionne beaucoup mieux aux élections locales qu'au niveau national. J'ai connu personnellement une bonne dizaine de maires et aucun n'était totalement incompétent pour sa fonction. Les uns étaient excellents, d'autres étaient pour le moins utiles à leurs communes. Aux locales, ce succès de la démocratie est proportionnel à la taille de la circonscription: plus une commune est petite, plus elle a de chance d'avoir un maire comme il faut.

On a cité comme exemple de succès républicain la Suisse. Je suis d'accord, pourvu qu'on n'oublie pas que la Suisse fut partie intégrante du Saint Empire tout au long de l'historie de ce supér-état. Puis, la démocratie suisse a ses spécificités, tout comme le Saint Empire en avait, qui ne se sont pas reproduites dans d'autres modèles.

On a cité encore les États Unis. En voilà une république qui dépasse la "taille humaine". Dans ce cas, on n'a pas encore peut-être le recul historique nécessaire. On sait que les racines des États Unis furent profondement chrétiennes. Tous les quatre "Pères fondateurs" étaient de fervents chrétiens. On en est où maintenant ? Le catholique Biden, vous pensez qu'il est animé par la même ferveur religieuse que Thomas Jefferson ou George Washington ?

Un préopinant a noté qu'à Rome, tout comme en France, la république naquit par réacion révolutionnaire à la monarchie. C'est vrai. Mais la république romaine échoue en dégringolade, avec des incessantes luttes pour le pouvoir et des listes de proscription où chacun mettait les ennemis de sa famille. La reprise de la monarchie, à une toute autre échelle que lorsque Rome était petite, s'est avéré nécessaire.

Je donne raison a celui qui disait que s'il était Suisse il raisonnerait autrement. Moi, en tant que Roumain par nature et Français par adoption, je suis royaliste. En Roumanie, la République naquit avec du sang innocent sur ses mains. Ce sont les blindés soviétiques qui nous ont fait ce maudit cadeau. En France, pareillement, la République naquit par ce qui fut le modèle de référence de toutes les "révolutions" communistes. L'acte de décapiter le Père de la Nation fut le baptême sanglant de la République. C'est pourquoi, cher Français, je te rapelle :
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Maintenant, pour sortir du domaine politique en entrant dans le domaine théologique, je pense que la forme de gouvernement qui puisse pencher le mieux en faveur du christianisme est la monarchie sur la base d'un argument de toute autre nature. On sait bien que l'Église Triomphante est une monarchie. L'Église Militante pareillement. Si on part de la prémisse que le modèle de gouvernance de la société terrestre doit être la société céleste (pour que la Cité Catholique d'ici bas soit une image de la Cité Catholique des Cieux), alors la forme de gouvernement monarchique s'impose avec nécessité. Bon, on peut imaginer une monarchie qui ne soit pas forcément héréditaire, mais élective. Cela a existé dans le Saint Empire déjà évoqué, cela existe dans l'Église. Néanmoins, la monarchie dans ce modèle est incompatible avec le suffrage universel, car les électeurs (princes électeurs dans le premier cas, princes de l'Église dans le deuxième) et non pas l'ensemble du corps social seront appelés à élire. Pas même besoin de théologie, la philosophie est suffisante : l'idée que du bas surgisse le haut a quelque chose d'absurde, dont la nature ne nous donne aucun exemple. Selon les mots de Saint Jacques : Tout don excellent, toute grâce parfaite, descend d'en haut, du Père des lumières, en qui n'existe aucune vicissitude, ni ombre de changement. (Jaques 1 : 17)

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Message non lu par ademimo » jeu. 17 févr. 2022, 21:30

Altior a écrit :
jeu. 17 févr. 2022, 8:56
Je vais essayer un peu de synthèse de ce qu'on peut conclure sur ce qu'on a discuté (et disputé) sur ce fil jusqu'ici :

1. On ne peut pas soutenir que, généralement parlant, la République soit incompatible par nature avec le catholicisme.
2. S'il y a une incompatibilité, il s'agit d'une spécificité française, où l'adversité de la République contre l'Église a des causes historiques.
3. Pourtant, la monarchie semble plus organiquement une forme de gouvernement favorable au christianisme.
4. Une monarchie où le chef de l'État n'a pas de pouvoir réel ne fait aucunement mieux qu'une république.
5. La légitimité d'un gouvernement ne vient pas de la manière dont il accède au gouvernement (voire à une forme de gouvernement), mais de la conformité de ses actions (ou non-actions) aux lois de Dieu.

D'accord sur ces points ?
Bonjour Altior,

1. On peut en effet imaginer une république théocratique chrétienne sur le modèle iranien. Je remarque seulement qu'elle n'a jamais existé, sauf au moins une fois à Florence (avec Savonarole). La Rome papale de l'époque l'a condamnée, et Savonarole a terminé sur le bûcher. Peut-être parce que le catholicisme considère que le religieux et le politique doivent être séparés, suivant la fameuse parole du Christ ("Rendez à César, etc.).

