Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

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Trinité
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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Trinité » mer. 31 janv. 2024, 14:15

cmoi a écrit :
lun. 29 janv. 2024, 8:20


Cela revient à une recherche de meilleure justice, celle dite dynamique par les philosophes, or ici la dynamique qui est parfaite est celle de Dieu qui fait précisément que nous ne le connaissons pas encore.
La seule façon de progresser, c’est de progresser dans Sa connaissance, et donc de prendre une autre voie, mystique et non philosophique… Elle consiste à savoir pourquoi dans tels cas qui se ressemblent, Dieu agit de façon différente. Il en donnera la réponse à celui qui le contemplera en admiration et dévotion, pas à celui qui le scrutera lui et ses actes comme pour le juger.
C’est d’étudier l’Écriture Sainte et de trouver des réponses nouvelles quand les autres nous semblent avoir des défauts. Cela suppose de garder l’esprit ouvert et non de s’arc-bouter sur ce que l’on sait ou croit savoir.
Et patati et patata…
Tout à fait !

Merci c moi .

Anit
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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Anit » mer. 31 janv. 2024, 21:17

Altior
Pour Anit, Trinité (et pour tous ceux qui ne croient pas que l'auteur de l'Ancien Testament est Dieu) j'ai trois questions :
1 ) Pourquoi Notre Seigneur, dans le Nouveau Testament, cite copieusement l'Ancien Testament ?
2) Comment ça se fait qu'à seulement 12 ans il étonnait les docteurs de la loi par sa science en Écritures ?
3) Quelle interprétation donnez-vous au verset selon lequel (de mémoire) il ne parlait pas comme les autres (rabbins), mais comme un qui a de l'autorité ?


Merci pour vos lumières.

Altior,
Je ne me dis pas que Dieu est l’auteur de l’Ancien Testament mais que l’Ancien Testament a été inspiré par l’avènement de Dieu dans les âmes. Certaines personnes ont perçu une part infime de Dieu à un moment donné de l’histoire et l'ont relaté. Certains (et beaucoup ! ) se sont trompés et ce qu'ils entendaient c'était "l'ennemi"... Libre ensuite à nous de séparer le bon grain de l’ivraie.

Pour moi Dieu arrive dans notre conscience (ou pas). C’est un avènement dans la conscience. Dans la pensée collective aussi et surtout. Nous évoluons sur les pensées et les avancées passées. Jésus ne pouvait parler à un peuple si il n'était pas perçu (même mal) par leur conscience. Mais il ne pouvait pas non plus dire plus que ce qui pouvait être acceptable à cette époque. Il a aussi repris plusieurs fois ce qu’il avait été sensé dire dans l’AT. Il s’est adapté.
Il doit parler encore à plein de gens aujourd'hui mais on ne l’entend plus, où plutôt les gens n'osent plus rien dire ...
C’est une erreur il me semble.

cmoi
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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par cmoi » jeu. 01 févr. 2024, 7:28

Trinité a écrit :
mer. 31 janv. 2024, 14:15
Tout à fait !

Merci c moi .
Merci à vous. Je vous ai hier évoqué aussi dans "amour et liberté", les 2 fils ayant entre eux une étroite et profonde connexion actuellement.

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ChristianK
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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » dim. 04 févr. 2024, 21:00

Coco lapin a écrit :
sam. 27 janv. 2024, 20:55
Qu'est-ce que c'est que cette histoire de cosmos ? Si Dieu choisit de punir parce que c'est meilleur pour le cosmos, alors il prend une décision "rationnelle" pour des raisons de justice, en quelque sorte. Et si c'est mieux de privilégier le cosmos, ça veut dire que faire l'inverse serait "moins bien", c'est-à-dire "imparfait" ; et comme Dieu ne peut pas agir de façon imparfaite, il est obligé de prendre la meilleure décision possible (qui serait de punir le pécheur, en l'occurrence).
.
C’est du Leibniz, avec le meilleur monde possible auquel Dieu est obligé. C’est pas un défaut en philo mais c’est pas catho. Dieu a donné 5 sens à l’homme, pas 7 et de toute facon la perfection humaine n’est que relative à sa propre nature; il n’est pas imparfait pour un arbre de ne pas être homme. Il y a le tout du cosmos a considérer. Dieu a pu décider les satisfactions pour le bien du tout sans que ce bien du tout soit nécessité – sauf pour la ligne de Leibniz, encore une fois séduisante.

St Thomas dit que de facto Dieu veut le remboursement mais qu'il aurait pu remettre la dette gratis, POURVU QUE LE DEBITEUR VEUILLE PAYER (pénitent).
-------------------------------
Cela paraît illogique. Si le débiteur veut payer, eh bien qu'il paye ! Et s'il ne veut pas, il ne devrait pas avoir à payer. De toute façon on nage un peu ici dans la théorie sans fondement, parce qu'en principe les âmes du purgatoire ne peuvent plus pécher ni vouloir autre chose que ce que Dieu veut.
.
Oui mais ils ont la volonté droite de payer, et de facto Dieu exige le paiement subséquent . Mais cela ne prouve pas à soi seul que Dieu ne pouvait remettre sans ca.
L'idée de cruauté à cause du remboursement exigé librement semble difficile à démontrer.
---------------------
Si Dieu est moralement libre d'exiger ou non le remboursement, pourquoi le faire si cela revient au même qu'il soit exigé ou non ? Et dans le cas où ce serait "mieux" d'exiger le remboursement, Dieu est moralement obligé de choisir ce "mieux".
.
Pour Leibniz le rationaliste oui. D’abord cela ne revient pas au même pcq c’est mieux. Mais Dieu ne pèche pas s’il ne fait pas le mieux, car la miséricorde est aussi un « mieux » à côté de la justice.
A la rigueur on pourrait dire que Dieu est obligé à punir (à nouveau) pour le bien du cosmos, mais il semble en ce cas que la situation soit plus contingente, moins stricte (au contraire de ce qui se passe pour les impénitents).
-------------------------
Dans tous les cas cette obligation découle de sa perfection.
.
Pas si c’est « plus contingent » . Il peut y avoir zone grise

!
Prétendre que Dieu est libre d'épargner ou non aux âmes du purgatoire le supplice du feu selon son bon plaisir, cela implique directement que Dieu est cruel lorsqu'il ne le fait pas. Et c'est ce que vous faites. Vous êtes donc hérétique sans vous en rendre compte.
Non, le raisonnement va trop loin. Il ne peut être cruel s’il est juste et choisit de facto de ne pas faire miséricorde, ou miséricorde à 100%. Absence de miséricorde , juste, ne peut être cruauté.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Coco lapin » mar. 06 févr. 2024, 22:16

