par VexillumRegis » dim. 16 avr. 2006, 10:41
[align=justify]Bonjour,
Voici des extraits significatifs de l'ouvrage du cardinal Ratzinger, L'Esprit de la liturgie, Genève, Ad Solem, 2001 :
La crise de l'art :
Que faire dans cette situation ? Nous voilà confrontés non seulement à une crise de l’art sacré, mais à une crise de l’art tout court, et dans des proportions inconnues jusqu’ici. La crise de l’art n’est d’ailleurs qu’un symptôme de la crise existentielle de l’humanité. La domination du monde matériel a fermé l’homme à toute interrogation sur le sens de la vie, à tout ce qui pourrait le conduire au-delà de la matérialité. On pourrait presque parler d’une cécité de l’intelligence. Comment devons-nous vivre, comment maîtriser le phénomène de la mort, notre existence a-t-elle une finalité et si oui laquelle ? Toute ces questions ne trouvent plus aujourd’hui de réponse commune. Au nom de la rigueur scientifique, le positivisme a rétréci notre horizon à ce qui est démontrable, à ce qui peut être prouvé expérimentalement - il nous a rendu le monde opaque. Certes, les mathématiques existent toujours, mais le Logos, qui chez les Anciens présupposait ces mathématiques, n’apparaît plus dans leur application. Notre monde figuratif ne va plus au-delà du monde manifeste, et le flot d’images qui nous envahit marque en fait la fin de l’image. Il n’y a plus rien à voir au-delà de ce qui est susceptible d’être photographié. A ce point, ce n’est pas seulement l’art de l’icône, ni l’art sacré en général, qui devient impossible, mais l’art lui-même qui, après avoir expérimenté, dans l’impressionnisme et l’expressionnisme, les possibilités extrêmes de la vision sensible est devenu, à la lettre, sans objet. L’art est aujourd’hui le terrain d’expérimentation de mondes auto-créés, d’une “créativité” vide qui ne s’ouvre plus au Creator Spiritus - à l’Esprit créateur. L’homme, dans la tentative de se substituer à l’esprit, ne parvient à créer qu’une réalité arbitraire, dérisoire, où transparaît surtout l’absurdité de sa propre création. (p. 107)
(...)
La liberté artistique qui doit exister dans le domaine spécifique de l’art sacré n’a rien de commun avec l’arbitraire de l’art moderne. (p. 110)
(...)
Aujourd’hui, les formes radicales du subjectivisme ont conduit à la dissolution du sujet, et les théories anarchiques de l’art achèvent leur oeuvre de déconstruction. Peut-être cela nous aidera-t-il à dépasser cette surenchère de la subjectivité, cette inflation du moi, et à reconnaître de nouveau que seule la relation au Logos peut sauver le sujet, c’est-à-dire la personne, de son isolement, et lui faire retrouver sa juste place dans la communauté des hommes, dans une relation fondée en dernier ressort sur l’amour trinitaire. (p. 125)
La musique :
L’Eglise est directement concernée par le développement de deux types de musique nés en Occident qui, depuis plusieurs décennies, façonnent la culture à l’échelle planétaire. D’une part une musique commerciale, destinée au “peuple”, mais qui n’a plus rien de populaire au sens traditionnel du terme. Produite industriellement, elle appartient aux phénomènes de masse et n’est rien d’autre, finalement, qu’un culte de la banalité. D’autre part la musique “rock” et ses dérivés, en particulier aujourd’hui la techno, qui sont les vecteurs de passions élémentaires et qui, dans les grands festivals, développent un caractère cultuel, jouant même le rôle d’un anti-culte par rapport au culte chrétien. Pris dans le mouvement de la foule, soumis à l’ébranlement du rythme, du bruit et des effets de lumière, les participants se sentent pour ainsi dire libérés d’eux-mêmes. Dans l’extase provoquée par l’annihilation de toute barrière et la chute de toute inhibition, ils déchaînent en quelque sorte les forces élémentaires de l’univers, dans lesquelles il finissent par se faire engloutir. Comment la musique de la sobre ivresse de l’Esprit Saint aurait-elle une chance de toucher ces individualités emprisonnées, ces esprits jugulés, pour qui l’évasion dans cette expérience collective, aussi brève soit-elle, semble bien être la seule promesse de délivrance ? (pp. 119-120)
Christ est ressuscité !