2. C'est plutôt la spécificité des "droits de l'homme". Une république théocratique serait fatalement intolérante, et n'admettrait donc aucune liberté à révoquer son propre caractère théocratique. Ceci étant, "compatible" ne veut pas forcément dire "légitime" (pour renvoyer à l'adage prononcé par le Christ).

3. Oui, dans le sens où il laisse peu de prise à la "liberté". Ceci étant, Dieu a clairement désavoué la monarchie comme forme de gouvernement dans la Genèse. Le gouvernement idéal reste la théocratie (à distinguer de la république théocratique), autrement dit un gouvernement exercé par le clergé directement. À condition que le peuple vive dans la sainteté. Ça reste quand même une forme d'utopie, et les réalités de la vie ont rendu nécessaire l'établissement de la monarchie, consentie finalement par Dieu. Tout comme les réalités de la vie moderne ont rendu nécessaire l'avènement de la vie démocratique, consentie par l'Eglise sous Léon XIII, la vie démocratique étant directement liée à la révolution industrielle et à la croissance économique.

4. Exact. Je dirais que rien ne les distingue vraiment. Il vaut mieux parler de "vie démocratique" pour qualifier ces deux régimes.

5. Non. Il faut se remémorer les paroles du Christ au sujet de César, et des puissants de ce monde. Ceux-ci détiennent leur pouvoir de Dieu, qui le leur a consenti. Si un gouvernement quelconque n'a plus la faveur de Dieu, il tombe. Voilà la doctrine chrétienne. Et c'est pour cela que l'Eglise a toujours voulu la séparation des pouvoirs religieux et politiques, et a condamné Savonarole. Tout potentat ici bas est, d'une certaine façon, "légitime". Ce qui ne veut pas dire qu'il soit compatible avec la diffusion du catholicisme en toute tranquillité. La "paix de l'Eglise", qui correspond à la période où l'Eglise avait la faveur des puissants, c'est-à-dire du IVe siècle au XVIe siècle en Occident, a existé seulement parce que Dieu l'a voulue. Si elle s'est interrompue, c'est aussi le résultat de la Providence divine qui a permis que l'Eglise soit mise à l'épreuve.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » ven. 18 févr. 2022, 11:15

