Conversion du protestantisme au catholicisme ?

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Olivier C
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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Olivier C » mer. 03 août 2022, 6:23

Augustin d'Hippone, Du Baptême, III, 11 a écrit :D'où il suit que l'Église catholique ne doit pas réitérer le baptême conféré par des hérétiques : car autrement elle laisserait croire ou bien qu'elle regarde comme venant de ces hérétiques ce qui ne vient que de Jésus-Christ, ou bien qu'ils ont pu perdre ce qu'ils avaient reçu avant de se séparer de l'unité. Cyprien lui-même, de concert avec ses collègues, statua que ceux qui, après avoir été baptisés dans l'Église et s'être jetés dans l'hérésie, demanderaient à rentrer dans l'unité, pourraient y être reçus, non pas après avoir de nouveau reçu le baptême, mais après avoir fait pénitence de leur crime ; n'est-ce pas là constater formellement que leur séparation de l'Église ne saurait leur faire perdre ce qu'ils ne peuvent recevoir de nouveau quand ils reviennent à l'unité ? Nous pouvons dire, en parlant de ces hommes : C'est là leur hérésie, c'est là leur erreur, c'est là leur schisme sacrilège ; mais, en parlant du baptême, nous ne pouvons dire : C'est là leur baptême, puisqu'il est essentiellement le baptême de Jésus-Christ. Si donc les maux dont ils sont les auteurs, leur sont pardonnés dès qu'ils reviennent sincèrement à l'unité de l'Église, ne doit-on pas reconnaître en eux ce qui ne vient pas d'eux, mais uniquement de Dieu ?
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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Æoline » mer. 03 août 2022, 7:53

Bonjour Lucie,

Je partage tout ce qu'a écrit Gaudens sur le sacerdoce, et la différence qui existe entre un prêtre et un pasteur protestant. Les rôles ne sont pas équivalents; le pasteur est une sorte de chef d'orchestre, de théologien et d'enseignant communautaire, le prêtre est avant tout... eh bien un prêtre, dont une des tâches fondamentales est d'offrir le sacrifice de la messe in persona Christi.

Ceci dit, je vais essayer de faire une réponse synthétique sur les raisons qui m'ont poussée à devenir catholique (pas évident !)

Mes premiers doutes ont commencé à apparaître vers la fin de mes études, où j'ai cessé d'adhérer à un des grands principes de la Réforme, le Sola Scriptura (donc le principe qui veut que l'Ecriture sainte soit la norme ultime en matière de foi). Un autre des grands principes, celui du Sola Fide (justification par la foi seule) n'a pas tardé à subir le même sort. Malgré tout, je me suis accrochée, avant tout parce que, à l'époque, je ne voulais pas renoncer à certains privilèges, dont celui du ministère pastoral féminin.

Mais petit à petit, les choses ont continué à s'effriter. Je me suis un peu plongée dans la lecture des Pères de l'Eglise et j'ai bien dû constater que l'Eglise qu'on découvre à travers leurs écrits, celle des premiers temps du christianisme, n'a pas grand-chose à voir avec la tradition protestante. J'ai commencé à me demander pourquoi notre vie spirituelle de réformés était si pauvre et n'avait pas grand-chose à offrir en-dehors du culte du dimanche (si on en avait envie) et de la lecture personnelle de la Bible (si la Bible faisait sens pour nous), et je n'ai pas pu me débarrasser du sentiment que c'était à cause de l'énergie encore dépensée, 500 ans plus tard, à ne pas vouloir faire comme les catholiques. Pas de théologie sacramentelle à proprement parler, et encore moins de vie sacramentelle. Pas de lectio divina, pas de liturgie des heures, de pratique de l'oraison, de méditation sur la vie du Christ ; pas non plus vraiment, dans mon expérience, d'encouragement à vivre la vie quotidienne dans son couple, dans son travail, dans sa famille, comme un chemin de sanctification. L'essentiel de la vie spirituelle passait, dans ce que j'ai vécu, par des études bibliques très inégales, parfois profondément sources de vie, parfois extrêmement desséchantes et polémiques.

