par Miles Christi » jeu. 27 avr. 2006, 15:53
MB a écrit :
Bonjour Miles Christi
Pour commencer, des détails :
- les "intellectuels hexagonaux" auxquels je pense ne sont peut-être pas ceux auxquels vous croyez. Je pensais à pas mal de mes connaissances universitaires (profs, chercheurs), qui travaillent des domaines un peu techniques (histoire, sciences humaines), et qui, pour beaucoup, refusent par principe de lire des travaux de théologiens ou d'historiens ayant l'air de faire de l'histoire à visée apologétique. Ils partent du principe - c'est leur problème - que les savants chrétiens ne sont pas libres de faire du travail dans des conditions intellectuelles honnêtes. Je connais un prof qui traite les savants chrétiens avec aussi peu de sérieux que les savants marxistes. Vous me direz : tant pis pour lui, et je vous approuverai volontiers. Le souci est que les intellectuels dont je vous parle sont nombreux et tiennent, du moins dans leur domaine, le haut du pavé ; leur opinion, même non fondée, a donc de l'importance et il faut en tenir compte. Il me paraît clair que la répression du modernisme n'a fait que conforter dans leurs préjugés les gens qui les ont formés...
Je vous accorde qu'en France il y a un réel problème avec la main mise sur l'Education nationale d'"intellectuels" viscéralement anticatholiques: gauchistes, libéraux, ou entre les deux tendances (comme les bobos) ils ont en commun d'être républicains, donc d'adorer une idole païenne qui n'a rien trouvé de mieux à faire que d'ériger un temple païen pour honorer la mémoire de ses morts: le Panthéon. Lorsque l'on songe que la nécropole des rois ayant fait la France était la basilique Saint-Denis, cette résurgence païenne fait froid dans le dos. Tout catholique qui se respecte devrait mettre comme dernière volonté dans son testament: "Au cas où la République désirerait m'honorer post mortem en transférant ma dépouille au Panthéon, je fais savoir que je refuse catégoriquement que mon corps repose en terre païenne". Sur ce point les universités américaines sont beaucoup plus libres, en tout cas elles ne sont pas soumises à ce Diktat idéologique républicain, ce qui peut aussi expliquer pourquoi de brillants universitaires français s'exilent là-bas, et également pourquoi dans un classement récent des 100 premières universités mondiales la première université française n'arrive qu'en 41 ème position. Là où je ne vous suis pas c'est lorsque vous semblez dire qu'il faudrait ménager la susceptibilité à fleur de peau de ces endoctrinés: il me semble que cette "opération séduction" (nonobstant le fait que la séduction est propre au Malin) ne servirait à rien puisque le système éducatif, voire même peut-être tout le régime républicain est sur le point de s'effondrer, donc plutôt que de risquer de se compromettre avec les intellectuels républicains en chute libre, les catholiques feraient mieux de rester en retrait et d'élaborer leurs propres solutions éducatives.
MB a écrit :
- ce que vous dites sur le savant en sciences cognitives est très intéressant. D'ailleurs il vous fait pointer le doigt sur un problème réel, savoir que la modernité (telle que vous l'entendez) comporte des éléments irrationnels. Or, dans un autre fil, vous en parlez comme de quelque chose de rationaliste ; il faut être plus précis.
Attention il ne faut pas confondre "être rationel" et "être rationaliste", je dirais même que le rationaliste est irrationel. Celui qui est rationel est celui qui sait faire usage de sa raison alors que le rationaliste en fait un fort mauvais usage à tel point qu'il en vient à souscrire à cette idéologie, car c'est une idéologie, du "rationalisme", on pourrait disserter des pages sur cette erreur moderne qui a imprégné le courant scientiste du XIXème, le positivisme etc, jusqu'à nos jours. Disons pour résumer que le rationaliste croit la raison humaine toute puissante, ce qui ne veut nullement dire que la sienne propre l'est effectivement (ce qui a fait dire à Louis Pasteur: "Peu de science éloigne de Dieu et beaucoup de science en rapproche"). Un rationaliste peut fort bien être un ignare en théorie de la démonstration, ne connaissant strictement rien des théorèmes d'incomplétudes de Gödel, voire même incapable d'effectuer la démonstration la plus élémentaire, et vous asséner avec aplomb que toute vérité est démontrable.
MB a écrit :
L'exemple des preuves rationnelles de l'existence de Dieu est percutant et me concerne directement : quel que soit le respect que je voue à l'architecture rhétorique et philosophique de ces démonstrations, elles ne parviennent pas à me convaincre ; pardonnez-moi, ce n'est pas que je leur en veuille, mais je n'arrive pas à croire à la portée réelle de la discussion métaphysique (autant se demander, comme le faisaient les présocratiques, si l'âme est une ou multiple, du feu, de l'eau, de la terre, etc. avec des arguments solides à l'appui...). Un jour viendra, qui sait...