ChristianK a écrit :Il y a le tout du cosmos a considérer. Dieu a pu décider les satisfactions pour le bien du tout sans que ce bien du tout soit nécessité – sauf pour la ligne de Leibniz, encore une fois séduisante.
Soit Dieu est nécessité à ordonner les satisfactions pour le bien du tout (pour des raisons de justice, ou simplement en raison de Sa perfection, peu importe), soit Dieu prend librement la décision de faire expier les pénitents sans nécessité, et alors c'est de la cruauté envers eux, parce que le "tout", lui, ne souffre pas, tandis qu'eux souffrent réellement.
ChristianK a écrit :Oui mais ils ont la volonté droite de payer, et de facto Dieu exige le paiement subséquent . Mais cela ne prouve pas à soi seul que Dieu ne pouvait remettre sans ca.
Je pense que c'est surtout parce que Dieu exige d'abord le paiement qu'ils ont conséquemment la volonté de payer. On ne peut pas échapper au purgatoire en disant simplement : "je préfère ne pas payer, surtout si ça ne sert à rien ni pour Dieu ni pour la justice, mais seulement pour le bien du cosmos dont je me fiche éperdument".
ChristianK a écrit :Pour Leibniz le rationaliste oui. D’abord cela ne revient pas au même pcq c’est mieux. Mais Dieu ne pèche pas s’il ne fait pas le mieux, car la miséricorde est aussi un « mieux » à côté de la justice.
La miséricorde est un mieux pour la personne coupable, mais pas forcément de façon globale (en prenant le point de vue divin et tout le cosmos). Si l'on considère qu'il y a une décision qui est mieux que l'autre, Dieu est obligé de choisir la meilleure, et ce n'est donc pas un choix libre.
ChristianK a écrit :Pas si c’est « plus contingent » . Il peut y avoir zone grise
Dans le cas où Dieu est vraiment libre de choisir entre miséricorde ou punition, ça veut dire que le choix est équivalent, il n'y en a pas un meilleur que l'autre, du point de vue de Dieu. Mais, sachant que la punition implique la souffrance d'une personne, pourquoi faire ce choix si ce choix n'est pas objectivement meilleur ? Faire souffrir quelqu'un inutilement, cela s'appelle de la cruauté.
ChristianK a écrit :Non, le raisonnement va trop loin. Il ne peut être cruel s’il est juste et choisit de facto de ne pas faire miséricorde, ou miséricorde à 100%. Absence de miséricorde , juste, ne peut être cruauté.
En fait non, parce qu'on parle d'équivalence au niveau de la justice : torturer serait juste, et faire miséricorde serait tout aussi juste. Pourquoi alors choisir de torturer ? Par cruauté.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » jeu. 08 févr. 2024, 5:04

Coco lapin a écrit :
mar. 06 févr. 2024, 22:16
Soit Dieu est nécessité à ordonner les satisfactions pour le bien du tout (pour des raisons de justice, ou simplement en raison de Sa perfection, peu importe), soit Dieu prend librement la décision de faire expier les pénitents sans nécessité, et alors c'est de la cruauté envers eux, parce que le "tout", lui, ne souffre pas, tandis qu'eux souffrent réellement.
Non car le tout c’est aussi le tout de l’humanité, et l’expiation et la punition détourne du péché. C’est le côté exemplarité.
Oui mais ils ont la volonté droite de payer, et de facto Dieu exige le paiement subséquent . Mais cela ne prouve pas à soi seul que Dieu ne pouvait remettre sans ca.
----------------------
Je pense que c'est surtout parce que Dieu exige d'abord le paiement qu'ils ont conséquemment la volonté de payer. On ne peut pas échapper au purgatoire en disant simplement : "je préfère ne pas payer, surtout si ça ne sert à rien ni pour Dieu ni pour la justice, mais seulement pour le bien du cosmos dont je me fiche éperdument".
Par volonté de payer j’entendais la contrition, qui implique que si Dieu veut on accepte (et méritoirement en ce monde) la satisfaction.
La miséricorde est un mieux pour la personne coupable, mais pas forcément de façon globale (en prenant le point de vue divin et tout le cosmos). Si l'on considère qu'il y a une décision qui est mieux que l'autre, Dieu est obligé de choisir la meilleure, et ce n'est donc pas un choix libre.
Mais pour St Thomas la miséricorde est aussi un point de vue divin. St Thomas pense que Dieu n’a pas besoin pour lui-même de satisfaction, mais si la satisfaction est un bien pour le cosmos, Dieu peut le vouloir, mais il aurait pu aussi ne pas le vouloir, le remplacer par un autre bien.
Mais, sachant que la punition implique la souffrance d'une personne, pourquoi faire ce choix si ce choix n'est pas objectivement meilleur ? Faire souffrir quelqu'un inutilement, cela s'appelle de la cruauté.

Je pense que cette objection rapproche trop le purgatoire, ou la satisfaction terrestre, de l’enfer. Le feu du purgatoire est purificateur et positif, centré sur le rejet, la dé-compensation du péché.
C’est un bien, incontestablement. Il n’est pas que punitif. Il est un châtiment médicinal, non vindicatif.
Et comme dit St Thomas, si j’annule la dette de quelqu’un , pcq je compatis à son sort, je souffre de sa soufrance, suis-je injuste? Mais ensuite passer de l’absence d’annulation à la cruauté, cela parait sophistique.

Non, le raisonnement va trop loin. Il ne peut être cruel s’il est juste et choisit de facto de ne pas faire miséricorde, ou miséricorde à 100%. Absence de miséricorde , juste, ne peut être cruauté.
--------------------
En fait non, parce qu'on parle d'équivalence au niveau de la justice : torturer serait juste, et faire miséricorde serait tout aussi juste. Pourquoi alors choisir de torturer ? Par cruauté.
Voir ci-haut.
Torturer est trop fort pour purification et satisfaction, qui sont des biens. Je ne pense pas qu’on puisse dire que la miséricorde est juste, elle ne fait que ne pas contredire la justice. Quand une contradiction risque de se produire, normalement une distinction s’impose.
Je vais improviser une piste.
Distinguons la justice commutative : on me doit cent
De la justice distributive : tout le monde a le droit de vivre.
Vous me voyez venir. On a 2 types de justices différentes. La miséricorde pourrait être vue comme plus de l’ordre de la justice distributive et la justice du point de vue de la justice commutative. Et il y aurait une sorte de liberté entre les 2.

Mais je pense que la vraie solution se trouve dans la ligne : le purgatoire n’est pas une punition vindicative mais médicinale. Là on a une sorte de synthèse entre miséricorde et justice.

Je vous félicite pour la rigueur de votre argumentation.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » ven. 09 févr. 2024, 1:15

Matériel de la Somme pour réflexion, III Suppl. par Réginald de Piperno, mais basé sur une oeuvre de jeunesse du docteur commun
Q4 temps de la contrition

Rep 3 3. Cette peine, que souffrent les âmes du Purgatoire, ne peut pas être appelée satisfaction proprement dite, car, pour
cette satisfaction, il faut un acte méritoire. Mais on appelle satisfaction au sens large, tout acquit de dette pénale.

Q10 effets de la confession

C’est à double titre, que la confession, jointe à l’absolution, a la vertu de nous libérer de la peine.
Premièrement, elle nous libère en vertu même de l’absolution et, à ce titre, du seul fait qu’elle est désirée, elle nous
délivre de la peine éternelle, comme aussi de la faute. Libéré de cette peine qui est vindicative et supprime toute vie de
grâce, l’homme reste encore débiteur d’une peine temporelle médicinale, destinée à le purifier et à le faire progresser.
Cette peine, qui doit être soufferte en purgatoire par ceux-là même qui ont été libérés de la peine de l’enfer, n’est point
solvable en cette vie par les seules forces du pénitent. Mais, par la vertu des clefs, elle est diminuée de telle sorte
qu’elle devient proportionnée aux forces du pénitent qui peut dès lors se purifier en cette vie par la satisfaction.

Q70 purgatoire
Nier le purgatoire, c’est donc blasphémer contre la justice divine. C’est donc une erreur, et une erreur contre la foi.
C’est pourquoi saint Grégoire de Nysse ajoutait aux paroles citées plus haut : « Nous l’affirmons comme une vérité
dogmatique et nous le croyons ».
L’Église universelle manifeste sa foi par « les prières qu’elle fait pour les défunts afin qu’ils soient délivrés de leurs
péchés », ce qui ne peut s’entendre que des âmes du purgatoire. Or, résister à l’autorité de 1’Église, c’est être hérétique.

...
Les peines ... celles du purgatoire ont pour but principal d’effacer les restes du péché

... on: Il y a deux peines en purgatoire : la peine du dam, l’ajournement de la vue de Dieu; la peine du sens, le
tourment infligé par le feu. Le moindre degré de l’une comme de l’autre surpasse la peine la plus grande que l’on
puisse endurer ici-bas.
Plus une chose est désirée, plus son absence est cruelle. Or, au sortir de ce monde, le souverain bien excite dans les
âmes justes le désir le plus intense, parce que le poids du corps ne l’étouffe plus; d’autre part, ce désir serait déjà
réalisé, si rien n’était venu y faire obstacle : l’ajourne ment leur cause donc la plus grande des souffrances.