Par cette porte de la vie spirituelle, je suis peu à peu entrée dans la théologie catholique. Au début, je me suis contentée d'y choisir ce qui me plaisait, ce qui me convenait, et de laisser de côté tout le reste. Mais plus je lisais, plus je devais admettre que ce tri ne fonctionne pas vraiment, et que l'ensemble de l'enseignement de l'Eglise forme un tout organique. Par exemple, j'étais séduite par ce que disait l'Eglise de la justice sociale, beaucoup moins par sa morale sexuelle ; mais il a fallu que je finisse par admettre que l'une ne tenait pas sans l'autre.

De l'autre côté, j'étais de plus en plus mal à l'aise avec le tournant libéral pris nettement par ma tradition réformée. Au départ, je n'étais pas forcément opposée, par exemple, au bénédictions de mariage pour les couples de même sexe. Mais j'ai commencé à en voir les conséquences, comme ce théologien interrogé lors un débat sur ces bénédictions sur la manière dont il conciliait sa position clairement favorable avec sa lecture de la Bible. Il a répondu "Oui, bon, si vous tenez vraiment à vous référer encore à la Bible..." Je suis convaincue que ce genre de réponse, et de prise de distance, n'est pas le fruit du hasard, mais le produit inévitable d'une rupture délibérée avec 2000 ans de tradition chrétienne, et du relativisme.

Une des dernières expériences qui m'a fait définitivement basculer du côté catholique s'est produite lors d'un de mes derniers postes pastoraux. Le curé de la paroisse voisine m'avait invitée pour une veillée de prière ; au cœur de la veillée, il y avait un temps d'adoration du Saint Sacrement. J'y suis allée sans en attendre beaucoup plus qu'un temps de silence et de méditation paisible. Je me suis retrouvée, et ç'a été un grand choc, face à face avec mon Seigneur. Dans les jours qui ont suivi, je me suis beaucoup demandé ce qui avait permis cette expérience que je n'avais jamais faite ailleurs, même en tant que protestante qui croyait à la présence réelle du Christ dans la Cène. La seule réponse cohérente qui m'est venue est celle de la succession apostolique. Jésus était là parce que cette hostie avait été consacrée par un prêtre ordonné par un évêque, lui-même ordonné par un autre évêque, et ainsi de suite jusqu'aux apôtres à qui il avait confié la tâche de "faire cela en mémoire de lui".

J'étais mûre pour devenir catholique. Le dernier obstacle qui restait était précisément celui du ministère pastoral féminin. Le prêtre qui m'accompagnait m'avait dit : "Tu verras, le moment venu, quitter le ministère pastoral ne sera pas un renoncement mais une grâce". Sur le coup, je ne l'avais pas cru, mais il avait raison. Ce qui m'a permis de cheminer sur ce sujet, ce sont deux choses : tout d'abord le choix délibéré de faire confiance à l'Eglise sur ce sujet, même si je n'arrivais pas à comprendre, en me disant que puisque j'en étais venue à lui faire confiance sur tout le reste il y avait des chances qu'elle ait raison sur ce point aussi. L'autre raison a été plus existentielle. J'ai réalisé à un moment à quel point j'avais changé depuis que je travaillais comme pasteure. Certains de ces changements que je voyais chez moi me dérangeaient, et j'ai commencé à soupçonner que c'était le résultat de l'effort fait pendant plusieurs années pour me conformer à un rôle pastoral forgé par des modèles masculins. Quelque part, ce que j'étais en train de devenir ne correspondait pas à mon identité profonde.

Au moment où j'ai quitté le ministère pastoral, c'était pour finir un immense soulagement. Aujourd'hui, je travaille toujours en Eglise, mais en tant que femme laïque au sein d'une équipe d'aumônerie d'hôpital, et je peux dire que je n'ai jamais été aussi heureuse et épanouie.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Altior » mer. 03 août 2022, 8:24

Olivier C a écrit :
mer. 03 août 2022, 6:18
J'ai déjà procédé comme cela avec vous pour ce qui est du trouble de Joseph en Mathieu 1, 19. Vous n'aviez pas remarqué ?
Ce n'est pas la même chose, Olivier. Nous avons d'un côté la question sur le trouble de Saint Joseph, question qui fait partie des "domaines libres" sur laquelle le Magistère ne s'est jamais prononcé. D'un autre nous avons la question des marques de l'Église en tant que Corps du Christ, sur laquelle nous avons multiples prises de position magisterielles auxquels on doit adhésion.

