La question du mal et la justice de Dieu

« Dieu leur donnera peut-être de se convertir et de connaître la vérité. » (2Tm 2.25)
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Cinci
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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Cinci » sam. 02 oct. 2021, 19:14

Sal;ut Foxy,
Bonjour Cinci

Je ne serais pas aussi catégorique que vous, connaissant des personnes en retraite (athées) qui se sont engagées pour aller porter secours lors de catastrophes. Elles l'ont fait parce qu'elles s'en sentaient le "devoir" et non pas de vouloir être reconnues en quoi que ce soit.

Et dans les associations humanitaires religieuses, pensez vous qu'il n'y a que le "don de soi" ? qu'ils n'y vont que par l'appel de Dieu ?
Mais au nom de quoi vos personnes athées se seront-elles senti le "devoir" d'agir en faveur de voisins catastrophés, victimes d'une inondation, d'un incendie ou je ne sais quoi ? Quel est le ressort ? Le savez-vous ?

Les religieux n'agissent pas uniquement ni toujours pour des motifs parfaitement purs et parfaitement religieux. C'est sûr. Ce sont des pécheurs comme tout le monde. Mais là n'est pas la question. En passant, vous vous comporteriez ici comme nos objecteurs incroyants qui méprisent la foi. Je veux dire que vous reprenez à votre compte leur vaine remarque («Mais je connais un incroyant qui fait plus et mieux et ... et blabla ...»)

Non

L'organisme qui inscrit officiellement et ouvertement son action sous le patronage direct de la mission soit celle qui consisterait à faire connaître Dieu, Jésus-Christ, son amour pour les hommes et pour ramener le crédit de toute l'opération à la grâce de Dieu qui permet ... , pour moi c'est plus clair et c'est mieux. Parce qu'il est juste que le mérite soit rendu ouvertement à l'Auteur de nos jours, le Père Saint et Créateur, puis Notre Rédempteur.

Il y a quelques mois de cela, j'aurai eu vent du changement de nom d'un organisme de charité chez nous, qui avait été fondé à l'origine par le cardinal Léger. A sa mort, l'organisme avait pris le nom des «Les oeuvres du cardinal Léger». Jusque là c'était clair et comme clair qu'une dimension religieuse chrétienne et catholique se rattachait à la mission en question. Finalement, on nous aura sécularisé la chose en la rebaptisant «Mission inclusion» ou un truc anonyme semblable. Un détail ? Oui. Mais un détail vicieux. Car c'est juste trahir la mission de départ de l'organisme et ce pourquoi il aura été fondé. Le truc bienveillant devenant gris, anonyme, sans couleur religieuse particulière et comme ouvert absolument à tout devient comme une autre façon de renier le Christ. On pourrait voir cela différemment mais il en reviendrait quand même, pour des catholiques, à trouver dans ce fait du moins bien, un recul, non pas un progrès.

Cinci
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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Cinci » sam. 02 oct. 2021, 20:01

merlaug a écrit :Je trouve que reprendre cet exemple vous contredit un peu car le "Bon samaritain" représente comme vous le dites un amour spécialement gratuit mais pas spécialement lié à une vertu théologale. C'est comme cela que je le comprends dans la bible et aussi comme cela que a évolué l'expression être "un bon samaritain". De plus, la bible met en comparaison le prêtre et le bon samaritain. Le religieux et l'autre. Je ne vois pas dans cet exemple la présence de la vertu théologale.
Si c'est dans le Nouveau Testament, vous pouvez être certain que la dimension religieuse se trouve présente. Les Samaritains réels du temps de Jésus n'étaient pas des incroyants, des agnostiques ou des catholiques du XXe siècle pratiquant la technique pastorale de l'enfouissement.

La parabole se comprend bien une fois projetée sur tout le reste du discours de Jésus présent dans les Évangiles. C'est à dire de la critique faite aux Pharisiens d'avoir édifié une tradition religieuse humaine de leur cru leur permettant d'annuler le commandement de Dieu. Les prêtres juifs sont en route pour Jérusalem et ils ne sont pas intéressés à se souiller de diverses manières en entrant en contact avec une personne impure et probablement ensanglantée par surcroît. Le fait de se souiller les obligerait ensuite à devoir pratiquer une opération de décontamination fastidieuse rendu à destination, les empêchant d'entrer dans le Temple, etc.