L'immortalité de l'âme, ou immortalité naturelle de l'homme en langage théologique, est démontrable sans problème, Saint Thomas d'Aquin l'a fait dans un style aristotélicien, Plotin dans un style platonicien mais leurs arguments sont toujours valables, ils s'appuient sur le constat évident que le corps est fini, que toutes ses opérations sont finies mais qu'en revanche la pensée a une portée infinie dans le concept, absolument irréductible à son extension sensible, qui elle n'est jamais qu'une collection finie d'objets. La pensée n'est par conséquent pas une opération matérielle, mais une opération d'un autre ordre. Qui plus est, elle est capable de saisir des "vérités éternelles", c'est descartes qui a employé ce terme constatant que si un objet physique varie constamment au cours du temps, en revanche un objet purement conceptuel reste invariant: Les cercles qu'Archimède a tracé sur le sol juste avant d'être tué par les Romains ne sont plus là mais le concept du cercle est toujours rigoureusement le même. D'une opération immatérielle ayant pour objet des vérités éternelles on en infère une res gogitans incorruptibilis et immortalis". Pour ce qui est de la validité des preuves de l'existence de Dieu, cosmologiques (comme les quinque viae de Saint Thomas d'Aquin) ou ontologiques (comme chez Saint Anselme, Descartes et Gödel) c'est plus complexe du fait du caractère suréminent et surnaturel de l'objet que nous ne pouvons approcher que de manière équivoque, par exemple dans le cas de la preuve ontologique anselmienne qui définit Dieu comme "un être tel que l'on ne puisse en concevoir de plus grand" on pourrait par exemple alléguer qu'un être dont l'existence n'est pas prouvable est plus grand qu'un être dont l'existence est prouvable parce que justement son existence dépasse toute raison, on en serait ainsi ramené à prouver ce qui n'est pas prouvable, d'où une contradiction. Pour ce qui est des preuves cosmologiques de Saint-Thomas d'Aquin, contrairement aux préjugés des modernistes qui en ont fait des fossiles de l'âge scolastique, la critique de leur validité est loin d'être triviale, ainsi en est-il de celle qui utilise les arguments de la non régression à l'infini, de la non réflexivité de la cause et de la distinction logique entre causes secondes ou moyens et cause première ou cause motrice par elle-même.
MB a écrit :
De manière générale, il y a un biais, dans votre démarche, qui rend impossible toute sérénité intellectuelle. Laisser la moindre place à l'examen humain, ne serait-ce que pour un infime détail, c'est selon vous la porte ouverte à toutes les erreurs modernes. Dans un sens, c'est vrai, puisque la liberté permet de dire des bêtises. Mais vous en faites comme une conséquence nécessaire, et surtout une conséquence nécessaire s'imposant à tous, y compris l'Eglise (ce qui, je le répète, est faux). On voit votre peu de confiance, il est vrai.
Forcément, quand vous partez d'un principe négatif et que vous cherchez à y accorder tout ce que vous voyez, on en arrive à vos conclusions. En substance, "modernité = pas bien" (en ayant une définition tendancieuse de la modernité, comme je l'ai dit ailleurs, et surtout en en faisant un bloc, ce qui est inadéquat), "modernité = diable", et "initiative correspondant à ce que j'apelle modernité = travail du démon". Tout ce qu'on pourra vous dire, vous l'interpréterez comme une preuve supplémentaire du travail du démon dans notre monde.
C'est exactement ce qui s'appelle une interprétation idéologique des choses ; c'est suivre une idéologie circulaire, qui non seulement prétend avoir réponse à tout, mais qui en plus interprète toute contestation comme preuve supplémentaire de sa validité. Exactement comme les marxistes ("si vous êtes contre ma théorie, c'est que vous êtes trompé par l'idéologie bourgeoise"), la psychanalyse ("si vous êtes contre, c'est votre névrose qui parle à travers vous"), les théories bourdieusiennes ("si vous êtes contre, c'est que vous êtes travaillé par votre habitus culturel"), le fanatisme musulman ("si vous êtes contre, c'est que vos ancêtres ont trafiqué la Bible"), etc. Permettez-moi donc de considérer votre manière de voir comme intellectuellement inutilisable.
Fraternellement
MB
Vous n'y êtes pas du tout: l'idéologie n'est qu'une classe d'idées organisées systématiquement par un ou plusieurs hommes et affranchie de toute autorité divine. Le marxisme, tout comme le libéralisme sont des idéologies et elles ont été fermement condamnées par l'Eglise. L'Eglise se distingue de toutes les autres institutions et organisations temporelles en ceci: elle ne procède pas de la libre décision d'individus de se constituer en association mais elle a pour fondement la volonté souveraine du Christ lui-même:
"Ce n’est pas vous qui m’avez choisi; mais moi, je vous ai choisis et je vous ai établis ," (Jean XV, 16).
Tu es heureux, Simon, fils de Jonas; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais c'est mon Père qui est dans les cieux.
Et moi, je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église , et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle.
(Matt,16 17-18)
L'Eglise est donc une institution divine tenant son autorité de Dieu lui-même. Autorité, jugement d'autorité, le mot qui fait hérisser le poil des modernistes est lâché. Cela permet de comprendre pourquoi la position de l'Eglise qui est celle du Ressuscité obéissant jusqu'à la mort est irréconciliable avec la position du Révolté désobéissant jusqu'à la chute. D'un côté une hétéronimie faite de jugements de raison et de jugements d'autorité, de vérités de raison et de vérités de foi, de l'autre une autonomie de la raison se reconnaissant comme seul juge de ce qui est vrai et de ce qui est faux. C'est d'ailleurs Kant, un protestant (comme par hasard), pénétré de l'esprit de l'Aufklärung, qui au nom de l'autonomie de la raison a artificiellement opposé les jugements d'autorité écclésiaux et les jugements de raison, pour aboutir à ça:
Ne croyant pas à la Révélation, ni en l'Incarnation de Dieu en Jésus, (lequel perdrait sa valeur d'exemple) il est cependant persuadé de l'utilité de la religion pour l'ordre et la paix sociale. Kant défend l'idée d'une religion morale dans laquelle Dieu, dont l'existence ne peut être démontrée, est l'initiateur de la conscience morale.
"La religion, sans la conscience morale n'est qu'un culte superstitieux. On croit servir Dieu lorsque, par exemple, on le loue ou célèbre sa puissance, sa sagesse, sans penser à la manière d'obéir aux lois divines, sans même connaître et étudier cette sagesse et cette puissance. Pour certaines gens, les cantiques sont un opium pour la conscience et un oreiller sur lequel on peut tranquillement dormir."