Quant à ce qu'à dit Saint Augustin, je ne peux pas être plus d'accord. C'est pourquoi les hérétiques ne doivent pas être "rébaptisés", c'est ce que fait l'Église jusqu'à nos jours. Car baptisé un jour, c'est baptisé pour toujours, dans la vie et dans l'au-delà. Mais vous auriez noté, dans la citation que vous-même vous apportez, que cela ne veut pas dire que tous les baptisés feront partie du Corps du Christ peu importe en quoi ils croient.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Altior » mer. 03 août 2022, 8:44

Æoline a écrit :
mer. 03 août 2022, 7:53
je vais essayer de faire une réponse synthétique sur les raisons qui m'ont poussée à devenir catholique (pas évident !)
Joli témoignage, Aeoline ! Jolie histoire de conversion. Voilà, il faut passer par là : il faut nous vider de nos idées reçues, il faut nous vider de l'ancien homme pour pouvoir être remplis de Dieu.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Lucie1990 » mer. 03 août 2022, 14:20

Æoline a écrit :
mer. 03 août 2022, 7:53
Bonjour Lucie,

Je partage tout ce qu'a écrit Gaudens sur le sacerdoce, et la différence qui existe entre un prêtre et un pasteur protestant. Les rôles ne sont pas équivalents; le pasteur est une sorte de chef d'orchestre, de théologien et d'enseignant communautaire, le prêtre est avant tout... eh bien un prêtre, dont une des tâches fondamentales est d'offrir le sacrifice de la messe in persona Christi.

Ceci dit, je vais essayer de faire une réponse synthétique sur les raisons qui m'ont poussée à devenir catholique (pas évident !)

Mes premiers doutes ont commencé à apparaître vers la fin de mes études, où j'ai cessé d'adhérer à un des grands principes de la Réforme, le Sola Scriptura (donc le principe qui veut que l'Ecriture sainte soit la norme ultime en matière de foi). Un autre des grands principes, celui du Sola Fide (justification par la foi seule) n'a pas tardé à subir le même sort. Malgré tout, je me suis accrochée, avant tout parce que, à l'époque, je ne voulais pas renoncer à certains privilèges, dont celui du ministère pastoral féminin.

Mais petit à petit, les choses ont continué à s'effriter. Je me suis un peu plongée dans la lecture des Pères de l'Eglise et j'ai bien dû constater que l'Eglise qu'on découvre à travers leurs écrits, celle des premiers temps du christianisme, n'a pas grand-chose à voir avec la tradition protestante. J'ai commencé à me demander pourquoi notre vie spirituelle de réformés était si pauvre et n'avait pas grand-chose à offrir en-dehors du culte du dimanche (si on en avait envie) et de la lecture personnelle de la Bible (si la Bible faisait sens pour nous), et je n'ai pas pu me débarrasser du sentiment que c'était à cause de l'énergie encore dépensée, 500 ans plus tard, à ne pas vouloir faire comme les catholiques. Pas de théologie sacramentelle à proprement parler, et encore moins de vie sacramentelle. Pas de lectio divina, pas de liturgie des heures, de pratique de l'oraison, de méditation sur la vie du Christ ; pas non plus vraiment, dans mon expérience, d'encouragement à vivre la vie quotidienne dans son couple, dans son travail, dans sa famille, comme un chemin de sanctification. L'essentiel de la vie spirituelle passait, dans ce que j'ai vécu, par des études bibliques très inégales, parfois profondément sources de vie, parfois extrêmement desséchantes et polémiques.