Le Samaritain très mal vu lui-même des Juifs et vu comme un impur n'est pourtant pas un être irréligieux, dépourvu d'une pratique religieuse explicite. Non, mais c'est juste que le Samaritain sans aucun doute plus frustre que les prêtres juifs du Temple, pour être plus frustre possède moins de ces traditions raffinées de casuistes, excellentes pour vous dispenser d'agir envers votre prochain. Le Samaritain religieux hors la loi ( ... celle des Pharisiens) se trouve paradoxalement plus proche de la loi divine.

Dans tout cela, le Samaritain sait ce qu'il fait et sait aussi qu'il obéi à une injonction divine en ce faisant.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par merlaug » dim. 03 oct. 2021, 1:22

Bonjour,

Riou, je comprends votre explication mais il n'empêche que l'expression "être un bon samaritain" dans le langage courant est dénuée de conotation religieuse. Le mot charité de "caritatis" en latin est une vertu théologale mais aussi un mot sans forcément une connation spirituelle ( oeuvres caritatives ). Il n'est pas la propriété des catholiques :-).

Cinci,
"Mais au nom de quoi vos personnes athées se seront-elles senti le "devoir" d'agir en faveur de voisins catastrophés, victimes d'une inondation, d'un incendie ou je ne sais quoi ? Quel est le ressort ? Le savez-vous ?"

?? même les animaux ont un sens de la communauté et de la famille, cela parait cohérent que les humains possédent ce sens aussi ( pas aussi pure que la vertu théologale de la charité mais il existe ). Sans être très spirituel l'on peut être altruiste. A priori, vous Cinci, vous savez que derrière les actions de ces personnes athées ou autres, il y a forcément quelque chose de bizarre derrière.

"En passant, vous vous comporteriez ici comme nos objecteurs incroyants qui méprisent la foi."

Rien dans ce sujet de discussion n'est venu dire que les incroyants méprisent la foi ou les croyants, vous inventez. Vous voyez du mépris là où il n'y en a pas.
Par contre, quand vous évoquez le changement de nom de mission, je partage votre opinion. Rendons à dieu ce qui est à dieu.
Enfin, je vois sur ce forum que vous postez beaucoup. Je vous lis un peu et je trouve que vous manquez d'ouverture d'esprit, de dialogue.
Quand vous parlez de discutailler sur Galilée, c'est méprisant. Quand vous parlez d'incroyants qui méprise la foi alors que le sujet n'a pas été abordé. Tout cela alors que vous vous revendiquez "catholique perplexe", vous trouvez comme vous l'avez écrit que le pape et ses évêques auraient une foi pervertie par l'influence de diocèses américains. Le pape a ces dernières années rappelé le message de l'église, le lien a la création avec l'encyclique "Laudato Si", la condamnation de la gnose, du pélagianisme. Je n'y ai pas trop vu d'incohérences flagrantes.

Sur cette question du mal et de la justice de DIeu, question qui a énormément évolué au sein de l'église, je trouve votre position bancale. Vous lire en sachant qu'aujourd'hui vous vous tenez éloigné de la position de l'église vous discrédite un peu sur ce sujet à mes yeux. Rassurez-vous, je n'ai moi aussi aucune envie de discutailler avec vous sur vos positions spirituelles.

Je reprends une partie de la réponse de Raistlin ( première page du sujet, première réponse ) :
"Après ces quelques données de cadrage, répondons à votre question sur le cancer. NON, Dieu n'a jamais voulu que nous souffrions de cette horrible maladie et n'en est aucunement la cause. Cependant, et étant donné que nous sommes en état de chute (lié au péché originel), nous devons en subir les conséquences.
Bien sûr, Dieu pourrait soigner tous les cas de cancer de par le monde mais non, Il laisse faire. Pourquoi ? Là, plusieurs réponses sont possibles : pour notre propre salut (certains se convertissent au cours d'une grande souffrance), pour celui des autres (beaucoup de saints et mystiques sont d'accord sur le fait que des souffrances offertes librement à Dieu sauvent des âmes), pour que les autres puissent nous témoigner leur charité (oui, c'est souvent une grâce que de pouvoir s'occuper de personnes en grande souffrance et soulager leur peine), etc.
Mais il n'y a pas de réponse toute faite dans ce domaine, ça reste un Mystère. Cependant, gardons à l'esprit que cette vie n'est qu'une étape et que ce qui nous attend, c'est la béatitude éternelle auprès de Celui qui est tout amour."