...

: Une chose peut être dite volontaire de deux manières. - 1° D’une volonté absolue; ainsi, aucune peine n’est
volontaire, puisqu’il est de sa raison même qu’elle soit contraire à la volonté. - 2° D’une volonté conditionnelle; ainsi
une brûlure est volontaire en vue d’une plaie à guérir. Ici deux cas se présentent. Dans le premier, la peine fait acquérir
un bien, et, à cause de cela, la volonté la recherche, comme dans la satisfaction; ou encore, l’accepte volontiers et ne
veut pas en être privée, comme dans le martyre. Dans le second, la peine ne mérite pas un bien, mais elle est le moyen
d’y parvenir ainsi en est-il de la mort. Cette peine, la volonté ne la recherche pas, elle voudrait en être délivrée, mais
elle la supporte, et, pour autant, cette souffrance est dite volontaire. C’est en ce sens que les souffrances du purgatoire
sont volontaires.
...

: Un débiteur s’acquitte de sa dette en la payant. Or, la dette contractée par le péché n’est pas autre chose
que la peine qu’il mérite. Donc, celui qui subit cette peine acquitte ainsi sa dette. C’est en ce sens que les souffrances
du purgatoire purifient de la dette du péché.
...
2. La peine n’est pas contraire à la peine comme telle, mais comme dette, car, on reste débiteur tant qu’on n’a pas subi
la peine dont on est redevable.

Q71 suffrages pour les défunts

2. On peut parfaitement admettre que la multiplication des suffrages réduise à néant la peine du purgatoire. En effet, il
ne s’ensuit pas que le péché reste impuni, puisque les oeuvres satisfactoires faites à l’intention d’un défunt sont
justement regardées comme faites par lui-même.

Q75 la resurrection

; de
même, les peines du purgatoire sont moins une punition qu’une purification; l
r
[http://docteurangelique.free.fr/bibliot ... c130063972]


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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Coco lapin » sam. 10 févr. 2024, 21:15

ChristianK a écrit :Non car le tout c’est aussi le tout de l’humanité, et l’expiation et la punition détourne du péché. C’est le côté exemplarité.
Cela me paraît un raisonnement circulaire. En effet, si Dieu inflige des peines expiatoires aux âmes du purgatoire sous prétexte de servir d'exemple pour les pécheurs vivants, cela implique qu'il serait obligé de les châtier eux aussi lorsqu'ils seront morts (sinon, autant faire miséricorde à tous). Or nous étions censés considérer le cas où Dieu serait totalement libre de faire expier ou non les âmes du purgatoire, car sa justice n'en serait pas moins satisfaite.
ChristianK a écrit :Mais pour St Thomas la miséricorde est aussi un point de vue divin. St Thomas pense que Dieu n’a pas besoin pour lui-même de satisfaction, mais si la satisfaction est un bien pour le cosmos, Dieu peut le vouloir, mais il aurait pu aussi ne pas le vouloir, le remplacer par un autre bien.
Mais dans ce cas, pourquoi ne pas toujours remplacer la satisfaction par un autre bien ? Pour que ce ne soit pas cruel, il faudrait que les souffrances engendrées soient équivalentes aux souffrances épargnées à l'âme dispensée de purgatoire. Difficile à concevoir.
ChristianK a écrit :Je pense que cette objection rapproche trop le purgatoire, ou la satisfaction terrestre, de l’enfer. Le feu du purgatoire est purificateur et positif, centré sur le rejet, la dé-compensation du péché.
C’est un bien, incontestablement. Il n’est pas que punitif. Il est un châtiment médicinal, non vindicatif.
C'est un bien parce que c'est une punition qui permet l'acquittement d'une dette, qui permet ensuite d'accéder au paradis. Mais ça reste un châtiment, une peine temporelle à expier.
ChristianK a écrit :Et comme dit St Thomas, si j’annule la dette de quelqu’un , pcq je compatis à son sort, je souffre de sa soufrance, suis-je injuste? Mais ensuite passer de l’absence d’annulation à la cruauté, cela parait sophistique.
Si annuler une dette ne s'oppose pas à la justice, il n'y a apparemment pas de raison de ne pas le faire, à moins d'être cruel.
ChristianK a écrit :Torturer est trop fort pour purification et satisfaction, qui sont des biens.
Torturer est un mot qui me semble approprié. Il paraît que les âmes du purgatoire brûlent dans un feu aussi douloureux que le feu de l'enfer (lui-même plus douloureux que les feux que nous pouvons connaître sur terre). De plus, elles souffrent de la peine du dam, même si ces deux châtiments sont atténués par le fait de savoir qu'ils ne sont que temporaires.
ChristianK a écrit :Je ne pense pas qu’on puisse dire que la miséricorde est juste, elle ne fait que ne pas contredire la justice.
La miséricorde, par définition, est injuste si elle n'est pas compensée par une "juste compensation". Elle est injuste parce qu'elle s'oppose au "juste châtiment".
ChristianK a écrit :Je vais improviser une piste.
Distinguons la justice commutative : on me doit cent
De la justice distributive : tout le monde a le droit de vivre.
Vous me voyez venir. On a 2 types de justices différentes. La miséricorde pourrait être vue comme plus de l’ordre de la justice distributive et la justice du point de vue de la justice commutative. Et il y aurait une sorte de liberté entre les 2.
Je n'ai pas compris votre exemple. Vous voulez dire que, par défaut, tout le monde doit écoper d'une certaine peine, mais que selon les mérites propres à chacun, il est juste que cette peine soit diminuée pour certains ? Je suis d'accord, mais je pense que cette justice s'opère avant le verdict. Par exemple, compte tenu de ses péchés, untel devrait écoper de vingt ans de purgatoire, mais considérant ses mérites, Dieu le condamne à seulement dix ans de purgatoire. Mais ensuite on a atteint le plancher, et Dieu ne peut pas librement choisir d'être davantage miséricordieux. Il faudra que des prières et des sacrifices émanant de l'Eglise militante viennent écourter sa peine.
ChristianK a écrit :Mais je pense que la vraie solution se trouve dans la ligne : le purgatoire n’est pas une punition vindicative mais médicinale. Là on a une sorte de synthèse entre miséricorde et justice.
Certes, on peut dire que la punition du purgatoire est déjà de la miséricorde, parce qu'elle permettra d'accéder à la vision béatifique lorsque la peine sera purgée, mais il n'est pas possible pour Dieu d'être encore plus miséricordieux en ouvrant le Royaume des cieux sans requérir cette punition.
ChristianK a écrit :Je vous félicite pour la rigueur de votre argumentation.
Merci, mais certaines choses ne sont pas tout à fait claires dans mon esprit, à vrai dire.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » dim. 11 févr. 2024, 21:08

Matériel préparatoire de la somme du docteur commun pour réfléchir sur la justice, distributive vs commutative (il semble que les 2 aspects soient pertinents en Dieu car il est maitre de tous les biens de la création).
II II Q 61

Réponse : Ainsi que nous l’avons dit, la justice particulière s’ordonne à une personne privée, qui est avec la société
dans un rapport comparable à celui de la partie avec le tout. Or une partie comporte une double relation : d’abord
celle de partie à partie, à laquelle correspond dans la société la relation d’individu à individu. C’est cet ordre de
relations que dirige la justice commutative, qui a pour objet les échanges mutuels entre deux personnes.
Entre le tout et les parties on envisage un autre ordre, auquel ressemble l’ordre de ce qui est commun aux individus.
Cet ordre est celui que dirige la justice distributive, appelée à répartir proportionnellement le bien commun de la
société. Il y a donc bien deux espèces de justice, l’une distributive, l’autre commutative.
...
3. Procéder à la répartition des biens communs appartient à celui-là seul qui a la charge de ces biens. Les sujets à qui
ils sont distribués n’en ont pas moins à pratiquer la justice distributive, en se montrant satisfaits si la répartition est
juste. Il arrive parfois que les biens communs à distribuer appartiennent non pas à la cité, mais à une famille ; en ce
cas, c’est l’autorité d’une personne privée qui fixe la répartition.