(Emmanuel Kant / 1724-1804 / Réflexions sur l'éducation)
"Dieu n'est pas une substance extérieure mais une relation morale en nous."
(Emmanuel Kant / 1724-1804 / Opus postumum)
"On mesure l'intelligence d'un individu à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter."
(Emmanuel Kant / 1724-1804)
"Moi, je n'y crois pas [en Dieu], les élites ne doivent pas croire en Dieu, mais les pauvres doivent y croire parce que c'est un facteur de paix sociale."
(Emmanuel Kant / 1724-1804)
Mais il y a bien pire, et nous y venons. Puisque vous parlez d'idéologie circulaire, il faut dire que dans le cadre du catholicisme une telle circularité n'existe pas parce que justement une autorité externe fondée en Christ vient rompre tout cercle imprédicatif et de plus l'Eglise n'est pas à son service (comme c'est par exemple le cas pour un groupement d'intérêts) mais au service de Dieu, des peuples et des hommes, par contre vous avez raison dans le cas du marxisme qui repose sur la philosophie de Hegel (encore un protestant) qui allant encore plus loin que Kant n'a pas simplement voulu que la raison soit autonome mais qu'elle soit aussi absolue, pour devenir la Raison, se fondant elle-même et se contredisant, à la fois sujet divin en et pour lui-même, moteur de l'histoire, des idées, etc ...
Hegel décrit bien ainsi l’organisation du tout de la science spéculative ou de ce que – reprenant sa définition par Kant comme totalité rationnelle – il appelle l’« Idée » de la philosophie : « Chacune des parties de la philosophie est un Tout philosophique, un cercle se fermant en lui-même , mais l’Idée philosophique y est dans une déterminité ou un élément particuliers... Le Tout se présente par suite comme un cercle de cercles, dont chacun est un élément nécessaire , de telle sorte que le système de leurs éléments propres constitue l’Idée tout entière, qui apparaît aussi bien en chaque élément singulier »( Enc, I, § 15, B, p. 181).
Hegel, au contraire, fait de la pensée de l’être, alors absolument manifesté comme être, la pensée de soi de l’être lui-même. Le hégélianisme, c’est d’abord, cette inouïe confiance en soi de la pensée : «L’essence fermée de l’univers n’a en elle aucune force qui pourrait résister au courage du connaître, elle doit nécessairement s’ouvrir devant lui et mettre sous ses yeux ainsi qu’offrir à sa jouissance sa richesse et ses profondeurs» (Allocution universitaire de 1818 à Berlin, Enc, I, B, p. 149) .
Pour ce qui est du combat contre Satan, combat livré par le Christ dans l'Evangile, l'Eglise peut non seulement faire valoir deux-milles ans d'expérience mais aussi affirmer que c'est un de ses charismes et ministères. Par conséquents entre les opinions de jeunes blanc-becs anticléricaux prétendument intellectuels et sortis de leur "minorité" (c'est à dire affranchi de toute autorité pour reprendre le terme péjoratif kantien) et un jugement d'autorité de l'Eglise il n'y a pas à hésiter, c'est la parole de l'Eglise qui doit avoir la primauté. Lorsque l'Eglise a condamné le communisme, cela a fait rire beaucoup d'intellectuels, mais au final qui s'est fourvoyé, qui n'a pas vu venir les famines, les camps, les dizaines de millions de morts, qui n'a pas voulu dénoncer ces crimes abominables ? Et qui encore aujourd'hui veut faire croire que ce n'est rien de plus qu'une aventure humaine qui aurait mal tourné, que le communisme n'est pas l'oeuvre de Satan mais le salut du genre humain ? Pour le libéralisme c'est la même chose, l'Eglise l'a condamné, les intellectuels ne tiennent aucun compte de cette mise en garde, ils n'en font qu'à leur tête et ce n'est qu'une fois que le désatre aura atteint son ampleur paroxystique qu'ils réaliseront, et encore ...
Pourtant l'Eglise ne fait pas de procès d'intention comme les philosophes et théologiens du soupçon, elle juge sur pièce avec la saine raison éclairée par les lumières de la Foi, comme dans le cas de K. Marx. Même le pasteur protestant Wurmbrand fait preuve de lucidité sur ce coup, voilà le résultat de ses recherches ("Was Karl Marx a satanist ?)
A la fin de ses études secondaires, son livret scolaire indique, sous la rubrique "Instruction religieuse": "Sa connaissance de la foi et de la morale chrétienne est lucide et bien fondée". L'oeuvre la plus ancienne qui nous soit parvenue de Karl Marx est intitulée "Union du fidèle au Christ". On y trouve par exemple des phrases comme celle-ci: "Par l'amour dont nous aimons le Christ, nous orientons en même temps nos coeurs vers nos frères qui nous sont intimement liés et pour lesquels Il s'est donné Lui-même en sacrifice... L'union au Christ est capable de procurer l'exaltation intérieure, le réconfort dans la douleur, une confiance paisible et un coeur susceptible d'aimer humainement tout ce qui est noble et grand, non par désir d'ambition ou de gloire, mais à cause du Christ". Dans un autre ouvrage, intitulé "Considérations d'un jeune homme sur le choix d'une carrière", il développait encore les mêmes idées, profondément chrétiennes.
