Je voudrais éviter de vous répondre de façon formaliste, d’autant que tout formalisme sur un des sujets concernés n’est que la conséquence de la parole du Christ adressée à tous les apôtres en direct : « ce que vous lierez... » etc.
Et que si un évêque a le droit de dispenser de l’obligation d’assister à la messe dominicale, il a donc à plus forte raison celui de ce dont il s’agit ici et qui ne saurait tenir lieu de dispense.
(Mais cela semble inévitable..).
Il n’est pas question de « sauf-conduit » massif, et c’est bien pourquoi à mon avis cela ne figure pas (jamais dans le futur ?) dans un code. Il ne saurait s’agir d’une règle dérogatoire, mais d’un critère de discernement face à un imprévu.
Voir les choses autrement (ce qui n’est pas votre cas) relèverait d’un « mauvais esprit »...
Il y a ensuite 2 façons de considérer la question :
- par rapport au commandement de l’Eglise quand son application est en jeu, pour savoir quand il conviendrait en cas de possibilité de « recommencer plus tard » ou si nous en sommes quitte (formalisme dur, et sachant qu’au final cela fera ou non un péché véniel qui sera absout, à moins d’une volonté délibérée qui semble ici si improbable ! Là, l’intérêt purement comptable de la chose ne serait-il pas à jeter aux orties... ?)
par rapport à l’efficacité sacramentelle d’une messe en terme de « satisfaction », de « réparation » ou de grâce, et qui là encore relève en soi d’un certain formalisme au regard de la volatilité de la grâce et de ce dont elle dépend (une volonté Divine qui nous échappe totalement car même si elle peut se rattacher à des actes précis comme les sacrements, l’efficacité dépend toujours de conditions faisant intervenir la conscience et le for interne...)
Cette seconde alternative rejoint la préoccupation plus légitime de considérer la célébration liturgique pour en quelque sorte en isoler une partie incompressible représentant le fondement sur quoi s’appuie la valeur propitiatoire et sacramentelle de l’eucharistie.
Enfin, il est bon de se rappeler qu’il est possible de communier hors d’une messe, pour ceux notamment qui ne peuvent y assister, et que par conséquent « manquer » d’arriver à temps ne nous prive pas de la possibilité de communier si ce retard n’est pas volontaire –or cette communion effaçant les péchés véniels (Cf. le catéchisme), je vous laisse en poursuivre le raisonnement « théorique » à la limite de l’absurde.
Je réponds ici aussi à l’anecdote rapportée par PAxetBonum : mais bien sûr que ce prêtre n’avait pas tort de demander et proposer à des scouts une éthique conforme à l’une des devises de ce mouvement : « de notre mieux », cela sans rentrer dans le détail « théorique » et pour traiter le cas en général, laissant les exceptions se régler dans le confessionnal : de la même façon, les papes condamnèrent l’usage du préservatif face au sida (c’est alors un problème de stratégie de communication, et non de théologie, stratégie sans doute mal évaluée d’ailleurs), même si un époux chrétien ayant contracté ce virus par une perfusion sanguine « devait » lui l’utiliser dans ses rapports conjugaux ensuite !
Faut-il imaginer que cet époux ait pu faire exprès d’attraper ce virus pour pouvoir utiliser un préservatif ? Quand bien même ce serait possible, une telle pensée spéculative serait en soi un péché contre la charité, sans doute plus grave que celui qui se serait senti acculé à ce subterfuge qui compromettait sa vie et sa santé, pour éviter d’être fécond sans offenser à chaque acte conjugal sa religion (faut-il être désespéré et à la fois croyant et formaliste pour en arriver là !)
Il est triste (je n’ai fait que prendre une comparaison) que le comportement « irrécupérable » de certains autres nous oblige à pousser la réflexion à ce point !
J’aurais voulu éviter aussi d’analyser la messe pour « prouver » la valeur de cette réponse donnée par un évêque. Ainsi, il est évident que si le cœur de l’eucharistie se trouve dans la consécration, celle-ci est « imbriquée » dans tout le canon de façon dirons-nous pour paraphraser un autre sacrement « indissoluble », lequel suppose le préalable de l’offertoire, se conclut par le « par lui... » et qui ouvre sur le pater, etc.
La partie « confessionnelle » au début (que réitère l’agnus Dei), ou celle que l’on appelle la liturgie de la parole, ou celle post communion (avec surtout la bénédiction), etc. n’ont évidemment pas la même nécessité, et répondent à des besoins ou préoccupations qui nous concernent nous et notre « mise en condition » (qui peut être déjà réalisée en nous et dont la grâce peut se passer pourvu que notre disposition soit la bonne) plus que l’action de la grâce...