Merci, cher Altior, pour votre longue et pertinente réponse.
Sans doute, Socrate. Mais les républiques chrétiennes citées (dont la liste n'est pas longue: Venise, Florence ...) étaient organiquement créés. Puis, elle étaient petites. D'ailleurs, plus généralement parlant, les républiques qu'on donne pour exemples de succès furent de taille humaine. Même Athènes dans son apogée, pendant Périclès, avait un corps électoral de 40 000 personnes. À cette taille là, on arrive facilement à connaître, sinon directement, au moins à deuxième main ceux qui demandent le suffrage. Arrivé en France, j'ai noté que le suffrage démocratique fonctionne beaucoup mieux aux élections locales qu'au niveau national. J'ai connu personnellement une bonne dizaine de maires et aucun n'était totalement incompétent pour sa fonction. Les uns étaient excellents, d'autres étaient pour le moins utiles à leurs communes. Aux locales, ce succès de la démocratie est proportionnel à la taille de la circonscription: plus une commune est petite, plus elle a de chance d'avoir un maire comme il faut.
Nous sommes d'accord sur un point très important : la démocratie est d'abord locale. C'est là qu'il faudrait commencer à introduire davantage de démocratie réelle, je veux dire directe, où les citoyens décident eux-mêmes des affaires qui les concernent immédiatement.
Ceci ne veut pas dire que le peuple ne peut pas intervenir directement au niveau national. Le référendum reste une très bonne chose.
Je répondrais un peu plus loin sur la question du suffrage universel.
On a cité encore les États Unis. En voilà une république qui dépasse la "taille humaine". Dans ce cas, on n'a pas encore peut-être le recul historique nécessaire. On sait que les racines des États Unis furent profondement chrétiennes. Tous les quatre "Pères fondateurs" étaient de fervents chrétiens. On en est où maintenant ? Le catholique Biden, vous pensez qu'il est animé par la même ferveur religieuse que Thomas Jefferson ou George Washington ?
Je ne connais pas la foi personnelle de Joe Biden, mais il est clair qu'il ne se conduit guère en catholique. Les USA ne sont plus un pays chrétien, nous sommes d'accord là-dessus, mais j'ai déjà fait remarqué que la même situation pourrait être observée en Belgique ou au Royaume-Uni, pays monarchiques s'il en est. Si les USA ne sont plus chrétiens, c'est parce qu'ils sont sécularisés, pas parce qu'ils sont une république.
Un préopinant a noté qu'à Rome, tout comme en France, la république naquit par réacion révolutionnaire à la monarchie. C'est vrai. Mais la république romaine échoue en dégringolade, avec des incessantes luttes pour le pouvoir et des listes de proscription où chacun mettait les ennemis de sa famille. La reprise de la monarchie, à une toute autre échelle que lorsque Rome était petite, s'est avéré nécessaire.
On pourrait faire remarquer qu'en France aussi, la monarchie a fini par dégringoler, pour le meilleur et pour le pire. De même en Italie, en Allemagne, en Russie, etc.
Je donne raison a celui qui disait que s'il était Suisse il raisonnerait autrement. Moi, en tant que Roumain par nature et Français par adoption, je suis royaliste. En Roumanie, la République naquit avec du sang innocent sur ses mains. Ce sont les blindés soviétiques qui nous ont fait ce maudit cadeau. En France, pareillement, la République naquit par ce qui fut le modèle de référence de toutes les "révolutions" communistes. L'acte de décapiter le Père de la Nation fut le baptême sanglant de la République. C'est pourquoi, cher Français, je te rapelle :
Si tu veux la délivrance
Pense clair et marche droit
Les Rois on fait la France
Elle se défait sans Roi.
Je ne me serais jamais attendu à voir un membre de ce forum citer un chant de l'Action française. Comme quoi, tout arrive ^^
C'est moi qui disais cela au sujet de la Suisse. Un régime politique bon dans un certain pays n'a pas vocation à s'imposer à tous. On l'a cru pour la démocratie et le prix à payer s'est compté en milliers de morts irakiens, afghans, libyens, etc. Il en va de même pour tout autre régime, y compris monarchique.
Pour l'anecdote, le premier Comte de Paris, Philippe d'Orléans (ou Philippe VII si l'on est royaliste) l'avait si bien compris que, se rendant aux USA, il avait prononcé un discours à ses hôtes américains en leur expliquant que si la république était le régime naturel des Américains, la royauté était celui de la France. Et il raisonnait bien : la monarchie n'est pas une internationale.
Soit dit en passant, puisque vous êtes Roumain de naissance, quel prétendant soutenez-vous ? Je suis d'autant plus intéressé que l'idée monarchique a fait son retour en Roumanie il y a peu.
Maintenant, pour sortir du domaine politique en entrant dans le domaine théologique, je pense que la forme de gouvernement qui puisse pencher le mieux en faveur du christianisme est la monarchie sur la base d'un argument de toute autre nature. On sait bien que l'Église Triomphante est une monarchie. L'Église Militante pareillement. Si on part de la prémisse que le modèle de gouvernance de la société terrestre doit être la société céleste (pour que la Cité Catholique d'ici bas soit une image de la Cité Catholique des Cieux), alors la forme de gouvernement monarchique s'impose avec nécessité. Bon, on peut imaginer une monarchie qui ne soit pas forcément héréditaire, mais élective. Cela a existé dans le Saint Empire déjà évoqué, cela existe dans l'Église. Néanmoins, la monarchie dans ce modèle est incompatible avec le suffrage universel, car les électeurs (princes électeurs dans le premier cas, princes de l'Église dans le deuxième) et non pas l'ensemble du corps social seront appelés à élire. Pas même besoin de théologie, la philosophie est suffisante : l'idée que du bas surgisse le haut a quelque chose d'absurde, dont la nature ne nous donne aucun exemple. Selon les mots de Saint Jacques : Tout don excellent, toute grâce parfaite, descend d'en haut, du Père des lumières, en qui n'existe aucune vicissitude, ni ombre de changement. (Jaques 1 : 17)
Plus exactement, l'Eglise militante est ce que saint Thomas appelle un "régime mixte", un régime composé d'éléments démocratiques (le peuple de Dieu), aristocratiques (le clergé) et monarchiques (l'évêque au niveau local, le souverain pontife au niveau universel). Il ne découle pas de là que la monarchie est le meilleur régime en soi et pour tous, car ce qui vaut pour l'Eglise ne vaut pas forcément pour la société civile.

Sur la question du suffrage universel, j'entends beaucoup de royalistes français s'y opposer sans savoir qu'ils se trouvent en porte-à-faux avec leur propre tradition. Souvenons-nous en effet que sous la Restauration, les premiers partisans du suffrage universel se trouvent parmi les Ultras ; que le Comte de Chambord voulait l'élargir ; que Maurras lui-même n'y était pas défavorable. Bien sûr, l'objet du suffrage n'était pas, dans leur pensée, la désignation du souverain, mais l'élection des députés, maires, etc.
De sorte qu'il n'y a pas de contradiction à être à la fois royaliste et partisan du suffrage universel.
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Altior » sam. 19 févr. 2022, 17:05

Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 18 févr. 2022, 11:15

On pourrait faire remarquer qu'en France aussi, la monarchie a fini par dégringoler, pour le meilleur et pour le pire. De même en Italie, en Allemagne, en Russie, etc.
Attndez, attendez. Voyons. En France on ne peut pas parler d'une dégringolade de la monarchie. Rien à voir avec les luttes incessantes pendant le dernier siècle de la République Romaine. Sans doute, on était arrivé à quelques problèmes bugétaires, mais je ne sais pas si la France sous Luis XVI était plus endetté que la République sous Macron. Puis, en Italie la monarchie (de très courte histoire) a fini effectivement en dégringolade à cause de sa faiblesse, puisqu'elle s'est laissé à la remorque des socialo-fascistes de Il Duce. En Allemagne la monarchie a été un grand succès. SImplement les Allemands sous le Kaiser ont perdu la guerre (plutôt à Versailles que sur le champ d'honneur) : là, c'est grâce à la faiblesse de la République de Weimar que les socialistes de Hitler ont pu prendre le pouvoir une génération après la défaite de leurs parents. En Russie, tout comme en France, la monarchie se portait très bien quand les bolchéviques ont transposé les idées de Robespierre chez eux. Le tsar Nicolas était encore plus conciliant que le roi Louis XVI : ses réformes à la pression de la gauche menchevique en 1905 furent très larges.

