Relations Église-État

« Par moi les rois règnent, et les souverains décrètent la justice ! » (Pr 8.15)
cmoi
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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » sam. 30 mai 2020, 23:46

Il y a tout de même un point très important sur lequel je me suis déjà et à plusieurs reprises retenu de m'exprimer sur ce forum.

Beaucoup y considèrent que la fin de la foi chrétienne est le salut, et cela s'entend dans plein de considérations qui à cause de cela sont faussées. C'est toujours la veille question de la peur de l'enfer et de la contrition imparfaite. Mais la fin de la foi c'est l'amour, et le salut n'en est qu'un moyen. Sans cette vision, vous ne convertirez, vous ne convaincrez personne, quels que soit vos merveilleux développements théologiques, liturgiques, philosophiques, etc. et votre foi restera lettre morte pour les autres car il vous faudrait d'abord leur donner la peur ! Et c'est une très bonne chose qu'ils la refusent...

Priorité à l'amour donc, et c'est ce qu'ont voulu dire les mystiques qui en exagérant dans un autre sens disaient être prêts à aller en enfer s'il le fallait. C'est comme si vous disiez sinon à propos de l'amour nuptial ou parental que ce qui compte c'est de vivre ensemble (d'aller au ciel). Non, ce qui compte c'est de s'aimer, et même alors si on est séparés (sur terre encore...) c'est mieux que tout. Vivre ensemble n'est qu'un moyen, et sans amour ce n'est pas forcément nul ou "ch...t" mais cela demande toute une organisation et plein de choses qui sont comme le canada dry - il y manque l'essentiel, il n'est dans le meilleur des cas que plagié, ce qui ramollit ou asphyxie, pollue le coeur et ne fait illusion qu'auprès de ceux qui ne savent pas ou plus ce qu'est le véritable amour (pour ne pas en être blessés parfois).

La fin de la foi c'est l'amour, et ce n'est qu'avec lui qu'une religion peut postuler à avoir une place dans une société.

Une "égalité de chance" décidera de celle qui en a le plus, et je comprends que certains puissent craindre de ne pas gagner s'ils ont perdu la finalité de la foi. Mais tout cela suppose autre chose : une honnêteté foncière dans la recherche de la vérité, une soif de celle-ci. Aujourd'hui elle existe et est indéniable dans nos sociétés, elle grandit. Et ce qui m'effraie, c'est qu'à force de confondre la fin et le moyen, de parler de salut (à grand renfort dogmatique), vous qui détenez la vérité vraie, vous l'occultiez et finissiez par désespérer les autres de ne pas la laisser paraître. Vous l'avez déjà en grande partie laissée s'échapper, pourquoi ne voulez vous pas la reconquérir, la faire refleurir ?

Il faut se mettre en danger ! C'est la condition du bonheur...

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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » dim. 31 mai 2020, 13:45

Je voudrais ce midi compléter mes deux précédents post par une autre considération par laquelle je prends à revers ou à rebours une croyance ou prétention fort populaire en chrétienté : celle de « sauver ».
Au nom de quoi on a commis les pires horreurs : extermination des indiens aux Amériques, inquisition, etcetera, parce qu’en vérité on ne vivait pas de la vraie foi.
Le point de départ des colonisations était bien d‘apporter la foi, n’est-ce pas ?
Et nos ancêtres n’étaient point des barbares, et il y eut bien des missionnaires, et le peuple dans son ensemble était chrétien !
Croyez-vous qu’on les ait sauvés en les exterminant ? Et dire qu’au départ, ils nous accueillirent avec une naïveté touchante, nous prenant pour des dieux : quel meilleur contexte d’évangélisation ! - ou ils faisaient confiance dans le discernement pastoral de leur « sainte mère l’Eglise » !
Comment expliquer ce qui s’en est suivi ? Parce que manquant de foi (et de vertu, et d’exemplarité) nous n’avons pas su les convaincre par les seuls moyens acceptables utilisés par le Christ… ! Et certains sont des martyrs authentiques à cause de l’Eglise et contre elle…
Ne refaisons pas la même erreur er commençons par nous changer nous-mêmes, nous qui avons effectivement (et là est l’explication de notre prétention) un moyen extraordinaire à notre disposition : le pardon et l’intercession du Christ, le trésor des indulgences… N’en faisons pas un moyen de perdition (puisqu’on sera pardonné de nos péchés, alors goûtons-y quand cela nous plaît !….)