Mais peu de temps après ses études secondaires, quelque chose s'est produit certainement dans sa vie qui l'a changé complètement. Il est devenu violemment antireligieux, non pas athée, comme on le croit souvent, mais antireligieux, ce qui est très différent. Il ne remet pas en cause l'existence de Dieu; il s'oppose à lui. Ceci apparaît nettement dans toute une série de poèmes et même dans une pièce de théâtre qui ne sera jamais jouée. La révolte qu'il y exprime sous le masque d'un "désespéré", d'un "ménestrel" ou d'"Oulanem" (anagramme presque parfait d'Emmanuel"), correspond certainement au drame qu'il vit lui-même à cette époque-là, seule explication possible du retour continuel de ce même et unique thème: "Je veux me venger de Celui qui règne au-dessus de nous". Ou encore, dans son poème intitulé "Invocation d'un désespéré", les vers suivants:
"Ainsi un dieu m'a arraché "mon tout"
Dans les malédictions et dans les coups du sort.
Tous ses mondes se sont évanouis
Sans espoir de retour,
Et il ne me reste plus désormais que la vengeance"
Nous avons là probablement une allusion à la cause de ce changement profond. K. Marx a l'impression que c'est Dieu lui-même qui lui a "arraché" quelque chose qu'il considérait comme son "tout". Il semble que d'autres textes fassent même allusion à un véritable pacte conclu avec Satan. Ainsi dans "Le ménestrel" où derrière la fiction se cache probablement K. Marx:
"Les vapeurs infernales me montent au cerveau
Et le remplissent jusqu'à ce que je devienne fou
ET que mon coeur soit complètement changé.
Regarde cette épée:
Le Prince des ténéèbres me l'a vendue".
Mais sa haine de Dieu se retourne bientôt contre l'humanité entière :
"Dédaigneusement, je jetterai mon gant
A la face du monde
Et verrai s'effondrer ce géant pygmée
Dont la chute n'éteindra pas mon ardeur.
Puis comme un dieu vainqueur j'irai au hasard
Parmi les ruines du monde
Et, donnant à mes paroles puissance d'action,
Je me sentirai l'égal du Créateur"
De même dans le "Oulanem":
"Perdu. Perdu. Mon heure est venue.
L'horloge du temps s'est arrêtée,
La maison pygmée s'est effondrée.
Bientôt j'embrasserai sur mon sein l'éternité.
Bientôt je proférerai sur l'humanité
D'horribles malédictions".
Et vers la fin du drame ces paroles qui sont tout un programme:
"S'il y a quelque chose capable de détruire,
Je m'y jetterai à corps perdu,
Quitte à mener le monde à la ruine.
Oui, ce monde qui fait écran entre moi et l'abîme,
Je le fracasserai en mille morceaux
A force de malédiction;
J'étreindrais dans mes bras sa réalité brutale,
Dans mes embrassements il mourra sans un mot
Et s'effondrera dans un néant total,
Liquidé, sans existence:
Oui, la vie ce sera vraiment cela!"
Et voici, encore plus clair dans le poème intitulé "Vierge pâle":
"Ainsi j'ai perdu le ciel,
Je le sais très bien.
Mon âme naguère fidèle à Dieu
A été marquée pour l'enfer".
Ses contemporains ne s'y sont pas trompés. Ils ont compris que Karl Marx ne s'intéressait absolument pas à la libération du peuple et au sort des travailleurs. Les premiers à l'avoir compris sont tout naturellement ses amis: "Marx va sûrement chasser Dieu de son ciel et il fera lui-même son procès.Il prétend que la religion chrétienne est l'une des plus immorales" (Georges Jung). Et le marxiste Franz Mehring, dans son étude intitulée "Karl Marx", note que le père de celui-ci semblait "avoir décelé avec son secrète appréhension la présence du démon en son fils préféré".
Il ne semble pas que Marx soit allé jusqu'à l'appartenance à une secte satanique organisée, bien que sa femme s'adresse à lui en l'appelant "grand prêtre et evêque des âmes" et évoque sa dernière "lettre pastorale", vocabulaire éminemment religieux, dont le Dieu ne peut être, à cette époque de l'évolution de Marx, que Satan lui-même. Cependant ses amis et maîtres à penser appartenaient tous à la même mouvance. Ainsi Bakounine, confondateur avec K. Marx de la Première Internationale: "Dans cette révolution, il nous faudra réveiller le diable chez le peuple et exciter en lui les passions les plus viles" . De même Proudhon: "Dieu est stupidité et lâcheté, Dieu est hypocrisie et fausseté, Dieu est tyrannie et pauvreté, Dieu et mauvais..."Le drame est encore plus évident avec Engels, dont l'engagement chrétien semble avoir été plus profond que chez K. Marx. C'est en pleurant qu'il cherchait à lutter contre l'évolution qu'il sentait se produire en lui après avoir lu l'ouvrage d'un théologien protestant "libéral" qui lui semblait ruiner les fondements mêmes de la foi chrétienne. Après avoir dénoncé alors K. Marx comme "possédé de mille démons", il finit par écrire avec lui le "Manifeste communiste" où ils tentent d'éradiquer définitivement tout sentiment religieux.
Il est vrai qu'il n'y a pas là de phénomènes prodigieux spectaculaires. Le prodige est plus diffus. Il n'en est pas moins terrifiant au contraire! Le prodige, c'est que des peuples généralement civilisés, de vieille culture et souvent imprégnés d'idéaux religieux, puissent en arriver à un aveuglement généralisé, à une soumission totale à ces forces du mal . Evidemment, l'influence de Karl Marx n'aurait pas fait tant de mal si elle n'avait été relayée par Staline, Mao, Pol Pot et bien d'autres. Mais il est important de discerner cette action du mal dès sa première infiltration.