- VR -[/align]
[align=justify]Bonjour,
Voici des extraits significatifs de l'ouvrage du cardinal Ratzinger, [i]L'Esprit de la liturgie[/i], Genève, Ad Solem, 2001 :
[color=darkred][b][i]La crise de l'art[/i][/b][/color] :
[color=darkblue][i]Que faire dans cette situation ? Nous voilà confrontés non seulement à une crise de l’art sacré, mais à une crise de l’art tout court, et dans des proportions inconnues jusqu’ici. La crise de l’art n’est d’ailleurs qu’un symptôme de la crise existentielle de l’humanité. La domination du monde matériel a fermé l’homme à toute interrogation sur le sens de la vie, à tout ce qui pourrait le conduire au-delà de la matérialité. On pourrait presque parler d’une cécité de l’intelligence. Comment devons-nous vivre, comment maîtriser le phénomène de la mort, notre existence a-t-elle une finalité et si oui laquelle ? Toute ces questions ne trouvent plus aujourd’hui de réponse commune. Au nom de la rigueur scientifique, le positivisme a rétréci notre horizon à ce qui est démontrable, à ce qui peut être prouvé expérimentalement - il nous a rendu le monde opaque. Certes, les mathématiques existent toujours, mais le Logos, qui chez les Anciens présupposait ces mathématiques, n’apparaît plus dans leur application. Notre monde figuratif ne va plus au-delà du monde manifeste, et le flot d’images qui nous envahit marque en fait la fin de l’image. Il n’y a plus rien à voir au-delà de ce qui est susceptible d’être photographié. A ce point, ce n’est pas seulement l’art de l’icône, ni l’art sacré en général, qui devient impossible, mais l’art lui-même qui, après avoir expérimenté, dans l’impressionnisme et l’expressionnisme, les possibilités extrêmes de la vision sensible est devenu, à la lettre, sans objet. L’art est aujourd’hui le terrain d’expérimentation de mondes auto-créés, d’une “créativité” vide qui ne s’ouvre plus au [/i]Creator Spiritus[i] - à l’Esprit créateur. L’homme, dans la tentative de se substituer à l’esprit, ne parvient à créer qu’une réalité arbitraire, dérisoire, où transparaît surtout l’absurdité de sa propre création[/i][/color]. (p. 107)
(...)
[color=darkblue][i]La liberté artistique qui doit exister dans le domaine spécifique de l’art sacré n’a rien de commun avec l’arbitraire de l’art moderne[/i][/color]. (p. 110)
(...)
[color=darkblue][i]Aujourd’hui, les formes radicales du subjectivisme ont conduit à la dissolution du sujet, et les théories anarchiques de l’art achèvent leur oeuvre de déconstruction. Peut-être cela nous aidera-t-il à dépasser cette surenchère de la subjectivité, cette inflation du moi, et à reconnaître de nouveau que seule la relation au Logos peut sauver le sujet, c’est-à-dire la personne, de son isolement, et lui faire retrouver sa juste place dans la communauté des hommes, dans une relation fondée en dernier ressort sur l’amour trinitaire[/i][/color]. (p. 125)
[color=darkred][b][i]La musique[/i][/b][/color] :
[color=darkblue][i]L’Eglise est directement concernée par le développement de deux types de musique nés en Occident qui, depuis plusieurs décennies, façonnent la culture à l’échelle planétaire. D’une part une musique commerciale, destinée au “peuple”, mais qui n’a plus rien de populaire au sens traditionnel du terme. Produite industriellement, elle appartient aux phénomènes de masse et n’est rien d’autre, finalement, qu’un culte de la banalité. D’autre part la musique “rock” et ses dérivés, en particulier aujourd’hui la techno, qui sont les vecteurs de passions élémentaires et qui, dans les grands festivals, développent un caractère cultuel, jouant même le rôle d’un anti-culte par rapport au culte chrétien. Pris dans le mouvement de la foule, soumis à l’ébranlement du rythme, du bruit et des effets de lumière, les participants se sentent pour ainsi dire libérés d’eux-mêmes. Dans l’extase provoquée par l’annihilation de toute barrière et la chute de toute inhibition, ils déchaînent en quelque sorte les forces élémentaires de l’univers, dans lesquelles il finissent par se faire engloutir. Comment la musique de la sobre ivresse de l’Esprit Saint aurait-elle une chance de toucher ces individualités emprisonnées, ces esprits jugulés, pour qui l’évasion dans cette expérience collective, aussi brève soit-elle, semble bien être la seule promesse de délivrance ?[/i][/color] (pp. 119-120)
Christ est ressuscité !
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