Les réponses proposées ne me satisfont pas, à savoir :
- Sa propre rédemption à travers la souffrance ( position plus juive que catholique d'après mes connaissances ).
- L'offrande de ses souffrances pour sauver les autres, les âmes. Je trouve cela magnifique, quelle humilité il faut avoir pour faire cela.
- Etre un intermédiaire de la charité au travers l'aide des autres. A priori, la position de l'aidant est plus agréable que la postion de l'aidé ( le malade ).

Cependant, je partage totalement la fin du paragraphe ou le Mystère de la souffrance est réaffirmé.

Voici un article que j'ai survolé sur le sujet :
https://repositorio.ucp.pt/bitstream/10 ... ne%201.pdf

de Alexandre-Freire-Duarte
https://www.porto.ucp.pt/pt/docentes-Al ... ire-Duarte ( université catholique du Portugal ).

Extrait :
"Nous affirmons que la souffrance est un thème anthropologique et théologien relevant, et peut-être même très relevant, par trois raisons essentielles. D’abord, il s’agit d’une réalité universelle : tout être humain, à n’importe quel moment de sa vie, expérimente en soi-même, et contemple chez les autres, la souffrance. Ainsi les perspectives y divergent: il y a ceux qui se révoltent contre elle, en arrivant même à invectiver Dieu et les autres: il y a ceux qui se résignent passivement, en se limitant à hausser les épaules ou l’âme; il y a, finalement, ceux qui essaient de la vivre dans un horizon plus vaste, en essayant de l’intégrer sous la clef de l’amour."

Je trouve sa présentation des personnes souffrantes péjorative par son classement en catégories. Pour beaucoup de malades, c'est un mélange des trois et ce à l'annonce de la maladie, jusqu'à son acceptation. C'est rarement vécu, je me trompe peut-être, directement en essayant de l'intégrer sous la clef de l'amour. Beaucoup de psychiatres ont évoqués à ce sujet qu'il y a souvent d'abord :
- la révolte
puis
- la négociation, la maladie entraine une passivité, forcément car l'on est moins acteur de sa vie et plus dépendant, maladie durant laquelle l'on peut "hausser les épaules ou l'âme"
et en parallèle l'on peut essayer de l'intégrer sous la clef de l'amour avec succès ou non. Le succès n'est jamais garanti.

Les trois choses sont imbriquées et non distinctes.

Pour continuer sur le sujet, j'ai regardé plusieurs fois cette émission et elle me rend perplexe :
https://www.youtube.com/watch?v=WyKogUPCFw4

C'est une émission de KTO, j'aime bien comment Régis Burnet se fait souvent l'avocat du diable. Les invités et le présentateur ont un bon bagage culturel, ce qui est intéréssant. Dans le lien, le philosophe Paul Clavier aborde la dignité humaine à la vingtième minute. C'est vraiment ambigü car il y évoque la résistance au mal. Or cette résistance au mal n'est pas toujours basé essentiellement sur le message christique. Par exemple, la résistance au nazisme, aux trafics de drogue, à la corruption ou encore le patriotisme. Le message du christ et des vertus morales comme le courage, l'engagement, "le patriotisme" se mélangent beaucoup.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Cinci » dim. 03 oct. 2021, 3:29

merlaug a écrit :Rien dans ce sujet de discussion n'est venu dire que les incroyants méprisent la foi ou les croyants, vous inventez. Vous voyez du mépris là où il n'y en a pas.
Je dis qu'un catholique quel qu'il soit (... ce serait même le pape François, tiens) qui viendrait me dirait à moi :

«Écoutez mon vieux, j'ai mon beau-frère qui est athée et qui rend volontairement des petits services à ses voisins et il s'est même porté volontaire pour donner un coup de main à l'organisme communiste sans frontière qui veut aider les migrants. Eh bien, mon beau-frère est mieux que les chrétiens, plus généreux, plus charitable; en fait il est »meilleur chrétien que les chrétiens eux-mêmes», tiens ! C'est un vrai chrétien qui s'ignore dans le fond.»