Par cette porte de la vie spirituelle, je suis peu à peu entrée dans la théologie catholique. Au début, je me suis contentée d'y choisir ce qui me plaisait, ce qui me convenait, et de laisser de côté tout le reste. Mais plus je lisais, plus je devais admettre que ce tri ne fonctionne pas vraiment, et que l'ensemble de l'enseignement de l'Eglise forme un tout organique. Par exemple, j'étais séduite par ce que disait l'Eglise de la justice sociale, beaucoup moins par sa morale sexuelle ; mais il a fallu que je finisse par admettre que l'une ne tenait pas sans l'autre.

De l'autre côté, j'étais de plus en plus mal à l'aise avec le tournant libéral pris nettement par ma tradition réformée. Au départ, je n'étais pas forcément opposée, par exemple, au bénédictions de mariage pour les couples de même sexe. Mais j'ai commencé à en voir les conséquences, comme ce théologien interrogé lors un débat sur ces bénédictions sur la manière dont il conciliait sa position clairement favorable avec sa lecture de la Bible. Il a répondu "Oui, bon, si vous tenez vraiment à vous référer encore à la Bible..." Je suis convaincue que ce genre de réponse, et de prise de distance, n'est pas le fruit du hasard, mais le produit inévitable d'une rupture délibérée avec 2000 ans de tradition chrétienne, et du relativisme.

Une des dernières expériences qui m'a fait définitivement basculer du côté catholique s'est produite lors d'un de mes derniers postes pastoraux. Le curé de la paroisse voisine m'avait invitée pour une veillée de prière ; au cœur de la veillée, il y avait un temps d'adoration du Saint Sacrement. J'y suis allée sans en attendre beaucoup plus qu'un temps de silence et de méditation paisible. Je me suis retrouvée, et ç'a été un grand choc, face à face avec mon Seigneur. Dans les jours qui ont suivi, je me suis beaucoup demandé ce qui avait permis cette expérience que je n'avais jamais faite ailleurs, même en tant que protestante qui croyait à la présence réelle du Christ dans la Cène. La seule réponse cohérente qui m'est venue est celle de la succession apostolique. Jésus était là parce que cette hostie avait été consacrée par un prêtre ordonné par un évêque, lui-même ordonné par un autre évêque, et ainsi de suite jusqu'aux apôtres à qui il avait confié la tâche de "faire cela en mémoire de lui".

J'étais mûre pour devenir catholique. Le dernier obstacle qui restait était précisément celui du ministère pastoral féminin. Le prêtre qui m'accompagnait m'avait dit : "Tu verras, le moment venu, quitter le ministère pastoral ne sera pas un renoncement mais une grâce". Sur le coup, je ne l'avais pas cru, mais il avait raison. Ce qui m'a permis de cheminer sur ce sujet, ce sont deux choses : tout d'abord le choix délibéré de faire confiance à l'Eglise sur ce sujet, même si je n'arrivais pas à comprendre, en me disant que puisque j'en étais venue à lui faire confiance sur tout le reste il y avait des chances qu'elle ait raison sur ce point aussi. L'autre raison a été plus existentielle. J'ai réalisé à un moment à quel point j'avais changé depuis que je travaillais comme pasteure. Certains de ces changements que je voyais chez moi me dérangeaient, et j'ai commencé à soupçonner que c'était le résultat de l'effort fait pendant plusieurs années pour me conformer à un rôle pastoral forgé par des modèles masculins. Quelque part, ce que j'étais en train de devenir ne correspondait pas à mon identité profonde.

Au moment où j'ai quitté le ministère pastoral, c'était pour finir un immense soulagement. Aujourd'hui, je travaille toujours en Eglise, mais en tant que femme laïque au sein d'une équipe d'aumônerie d'hôpital, et je peux dire que je n'ai jamais été aussi heureuse et épanouie.
Merci beaucoup pour ce témoignage Eoline
Il y a tout de même une forme de lectio divina dans le protestantisme aussi. ( prier avant de lire la Bible).
Après, les réformes, grâce au dialogue oecuménique reprennent aussi des éléments du catholicisme ( considérant comme valide le baptême administré par affusion) . Les évangéliques, par exemple, se basant sur la Bible, ne reconnaissent que le baptême par immersion ( par exemple). Il y a aussi que le protestantisme ne reconnaît comme chef de l'Eglise que Jésus-Christ en personne ( d'où le rejet de l'autorité du pape). Sur ces points là je resterais dans le protestantisme. Par contre, là où je vous rejoins c'est que les églises issues de la réforme manquent d'éléments qui puissent nourrir la vie spirituelle ( c'est pour ça que je parlais de l'aspect trop " intellectuel" à mon avis. Il y a moins ce rapport d'intimite avec le Christ.
Pour l'instant je suis encore en recherche par rapport à tout cela.