II II Q 61

Article 2 : Le juste milieu se détermine-t-il de la même façon dans la justice commutative dans la justice
distributive ?
Objections : 1. Il semble bien, car ces deux justices sont des parties de la justice particulière, nous venons de le dire.
Or, dans toutes les parties de la tempérance ou de la force, le juste milieu est déterminé de la même façon. Donc, il
doit l’être aussi dans les deux justices, distributive et commutative.
2. La forme de la vertu morale consiste en un juste milieu déterminé rationnellement. Donc, puisqu’une seule vertu
n’a qu’une seule forme, il semble bien que dans ces deux espèces d’une seule vertu, le juste milieu doit être
déterminé de la même façon.
3. Dans la justice distributive, le juste milieu s’établit en tenant compte de la dignité différente des personnes. Mais
cette dignité intervient aussi dans la justice commutative, par exemple dans les peines, car celui qui frappe le prince
est plus sévèrement puni que celui qui frappe une personne privée. Donc, le juste milieu s’établit de la même façon
dans l’une et l’autre justices.
En sens contraire, le Philosophe dit que dans la justice distributive le juste milieu s’établit selon une proportion
géométrique, et dans la justice commutative selon une proportion arithmétique.
Réponse : Comme nous venons de le dire, il appartient à la justice distributive de donner quelque chose à une
personne privée pour autant que ce qui appartient au tout est dû à la partie. Mais ce dû est d’autant plus considérable
que la partie occupe dans le tout une plus grande place. Et c’est pourquoi, en justice distributive, il est donné
d’autant plus des biens communs à une personne que sa place dans la communauté est prépondérante. Dans les
communautés à régime aristocratique, cette prépondérance est donnée à la vertu ; dans les oligarchies, à la richesse ;
dans les démocraties, à la liberté ; et sous d’autres régimes, d’autres façons. C’est pourquoi, dans la justice
distributive, le juste milieu vertueux ne se détermine pas par une égalité de chose à chose, mais selon une proportion
des choses aux personnes ; de telle sorte que si une personne est supérieure à une autre, ce qui lui est donné doit
dépasser ce qui est donné à l’autre. Et c’est pourquoi le Philosophe dit qu’un tel milieu vertueux s’établit selon une
proportion géométrique, où l’égalité n’est pas une égalité de quantité, mais une égalité proportionnelle. Nous disons
ainsi que 6 est à 4 comme 3 est à 2, parce que nous y trouvons la même proportion sesquialtère, c’est-à-dire telle que
le plus grand nombre égale une fois et demie le plus petit. Cette égalité n’est pas, comme on le voit, une égalité de
différences entre les quantités comparées, puisque la différence entre 6 et 4 est 2, et celle entre 3 et 2 est 1.
Au contraire, dans les échanges, on rend à une personne particulière quelque chose en remplacement de ce que l’on
a reçu d’elle ; ce qui est évident dans l’achat et la vente, qui nous donnent la définition élémentaire de l’échange. Il
faut égaler objet à objet, de telle façon que, tout ce que l’un a reçu en plus en prenant sur ce qui est à l’autre, il le lui
restitue en égale quantité. Et ainsi l’égalité s’établit selon une moyenne arithmétique que fixe un excédent quantitatif
égal
....
3. Dans les actions et les passions, la condition de la personne est un élément de la valeur quantitative de la chose
considérée objectivement ; l’offense est plus grave si l’on frappe le prince que si l’on frappe une personne privée. Et
ainsi la condition de la personne est considérée en soi, par la justice distributive ; et par la justice commutative, dans
la mesure où elle est cause de distinctions réelles.

...
Les échanges sont appelés volontaires quand quelqu’un transfère volontairement sa propriété à autrui. Si le bien est
transféré à titre gratuit, comme dans la donation, ce n’est pas un acte de justice, mais de libéralité

...

Objections : 1. Il semble bien, car le jugement divin est la justice même ; or, c’est une formule du jugement divin,
que l’on doit souffrir ce qu’on a fait endurer. Nous lisons en S. Matthieu (7, 2) : “ On vous jugera du jugement dont
vous aurez jugé, on vous mesurera avec la mesure dont vous aurez mesuré. ” Donc la justice consiste simplement
dans la réciprocité.
...
Solutions : 1. Cette formule de jugement divin est à entendre dans un sens de justice commutative, en tant qu’elle
égale les récompenses aux mérites, et les supplices aux péchés.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » mar. 13 févr. 2024, 19:59

Je prévoyais la rigueur de vos réponses, étrangères aux échappatoires existentielles et émotives. Elles permettent vraiment de creuser le point. Je vais tenter de répondre en cernant le plus possible ce que peut être la position de St Thomas, utilisant la vertu de libéralité et l’impossibilité d’être injuste envers soi-même. Tout en sauvegardant une partie de l’obligation divine que vous percevez.
Ceci nous amènera à nuancer la notion néanmoins juste de dette (qui se trouve plus du côté vindicatif – la dé-compense – que médicinal)
Il est vraiment difficile de croire que St Thomas commettrait une grossière contradiction en parlant de justice de Dieu qui exige satisfaction et ensuite que la miséricorde ne contredirait pas cette justice.
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Vous n'avez pas bien compris, j'ai l'impression. Saint Thomas dit que la justice de Dieu (c-à-d les décisions de justice de Dieu) dépend de sa volonté, et que c'est cette volonté qui exige (librement) satisfaction.
Pour le purgatoire seulement, et globalement seulement, pas pour l’enfer. St Thomas ne dit pas que le purgatoire de chacun est arbitraire individuellement, Mais seulement que le purgatoire aurait pu ne pas exister. Peut-être une autre peine médicinale aurait-elle pu exister, par exemple, on sait pas ?
Tout ce qu’il veut dire c’est que dans le cas du pénitent la satisfaction est juste PCQ DECIDEE ainsi librement (présumément pcq c’est mieux) par Dieu.
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C'est pas parce que Dieu déciderait librement la satisfaction que celle-ci serait juste. Cela n'a pas de sens. .
Ca a du sens pour St Thomas puisque Dieu ne peut être injuste. Et il nous dit pourquoi : le libéral n’est pas injuste, il peut seulement manquer de la vertu de prudence.
Oui, c'est ce que Saint Thomas prétend : Dieu n'agirait pas contre la justice en n'exigeant aucune satisfaction. Mais si la justice n'en serait nullement lésée, pourquoi ne pas faire miséricorde ? Je ne peux y voir que de la cruauté. .
La simple non libéralité n’est pas cruauté si elle reste juste. La cruauté implique un châtiment injuste, excessif, contraire à la vertu (juste milieu) de vindicte.
Quant à conclure que pcq décidée librement, la satisfaction serait cruelle, c’est excessif et anthropomorphique, comme dit cmoi Dieu a ses raisons et elles ne peuvent être cruelles, par définition; comme je l’ai dit, le plus grand bien pour le tout de la création est probable.
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Choisir de réclamer satisfaction est cruel si un autre choix est librement possible sans agir contre la justice.
Le plus grand bien pour le tout, vous êtes gentil, mais vous ne dites pas la raison pour laquelle ce serait mieux de choisir ce bien plutôt que le bien de la personne. Et s'il y a une vraie bonne raison, cela implique alors que ce choix est meilleur, et que donc Dieu est obligé d'opter pour.
On revient à Leibniz et à l’obligation divine au meilleur monde possible. C’est défendable en philo mais pas catho, Dieu peut avoir fait un monde objectivement moins bon que possible, sans injustice. La raison du plus grand bien pour le tout est la hiérarchie harmonique, le mal de la gazelle tuée par le lion est un bien pour le lion et pour le tout.
Le bien pour le tout pourrait être l’exemplarité.
Votre position serait celle de Leibniz, ou Dieu est obligé par sa nature au meilleur monde possible. Bien sûr Leibniz est une excellente référence , particulièrement sur le problème du mal. Mais dans le dogme catho, il n’y a pas le meilleur monde possible.
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Je ne sais pas d'où vous tenez ça. Où est-ce que le dogme fait référence à un meilleur monde possible ?
Justement, il n’existe pas. Mais vous l’affirmez, ou l’impliquez
IL serait certes une impossibilité métaphysique que Dieu pèche en étant injuste. Mais St Thomas dit que s’il décidait de remettre la satisfaction des pénitents il ne serait PAS injuste, pcq il ne serait pas lésé. C’est le point précis. Ceci malgré que de facto, Dieu a décidé qu’il est injuste pour l’homme de ne pas satisfaire. C’est subtil…
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Dans les faits, miséricorde et justice s'opposent. C'est pour ça qu'à la base, dire que faire miséricorde sans aucune satisfaction n'est pas agir contre la justice est faux. Même si l'on consent soi-même à ne pas se faire justice, et qu'on peut dire qu'on ne commet ainsi pas d'injustice envers autrui, la justice n'est pas appliquée. C'est pour ça que Dieu ne peut faire miséricorde que s'il y a une compensation au niveau de la justice.
Mais de toute façon nous avons vu que même en admettant que "gracier" ne serait pas agir contre la justice, et que Dieu pourrait librement ne pas exiger de satisfaction (sans que la justice en soit lésée, donc), la déduction inévitable est que Dieu est cruel lorsqu'il choisit de torturer, car cela ne peut pas être pour une raison de justice. L'objection qui consiste à déplacer le problème en disant que la décision serait objectivement meilleure (pour une raison inconnue) ne sert à rien. En effet, si ce choix est meilleur, Dieu est nécessité à le faire (perfection oblige), et si ce choix n'est pas meilleur, Dieu devrait choisir d'éviter aux humains des tortures inutiles... à moins qu'il soit cruel.
Non, ca va trop loin, la perfection n’implique pas le meilleur monde possible et on ne pèche pas si on ne le fait pas, surtout pas Dieu.
Mais revenons à Thomas :