Ce genre de discours déjà entendu mille fois et même dans la bouche de commentateurs catholiques : c'est un discours qui méprise parfaitement la foi catholique dans le fond. C'est mépriser à la fois l'athée et le catholique. Mais les deux ! La personne qui est athée n'a pas envie qu'on la prenne pour un chrétien pour commencer. Et c'est se moquer de la foi catholique (la grâce sanctifiante, etc.) à prétendre que n'importe qui, le premier venu qui ne respecte rien du B-A, BA des éléments du catéchisme, les sacrements et tout, devrait être une sorte de chrétien qui s'ignore et meilleur chrétien au fond que toute la masse de ceux qui vont à l'église, etc. C'est une sorte de petit blasphème en soi, rendu banal, quasi-inconscient, machinal. C'est un discours de mépris larvé envers la masse des croyants ainsi qu'envers la profession de foi explicite de l'Église.

Parce que c'est un discours "socialisant" de faiseux qui prétendrait que «tout ce qui compte en réalité c'est faire ceci, cela»; ici on penserait à donner des sous, tel se dépenser pour donner un vêtement à tel ou tels. Judas Iscariote parlait lui aussi de donner pour les pauvres.

Je ne crois pas inventer en disant que sous la banalité de la formule souvent répétée se cache du mépris envers les fondements de la foi.

Un athée peut bien posséder certaines vertus naturelles, même une facilité en terme de sociabilité, de l'endurance à l'effort, une grande capacité à entreprendre des projets, etc. C'est bien égal que tout cela ne fera pas de l'athée et ses oeuvres une ode à la gloire de Jésus-Christ !

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Cinci » dim. 03 oct. 2021, 3:49

merlaug a écrit :même les animaux ont un sens de la communauté et de la famille, cela parait cohérent que les humains possédent ce sens aussi ( pas aussi pure que la vertu théologale de la charité mais il existe ). Sans être très spirituel l'on peut être altruiste. A priori, vous Cinci, vous savez que derrière les actions de ces personnes athées ou autres, il y a forcément quelque chose de bizarre derrière.
Des athées parlent d'un gène "égoïste". L'espèce humaine serait naturellement programmée (fruit d'une évolution aveugle) pour aider tel ou tels semblables, et parce que cela serait profitable à l'espèce, mieux à même d'assurer la survie du groupe, etc. Dieu ? Non. Il n'en est pas question. Pas du tout. Moralité ? Il serait quand même plus intelligent d'assurer une forme d'entraide organisée. Mieux que la loi de la jungle ou qu'une sorte de loi brutale qui consisterait pour le plus fort à éliminer les autres. Tout simplement parce que ce dernier cas de figure rendrait invivable le quotidien de tout le monde.

Et alors oui ce genre de mentalité utilitaire est une mentalité qui autorise les  «bonnes oeuvres». Sauf que ça ne vaut strictement rien du point de vue de la foi,; rien en terme de mérite ou de trésor à recouvrir dans le Royaume des Cieux !

Les animaux dont vous parler, merlaug, comme la chatte qui s'occupe de ses petits (le gène égoïste), mais ils ne vont pas recouvrir quoi que ce soit en terme de trésor de mérite dans la maison du Père éternel. Et que les athées veuillent bien nous rabaisser au rang des animaux n'est qu'un vice. La chose est vicieuse, merlaug.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par cmoi » dim. 03 oct. 2021, 8:56

Vous n'êtes pas sérieux Cinci, même si Riou et Perlim Pimpum et d'autres ailleurs sur ce site partagent votre avis.
Lequel revient à dire et prendre au sens littéral : "hors de l'Eglise, pas de salut" et donc remet en cause la doctrine éternelle de l'Eglise et l'enseignement des évangiles.

Cela revient aussi à dire que ne pas mentir, voler tuer, etc. n'a aucune valeur, si ce n'est pas exclusivement dû au fait que les commandements de Dieu le disent et parce qu'il faut leur obéIr.

Je vous crois trop intelligent pour qu'il soit besoin de l'argumenter et l'illustrer davantage, de parler de loi naturelle, etc. !
Attention, de grâce, au snobisme théologique !

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Riou » dim. 03 oct. 2021, 9:59

cmoi a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 8:56
Vous n'êtes pas sérieux Cinci, même si Riou et Perlim Pimpum et d'autres ailleurs sur ce site partagent votre avis.
Lequel revient à dire et prendre au sens littéral : "hors de l'Eglise, pas de salut" et donc remet en cause la doctrine éternelle de l'Eglise et l'enseignement des évangiles.