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Xavi
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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Xavi » mer. 03 août 2022, 15:33

Observez cependant qu’en pratique, lorsque « le protestantisme ne reconnaît comme chef de l'Église que Jésus-Christ en personne (d'où le rejet de l'autorité du pape) » cela signifie concrètement que chacun n’a plus d’autre autorité que sa propre pensée puisque personne ne peut prétendre avoir une ligne téléphonique directe avec le Christ, même s’il est présent en nous par l’Esprit Saint, et chacun devra bien vite constater les désordres de sa propre pensée altérée par le péché originel qui ne nous permet pas de recevoir aujourd’hui l’autorité du Christ ou de l’Esprit Saint avec une clarté qui dissiperait toute dysharmonie et l’incertitude.

Les innombrables désaccords et divisions au sein du protestantisme montrent de manière évidente ce que produit la prétention d’être directement sous l’autorité du Christ ou de l’Esprit Saint. Vouloir dissocier l’autorité de Jésus-Christ de son corps qu’est l’Église mène à une impasse dans laquelle, en vérité, c’est bien le moi qui reprend la première place.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Lucie1990 » mer. 03 août 2022, 17:17

De ce point de vue là je suis d'accord.
Il est vrai qu'il y a beaucoup de divergences au sein du protestantisme. Cependant, comme vous le dites aussi, le pape reste un pêcheur. Comment peut-il être le représentant du Christ sur terre alors ?
Il y a aussi la notion des sacrements que je ne comprends pas toujours. Du point de vue de l'église catholique, le baptême( en commun avec le protestantisme) agit par lui-même. Et c'est pour cela, que toute personne, y compris un athée peut l'administrer en cas de danger de mort(pourvu d'avoir l'intention de faire ce que fait l'église). Pour le protestantisme les sacrements ( baptême et sainte cène) sont juste des signes. Ils signifient une grâce déjà donnée. Si le sacrement agit par lui- même, ça revient à considérer que Dieu attend un geste venant d'un humain avant d'accorder sa Grâce.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Gaudens » mer. 03 août 2022, 17:19

Bonjour Lucie,
Souvenez vous que pour les catholiques également,le seul Chef de l'Eglise , " Caput Ecclesiae",la Tête du Corps mystique qu'est l'Eglise, c'est le Christ,le successeur de Pierre n'étant que son vicaire sur la terre le temps de son pontificat. Il n'est "chef" qu'au sens second,les évêques,au moins les primats, étant des chefs de moindre rang en quelque sorte.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par prodigal » mer. 03 août 2022, 17:43

Chère Lucie,
remarquez qu'aucun catholique n'appellera le pape "Notre Seigneur", ce qui est réservé à Jésus-Christ.
Si d'aventure éclatait un conflit entre le pape et Jésus-Christ, hypothèse un peu baroque, mais que je pose pour la clarté de l'exposé, un catholique aurait deux choses à faire.
1) bien vérifier qu'il y a bien un conflit entre le pape et Jésus-Christ, et que ce n'est pas sa conscience à lui, ou de perverses influences, qui l'ont poussé à le croire un peu vite.
2) suivre Jésus-Christ.
En ce qui concerne les sacrements, vous dites qu'ils ne sont que des signes. Le "ne...que" me dérange, je vous l'avoue. Oui, les sacrements sont des signes, c'est entendu. Mais il existe différentes espèces de signes (par exemple l'indice, le signal, le mot, le symbole...). Le sacrement, pour un catholique, est une espèce particulière du signe, sans équivalent, qui produit ce qu'il dit. On peut trouver des analogies dans la vie ordinaire, comme par exemple une déclaration d'amour qui inaugure la vie amoureuse, ou plus trivialement la consommation du verre de l'amitié qui contribue à sceller l'amitié, mais ce ne sont que des analogies.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Lucie1990 » mer. 03 août 2022, 18:10

Merci Gaudens et prodigal
Lorsque vous expliquez ainsi je comprends mieux.
Ce que je veux dire par " les sacrements sont des signes " c'est que la réalité spirituelle qu'ils signifient est infiniment plus importante que le sacrement lui-même.