Soit dit en passant, puisque vous êtes Roumain de naissance, quel prétendant soutenez-vous ? Je suis d'autant plus intéressé que l'idée monarchique a fait son retour en Roumanie il y a peu.
Je ne me prononce pas car je n'ai pas assimilé tous les éléments de la question de la succession. D'ailleurs, je la trouve secondaire. Comme personalités, j'ai une certaine préférence pour celui qui se dit être "l'aîné des Bourbons". Il me parle un peu mieux que l'autre, mais même l'autre sur trône, serait mille fois mieux que les Sarkozys, les Hollandes et les autres Macrons avec lesquelles leur république essaye de nous habituer.

On ne peut pas parler d'un retour de l'idée monarchique en Roumanie. Un large sondage d'opinion donnait l'option monarchique à seulement 7 % des préférences. Pourcentage étonnant, car la Roumanie n'est république que dépuis décembre 1947, donc la mémoire de la monarchie devrait être bien plus vivante qu'en France. Puis, à la différence de la France, où la Révolution fut un phénomène franco-français, en Roumaine la république est venu par l'ordre de Staline pendant l'Occupation. Mais voilà, la propagande communiste, foncièrement anti-royaliste, a fait bien son travail.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Cinci » sam. 19 févr. 2022, 19:15

Altior

En France on ne peut pas parler d'une dégringolade de la monarchie. Rien à voir avec les luttes incessantes pendant le dernier siècle de la République Romaine.
Je dirais que le régime monarchique des Bourbons à la fin du XVIIIe siècle n'avait pas du tout démérité de la patrie en réalité, rien qu'à voir le positionnement de la France à l'échelle internationale à l'époque, la puissance de son économie réelle, l'amélioration réelle du niveau des vie des Français entre 1700 et 1789. Un progrès réel sur bien des plans était intervenu. Le niveau d'éducation du peuple s'était accru, l'armée française était la première d'Europe, la Marine avait pratiquement rejoint celle des Britanniques. La langue française était la lingua franca de toutes les monarchies importantes d'Europe ou la langue de la diplomatie internationale.

Mais la position du régime monarchique de droit divin en France se trouvait quand même idéologiquement affaiblie à la fin du XVIIIe siècle, à cause du succès de la «pensée des Lumières» auprès des aristocrates, grands bourgeois et même dans une portion significative de la noblesse.

C'est déjà le modèle protestant anglais qui vient avec cette pensée "lumineuse". Une idée de monarchie parlementaire qui restreint les droits du Souverain régnant, qui estompe grandement la différence entre nobles et grands bourgeois, qui permet aux nobles de vivre comme des bourgeois, de se livrer au commerce comme peuvent le faire les riches bourgeois, d'accorder plus de franchises aux bourgeois pour leurs affaires, qui leur permet d'avoir leur mot à dire dans la conduite des affaires du pays, etc.

Le prétexte de la crise des finances publiques en 1788-89 est occasion pour le parti des réformateurs «anglophiles» et autres gens actifs «bien éclairés» pour susciter aussi une crise politique, pour s'assurer un avantage décisif et faire basculer le régime dans un mode plus «sympa» aux amis de Voltaire (... or que Voltaire (sa figure; une vraie rock-star avant l'heure) comptait déjà une myriade d'amis dans l'entourage du roi lui-même) La tolérance envers les protestants, envers les Juifs, la nécessité de placer en garde-à vue le grand pontife à Rome, briser avec la superstition («Abattons l'infâme !»), mettre de l'avant une Église nationale, etc. Tout ceci : idées des Lumières. La pensée des Lumières mais également pensée assimilée et véhiculée dans les loges (sociétés de pensée. )

Le problème du point de vue de la vieille noblesse c'est que de moins en moins de gens (l'opinion publique) croient en la valeur de cette idée qui voudrait qu'il soit bénéfique pour tous (l'Immense majorité) que la société soit divisée en vraies classes , une société clairement stratifiée, avec des nobles qui ne doivent pas se confondre avec des roturiers (qui ne veut pas dire snobisme remarquez, ni distance ni caractère «intouchable» comme en Inde). Non mais juste une classe de nobles (entre autres) et comme chargés en particulier d'être comme les arbitres du bon goût et aussi bien en terme de grandes valeurs à défendre ... et le catholicisme comme de juste, fonction royale par excellence.

Le roi tombé, l'Église se retrouve en dangereuse posture. Il n'aura pas pris beaucoup de temps pour que Bonaparte en fasse la démonstration avec Pie VII.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Altior » sam. 19 févr. 2022, 22:08

Bonjour, Cinci !