Cela revient aussi à dire que ne pas mentir, voler tuer, etc. n'a aucune valeur, si ce n'est pas exclusivement dû au fait que les commandements de Dieu le disent et parce qu'il faut leur obéIr.

Je vous crois trop intelligent pour qu'il soit besoin de l'argumenter et l'illustrer davantage, de parler de loi naturelle, etc. !
Attention, de grâce, au snobisme théologique !
Bonjour,

Je ne partage pas l'opinion que vous me prêtez, et je ne crois pas qu'il soit bon de faire une chose simplement parce que "Dieu le commande", mais que c'est parce que cette chose est bonne que "Dieu le commande" (c'est d'ailleurs cette idée que Saint Thomas défend, en disant que l'essence de Dieu ne fait qu'un avec la bonté absolue).
Il existe des devoirs envers l'être humain qu'une personne athée est évidemment capable de discerner et d'appliquer, cela ne pose aucun problème. De même, des athées sont évidemment capables de compassion à la manière du bon samaritain, et la compassion est une émotion qui fait agir dans un certain sens qui parfois est le bon (bien qu'elle puisse parfois rendre aveugle).
Les vertus naturelles existent, cela est indéniable et la théologie classique ne le nie pas du tout. Ma question est simplement la suivante : la vertu de charité est-elle possible sans Dieu? Si la charité est une pure gratuité qui libère l'âme en communiquant la Vie même de Dieu, cette pure gratuité libératrice est-elle possible pour l'homme seul? Autrement dit, l'humanité est-elle capable de charité sans transcendance? Cette question n'est ni un rejet des vertus naturelles chez des personnes non croyantes, ni une autoglorification de je ne sais quelle communauté religieuse particulière, mais une interrogation sur les capacités de l'homme - à la manière de Pascal qui se demandait si l'homme est capable de charité sans Dieu.
Ce n'est pas pour rien, d'ailleurs, que des athées aux accents moralistes ne croient pas vraiment en la possibilité de la charité - et de leur point de vue, ils ont raison, car ils pensent au fond que la charité dépasse les capacités humaines, que sa dimension potentiellement sacrificielle (avec la Passion) n'est pas du tout recommandable, que sa gratuité est inaccessible, qu'on ne peut donner de la main droite sans que la main gauche en sache quelque chose, et qu'un tel idéal ne se trouve pas dans le monde des hommes. Et si on met la charité au niveau spirituel qui est le sien, ce que ces athées font de manière remarquable, alors leur position est très cohérente et très humble, à sa manière.

Ceci ne revient pas du tout à dire "qu'hors de l'Eglise, point de salut" - ce que l'Eglise n'a jamais vraiment dit officiellement, à ma connaissance.

Par ailleurs, l'idée d'un non chrétien qui serait charitable ne me rebute pas du tout. Mais ceci ne peut-il pas signifier qu'il est nourri d'une énergie spirituelle qui le dépasse et qui ne vient pas de lui, sans qu'il en soit pleinement conscient? Là aussi, c'est une question.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par prodigal » dim. 03 oct. 2021, 19:00

Cher Merlaug,
il me semble qu'il y a plusieurs questions qui se chevauchent. Je voudrais essayer d'en lister quelques-unes.
Etre charitable et être vertueux est-ce la même chose? Non, si l'on prend le mot "charitable" dans son vrai sens.
Je précise un peu. Il y a selon Kant trois motivations principales pour faire le bien : l'intérêt, le sentiment, le respect du devoir. Il ajoute, en insistant, que seule la troisième est vraiment vertueuse. Cela fait donc deux ordres : intérêt et sentiment constituent le premier, en-deça de la moralité, la vertu constitue le second, au niveau de la vraie moralité.
Il n'est pas question à ce stade de charité, mais seulement de suivre les règles que l'homme est capable de reconnaître comme ayant valeur d'obligations.
Avançons.
Un chrétien peut-il être vertueux sans être charitable? C'est l'évidence même.
Un athée peut-il être vertueux? Bien sûr, et cela arrive assez souvent.
Un athée peut-il être mû par la charité? cela paraît douteux dans un premier temps, puisque la charité est l'amour de Dieu manifesté dans l'amour du prochain (sans lequel il est mensonge). Mais, dans un deuxième temps, l'amour divin est sans limite, et la grâce de Dieu peut tout. Un athée touché par la grâce et charitable est donc possible.
J'ajouterai cependant non pas une réserve mais une nuance : un athée touché par la grâce divine et empli de charité sera au minimum ébranlé dans son incroyance. Sinon c'est que nous ne parlons pas de la même chose.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Riou » dim. 03 oct. 2021, 19:42