« . . La justice de Dieu dépend elle-même de la volonté divine, qui exige du genre humain satisfaction pour le péché. Car si Dieu avait voulu libérer l'homme du péché sans aucune satisfaction, il n'aurait pas agi contre la justice. Un juge ne peut sans léser la justice remettre une faute ou une peine, car il est là pour punir la faute commise contre un autre, soit un tiers, soit tout l'État, soit le chef qui lui commande. Mais Dieu n'a pas de chef, il est lui-même le bien suprême et commun de tout l'univers. C'est pourquoi, s'il remet le péché, qui a raison de faute en ce qu'il est commis contre lui, il ne fait de tort à personne, pas plus qu'un homme ordinaire qui remet, sans exiger de satisfaction, une offense commise contre lui ; il agit alors avec miséricorde, non d'une manière injuste. »

Revenons à cet homme ordinaire et à la justice commutative : Il est impossible pour Aristote et St Thomas d’ëtre injuste à l’égard de soi-même à strictement parler (au lieu, on sera dans le vice d’imprudence) car la justice concerne le rapport à autrui. Il est donc évident et classique que si on me doit 100 et que je remets la dette sans compensation je ne suis pas injuste, mais un vertueux par libéralité (si c’est raisonnable dans les circonstances; ceci si le débiteur veut me rembourser, donc est honnête. S’il ne veut pas, malicieusement, c’est un escroc disons, et son acte est injuste dans l’intention et en ce cas, à cause de la malice, j’aurai un moindre droit de remettre la dette car ce serait faire corps avec l’injustice. Pour ce cas vous auriez raison). Puis si je suis l’adjudicateur d’une dette entre 2 parties je ne pourrai la remettre si le créancier refuse et s’estime lésé, je deviendrais injuste en condamnant le créancier qui ne serait pas libéral car ce jugement lui appartient.
Vu autrement, si on me doit 100 et que je suis libéral, je peux dire : emprunte alleurs, paye moi, et pour ton honnêteté je te donne 100 dans un 2e acte distinct de libéralité. C’est pour ca que St Thomas dit que la la libéralité n’est pas une injustice, elle relève davantage de la justice distributive que de la justice commutative.
Je suis sûr que St Thomas ne se trompe pas sur ça, ni Aristote. Il serait vraiment très risqué de le contredire là-dessus.

Pour Dieu c’est plus compliqué mais le principe reste , et est analogue : La purification médicinale de ceux qui ne sont pas escrocs (se prenant pour Dieu et usurpant sa place) aurait pu être remise sans injustice., à condition que tous soient équitablement traités sur une base d’égalité.
Oui, exact. Le jugement se fait sur le réel exact. Mais la satisfaction du pénitent ca vient après le jugement, dans le processus de pénitence, c’est pas exactement pareil
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Quand je parlais de "jugement", je pensais au "verdict", c'est-à-dire que j'incluais toutes les décisions pénales consécutives.
Oui, mais dans ces décisions, une soustraction de ce qui était du peut avoir eu lieu; e.g. quand on dit que les damnés sont moins punis que ce qu’ils mériteraient, il y a des degrés.
C'est pourquoi Notre-Dame de Fatima a dit que le salut de beaucoup d'âmes dépendait (outre leurs propres mérites ou démérites, évidemment) des prières et des sacrifices de tierces personnes, et non des caprices de Dieu ("toi tu vas au paradis, toi tu vas en enfer, toi je t'aime bien, toi je peux pas te blairer... no matter what")
C’est curieux car a priori ça semble aller un peu contre votre position : la dette payée par un autre pour quelqu’un qui la doit.

Sur ce point vous avez raison, Dieu n’est pas arbitraire, mais c’était pas le point de St Thomas. Une fois le purgatoire et sa satisfaction décidée, oui, Dieu ne peut plus être arbitraire entre les pécheurs, il est un juste juge et mesure tout. Mais l’idée est que globalement, pour tous, le purgatoire ne liait pas la justice divine pcq la libéralité n’a jamais en elle-même , été une injustice., elle est de justice distributive.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Coco lapin » mer. 14 févr. 2024, 16:34

ChristianK a écrit :Pour le purgatoire seulement, et globalement seulement, pas pour l’enfer. St Thomas ne dit pas que le purgatoire de chacun est arbitraire individuellement, Mais seulement que le purgatoire aurait pu ne pas exister. Peut-être une autre peine médicinale aurait-elle pu exister, par exemple, on sait pas ?
Non, pas seulement pour le purgatoire, mais pour le salut aussi, puisque le caractère "accessoire" de la satisfaction vaut selon lui pour tous les péchés. Selon Saint Thomas, Dieu aurait pu tout pardonner à l'homme sans avoir besoin de sacrifier son Fils unique (et sans exiger aucune autre contrepartie).
Ce qui vaut pour le global vaut donc aussi pour le particulier, donc Dieu pourrait librement délivrer n'importe quelle âme du purgatoire sans exiger de satisfaction.
ChristianK a écrit :Ca a du sens pour St Thomas puisque Dieu ne peut être injuste.
C'est raisonner à l'envers. Est-ce qu'une chose est juste parce que Dieu la fait, ou est-ce qu'une chose est juste indépendamment du fait que Dieu la fasse ou pas ? Or nous ne savons pas a priori si Dieu peut faire cette chose ou pas (car c'est ce que nous cherchons à prouver *). Donc, dire que "Dieu peut la faire, donc elle est juste", c'est le niveau zéro de l'argumentation, c'est un sophisme, en fait.