Permettez-moi de vous poser une question. Bon, je la pose à tout le monde, mais à vous particulièrement puisque vous êtes le seul actif dans ce forum qui vivez dans une monarchie. Une monarchie bien théorique, évidemment, mais une monarchie quand même.

La question est : qu'est-ce qui a fondamentalement changé dans la monarchie britannique et du Commonwealth pour qu'elle devienne purement théorique ? Pourquoi la reine Victoria, « la grand-mère de l'Europe » pouvait avoir encore un rôle actif au Canada (un rôle d'arbitrage, comme il convient à une reine constitutionnelle, mais un rôle quand même et non pas une photo de classe), tandis que de nos jours cela n'existe plus ? Un siècle à peine est passé, les lois sont les mêmes, mais la puissance du souverain n'est plus la même. J'ai du mal à croire que dans le contexte actuel au Canada où la chienlit et la gronde populaire monte, la reine Victoria aurait toléré un premier ministre comme votre Macron. Pourtant, l'actuelle reine ne dit mot. Comment expliquer cela, si du point de vu de la législation rien n'a changé en matière de forme de gouvernement ?

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Riou » dim. 20 févr. 2022, 12:49

Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 18 févr. 2022, 11:15


Sur la question du suffrage universel, j'entends beaucoup de royalistes français s'y opposer sans savoir qu'ils se trouvent en porte-à-faux avec leur propre tradition. Souvenons-nous en effet que sous la Restauration, les premiers partisans du suffrage universel se trouvent parmi les Ultras ; que le Comte de Chambord voulait l'élargir ; que Maurras lui-même n'y était pas défavorable. Bien sûr, l'objet du suffrage n'était pas, dans leur pensée, la désignation du souverain, mais l'élection des députés, maires, etc.
De sorte qu'il n'y a pas de contradiction à être à la fois royaliste et partisan du suffrage universel.
Bonjour,

Tout à fait. L'élection d'un homme pour diriger la société, élection au suffrage universel, est une idée contre-révolutionnaire, qui fait suite aux insurrections de 1848. Le Parti de l'ordre, majoritairement monarchiste, désirait prendre le peuple à son propre piège, à défaut de pouvoir restaurer pleinement la monarchie. Ainsi, le principe de l'élection d'un souverain était pour eux le moyen de restaurer un pouvoir séparé en vidant la démocratie de sa substance. Ce n'est pas un hasard si un coup d'Etat à suivi ce type d'élection, puisque d'un point de vue démocratique, le principe de ce genre d'élection est précisément une forme de coup d'Etat enrobé de procédures légales.
Ainsi, l'élection présidentielle s'est faite contre la démocratie, dans l'intention de déposséder le peuple du pouvoir réel. Voilà pourquoi les monarchistes et les contre-révolutionnaires, traditionnellement, y sont favorables.

Aujourd'hui, cette élection est devenue une manière de rendre complice le corps social du déferlement de violence qui va s'abattre sur lui durant 5 ans, sans qu'il puisse contester quoi que ce soit sans prendre de gros risques pour son intégrité physique et sociale (cf. les membres arrachés des gilets jaunes, les crânes fracturés, les éborgnés, etc.). C'est au nom de la "légitimité démocratique" que les dirigeants ont justifié la répression très violente d'un mouvement de contestation pourtant largement soutenu par la population. L'élection présidentielle est une justification de la cruauté des dirigeants envers leurs administrés. La preuve: dans la rhétorique ambiante de cette élection, le "courage" est devenu une vertu, bien que ces petits tyranneaux en puissance ont complètement redéfini cette notion. Par courage, ils entendent la force de passer des "réformes" impopulaires et de résister à toutes les contestations, sans discuter réellement du fond.
L'élection présidentielle est donc une élection anti-démocratique par excellence, et c'est pourquoi elle plaît tant aux gouvernements actuels. Désireux de faire advenir un monde très inquiétant pour le destin de l'humanité, ils ont bien besoin de rendre complice la société de leurs pulsions nihilistes et destructrices.

Les demi-habiles diront : il ne faut donc pas voter, pour ne pas être complice de cette illusion et de ce sado-masochisme collectif. Peut-être, mais les gouvernements se moquent complètement de l'abstention. Mise à part quelques petites phrases le soir de l'élection pour déplorer l'absence de mobilisation générale, ils s'empressent, deux jours plus tard, de faire comme si cela n'avait jamais vraiment existé, pour finalement se réclamer de la "légitimité du peuple", "légitimité" si nécessaire à la poursuite de leurs intérêts mesquins, prométhéens et égoïstes. Un président peut être d'autant plus cruel qu'il persuade sa population qu'il n'est que le produit de la volonté populaire.
Voilà la contradiction : l'abstention n'est pas une solution réelle, et voter, c'est toujours prendre le risque de justifier la violence politique pour les cinq ans à venir.

Gaudens
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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Gaudens » dim. 20 févr. 2022, 20:09

Intéressantes, vos contributions, Altior, Socrate et Riou.