prodigal a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 19:00
Il y a selon Kant trois motivations principales pour faire le bien : l'intérêt, le sentiment, le respect du devoir. Il ajoute, en insistant, que seule la troisième est vraiment vertueuse. Cela fait donc deux ordres : intérêt et sentiment constituent le premier, en-deça de la moralité, la vertu constitue le second, au niveau de la vraie moralité.
Bonjour,

Et j'ajouterai - car c'est important pour notre question sur l'humanitaire et le devoir - que Kant lui-même déclare qu'on ne peut jamais savoir vraiment si le niveau de la vraie moralité est atteint dans l'intention d'une action. L'homme est trop opaque pour lui-même, il n'y a pas de transparence réelle de la conscience sur ses véritables mobiles, de sorte que la pureté requise par la vraie moralité (je ne parle même pas de la charité) n'est jamais assurée. Dans l'accomplissement du devoir, on ne sait jamais s'il ne s'y mêle pas une composante empirique et pathologique (affectivité) comme un sentiment particulier, un intérêt discret qui passe en contrebande. Kant poursuit sur ce point les moralistes et anticipe, à sa manière, Freud : quels sont les vrais mobiles de notre action? Kant parlera donc de vertus empiriques, mais il sera très perplexe sur l'existence d'une vertu morale réelle et parfaite. Il ira même jusqu'à dire qu'une action morale, libérée de toute subjectivité intéressée, n'a peut-être jamais vraiment existé dans l'histoire de l'humanité. Ce qui est assez pessimiste, je le reconnais. Mais ceci touche à notre problème : de quoi l'homme est-il capable?

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par cmoi » dim. 03 oct. 2021, 20:19

Riou a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 9:59
Je ne partage pas l'opinion que vous me prêtez,
Dans ce cas tant mieux, et je vous fais entièrement confiance, sans relire ce que vous aviez écrit...
Merci d'ailleurs d'avoir poursuivi votre réflexion pour permettre un échange...
Riou a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 9:59
et je ne crois pas qu'il soit bon de faire une chose simplement parce que "Dieu le commande", mais que c'est parce que cette chose est bonne que "Dieu le commande" (c'est d'ailleurs cette idée que Saint Thomas défend, en disant que l'essence de Dieu ne fait qu'un avec la bonté absolue).
Oui, mais aussi Dieu ne nous demande pas d'obéir en aveugles, car alors nous ne serions plus libres, mais de comprendre. Par exemple, à Adam et Eve, il n'a pas interdit de manger le fruit, il leur a dit qu'ils mourraient s'ils le faisaient : c'était à eux de comprendre qu'il ne voulait que leur bien, et non les piéger comme le leur a fait croire le serpent !
Riou a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 9:59
Ma question est simplement la suivante : la vertu de charité est-elle possible sans Dieu?
Rien n'est possible sans Dieu, pas même le péché ! Réponse facile, j'en conviens...

Ce que vous appelez l'homme seul est un homme qui a été créé et voulu par Dieu, et pas pour qu'il souffre. S'il n'a pas eu la grâce "religieuse", il n'entre pas moins dans le plan de salut de Dieu et peut y répondre à son niveau.
J'entends bien la distinction que vous voulez faire, mais je ne crois pas que Dieu la fasse, il suffit de relire les évangiles et de voir le comportement de Jésus. Il arrive qu'il s'en donne l'air, face à la Phénicienne, mais ensuite...

Bien sûr que des athées vont eux chercher à justifier le fait de rester athée quand ils ont été en contact avec la religion, quitte pour cela à porter celle-ci trop haut dans ses exigences.
Je comprends ce que vous dites en parlant d'rune sorte d'humilité, mais j'y vois plus un désespoir, faute d'avoir saisi le plus important : l'appel de l'amour, qui veut nous faire dépasser le côté moralisateur qui tout seul pousserait au désespoir, car en effet : impossible d'être parfait.
Cela renvoie au point précédent : Dieu nous veut nous tout entier, bien plus que de nous voir faire ceci et pas cela. Il veut notre confiance et notre amitié, pour nous aider. Certains le pressentent sans religion formelle, rien qu'en observant la règle d'or...
Je réponds donc oui à votre dernière question, même si les mots employés par eux ne sont pas les mêmes, ce qui compte ce ne sont pas les mots.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par cmoi » dim. 03 oct. 2021, 20:22