[quote="MB"]
Bonjour Miles Christi
Pour commencer, des détails :
- les "intellectuels hexagonaux" auxquels je pense ne sont peut-être pas ceux auxquels vous croyez. Je pensais à pas mal de mes connaissances universitaires (profs, chercheurs), qui travaillent des domaines un peu techniques (histoire, sciences humaines), et qui, pour beaucoup, refusent par principe de lire des travaux de théologiens ou d'historiens ayant l'air de faire de l'histoire à visée apologétique. Ils partent du principe - c'est leur problème - que les savants chrétiens ne sont pas libres de faire du travail dans des conditions intellectuelles honnêtes. Je connais un prof qui traite les savants chrétiens avec aussi peu de sérieux que les savants marxistes. Vous me direz : tant pis pour lui, et je vous approuverai volontiers. Le souci est que les intellectuels dont je vous parle sont nombreux et tiennent, du moins dans leur domaine, le haut du pavé ; leur opinion, même non fondée, a donc de l'importance et il faut en tenir compte. Il me paraît clair que la répression du modernisme n'a fait que conforter dans leurs préjugés les gens qui les ont formés...
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Je vous accorde qu'en France il y a un réel problème avec la main mise sur l'Education nationale d'"intellectuels" viscéralement anticatholiques: gauchistes, libéraux, ou entre les deux tendances (comme les bobos) ils ont en commun d'être républicains, donc d'adorer une idole païenne qui n'a rien trouvé de mieux à faire que d'ériger un temple païen pour honorer la mémoire de ses morts: le Panthéon. Lorsque l'on songe que la nécropole des rois ayant fait la France était la basilique Saint-Denis, cette résurgence païenne fait froid dans le dos. Tout catholique qui se respecte devrait mettre comme dernière volonté dans son testament: "Au cas où la République désirerait m'honorer post mortem en transférant ma dépouille au Panthéon, je fais savoir que je refuse catégoriquement que mon corps repose en terre païenne". Sur ce point les universités américaines sont beaucoup plus libres, en tout cas elles ne sont pas soumises à ce Diktat idéologique républicain, ce qui peut aussi expliquer pourquoi de brillants universitaires français s'exilent là-bas, et également pourquoi dans un classement récent des 100 premières universités mondiales la première université française n'arrive qu'en 41 ème position. Là où je ne vous suis pas c'est lorsque vous semblez dire qu'il faudrait ménager la susceptibilité à fleur de peau de ces endoctrinés: il me semble que cette "opération séduction" (nonobstant le fait que la séduction est propre au Malin) ne servirait à rien puisque le système éducatif, voire même peut-être tout le régime républicain est sur le point de s'effondrer, donc plutôt que de risquer de se compromettre avec les intellectuels républicains en chute libre, les catholiques feraient mieux de rester en retrait et d'élaborer leurs propres solutions éducatives.
[quote="MB"]
- ce que vous dites sur le savant en sciences cognitives est très intéressant. D'ailleurs il vous fait pointer le doigt sur un problème réel, savoir que la modernité (telle que vous l'entendez) comporte des éléments irrationnels. Or, dans un autre fil, vous en parlez comme de quelque chose de rationaliste ; il faut être plus précis.
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Attention il ne faut pas confondre "être rationel" et "être rationaliste", je dirais même que le rationaliste est irrationel. Celui qui est rationel est celui qui sait faire usage de sa raison alors que le rationaliste en fait un fort mauvais usage à tel point qu'il en vient à souscrire à cette idéologie, car c'est une idéologie, du "rationalisme", on pourrait disserter des pages sur cette erreur moderne qui a imprégné le courant scientiste du XIXème, le positivisme etc, jusqu'à nos jours. Disons pour résumer que le rationaliste croit la raison humaine toute puissante, ce qui ne veut nullement dire que la sienne propre l'est effectivement (ce qui a fait dire à Louis Pasteur: "Peu de science éloigne de Dieu et beaucoup de science en rapproche"). Un rationaliste peut fort bien être un ignare en théorie de la démonstration, ne connaissant strictement rien des théorèmes d'incomplétudes de Gödel, voire même incapable d'effectuer la démonstration la plus élémentaire, et vous asséner avec aplomb que toute vérité est démontrable.
[quote="MB"]
L'exemple des preuves rationnelles de l'existence de Dieu est percutant et me concerne directement : quel que soit le respect que je voue à l'architecture rhétorique et philosophique de ces démonstrations, elles ne parviennent pas à me convaincre ; pardonnez-moi, ce n'est pas que je leur en veuille, mais je n'arrive pas à croire à la portée réelle de la discussion métaphysique (autant se demander, comme le faisaient les présocratiques, si l'âme est une ou multiple, du feu, de l'eau, de la terre, etc. avec des arguments solides à l'appui...). Un jour viendra, qui sait...