* et à mon avis, Dieu ne peut pas faire une telle chose, parce qu'elle est injuste.
ChristianK a écrit :Et il nous dit pourquoi : le libéral n’est pas injuste, il peut seulement manquer de la vertu de prudence.
Erreur ! Le libéral est injuste. Donner à quelqu'un plus que ce qu'il mérite, ou annuler une punition qu'un individu méritait, est une injustice. C'est pourquoi il est nécessaire de la compenser par autre chose pour rééquilibrer la justice.
ChristianK a écrit :La simple non libéralité n’est pas cruauté si elle reste juste. La cruauté implique un châtiment injuste, excessif, contraire à la vertu (juste milieu) de vindicte.
Ce serait injuste de faire miséricorde à une personne et pas à une autre si l'on est totalement libre de le faire sans aller contre la justice. Et ce serait cruel, car si rien n'empêche de faire miséricorde, mais que Dieu ne veut pas le faire, c'est alors parce qu'il veut que la personne souffre, sans raison de justice. S'il n'est pas nécessaire (de nécessité de justice) qu'untel paye ses crimes, Dieu est cruel lorsqu'il l'exige.
ChristianK a écrit :On revient à Leibniz et à l’obligation divine au meilleur monde possible. C’est défendable en philo mais pas catho, Dieu peut avoir fait un monde objectivement moins bon que possible, sans injustice.
Quand je parle de meilleur monde possible, je parle de meilleur monde pouvant possiblement résulter de la perfection de Dieu. La décision de Dieu de créer le monde ainsi était nécessairement parfaite. S'il l'avait créé plus cool, sa décision n'aurait pas été parfaite, et s'il l'avait créé moins cool, non plus.
ChristianK a écrit :La raison du plus grand bien pour le tout est la hiérarchie harmonique, le mal de la gazelle tuée par le lion est un bien pour le lion et pour le tout.
Le bien pour le tout pourrait être l’exemplarité.
L'exemplarité me paraît issue d'un faux raisonnement, car circulaire : l'exemplarité n'est nécessaire que si le danger est réel, or il n'est réel que parce que l'exemplarité est nécessaire.
ChristianK a écrit :Je ne sais pas d'où vous tenez ça. Où est-ce que le dogme fait référence à un meilleur monde possible ?
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Justement, il n’existe pas. Mais vous l’affirmez, ou l’impliquez
Je prétends que Dieu a créé le monde de la meilleure façon possible, en fonction de Sa perfection (la perfection de Dieu). Où est le dogme qui affirme le contraire ?
ChristianK a écrit :Non, ca va trop loin, la perfection n’implique pas le meilleur monde possible et on ne pèche pas si on ne le fait pas, surtout pas Dieu.
La perfection implique de créer le meilleur monde que Dieu est capable de créer, donc de la façon la plus sage, la plus juste, la plus intelligente, la plus équilibrée, etc, bref, la plus parfaite.
Le monde tel que nous le connaissons est imparfait, mais s'il avait été plus parfait, ou s'il avait été plus imparfait encore, alors l'action de Dieu n'aurait pas été parfaite.
ChristianK a écrit :Il est impossible pour Aristote et St Thomas d’ëtre injuste à l’égard de soi-même à strictement parler (au lieu, on sera dans le vice d’imprudence) car la justice concerne le rapport à autrui.
Eh bien leur prémisse est fausse, c'est bien le problème. En effet, on peut tout à fait être injuste envers soi-même.
ChristianK a écrit :Il est donc évident et classique que si on me doit 100 et que je remets la dette sans compensation je ne suis pas injuste, mais un vertueux par libéralité (si c’est raisonnable dans les circonstances; ceci si le débiteur veut me rembourser, donc est honnête. S’il ne veut pas, malicieusement, c’est un escroc disons, et son acte est injuste dans l’intention et en ce cas, à cause de la malice, j’aurai un moindre droit de remettre la dette car ce serait faire corps avec l’injustice. Pour ce cas vous auriez raison).
Même si le débiteur souhaite vous rembourser, si vous annulez cette dette vous êtes doublement injuste : injuste envers vous, car vous n'aurez pas récupéré le montant qui vous était dû, et injuste envers le débiteur car il aura gardé injustement cette somme imméritée sans jamais la rembourser.
ChristianK a écrit :Pour Dieu c’est plus compliqué mais le principe reste , et est analogue : La purification médicinale de ceux qui ne sont pas escrocs (se prenant pour Dieu et usurpant sa place) aurait pu être remise sans injustice., à condition que tous soient équitablement traités sur une base d’égalité.
remise sans injustice envers autrui, oui. Mais à la base, le purgatoire existe pour rétablir la justice envers Dieu, et non envers autrui. On peut certes dire que si tout le monde était exempté de purgatoire, ce serait injuste par rapport à ceux qui ont trimé plus que les autres, mais la justice pouvait être rétablie d'une autre manière (par le degré de bonheur et de gloire au Ciel, par exemple).
ChristianK a écrit :C’est curieux car a priori ça semble aller un peu contre votre position : la dette payée par un autre pour quelqu’un qui la doit.
Une compensation faite par autrui vient satisfaire la justice. Je ne vois pas le problème, tant que tous les acteurs sont consentants. Vous voulez dire que c'est injuste parce que le premier gars n'a pas personnellement payé ? Mais dans ce cas la justice est rééquilibrée par le fait que cela ne lui est pas compté au nombre de ses mérites. C'est pour ça que ceux qui passent par le purgatoire ne seront jamais de "glorieux saints" mais des habitants lambda du paradis.
ChristianK a écrit :Sur ce point vous avez raison, Dieu n’est pas arbitraire, mais c’était pas le point de St Thomas. Une fois le purgatoire et sa satisfaction décidée, oui, Dieu ne peut plus être arbitraire entre les pécheurs, il est un juste juge et mesure tout. Mais l’idée est que globalement, pour tous, le purgatoire ne liait pas la justice divine pcq la libéralité n’a jamais en elle-même , été une injustice., elle est de justice distributive.
Si la libéralité n'est pas une injustice, qu'est-ce qui l'empêche d'avoir lieu après jugement ?