prodigal a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 19:00
J'ajouterai cependant non pas une réserve mais une nuance : un athée touché par la grâce divine et empli de charité sera au minimum ébranlé dans son incroyance. Sinon c'est que nous ne parlons pas de la même chose.
Ben oui, mais il y a aussi les prêtres pédophiles, etc (pour faire court et ne pas remuer de couteau dans une plaie trop nourrie de nombreuses causes):... donc cet ébranlement a aussi son contre poids.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Riou » dim. 03 oct. 2021, 20:59

cmoi a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 20:19

Je comprends ce que vous dites en parlant d'rune sorte d'humilité, mais j'y vois plus un désespoir, faute d'avoir saisi le plus important : l'appel de l'amour, qui veut nous faire dépasser le côté moralisateur qui tout seul pousserait au désespoir, car en effet : impossible d'être parfait.
Cela renvoie au point précédent : Dieu nous veut nous tout entier, bien plus que de nous voir faire ceci et pas cela. Il veut notre confiance et notre amitié, pour nous aider. Certains le pressentent sans religion formelle, rien qu'en observant la règle d'or...
Je réponds donc oui à votre dernière question, même si les mots employés par eux ne sont pas les mêmes, ce qui compte ce ne sont pas les mots.
Il n'y a rien de moralisateur dans l'amour. Comme vous le dites, il y a un lien de confiance et d'amour que certains pressentent sans doute sans savoir d'où ça vient, peut-être. Je n'ai pas réduit la religion à un ensemble de règles formelles qui font croire qu'on peut se laver les mains et décrocher un ticket - religion de consommateur qui croit qu'il suffit de payer pour avoir sa récompense (les marchands du temple, en somme).
L'athée ou l'agnostique qui pensent que la charité est un idéal impossible et peu recommandable n'est pas nécessairement un signe de désespoir. Il ne se présente pas toujours comme tel et croit trouver son bien ailleurs. Mais il y a peut-être une sorte de lucidité dans son opinion selon laquelle la charité est impossible à l'homme.

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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Ombiace » dim. 03 oct. 2021, 21:24

Bonsoir à tous,

Marc 16, 14 ne pourrait-il pas nous aider, en ce sens que l'incrédulité des apôtres avait sans doute une ressemblance avec celle de notre athée contemporain.

Or, les apôtres, tout en étant certainement aptes à faire preuve de vertu chrétienne altruiste, se voient pourtant reprocher par Jésus leur dureté de coeur

cmoi
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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par cmoi » lun. 04 oct. 2021, 6:59

Riou a écrit :
dim. 03 oct. 2021, 20:59
Je n'ai pas réduit la religion à
Détendez-vous Riou, personne n'est là et surtout pas moi, pour vous juger ou vous examiner de cette manière. Si je m'exprime parfois de façon un peu "brute de décoffrage", et je m'en excuse si vous l'avez ressenti ainsi, la raison n'en est pas là...
D'ailleurs votre dernier paragraphe me renvoie très bien la balle (la première envoyée)
En effet, par cette idée de désespoir, je réagissais en donnant une interprétation "chrétienne" à ce qui ne l'était pas, comme un appui pour une tentative de parole missionnaire - qui "prendra" ou ne prendra pas. La lucidité que vous évoquez est tout à fait réelle aussi, le tout est de trouver par où la contourner, comment toucher le coeur, et quand nous manquons d'information (ici nous sommes dans la spéculation, pas le réel, et j'ai réagi selon ma propre sensibilité) soit nous ne pouvons rien faire, soit nous essayons en aveugle en tendant des perches...

Cher Pierrot2, vous êtes pile dans le sujet..., en effet... et c'est une des perches

Ombiace
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Re: La question du mal et la justice de Dieu

Message non lu par Ombiace » lun. 04 oct. 2021, 17:29

Bonjour cmoi, ravi de vous relire

Sans doute Riou ne tardera pas à vous répondre.

Pour moi, je n'ai pas grand chose à ajouter à ma suggestion, si ce n'est de m'autocritiquer : Les apôtres n'étaient sans doute pas des athées au sens strict

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