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L'immortalité de l'âme, ou immortalité naturelle de l'homme en langage théologique, est démontrable sans problème, Saint Thomas d'Aquin l'a fait dans un style aristotélicien, Plotin dans un style platonicien mais leurs arguments sont toujours valables, ils s'appuient sur le constat évident que le corps est fini, que toutes ses opérations sont finies mais qu'en revanche la pensée a une portée infinie dans le concept, absolument irréductible à son extension sensible, qui elle n'est jamais qu'une collection finie d'objets. La pensée n'est par conséquent pas une opération matérielle, mais une opération d'un autre ordre. Qui plus est, elle est capable de saisir des "vérités éternelles", c'est descartes qui a employé ce terme constatant que si un objet physique varie constamment au cours du temps, en revanche un objet purement conceptuel reste invariant: Les cercles qu'Archimède a tracé sur le sol juste avant d'être tué par les Romains ne sont plus là mais le concept du cercle est toujours rigoureusement le même. D'une opération immatérielle ayant pour objet des vérités éternelles on en infère une res gogitans incorruptibilis et immortalis". Pour ce qui est de la validité des preuves de l'existence de Dieu, cosmologiques (comme les quinque viae de Saint Thomas d'Aquin) ou ontologiques (comme chez Saint Anselme, Descartes et Gödel) c'est plus complexe du fait du caractère suréminent et surnaturel de l'objet que nous ne pouvons approcher que de manière équivoque, par exemple dans le cas de la preuve ontologique anselmienne qui définit Dieu comme "un être tel que l'on ne puisse en concevoir de plus grand" on pourrait par exemple alléguer qu'un être dont l'existence n'est pas prouvable est plus grand qu'un être dont l'existence est prouvable parce que justement son existence dépasse toute raison, on en serait ainsi ramené à prouver ce qui n'est pas prouvable, d'où une contradiction. Pour ce qui est des preuves cosmologiques de Saint-Thomas d'Aquin, contrairement aux préjugés des modernistes qui en ont fait des fossiles de l'âge scolastique, la critique de leur validité est loin d'être triviale, ainsi en est-il de celle qui utilise les arguments de la non régression à l'infini, de la non réflexivité de la cause et de la distinction logique entre causes secondes ou moyens et cause première ou cause motrice par elle-même.
[quote="MB"]
De manière générale, il y a un biais, dans votre démarche, qui rend impossible toute sérénité intellectuelle. Laisser la moindre place à l'examen humain, ne serait-ce que pour un infime détail, c'est selon vous la porte ouverte à toutes les erreurs modernes. Dans un sens, c'est vrai, puisque la liberté permet de dire des bêtises. Mais vous en faites comme une conséquence nécessaire, et surtout une conséquence nécessaire s'imposant à tous, y compris l'Eglise (ce qui, je le répète, est faux). On voit votre peu de confiance, il est vrai.
Forcément, quand vous partez d'un principe négatif et que vous cherchez à y accorder tout ce que vous voyez, on en arrive à vos conclusions. En substance, "modernité = pas bien" (en ayant une définition tendancieuse de la modernité, comme je l'ai dit ailleurs, et surtout en en faisant un bloc, ce qui est inadéquat), "modernité = diable", et "initiative correspondant à ce que j'apelle modernité = travail du démon". Tout ce qu'on pourra vous dire, vous l'interpréterez comme une preuve supplémentaire du travail du démon dans notre monde.
C'est exactement ce qui s'appelle une interprétation idéologique des choses ; c'est suivre une idéologie circulaire, qui non seulement prétend avoir réponse à tout, mais qui en plus interprète toute contestation comme preuve supplémentaire de sa validité. Exactement comme les marxistes ("si vous êtes contre ma théorie, c'est que vous êtes trompé par l'idéologie bourgeoise"), la psychanalyse ("si vous êtes contre, c'est votre névrose qui parle à travers vous"), les théories bourdieusiennes ("si vous êtes contre, c'est que vous êtes travaillé par votre habitus culturel"), le fanatisme musulman ("si vous êtes contre, c'est que vos ancêtres ont trafiqué la Bible"), etc. Permettez-moi donc de considérer votre manière de voir comme intellectuellement inutilisable.
Fraternellement
MB[/quote]
Vous n'y êtes pas du tout: l'idéologie n'est qu'une classe d'idées organisées systématiquement par un ou plusieurs hommes et affranchie de toute autorité divine. Le marxisme, tout comme le libéralisme sont des idéologies et elles ont été fermement condamnées par l'Eglise. L'Eglise se distingue de toutes les autres institutions et organisations temporelles en ceci: elle ne procède pas de la libre décision d'individus de se constituer en association mais elle a pour fondement la volonté souveraine du Christ lui-même:
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"[b]Ce n’est pas vous qui m’avez choisi; mais moi, je vous ai choisis et je vous ai établis [/b]," (Jean XV, 16).
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Tu es heureux, Simon, fils de Jonas; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais c'est mon Père qui est dans les cieux.
Et moi, [b] je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église [/b], et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle.
(Matt,16 17-18)
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L'Eglise est donc une institution divine tenant son autorité de Dieu lui-même. Autorité, jugement d'autorité, le mot qui fait hérisser le poil des modernistes est lâché. Cela permet de comprendre pourquoi la position de l'Eglise qui est celle du Ressuscité obéissant jusqu'à la mort est irréconciliable avec la position du Révolté désobéissant jusqu'à la chute. D'un côté une hétéronimie faite de jugements de raison et de jugements d'autorité, de vérités de raison et de vérités de foi, de l'autre une autonomie de la raison se reconnaissant comme seul juge de ce qui est vrai et de ce qui est faux. C'est d'ailleurs Kant, un protestant (comme par hasard), pénétré de l'esprit de l'Aufklärung, qui au nom de l'autonomie de la raison a artificiellement opposé les jugements d'autorité écclésiaux et les jugements de raison, pour aboutir à ça:
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Ne croyant pas à la Révélation, ni en l'Incarnation de Dieu en Jésus, (lequel perdrait sa valeur d'exemple) il est cependant persuadé de l'utilité de la religion pour l'ordre et la paix sociale. Kant défend l'idée d'une religion morale dans laquelle Dieu, dont l'existence ne peut être démontrée, est l'initiateur de la conscience morale.
"La religion, sans la conscience morale n'est qu'un culte superstitieux. On croit servir Dieu lorsque, par exemple, on le loue ou célèbre sa puissance, sa sagesse, sans penser à la manière d'obéir aux lois divines, sans même connaître et étudier cette sagesse et cette puissance. Pour certaines gens, les cantiques sont un opium pour la conscience et un oreiller sur lequel on peut tranquillement dormir."