J'ai pour ma part été baptisée adulte.
Je croyais pourtant en Jésus, je priais, lisais la Bible, allais au culte le dimanche ( et parfois même à la messe catholique). J'ai demandé le baptême 3 ans après ma conversion. Je n'était pas pressée parce que le pasteur m'avait dit " évidemment que Dieu te considère comme son enfant et que tu peux entrer en relation avec lui, même sans être baptisée. Dieu n'est pas comme un fonctionnaire des douanes qui vérifie que le passeport à bien le bon coup de tampon qu'il faut ".
Cela dit, je pense que le baptême, comme la communion restent très importants car institués par Jésus. ( à refaire j'aurais d'ailleurs fais mon baptême par immersion, car c'est ce que signifie " baptizo " mais j'ai été baptisée par aspersion car c'est ainsi que cela se fait dans la plupart des églises réformées.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Æoline » mer. 03 août 2022, 21:18

Lorsque vous écrivez, Lucie, que pour le protestantisme Jésus-Christ est le seul chef de l'Église, je pense que le catholicisme peut faire exactement la même affirmation, et le fait avec beaucoup plus de poids. En pratique, le développement même du protestantisme et sa fragmentation en dizaines de milliers de dénominations tendraient plutôt à montrer que le seul chef de l'Église est l'individu face à la Bible, et les choix personnels d'interprétation qu'il pose.

Le Pape n'est pas le Christ. En revanche il est le garant de la fidélité à la tradition évangélique reçue des apôtres. En ce sens, cette présence à la tête de l'Eglise, vécue dans cette fidélité, est la seule instance qui puisse efficacement préserver dans son intégralité le dépôt de la foi reçu du Seigneur. Cela signifie que le Pape, et plus largement, le magistère de l'Eglise, la garde (bien souvent contre vents et marées) dans l'obéissance à son Chef, le Christ, ainsi que dans l'unité visible sous ce seul Chef.

Sur les sacrements, pour l'Eglise catholique, ils sont considérés comme le vecteur direct et réel de la réalité spirituelle. L'eucharistie ne "signifie" pas le Christ; elle est le Christ, pleinement et réellement présent sous l'apparence des espèces consacrées. Le baptême ne "signifie" pas une relation nouvelle avec Dieu, il est réellement nouvelle naissance, libération du péché originel, et incorporation au peuple de Dieu. Et ainsi de suite... Bien sûr, Dieu peut communiquer sa grâce en-dehors des sacrements. Mais nous, en tant qu'Eglise, sommes liés par ces sacrements précisément parce qu'ils ont été institués et donnés à l'Eglise par le Christ comme vecteurs de grâce et instruments de salut.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Altior » jeu. 04 août 2022, 0:00

Lucie1990 a écrit :
mer. 03 août 2022, 18:10
Dieu n'est pas comme un fonctionnaire des douanes qui vérifie que le passeport à bien le bon coup de tampon qu'il faut ".
Mais d'où savait le pasteur cela ? C'est dans la Bible ?

Je pose la question parce que, dans la Bible, là où Jésus nous explique comment ça fonctionne le Royaume de Cieux, il est écrit que le Roi met dehors celui des invités qui n'a pas le habit de noces (Mt 22 :13 sqq). Car ceux qui en Christ sont baptisés, en Christ sont revêtus (Galates 3 : 26). Les vainqueurs seront habillés de vêtements blancs (Apoc 3 :5).