Je fais comme Altior la même constatation.
Pour ma part, j'avais regretté qu'Elisabeth II,en tant que souveraine du Royaume Uni n'ait pas pu épargner à son peuple l'accès au pouvoir du hooligan des beaux quartiers qu'est Boris Johnson, un type qui après avoir longtemps savonné la planche de Mme Mey, honnête premier ministre en recherche d'un Brexit acceptable par tous , s'est livré à un quasi coup d'Etat parlementaire (la reine avait hésité à signer son feu vert à l'ajournement parlementaire, l'avait quand même fait, comme toujours mais la cour constitutionnelle écossaise l'avait heureusement annulé)...
En fait , en l'absence de Constitution écrite, c'est la coutume qui a évolué en cent ans dans un sens toujours plus étroitement "démocratique", affaiblissant ainsi le rôle arbitral du souverain.
Car si ce rôle arbitral est fondamental pour un monarque, il n'est justement pas compatible avec une élection du chef d'Etat au suffrage universel; le vainqueur est nécessairement le leader d'un parti gagnant; la pose de "président de tous les Français" ne trompe personne durablement ,jusqu'à présent tout au moins. En cela ,je ne suivrai pas l'analyse de Riou: en privilégiant le "parti de l'ordre" les élites politiques de 1848 me paraissent être allées contre une réelle conception royaliste et on en a vu la dérive et les conséquences.
Cela dit, je ne vois aucune incompatibilité entre élection et monarchie; même la regrettable monarchie absolue d'Ancien Régime l'acceptait. Avant 1848, les dernières élections, certes à plusieurs degrés, presque au suffrage universel (dont un certain nombre de femmes: cheffes d'entreprises, artisanales entre autres, responsables de communautés religieuses et quelques autres) furent celles de 1789 pour l'élection aux Etats Généraux.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Riou » dim. 20 févr. 2022, 23:15

Gaudens a écrit :
dim. 20 févr. 2022, 20:09
En cela ,je ne suivrai pas l'analyse de Riou: en privilégiant le "parti de l'ordre" les élites politiques de 1848 me paraissent être allées contre une réelle conception royaliste et on en a vu la dérive et les conséquences.
Disons que cette solution, selon moi, était une manière d'introduire une forme de monarchie dans la situation qui était celle de 1848. Je veux dire par là que ce type d'élection n'était pas leur "tasse de thé", mais qu'il fallait bien s'en accommoder, car c'était la seule manière possible de contrecarrer la démocratisation de la vie politique. L'enseignement majeur de cette séquence historique est le suivant : l'élection présidentielle au suffrage universel s'est affirmée contre la République et la démocratie.
Par ailleurs, je soumets cela à votre regard d'historien : on entend souvent dire, lors de l'élection présidentielle, que "des gens sont morts pour qu'on puisse voter", "voter" signifiant ici "élire un président". Peut-être, quoique ce soit discutable - il n'est pas certain que les révolutionnaires soient morts pour pouvoir élire un président de la "République" qui pourra faire ce qu'il veut pendant 5 ans... Mais on oublie souvent de dire que lors de la commune de Paris, certains communards qui étaient contre le principe de l'élection présidentielle furent fusillés. Ils estimaient que ce genre d'élection était une négation de la République et de la démocratie. Ainsi des gens sont morts, et peut-être en plus grand nombre, pour qu'on ne puisse pas voter à des élections présidentielles, dans l'intention de pouvoir voter différemment, dans le cadre d'une démocratie directe.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Cinci » lun. 21 févr. 2022, 8:11

Bonjour, Cinci !

Permettez-moi de vous poser une question. Bon, je la pose à tout le monde, mais à vous particulièrement puisque vous êtes le seul actif dans ce forum qui vivez dans une monarchie. Une monarchie bien théorique, évidemment, mais une monarchie quand même.

La question est : qu'est-ce qui a fondamentalement changé dans la monarchie britannique et du Commonwealth pour qu'elle devienne purement théorique ? Pourquoi la reine Victoria, « la grand-mère de l'Europe » pouvait avoir encore un rôle actif au Canada (un rôle d'arbitrage, comme il convient à une reine constitutionnelle, mais un rôle quand même et non pas une photo de classe), tandis que de nos jours cela n'existe plus ? Un siècle à peine est passé, les lois sont les mêmes, mais la puissance du souverain n'est plus la même.

Salut Altior,

C'est un bonne question. Tellement il me serait assez difficile d'y répondre à brûle-pourpoint et je ne me la suis jamais posée non plus, cette question.

Mais, ma première idée quand même, indépendamment de ce que je viens de voir que Gaudens a écrit, aurait été de répondre que les progrès du libéralisme tout au long du XIXe siècle auront consolidé en Angleterre (pas crée, raffermi) le fait que le Souverain régnant devait bien se borner à jouer un rôle plus honorifique et symbolique qu'autre chose, et ce qui rejoindrait quand même l'opinion de Gaudens.