Je ne peux m’empêcher de penser à la pratique orthodoxe, où le culte fait preuve d’une grande souplesse et d’un moindre formalisme (comme il n’y a pas de sièges, il n’y a pas de rangs, on ne gêne personne à se déplacer pour vénérer une icône pendant la cérémonie, etc.) : les orthodoxes sont « chez eux » à l’Eglise, non enrégimentés, ils sont comme des enfants dans la maison de leur père : de même que rien n’empêche un catholique de participer à la messe en disant son rosaire en silence dans son coin !
La question d’arriver ou de partir à l’heure y perd tout son mordant, notamment parce que le jeûne depuis le réveil est une façon de déjà commencer sa participation, et que la confiance dans le rôle que chacun doit tenir, pour un bénéfice plus communautaire (et qui dépasse l’assemblée) qu’individuel, autorise une plus grande liberté formelle : ainsi le maintien des prêtres n’est pas aussi codifié et stylisé ; chacun prend part au service à sa façon et cette familiarité, cette simplicité, contribue à relever le sens profond du mystère.
Il est bon de se souvenir aussi que la liturgie de la parole n’a été « fondue » avec celle de l’eucharistie qu’au 4 ème siècle, qu’elles existaient avant mais séparément.
En outre, la partie « offertoire » chez les orthodoxes se fait en partie en privé (prêtre et diacre) et au commencement, en préparation : si on appliquait la règle de présence ici défendue dans sa rigidité et oubliait ce caractère privé, il y aurait donc interdiction d’arriver en retard, sauf à considérer ce que j’écrivais sur le rôle de chacun.
Faut-il rappeler la nécessité de savoir de quoi il est question ? (Oui, car c’est aussi un peu au cœur de la querelle des intégristes, et bien que je me demande si ce n’est pas devenu qu’un prétexte pour véhiculer et défendre des idées obsolètes, une dogmatique périmée voire hérétique sur certains points à l’égard desquels l’Eglise a évolué – œcuménisme, « hors de l’Eglise pas de salut », liberté religieuse, etc.)
Ni image ni symbole, ni simple commémoration (donc actuelle), ni représentation imaginaire, mais sacrifice véritable du corps véritable de Jésus.
Et pourtant, comme cet agneau a été immolé une seule fois et pour toutes, la messe n’est pas son immolation sanglante, mais la transformation du pain en cet Agneau, et le vin en son sang versé.
Ce n’est donc pas un nouveau sacrifice, ni sa répétition, et ce sacrifice contient bien plus que sa mort, dont tous les autres éléments (depuis l’incarnation jusqu’à l’ascension) sont aussi rendus présents.
L’éternité rejoint alors notre temps et nous devenons les contemporains réels de ces événements.
Or si nous l’avions été, serions-nous restés par exemple des heures au pied de la croix (moment crucial trop souvent seulement évoqué pour exiger plus que le possible, mais en fait de façon réductrice et artificielle) ? N’aurions-nous pas dû ou pu nous absenter pour - travailler, aller chercher ou écarter un enfant, manger peut-être, déféquer, etc. : en un mot : continuer à vivre de cette vie pour le bonheur de laquelle tout cela a eu lieu !
Surtout, vu que ces événements dépassent le seul cadre de la passion (ce pour quoi répondre « oui » à la question précédente serait plus téméraire qu’impertinent !), cela ne nous permet-il pas de relativiser cette contrainte de lieu et d’horaire ? (Dans les deux sens : combien restent dans l’Eglise pour une prière post –communion d’action de grâce ou autre... ? Mais rien n’empêche de la faire ailleurs ! Et partir avant peut être une façon de rester concentré et d’éviter les bousculades et les embouteillages (engueulades aussi parfois : j’ai connu !) de sortie !
Ceci dans la mesure où toutes nos messes participent du même instant, et qu’en conséquence nous sommes libres d’y donner l’importance la plus grande au mieux, en négociant avec les contraintes inopinées d’une seule, actuelle, d’une façon qui pourra paraître immodérée, peu respectueuse, etc. à un regard extérieur qui ne saurait connaître notre foi intérieure et nos intentions.
Bref, il est sans doute bon d’avoir une règle formelle (je l’ai donnée de façon laconique, ou sa présomption), mais encore meilleur d’en dépasser la lettre par l’esprit.
La règle, c’est que chaque instant de notre vie soit une participation à cette oeuvre de salut qui trouve son accomplissement dans celle du Christ Jésus. A partir de là, il appartient à chacun de gérer la sienne au mieux de sa conscience.
Je me doute Cinci que ma réponse ne vous aura pas complétement satisfait, mais peut-être en aurez vous retenu un ou 2 "petits trucs" intéressants...