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » jeu. 15 févr. 2024, 20:50

Coco lapin a écrit :
sam. 10 févr. 2024, 21:15
Non car le tout c’est aussi le tout de l’humanité, et l’expiation et la punition détourne du péché. C’est le côté exemplarité.
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Cela me paraît un raisonnement circulaire. En effet, si Dieu inflige des peines expiatoires aux âmes du purgatoire sous prétexte de servir d'exemple pour les pécheurs vivants, cela implique qu'il serait obligé de les châtier eux aussi lorsqu'ils seront morts (sinon, autant faire miséricorde à tous). Or nous étions censés considérer le cas où Dieu serait totalement libre de faire expier ou non les âmes du purgatoire, car sa justice n'en serait pas moins satisfaite.
Je ne vois pas. L’exemplarité vaudra simplement aussi pour ceux qui ont des indulgences pour les autres et ca se transmettra. Mais on voit des éléments de solution. Vous ciblez constamment la justice vindicative, or l’exemplarité est de justice médicinale, et c’est encore la justice.
Mais pour St Thomas la miséricorde est aussi un point de vue divin. St Thomas pense que Dieu n’a pas besoin pour lui-même de satisfaction, mais si la satisfaction est un bien pour le cosmos, Dieu peut le vouloir, mais il aurait pu aussi ne pas le vouloir, le remplacer par un autre bien.
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Mais dans ce cas, pourquoi ne pas toujours remplacer la satisfaction par un autre bien ? Pour que ce ne soit pas cruel, il faudrait que les souffrances engendrées soient équivalentes aux souffrances épargnées à l'âme dispensée de purgatoire. Difficile à concevoir.
Bien pour le cosmos=bien pour le tout (par opposition à la partie) . Encore une fois ca pourra être de l’ordre de la punition médicinale, que vous oubliez trop. Dans le bien pour le tout on aura l’exemplarité, qui n’est pas une souffrance pour celui qu en profite mais vise son évitement
Je pense que cette objection rapproche trop le purgatoire, ou la satisfaction terrestre, de l’enfer. Le feu du purgatoire est purificateur et positif, centré sur le rejet, la dé-compensation du péché.
C’est un bien, incontestablement. Il n’est pas que punitif. Il est un châtiment médicinal, non vindicatif.
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C'est un bien parce que c'est une punition qui permet l'acquittement d'une dette, qui permet ensuite d'accéder au paradis. Mais ça reste un châtiment, une peine temporelle à expier.
Vous évitez l’aspect médicinal de la punition, même si l’idée de dette est juste aussi.
Et comme dit St Thomas, si j’annule la dette de quelqu’un , pcq je compatis à son sort, je souffre de sa soufrance, suis-je injuste? Mais ensuite passer de l’absence d’annulation à la cruauté, cela parait sophistique.
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Si annuler une dette ne s'oppose pas à la justice, il n'y a apparemment pas de raison de ne pas le faire, à moins d'être cruel.
C’est le nœud de l’affaire.. Une remise de dette n’est pas une injustice mais un acte de vertu de libéralité, laquelle par définition est gratuite.
Torturer est trop fort pour purification et satisfaction, qui sont des biens.
Torturer est un mot qui me semble approprié. Il paraît que les âmes du purgatoire brûlent dans un feu aussi douloureux que le feu de l'enfer (lui-même plus douloureux que les feux que nous pouvons connaître sur terre). De plus, elles souffrent de la peine du dam, même si ces deux châtiments sont atténués par le fait de savoir qu'ils ne sont que temporaires.

En terme de peine et douleur cela se peut mais pas en terme d’intention : qui va torturer médicinalement au sens courant du terme torture?
Les arguments de Thomas sur la sensibilité supérieure à la peine des âmes séparées , pcq plus directement affectées sans l’intermédiaire du corps, ne sont pas absolument démonstratifs.
Je ne pense pas qu’on puisse dire que la miséricorde est juste, elle ne fait que ne pas contredire la justice.
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La miséricorde, par définition, est injuste si elle n'est pas compensée par une "juste compensation". Elle est injuste parce qu'elle s'oppose au "juste châtiment".
Ça dépend. Personne ne peut être injuste envers soi. Remise de dette est simple libéralité.
Je vais improviser une piste.
Distinguons la justice commutative : on me doit cent
De la justice distributive : tout le monde a le droit de vivre.
Vous me voyez venir. On a 2 types de justices différentes. La miséricorde pourrait être vue comme plus de l’ordre de la justice distributive et la justice du point de vue de la justice commutative. Et il y aurait une sorte de liberté entre les 2.
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Je n'ai pas compris votre exemple. Vous voulez dire que, par défaut, tout le monde doit écoper d'une certaine peine, mais que selon les mérites propres à chacun, il est juste que cette peine soit diminuée pour certains
Pas du tout car la justice distributive distribue des biens, pas des peines; chacun a droit à une part de bien commun. Dans certains cas ces biens seront gratuits et accordés librement, il ne s’agira pas d’un échange commutatif comme dans l’achat.
DANS l’affaire du purgatoire, l’exemplarité pourrait être vue comme un élément de justice distributive. On distribue un désincitatif au mal.
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Je suis d'accord, mais je pense que cette justice s'opère avant le verdict. Par exemple, compte tenu de ses péchés, untel devrait écoper de vingt ans de purgatoire, mais considérant ses mérites, Dieu le condamne à seulement dix ans de purgatoire. Mais ensuite on a atteint le plancher, et Dieu ne peut pas librement choisir d'être davantage miséricordieux. Il faudra que des prières et des sacrifices émanant de l'Eglise militante viennent écourter sa peine.
Mais justement, si on suit votre position, n’y aura-t-il pas remise de peine injuste, payée par les autres?
Mais je pense que la vraie solution se trouve dans la ligne : le purgatoire n’est pas une punition vindicative mais médicinale. Là on a une sorte de synthèse entre miséricorde et justice.
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Certes, on peut dire que la punition du purgatoire est déjà de la miséricorde, parce qu'elle permettra d'accéder à la vision béatifique lorsque la peine sera purgée, mais il n'est pas possible pour Dieu d'être encore plus miséricordieux en ouvrant le Royaume des cieux sans requérir cette punition.
Il le pouvait par libéralité, laquelle il n’a pas choisi.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Coco lapin » sam. 17 févr. 2024, 22:16

ChristianK a écrit :Bien pour le cosmos=bien pour le tout (par opposition à la partie) . Encore une fois ca pourra être de l’ordre de la punition médicinale, que vous oubliez trop. Dans le bien pour le tout on aura l’exemplarité, qui n’est pas une souffrance pour celui qu en profite mais vise son évitement
Mais si cette souffrance n'existe que pour donner l'exemplarité nécessaire à son évitement, c'est absurde, car s'il n'y avait pas de souffrance, il n'y aurait pas besoin d'évitement, donc pas besoin d'exemplarité, et donc pas besoin de souffrance.
ChristianK a écrit :Vous évitez l’aspect médicinal de la punition, même si l’idée de dette est juste aussi.
Parler d'aspect médicinal mène à un autre raisonnement circulaire : cramer est un bien parce que j'en ai besoin pour accéder au paradis, et pourquoi en ai-je besoin ? parce que c'est un bien pour accéder au paradis.
C'est pourquoi je me contente de la notion de dette, simplement factuelle.
ChristianK a écrit :C’est le nœud de l’affaire.. Une remise de dette n’est pas une injustice mais un acte de vertu de libéralité, laquelle par définition est gratuite.
Si la remise de dette pouvait se faire gratuitement, sans conséquence sur le plan de la justice, alors la bonté infinie de Dieu impliquerait qu'il le fasse tout le temps. Or il n'est pas si généreux, justement parce que sa miséricorde est freinée par sa justice.
ChristianK a écrit :En terme de peine et douleur cela se peut mais pas en terme d’intention : qui va torturer médicinalement au sens courant du terme torture?
Mais ce n'est médicinal que parce que vous le considérez comme tel. A la base, ce n'est qu'un châtiment expiatoire.
ChristianK a écrit :Ça dépend. Personne ne peut être injuste envers soi. Remise de dette est simple libéralité.
Si si, c'est une injustice envers soi puisqu'au bout du compte il y a toujours un "trou dans la caisse".
ChristianK a écrit :Pas du tout car la justice distributive distribue des biens, pas des peines; chacun a droit à une part de bien commun. Dans certains cas ces biens seront gratuits et accordés librement, il ne s’agira pas d’un échange commutatif comme dans l’achat.
Peut-être, mais concernant les peines expiatoires, on est dans la justice rétributive.
ChristianK a écrit :Mais justement, si on suit votre position, n’y aura-t-il pas remise de peine injuste, payée par les autres?
Oui, au fond c'est injuste, et c'est pourquoi cette miséricorde a des limites. Il semble d'ailleurs que la totalité de la dette n'est jamais payée uniquement par les contributions des autres, et que les coupables payent quand même leurs crimes bien sévèrement.
ChristianK a écrit :Il le pouvait par libéralité, laquelle il n’a pas choisi.
De par sa miséricorde, Dieu peut faire preuve d'une certaine générosité, mais celle-ci est limitée par sa justice. C'est pourquoi il est nécessaire que des compensations viennent satisfaire la justice.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par ChristianK » dim. 03 mars 2024, 20:54

Bien pour le cosmos=bien pour le tout (par opposition à la partie) . Encore une fois ca pourra être de l’ordre de la punition médicinale, que vous oubliez trop. Dans le bien pour le tout on aura l’exemplarité, qui n’est pas une souffrance pour celui qu en profite mais vise son évitement
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Mais si cette souffrance n'existe que pour donner l'exemplarité nécessaire à son évitement, c'est absurde, car s'il n'y avait pas de souffrance, il n'y aurait pas besoin d'évitement, donc pas besoin d'exemplarité, et donc pas besoin de souffrance.
Non, car la fin de la souffrance médicinale c’est pas la souffrance mais la santé, la purification. Le besoin d’évitement de peine sert au besoin d’évitement de faute : éviter de pécher. Ensuite seulement il évite la conséquences peinante.