Une forte restriction de la capacité du monarque à intervenir dans les affaires du parlement est une affaire qui se sera réglée au XVIIe siècle chez les Anglais, à la suite de leurs propres épisodes révolutionnaires. Il est vrai que malgré tout, au XVIIIe siècle, même en Angleterre, un roi pouvait quand même conserver une certaine influence sur l'orientation des politiques publiques. Mais cela était justement dû au fait que le pays était en réalité très peu démocratique et bien plus aristocratique avant tout, je pense. Le jeu de l'opinion publique n'avait rien à voir encore avec ce que le phénomène deviendra à l'ère des masses, de la culture de masse.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Gaudens » lun. 21 févr. 2022, 10:16

Riou,l'historien de coeur(mais pas de métier) que je suis souscrit à votre lecture d'hier soir.Bonne journée.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Cinci » lun. 21 févr. 2022, 18:52

Altior,

Tenez, pour votre plaisir, j'ai pensé vous ajouter ici un petit exemple «bien concret» de l'influence du monarque au XVIIIe siècle.


Dans le Canada du XVIIIe siècle, qui se limitait à l'actuel territoire de la province de Québec, avec une partie du futur territoire de l'Ontario et un peu de territoire sis en terres états-uniennes d'aujourd'hui, le poids de l'influence du monarque britannique se faisait sentir par l'intermédiaire du Gouverneur général, et lequel était justement chargé de défendre les intérêts de la Couronne anglaise. Il agissait comme représentant du roi.

Exemple :

Instructions à Guy Carleton (janvier 1775)

C'est une lettre que le roi Georges III signe à l'adresse du gouverneur Carleton, pour lui donner les instructions nécessaires à l'administration de la province de Québec.
[...] Vous devez rassembler à Québec (que nous désignons par les présentes pour être le lieu de votre résidence habituelle et le siège principal du gouvernement) les personnes suivantes que nous constituons et nommons par les présentes, de l'avis de notre Conseil privé, pour composer notre Conseil en ce qui regarde les affaires de notre dite province de Québec et des territoires y annexés [...]

Que dans toutes les églises et endroits réservés au culte public, il soit fait des prières pour la famille royale suivant la formule prescrite dans ce royaume, que nos insignes et armoiries soient placés non seulement dans les églises et endroits réservés au culte mais dans les cours de justice et que les armoiries de France soient enlevés de toutes les églises et cours ou elles peuvent se trouver encore.

Que la société de prêtres romains appelés les séminaires de Québec et de Montréal continue de posséder et à habiter les maisons qui servent de résidence ainsi que toutes les autres maisons et terres qui lui appartenaient en vertu de la loi, le 13 septembre 1759; en outre qu'il soit loisible à cette société de remplir les vacances qui se produiront et d'admettre de nouveaux membres conformément aux règles de sa fondation et d'instruire les jeunes gens de manière à ce que des cures leur soient confiées par la suite à mesure qu'elles deviendront vacantes.

C'est aussi notre bon plaisir que toutes les autres institutions religieuses et les séminaires (sauf seulement l'ordre des jésuites) restent pour le moment en possession de leurs établissements actuels, jusqu'à ce que nous soyons mieux renseigné sur leur véritable état et que nous sachions jusqu'à quel point elles sont essentielles au libre exercice de la religion de l'Église de Rome, tel que permis dans notre dite province. [...]

- Archives publiques du Canada, Documents constitutionnels 1759-1791
L'Acte de Québec de 1774 - qui avait été promulgué selon la volonté du roi d'Angleterre Georges III, suite à des représentations de Guy Carleton et l'avis de conseillers nommés directement par le roi pour étudier le dossier fut l'un des principaux éléments déclencheurs de la révolution américaine, de la rébellion des colonies anglaises d'Amérique du nord et leur volonté de s'affranchir de la monarchie britannique.

Parce que cet Acte de Québec fut reçu comme une manoeuvre hostile de la monarchie anglaise à l'encontre des intérêts locaux des marchands anglo-américains. L'Acte en question «sanctuarisait» une bonne partie de l'ancienne Nouvelle-France, sauvegardait globalement les intérêts de la religion catholique, avec la reconduite des coutumes civiles française et interdisait d'accès, en outre, aux commerçants américains, les terres plus à l'ouest à l'intérieur du continent. En un mot : comme si la monarchie anglaise, dans le but de sauvegarder ses propres intérêts, en Amérique, préférait désormais faire alliance avec l'ennemi de la veille, le clergé catholique et les hobereaux et autres petits seigneurs français sur leurs terres.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Socrate d'Aquin » lun. 21 févr. 2022, 20:03

Altior a écrit :
sam. 19 févr. 2022, 17:05
Socrate d'Aquin a écrit :
ven. 18 févr. 2022, 11:15