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Lucie1990 » jeu. 04 août 2022, 8:08

Je lui avais aussi cité romain 6.
Il disait que ces passages parlent d'être plongés dans le Christ. Que c'est une incorporation spirituelle indépendamment du geste liturgique.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Marie2964 » jeu. 04 août 2022, 10:24

Æoline a écrit :
mer. 03 août 2022, 7:53
Bonjour Lucie,

Je partage tout ce qu'a écrit Gaudens sur le sacerdoce, et la différence qui existe entre un prêtre et un pasteur protestant. Les rôles ne sont pas équivalents; le pasteur est une sorte de chef d'orchestre, de théologien et d'enseignant communautaire, le prêtre est avant tout... eh bien un prêtre, dont une des tâches fondamentales est d'offrir le sacrifice de la messe in persona Christi.

Ceci dit, je vais essayer de faire une réponse synthétique sur les raisons qui m'ont poussée à devenir catholique (pas évident !)

Mes premiers doutes ont commencé à apparaître vers la fin de mes études, où j'ai cessé d'adhérer à un des grands principes de la Réforme, le Sola Scriptura (donc le principe qui veut que l'Ecriture sainte soit la norme ultime en matière de foi). Un autre des grands principes, celui du Sola Fide (justification par la foi seule) n'a pas tardé à subir le même sort. Malgré tout, je me suis accrochée, avant tout parce que, à l'époque, je ne voulais pas renoncer à certains privilèges, dont celui du ministère pastoral féminin.

Mais petit à petit, les choses ont continué à s'effriter. Je me suis un peu plongée dans la lecture des Pères de l'Eglise et j'ai bien dû constater que l'Eglise qu'on découvre à travers leurs écrits, celle des premiers temps du christianisme, n'a pas grand-chose à voir avec la tradition protestante. J'ai commencé à me demander pourquoi notre vie spirituelle de réformés était si pauvre et n'avait pas grand-chose à offrir en-dehors du culte du dimanche (si on en avait envie) et de la lecture personnelle de la Bible (si la Bible faisait sens pour nous), et je n'ai pas pu me débarrasser du sentiment que c'était à cause de l'énergie encore dépensée, 500 ans plus tard, à ne pas vouloir faire comme les catholiques. Pas de théologie sacramentelle à proprement parler, et encore moins de vie sacramentelle. Pas de lectio divina, pas de liturgie des heures, de pratique de l'oraison, de méditation sur la vie du Christ ; pas non plus vraiment, dans mon expérience, d'encouragement à vivre la vie quotidienne dans son couple, dans son travail, dans sa famille, comme un chemin de sanctification. L'essentiel de la vie spirituelle passait, dans ce que j'ai vécu, par des études bibliques très inégales, parfois profondément sources de vie, parfois extrêmement desséchantes et polémiques.

Par cette porte de la vie spirituelle, je suis peu à peu entrée dans la théologie catholique. Au début, je me suis contentée d'y choisir ce qui me plaisait, ce qui me convenait, et de laisser de côté tout le reste. Mais plus je lisais, plus je devais admettre que ce tri ne fonctionne pas vraiment, et que l'ensemble de l'enseignement de l'Eglise forme un tout organique. Par exemple, j'étais séduite par ce que disait l'Eglise de la justice sociale, beaucoup moins par sa morale sexuelle ; mais il a fallu que je finisse par admettre que l'une ne tenait pas sans l'autre.

De l'autre côté, j'étais de plus en plus mal à l'aise avec le tournant libéral pris nettement par ma tradition réformée. Au départ, je n'étais pas forcément opposée, par exemple, au bénédictions de mariage pour les couples de même sexe. Mais j'ai commencé à en voir les conséquences, comme ce théologien interrogé lors un débat sur ces bénédictions sur la manière dont il conciliait sa position clairement favorable avec sa lecture de la Bible. Il a répondu "Oui, bon, si vous tenez vraiment à vous référer encore à la Bible..." Je suis convaincue que ce genre de réponse, et de prise de distance, n'est pas le fruit du hasard, mais le produit inévitable d'une rupture délibérée avec 2000 ans de tradition chrétienne, et du relativisme.