(Emmanuel Kant / 1724-1804 / Réflexions sur l'éducation)
"Dieu n'est pas une substance extérieure mais une relation morale en nous."
(Emmanuel Kant / 1724-1804 / Opus postumum)
"On mesure l'intelligence d'un individu à la quantité d'incertitudes qu'il est capable de supporter."
(Emmanuel Kant / 1724-1804)
"Moi, je n'y crois pas [en Dieu], les élites ne doivent pas croire en Dieu, mais les pauvres doivent y croire parce que c'est un facteur de paix sociale."
(Emmanuel Kant / 1724-1804)
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Mais il y a bien pire, et nous y venons. Puisque vous parlez d'idéologie circulaire, il faut dire que dans le cadre du catholicisme une telle circularité n'existe pas parce que justement une autorité externe fondée en Christ vient rompre tout cercle imprédicatif et de plus l'Eglise n'est pas à son service (comme c'est par exemple le cas pour un groupement d'intérêts) mais au service de Dieu, des peuples et des hommes, par contre vous avez raison dans le cas du marxisme qui repose sur la philosophie de Hegel (encore un protestant) qui allant encore plus loin que Kant n'a pas simplement voulu que la raison soit autonome mais qu'elle soit aussi absolue, pour devenir la Raison, se fondant elle-même et se contredisant, à la fois sujet divin en et pour lui-même, moteur de l'histoire, des idées, etc ...
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Hegel décrit bien ainsi l’organisation du tout de la science spéculative ou de ce que – reprenant sa définition par Kant comme totalité rationnelle – il appelle l’« Idée » de la philosophie : « Chacune des parties de la philosophie est un Tout philosophique, [b] un cercle se fermant en lui-même [/b], mais l’Idée philosophique y est dans une déterminité ou un élément particuliers... [b]Le Tout se présente par suite comme un cercle de cercles, dont chacun est un élément nécessaire [/b], de telle sorte que le système de leurs éléments propres constitue l’Idée tout entière, qui apparaît aussi bien en chaque élément singulier »( Enc, I, § 15, B, p. 181).
Hegel, au contraire, fait de la pensée de l’être, alors absolument manifesté comme être, la pensée de soi de l’être lui-même. Le hégélianisme, c’est d’abord, cette inouïe confiance en soi de la pensée : [b] «L’essence fermée de l’univers n’a en elle aucune force qui pourrait résister au courage du connaître, elle doit nécessairement s’ouvrir devant lui et mettre sous ses yeux ainsi qu’offrir à sa jouissance sa richesse et ses profondeurs» (Allocution universitaire de 1818 à Berlin, Enc, I, B, p. 149) [/b].
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Pour ce qui est du combat contre Satan, combat livré par le Christ dans l'Evangile, l'Eglise peut non seulement faire valoir deux-milles ans d'expérience mais aussi affirmer que c'est un de ses charismes et ministères. Par conséquents entre les opinions de jeunes blanc-becs anticléricaux prétendument intellectuels et sortis de leur "minorité" (c'est à dire affranchi de toute autorité pour reprendre le terme péjoratif kantien) et un jugement d'autorité de l'Eglise il n'y a pas à hésiter, c'est la parole de l'Eglise qui doit avoir la primauté. Lorsque l'Eglise a condamné le communisme, cela a fait rire beaucoup d'intellectuels, mais au final qui s'est fourvoyé, qui n'a pas vu venir les famines, les camps, les dizaines de millions de morts, qui n'a pas voulu dénoncer ces crimes abominables ? Et qui encore aujourd'hui veut faire croire que ce n'est rien de plus qu'une aventure humaine qui aurait mal tourné, que le communisme n'est pas l'oeuvre de Satan mais le salut du genre humain ? Pour le libéralisme c'est la même chose, l'Eglise l'a condamné, les intellectuels ne tiennent aucun compte de cette mise en garde, ils n'en font qu'à leur tête et ce n'est qu'une fois que le désatre aura atteint son ampleur paroxystique qu'ils réaliseront, et encore ...
Pourtant l'Eglise ne fait pas de procès d'intention comme les philosophes et théologiens du soupçon, elle juge sur pièce avec la saine raison éclairée par les lumières de la Foi, comme dans le cas de K. Marx. Même le pasteur protestant Wurmbrand fait preuve de lucidité sur ce coup, voilà le résultat de ses recherches ("Was Karl Marx a satanist ?)
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A la fin de ses études secondaires, son livret scolaire indique, sous la rubrique "Instruction religieuse": "Sa connaissance de la foi et de la morale chrétienne est lucide et bien fondée". L'oeuvre la plus ancienne qui nous soit parvenue de Karl Marx est intitulée "Union du fidèle au Christ". On y trouve par exemple des phrases comme celle-ci: "Par l'amour dont nous aimons le Christ, nous orientons en même temps nos coeurs vers nos frères qui nous sont intimement liés et pour lesquels Il s'est donné Lui-même en sacrifice... L'union au Christ est capable de procurer l'exaltation intérieure, le réconfort dans la douleur, une confiance paisible et un coeur susceptible d'aimer humainement tout ce qui est noble et grand, non par désir d'ambition ou de gloire, mais à cause du Christ". Dans un autre ouvrage, intitulé "Considérations d'un jeune homme sur le choix d'une carrière", il développait encore les mêmes idées, profondément chrétiennes.