On pourrait faire remarquer qu'en France aussi, la monarchie a fini par dégringoler, pour le meilleur et pour le pire. De même en Italie, en Allemagne, en Russie, etc.
Attndez, attendez. Voyons. En France on ne peut pas parler d'une dégringolade de la monarchie. Rien à voir avec les luttes incessantes pendant le dernier siècle de la République Romaine. Sans doute, on était arrivé à quelques problèmes bugétaires, mais je ne sais pas si la France sous Luis XVI était plus endetté que la République sous Macron. Puis, en Italie la monarchie (de très courte histoire) a fini effectivement en dégringolade à cause de sa faiblesse, puisqu'elle s'est laissé à la remorque des socialo-fascistes de Il Duce. En Allemagne la monarchie a été un grand succès. SImplement les Allemands sous le Kaiser ont perdu la guerre (plutôt à Versailles que sur le champ d'honneur) : là, c'est grâce à la faiblesse de la République de Weimar que les socialistes de Hitler ont pu prendre le pouvoir une génération après la défaite de leurs parents. En Russie, tout comme en France, la monarchie se portait très bien quand les bolchéviques ont transposé les idées de Robespierre chez eux. Le tsar Nicolas était encore plus conciliant que le roi Louis XVI : ses réformes à la pression de la gauche menchevique en 1905 furent très larges.

Soit dit en passant, puisque vous êtes Roumain de naissance, quel prétendant soutenez-vous ? Je suis d'autant plus intéressé que l'idée monarchique a fait son retour en Roumanie il y a peu.
Je ne me prononce pas car je n'ai pas assimilé tous les éléments de la question de la succession. D'ailleurs, je la trouve secondaire. Comme personalités, j'ai une certaine préférence pour celui qui se dit être "l'aîné des Bourbons". Il me parle un peu mieux que l'autre, mais même l'autre sur trône, serait mille fois mieux que les Sarkozys, les Hollandes et les autres Macrons avec lesquelles leur république essaye de nous habituer.

On ne peut pas parler d'un retour de l'idée monarchique en Roumanie. Un large sondage d'opinion donnait l'option monarchique à seulement 7 % des préférences. Pourcentage étonnant, car la Roumanie n'est république que dépuis décembre 1947, donc la mémoire de la monarchie devrait être bien plus vivante qu'en France. Puis, à la différence de la France, où la Révolution fut un phénomène franco-français, en Roumaine la république est venu par l'ordre de Staline pendant l'Occupation. Mais voilà, la propagande communiste, foncièrement anti-royaliste, a fait bien son travail.
Cher Altior, quelques remarques :

La monarchie n'a pas pris fin en 1792, elle a pris fin en 1848. Plus exactement encore, en 1870, par un désastre sans précédent. Elle a donc bien "dégringolé", de même que la monarchie des Hohenzollern, qui fut vaincue et a laissé l'Allemagne dans une situation terrible.

Les Bolchéviques ne sont pas des Jacobins, même si on peut probablement faire descendre les premiers des seconds.

Merci pour vos remarques sur vos prétendants. En ce qui me concerne, si j'étais royaliste, je soutiendrais le Comte de Paris (et non "l'aîné des Bourbons", qui pour toutes ses qualités apparaît un peu comme un cheveu sur la soupe).
Mais je pensais plutôt aux prétendants roumains.
Ἐν ἀρχῇ ἦν ὁ λόγος, καὶ ὁ λόγος ἦν πρὸς τὸν θεόν, καὶ θεὸς ἦν ὁ λόγος. Οὗτος ἦν ἐν ἀρχῇ πρὸς τὸν θεόν. Πάντα δι’ αὐτοῦ ἐγένετο, καὶ χωρὶς αὐτοῦ ἐγένετο οὐδὲ ἓν ὃ γέγονεν. Ἐν αὐτῷ ζωὴ ἦν, καὶ ἡ ζωὴ ἦν τὸ φῶς τῶν ἀνθρώπων, καὶ τὸ φῶς ἐν τῇ σκοτίᾳ φαίνει, καὶ ἡ σκοτία αὐτὸ οὐ κατέλαβεν.

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Re: En tant que catholique, Républicain ou Royaliste ?

Message non lu par Cinci » jeu. 24 févr. 2022, 19:13

Altior,

Mon petit exemple concret plus haut (instructions royales en 1775) : il se voudrait tel un exemple de ce que l'on verra de moins en moins au XIXe siècle et jusqu'à aujourd'hui de la part d'un monarque en Europe de l'ouest. Il s'agit d'un exemple pouvant servir de révélateur de ce qui disparaît. Mais j'ai quand même conscience de ne pas répondre réellement à votre question qui est assez pointue. Pour y répondre, je crois que ça demanderait une étude sur les activités chez nous des différents gouverneurs généraux s'étant succédés, pour trouver exactement le point de bascule. C'est à dire à partir de quelle occasion l'on ne trouvera plus le roi , la reine ou leurs représentants comme désireux de se mêler des affaires politiques courantes.

De ce que je connais un peu de l'évolution historique de la situation chez nous, avant même d'aller voir, je dirais que le point de bascule se situe vers le milieu du XIXe siècle. Il y aurait bien des raisons pour cela mais que je ne vais pas lister ici.

Maintenant, mais est-ce que le roi en Belgique eût été tellement plus actif politiquement entre le milieu du XIXe siècle et le début XXe ? Le roi en Italie ? en Allemagne ?

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