Vous évitez l’aspect médicinal de la punition, même si l’idée de dette est juste aussi.
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Parler d'aspect médicinal mène à un autre raisonnement circulaire : cramer est un bien parce que j'en ai besoin pour accéder au paradis, et pourquoi en ai-je besoin ? parce que c'est un bien pour accéder au paradis.
C'est pourquoi je me contente de la notion de dette, simplement factuelle.
Elle est plus facile à comprendre mais incomplète. C’est vrai qu’il y a paiement, mais il faut regarder aussi quelle forme prend ce paiement : Le mal de peine (cramer) est bon pour éliminer la tendance à la joie goutée dans le péché; en cette élimination réside le 1er facteur, qui permet d’entrer au paradis. Ici, il s’agit d’un autonettoyage différent du paiement de dette externe, même si c’est lié.

C’est le nœud de l’affaire.. Une remise de dette n’est pas une injustice mais un acte de vertu de libéralité, laquelle par définition est gratuite.
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Si la remise de dette pouvait se faire gratuitement, sans conséquence sur le plan de la justice, alors la bonté infinie de Dieu impliquerait qu'il le fasse tout le temps. Or il n'est pas si généreux, justement parce que sa miséricorde est freinée par sa justice.
Ca va plus du tout avec le Docteur commun. Par définition un don par libéralité n’est pas obigatoire, ni exigé en justice, encore moins en justice commutative. Le libéral aime donner ses biens (dans les limites de la vertu de prudence) sans que ce soit mérité aucunement, en justice ou autrement.
Et la libéralité est une vertu appliquée selon les circonstances.
Puisque sur terre, remettre un dette à un non escroc est un geste de libéralité identique à un don, Dieu aurait pu être libéral avec le purgatoire en général. Il a des raisons pour ne l’avoir pas été tout en étant parfait.
En terme de peine et douleur cela se peut mais pas en terme d’intention : qui va torturer médicinalement au sens courant du terme torture?
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Mais ce n'est médicinal que parce que vous le considérez comme tel. A la base, ce n'est qu'un châtiment expiatoire.
Voir Piperno plus haut dans la somme. Il y a sûrement un aspect purification.
Ça dépend. Personne ne peut être injuste envers soi. Remise de dette est simple libéralité.
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Si si, c'est une injustice envers soi puisqu'au bout du compte il y a toujours un "trou dans la caisse".
Certainement faux pour des débiteurs non escrocs à qui je fais don de la dette par vertu de libéralité. Ceux-ci ne sont aucunement différents de tout un chacun à qui je donne une libéralité sur mes biens. Elle est par nature gratuite, et ne viole aucune justice commutative.

Pas du tout car la justice distributive distribue des biens, pas des peines; chacun a droit à une part de bien commun. Dans certains cas ces biens seront gratuits et accordés librement, il ne s’agira pas d’un échange commutatif comme dans l’achat.
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Peut-être, mais concernant les peines expiatoires, on est dans la justice rétributive.
C’est le point. Elles ne sont pas uniquement expiatoires. Et même si elles l’étaient Dieu aurait pu faire acte de libéralité dit Thomas-Reginald.

Il le pouvait par libéralité, laquelle il n’a pas choisi.
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De par sa miséricorde, Dieu peut faire preuve d'une certaine générosité, mais celle-ci est limitée par sa justice. C'est pourquoi il est nécessaire que des compensations viennent satisfaire la justice.
Non si la libéralité ne contredit pas la justice. Comme quand je remets une dette à un débiteur non escroc : je ne suis pas injuste en ce cas. Je donne en ayant mes raisons de le faire, sans obligation.

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Re: Jésus s'est sacrifié à qui exactement ?

Message non lu par Coco lapin » mar. 05 mars 2024, 12:49

ChristianK a écrit :Le besoin d’évitement de peine sert au besoin d’évitement de faute : éviter de pécher. Ensuite seulement il évite la conséquences peinante.
Mais si Dieu torture des gens seulement pour dissuader les autres de commettre des fautes, n'est-ce pas de la cruauté ?
ChristianK a écrit :C’est vrai qu’il y a paiement, mais il faut regarder aussi quelle forme prend ce paiement : Le mal de peine (cramer) est bon pour éliminer la tendance à la joie goutée dans le péché; en cette élimination réside le 1er facteur, qui permet d’entrer au paradis. Ici, il s’agit d’un autonettoyage différent du paiement de dette externe, même si c’est lié.
Il me semble que les âmes du purgatoire ont dès le début la charité parfaite : elles ne peuvent aimer que Dieu et rien vouloir d'autre que sa très sainte volonté. Ce n'est pas leur coeur qui a besoin d'être purifié, mais leur âme. Leur "cervelle", leur caractère, leur volonté, etc, tout ça est déjà corrigé d'entrée de jeu. Il ne leur reste qu'à expier leurs péchés par la souffrance intense. On peut voir ça comme une punition "médicinale" puisque ça permet ensuite d'entrer au paradis, mais ça reste une punition quand même.
ChristianK a écrit :Ca va plus du tout avec le Docteur commun. Par définition un don par libéralité n’est pas obigatoire, ni exigé en justice, encore moins en justice commutative. Le libéral aime donner ses biens (dans les limites de la vertu de prudence) sans que ce soit mérité aucunement, en justice ou autrement.
Justement, si ce n'est pas mérité du tout, c'est une injustice, par définition ("immérité" et "injuste" sont synonymes). Disons que c'est une injustice positive.
ChristianK a écrit :Puisque sur terre, remettre un dette à un non escroc est un geste de libéralité identique à un don, Dieu aurait pu être libéral avec le purgatoire en général. Il a des raisons pour ne l’avoir pas été tout en étant parfait.
Un don est une injustice qui consiste à donner "injustement". C'est pourquoi Dieu ne fait pas de dons gratuits. Il réclame toujours des compensations (il faut l'aimer, obéir, souffrir, etc).
Si Dieu supprimait le purgatoire pour tout le monde, ce serait injuste, mais au moins ce serait équitable pour tout le monde.
ChristianK a écrit :Certainement faux pour des débiteurs non escrocs à qui je fais don de la dette par vertu de libéralité. Ceux-ci ne sont aucunement différents de tout un chacun à qui je donne une libéralité sur mes biens. Elle est par nature gratuite, et ne viole aucune justice commutative.
Si vous annulez une dette, vous allez à l'encontre de la justice rétributive. Et si vous faites un don de façon antécédente, cela relève de la justice distributive ; or si vous déséquilibrez la balance, il faudra la rééquilibrer tôt ou tard. C'est pourquoi Jésus disait "à celui qui a plus reçu, il sera plus demandé".
ChristianK a écrit :Non si la libéralité ne contredit pas la justice. Comme quand je remets une dette à un débiteur non escroc : je ne suis pas injuste en ce cas. Je donne en ayant mes raisons de le faire, sans obligation.
La libéralité contredit la justice rétributive. Vous vous dépossédez, et vous remettez injustement la dette d'un débiteur qui ne le mérite pas.

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