Mais peu de temps après ses études secondaires, quelque chose s'est produit certainement dans sa vie qui l'a changé complètement. Il est devenu violemment antireligieux, non pas athée, comme on le croit souvent, mais antireligieux, ce qui est très différent. [b]Il ne remet pas en cause l'existence de Dieu; il s'oppose à lui.[/b] Ceci apparaît nettement dans toute une série de poèmes et même dans une pièce de théâtre qui ne sera jamais jouée. La révolte qu'il y exprime sous le masque d'un "désespéré", d'un "ménestrel" ou d'"Oulanem" (anagramme presque parfait d'Emmanuel"), correspond certainement au drame qu'il vit lui-même à cette époque-là, seule explication possible du retour continuel de ce même et unique thème: [b]"Je veux me venger de Celui qui règne au-dessus de nous"[/b]. Ou encore, dans son poème intitulé [b]"Invocation d'un désespéré"[/b], les vers suivants:
"Ainsi un dieu m'a arraché "mon tout"
Dans les malédictions et dans les coups du sort.
Tous ses mondes se sont évanouis
Sans espoir de retour,
Et il ne me reste plus désormais que la vengeance"
Nous avons là probablement une allusion à la cause de ce changement profond. K. Marx a l'impression que c'est Dieu lui-même qui lui a "arraché" quelque chose qu'il considérait comme son "tout". Il semble que d'autres textes fassent même allusion à un véritable pacte conclu avec Satan. Ainsi dans "Le ménestrel" où derrière la fiction se cache probablement K. Marx:
[b]"Les vapeurs infernales me montent au cerveau [/b]
Et le remplissent jusqu'à ce que je devienne fou
ET que mon coeur soit complètement changé.
[b]Regarde cette épée:
Le Prince des ténéèbres me l'a vendue".[/b]
Mais [b]sa haine de Dieu se retourne bientôt contre l'humanité entière [/b]:
"Dédaigneusement, je jetterai mon gant
A la face du monde
Et verrai s'effondrer ce géant pygmée
Dont la chute n'éteindra pas mon ardeur.
Puis comme un dieu vainqueur j'irai au hasard
Parmi les ruines du monde
Et, donnant à mes paroles puissance d'action,
Je me sentirai l'égal du Créateur"
De même dans le "Oulanem":
[b]"Perdu. Perdu. Mon heure est venue. [/b]
L'horloge du temps s'est arrêtée,
La maison pygmée s'est effondrée.
Bientôt j'embrasserai sur mon sein l'éternité.
[b]Bientôt je proférerai sur l'humanité
D'horribles malédictions". [/b]
Et vers la fin du drame ces paroles qui sont tout un programme:
"S'il y a quelque chose capable de détruire,
Je m'y jetterai à corps perdu,
Quitte à mener le monde à la ruine.
[b] Oui, ce monde qui fait écran entre moi et l'abîme,
Je le fracasserai en mille morceaux [/b]
A force de malédiction;
J'étreindrais dans mes bras sa réalité brutale,
Dans mes embrassements il mourra sans un mot
Et s'effondrera dans un néant total,
Liquidé, sans existence:
Oui, la vie ce sera vraiment cela!"
Et voici, encore plus clair dans le poème intitulé "Vierge pâle":
[b] "Ainsi j'ai perdu le ciel,
Je le sais très bien.
Mon âme naguère fidèle à Dieu
A été marquée pour l'enfer". [/b]
Ses contemporains ne s'y sont pas trompés. Ils ont compris que Karl Marx ne s'intéressait absolument pas à la libération du peuple et au sort des travailleurs. Les premiers à l'avoir compris sont tout naturellement ses amis: "Marx va sûrement chasser Dieu de son ciel et il fera lui-même son procès.Il prétend que la religion chrétienne est l'une des plus immorales" (Georges Jung). Et le marxiste Franz Mehring, dans son étude intitulée "Karl Marx", note que le père de celui-ci semblait "avoir décelé avec son secrète appréhension la présence du démon en son fils préféré".
Il ne semble pas que Marx soit allé jusqu'à l'appartenance à une secte satanique organisée, bien que sa femme s'adresse à lui en l'appelant "grand prêtre et evêque des âmes" et évoque sa dernière "lettre pastorale", vocabulaire éminemment religieux, dont le Dieu ne peut être, à cette époque de l'évolution de Marx, que Satan lui-même. Cependant ses amis et maîtres à penser appartenaient tous à la même mouvance. Ainsi Bakounine, confondateur avec K. Marx de la Première Internationale: [b]"Dans cette révolution, il nous faudra réveiller le diable chez le peuple et exciter en lui les passions les plus viles" [/b]. De même Proudhon: "Dieu est stupidité et lâcheté, Dieu est hypocrisie et fausseté, Dieu est tyrannie et pauvreté, Dieu et mauvais..."Le drame est encore plus évident avec Engels, dont l'engagement chrétien semble avoir été plus profond que chez K. Marx. C'est en pleurant qu'il cherchait à lutter contre l'évolution qu'il sentait se produire en lui après avoir lu l'ouvrage d'un théologien protestant "libéral" qui lui semblait ruiner les fondements mêmes de la foi chrétienne. Après avoir dénoncé alors K. Marx comme "possédé de mille démons", il finit par écrire avec lui le "Manifeste communiste" où ils tentent d'éradiquer définitivement tout sentiment religieux.
Il est vrai qu'il n'y a pas là de phénomènes prodigieux spectaculaires. Le prodige est plus diffus. Il n'en est pas moins terrifiant au contraire! [b] Le prodige, c'est que des peuples généralement civilisés, de vieille culture et souvent imprégnés d'idéaux religieux, puissent en arriver à un aveuglement généralisé, à une soumission totale à ces forces du mal [/b]. Evidemment, l'influence de Karl Marx n'aurait pas fait tant de mal si elle n'avait été relayée par Staline, Mao, Pol Pot et bien d'autres. Mais [b]il est important de discerner cette action du mal dès sa première infiltration. [/b]
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