Pour le dire autrement ; je ne crois pas que les enfants de la fin du siècle dernier qui sont hors de l’Eglise n’y entrent pas parce que ce sont des « méchants » ou des bornés ou des incultes, ou des idiots, ou…etc.
Je crois qu’au vu de nos divisions internes dont les médias se font l’écho, de l’histoire (eux aussi ont droit d’y voir une « tradition »), au vu des nombreux scandales touchant les élites de notre religion (prêtres pédophiles mais aussi corruptions, dictatures, guerres fratricides sur/pour des abstractions ou révélant notre goût prioritaire pour les biens de ce monde) au vu aussi de ceux qui nous quittent et parfois pour de pas si mauvaises raisons, - ils ont parfaitement la conscience tranquille et saine et pure et sainte, de se méfier de nous et de ne pas vouloir entrer dans nos églises autrement que physiquement pour une visite culturelle ou de curiosité et parfois pour y prier. Je crois qu’ils ont le droit d’être pragmatiques dans leur recherche spirituelle et de chercher ce qui leur fait du bien, que la façon dont nous vantons parfois la souffrance et le sacrifice (alors que nous supportons peu les contestations spirituelles, du coup par amendement nous les avons multipliées, mais (oh l’erreur !) en interne seulement !) a de quoi les effrayer, etc. Je crois qu’ils ont le droit de se méfier de notre désir de « les sauver » et que plus leurs racines culturelles sont proches des nôtres, plus cela s’explique et se comprend, et rend difficile leur conversion.
Les valeurs du Christ ont tellement imbibé nos institutions que personne ne voit à quel point elles sont présentes jusque dans la façon de réaliser cet idéal dit de laïcité. Les chrétiens eux-mêmes sont les premiers à s‘y perdre, à cause des entorses qu’ils jugent scandaleuses (par un reste d’appropriation outrée qui leur a fait oublier leur statut de serviteurs inutiles) que représentent certaines lois morales come celles sur l’avortement. Alors pourquoi pas les nouveaux païens ? Et pourquoi les effrayer là où ils sont sans le savoir déjà chrétiens, en nous appropriant trop tôt dans leur développement conscient la paternité de ces choses !
Au regard de cela, je ne crois pas qu’ils seront « perdus pour toujours » de ce fait même, et c’est ce qu’enseigne Vatican II sans que se puisse soupçonner que ce fut en pensant à eux car la prétention de l’église n’avait en rien changé sur ce point que ne défendent plus aujourd’hui que les intégristes, et ce n’est pas un signe que les autres se sont attiédis ou dévergondés doctrinalement, ni que ce soit l’expression de la reconnaissance de leur erreur (pas même d’un repentir ou d’un aveu d’incompétence) ces humilités là n’ont pas atteint encore notre tête, et en seront chassées quand elles y arriveront car elles entraîneront notre conversion et donc un nouveau désir missionnaire mais selon d’autres modalités, qui n’auront pas besoin de prétendre que l’église militante seule sauve, il arrive que l’Eglise triomphante intervienne, car l’amour pallie à tout, est contagieux, n’est pas jaloux, et laisse à Dieu les desseins de sa providence sans prétendre y interférer par un zèle qui ne fait que révéler nos lacunes.
Voilà pourquoi cohabitent en notre sein des saints et des salauds (qui se servent consciemment de cette confusion pour désespérer les âmes, font de nos rites une magie incantatoire ou un prétexte à rassemblement sympa et populaire, etc ), qui parlent le même langage, ont les mêmes ambitions, etc.
Aussi des naïfs et des idiots, ou des prudents et des couards, ou des « je vais vivre ma foi dans mon coin », ou… etc
De fait, il arrive, par une incroyable mais tout à fait explicable inversion des valeurs, que le sacrifice du Christ ne nous protège et ne nous sauve et ne nous mette à l’abri que d’une chose : l’amour non moins incroyable de Dieu son père pour nous, et qui a quelque chose d’effrayant tant ce dont cela témoigne de vrai « sacrifice » est grand.
Cela pourrait bien être le péché contre l’Esprit, quand cela devient conscient, mais dans le cas contraire ce n’est que la cause d’une grande faiblesse devenue congénitale car ses racines obligent à remonter bien avant Vatican II et à voir tant de nos défaillances (en tant qu’Eglise) !
Jean-Paul II avait commencé ce travail d’examen et cela n’avait pas plu à tous les chrétiens, pourtant tous aujourd’hui reconnaissent que c’était un saint. Travail dont il ne faudrait pas perdre de vue le but, en s’enfermant dans un repentir stérile ou le refusant.
Qu’il soit clair que ma « critique » ne vise aucun courant particulier reconnu comme tel, elle les brasse et intercepte des hommes en dérive dans tous, ne blâme pas ces courants mais ceux qui s’y comportent, par la manière dont ils les suivent et selon leur destination.