Une des dernières expériences qui m'a fait définitivement basculer du côté catholique s'est produite lors d'un de mes derniers postes pastoraux. Le curé de la paroisse voisine m'avait invitée pour une veillée de prière ; au cœur de la veillée, il y avait un temps d'adoration du Saint Sacrement. J'y suis allée sans en attendre beaucoup plus qu'un temps de silence et de méditation paisible. Je me suis retrouvée, et ç'a été un grand choc, face à face avec mon Seigneur. Dans les jours qui ont suivi, je me suis beaucoup demandé ce qui avait permis cette expérience que je n'avais jamais faite ailleurs, même en tant que protestante qui croyait à la présence réelle du Christ dans la Cène. La seule réponse cohérente qui m'est venue est celle de la succession apostolique. Jésus était là parce que cette hostie avait été consacrée par un prêtre ordonné par un évêque, lui-même ordonné par un autre évêque, et ainsi de suite jusqu'aux apôtres à qui il avait confié la tâche de "faire cela en mémoire de lui".

J'étais mûre pour devenir catholique. Le dernier obstacle qui restait était précisément celui du ministère pastoral féminin. Le prêtre qui m'accompagnait m'avait dit : "Tu verras, le moment venu, quitter le ministère pastoral ne sera pas un renoncement mais une grâce". Sur le coup, je ne l'avais pas cru, mais il avait raison. Ce qui m'a permis de cheminer sur ce sujet, ce sont deux choses : tout d'abord le choix délibéré de faire confiance à l'Eglise sur ce sujet, même si je n'arrivais pas à comprendre, en me disant que puisque j'en étais venue à lui faire confiance sur tout le reste il y avait des chances qu'elle ait raison sur ce point aussi. L'autre raison a été plus existentielle. J'ai réalisé à un moment à quel point j'avais changé depuis que je travaillais comme pasteure. Certains de ces changements que je voyais chez moi me dérangeaient, et j'ai commencé à soupçonner que c'était le résultat de l'effort fait pendant plusieurs années pour me conformer à un rôle pastoral forgé par des modèles masculins. Quelque part, ce que j'étais en train de devenir ne correspondait pas à mon identité profonde.

Au moment où j'ai quitté le ministère pastoral, c'était pour finir un immense soulagement. Aujourd'hui, je travaille toujours en Eglise, mais en tant que femme laïque au sein d'une équipe d'aumônerie d'hôpital, et je peux dire que je n'ai jamais été aussi heureuse et épanouie.
Bonjour Aeoline,

Je me permets juste un petit message pour vous dire que votre témoignage est très beau et qu'étant moi-même issue d'une famille protestante, je me retrouve complètement (ou presque) dans votre cheminement.

Merci.

Marie.

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Re: Conversion catholicisme ?

Message non lu par Æoline » jeu. 04 août 2022, 10:29

Lucie1990 a écrit :
jeu. 04 août 2022, 8:08
Je lui avais aussi cité romain 6.
Il disait que ces passages parlent d'être plongés dans le Christ. Que c'est une incorporation spirituelle indépendamment du geste liturgique.
C'est ce que j'ai bien souvent entendu aussi. Et pourtant, ce n'est pas du tout comme cela que les choses fonctionnent dans le Nouveau Testament. On voit bien dans les Actes des apôtres que "l'incorporation spirituelle indépendamment du geste liturgique" n'existe pas. De manière générale dans les Actes, les apôtres baptisent (et imposent les mains à) ceux qui deviennent croyants. Dès Ac 2, bouleversés suite à l'effusion de l'Esprit et au discours de saint Pierre, les auditeurs demandent "Que devons-nous faire?" A cette question fondamentale, Pierre ne répond pas "oh, pas grand-chose, de toute façon c'est une incorporation spirituelle indépendante d'un geste liturgique" ; il répond "Repentez-vous, et que chacun de vous se fasse baptiser au nom de Jésus Christ pour la rémission de ses péchés, et vous recevrez alors le don du Saint Esprit" (Ac 2,38).

Cette réponse de votre pasteur est à mes yeux typique d'un protestantisme qui a oublié les 1500 premières années de l'histoire du christianisme, et se fonde sur son propre jugement, aujourd'hui bien souvent biaisé par le désir de ne pas paraître sectaire ou légaliste...

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