Encore une fois, se donner pour but d’être sauvé c’est jouer petit bras, à quoi cela nous servira-t-il ? « Qui veut sauver sa vie la perdra, et qui… » etcetera…

En principe j'attends les sollicitations pour y répondre, mais à défaut je préciserai ma pensée concernant Léon XIII prochainement...

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Altior » dim. 31 mai 2020, 13:50

cmoi a écrit :
dim. 31 mai 2020, 13:45
Et certains sont des martyrs authentiques à cause de l’Eglise et contre elle…
Cmoi, cessez de lire tant de littérature de propagande gauchiste. Ou orthodoxe, peut-être ? Car vraiment, vous risquez votre raison.

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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » dim. 31 mai 2020, 14:02

Voulez-vous des exemples ?
Marguerite Porete.
Et il y en a tant d'autres...
Jeanne d'Arc avant de devenir sainte et héroïne, pouvait aussi se compter du nombre...

La vérité suppose l'objectivité et l'impartialité.
Inutile par ailleurs de me chercher des références quelque part, que ce soit dans l'orthodoxie , la gauche ou je ne sais quoi.
Et si vous me croyez perdu, alors accomplissez votre devoir : prouvez -le moi !

« L’heure est venue, nous semble-t-il, où la vérité concernant l’Eglise du Christ doit de plus en plus être explorée, ordonnée et exprimée, non pas peut-être en ces formules solennelles qu’on nomme définitions dogmatiques, mais en des déclarations par lesquelles l’Eglise se dit à elle-même, dans un enseignement plus explicite et autorisé, ce qu’elle pense d’elle-même. »

Extrait du discours de SS Paul VI lors de l’ouverture de la deuxième session du concile de Vatican II.

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Suliko » dim. 31 mai 2020, 14:56

Bonjour,
Et vous ne trouvez pas à cela une tonalité pragmatique et circonstancielle ?
Non. Les principes énoncés par Léon XIII restent universaux : l'Etat et l'Eglise ne doivent pas être séparés. Ceci étant dit, il est évident qu'une telle séparation dans un pays de longue tradition catholique comme la France est plus désastreuse que la situation américaine (libéralisme religieux), qui résulte d'un contexte historique protestant. Pour autant, ces deux conceptions des liens entre l'Etat et l'Eglise sont clairement condamnées et la doctrine traditionnelle de la distinction et coopération des deux pouvoirs réaffirmée. Voici ce qu'écrit ce pape dans l'encyclique Longinqua Oceani adressée aux évêques américains (1895) :
Chez vous, en effet, grâce à la bonne constitution de l'Etat, l'Eglise n'étant gênée par les liens d'aucune loi, étant défendue contre la violence par le droit commun et l'équité des jugements, a obtenu la liberté garantie de vivre et d'agir sans obstacle. Toutes ces remarques sont vraies ; pourtant, il faut se garder d'une erreur : qu'on n'aille pas conclure de là que la meilleure situation pour l'Eglise est celle qu'elle a en Amérique, ou bien qu'il est toujours permis et utile de séparer, de disjoindre les intérêts de l'Eglise et de l'Etat comme en Amérique.
En effet, si la religion catholique est honorée parmi vous, si elle prospère, si même elle s'est accrue, il faut l'attribuer entièrement à la fécondité divine dont jouit l'Eglise, qui, lorsque personne ne s'y oppose., lorsque rien ne lui fait obstacle, s'étend d'elle-même et se répand ; pourtant elle produirait encore bien plus de fruits si clic jouissait, non seulement de la liberté, mais encore de la faveur des lois et de la protection des pouvoirs publics.
J'aimerais aussi clarifier une chose. Contrairement à ce qui est souvent écrit, le refus de la séparation des pouvoirs ne date ni du XIXe siècle, ni de l'époque de la Réformation, mais est bien la doctrine traditionnelle de l'Eglise depuis les premiers temps. On la retrouve déjà au premier millénaire. Le pape saint Gélase est un exemple bien connu, mais il est très loin d'être le seul.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Gaudens » dim. 31 mai 2020, 20:15

Bonsoir Suliko,
Je ne suis pas sûr que le pape Léon XIII ait eu raison d'écrire que l'Eglise catholique eût mieux réussi aux EEUU si ,en plus de la liberté ,elle avait obtenu la "faveur" des pouvoirs publics. Peut-être que oui,peut-être que non (connaissant le peu de goût des citoyens américains pour la contrainte,je pencherais même pour le non). Je suppose qu'il m'est permis d'avoir en la matière une opinion différente de celle de ce pontife de vénérée mémoire sans être accusable de libre-examen

Quant à l'ancienneté de la doctrine (que signifie exactement ce terme d'ailleurs dès lors qu'il ne s'agit pas d'un dogme ?) , je répète qu'en tous les cas elle ne peut être antérieure à l'édit de Théodose de 380 ; du reste Wikipedia m'apprend que Saint Gélase Ier régna de 492 à 496 . Pendant au moins 350 ans, je le répète, l'Eglise a vécu sans cette doctrine et par parenthèse,comme aux EEUU, ça ne lui a pas mal réussi, heureusement .
Donc "doctrine" de très longue durée, sans doute mais pas congénitale à l'Eglise ni indispendsable à la vie de foi des fidèles.
En 380 l'Eglise passa d'une ère historique à une autre et il en fût de même au long du XIXè siècle (sans qu'on puisse en donner une date particulière). Dont acte, reconnut l'Eglise lors du Concile Vatican II.
Un retour en arrière est-il possible ? C'est douteux car historiquement on ne revient jamais exactement en arrière durablament, mais il est vrai que l'histoire prend parfois des chemins de traverse qui modifient la donne de manière imprévisible.

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Altior » dim. 31 mai 2020, 21:18

Gaudens a écrit :
dim. 31 mai 2020, 20:15

En 380 l'Eglise passa d'une ère historique à une autre et il en fût de même au long du XIXè siècle (sans qu'on puisse en donner une date particulière). Dont acte, reconnut l'Eglise lors du Concile Vatican II.
Un retour en arrière est-il possible ? C'est douteux car historiquement on ne revient jamais exactement en arrière durablament,
Cher Gaudens,

Veuillez me permettre de noter que, selon vos propres dires, un retour en arrière est exactement ce qui s'est passé. Donc, si l'Édit de Thessalonique marque, en 380, un progrès par rapport à l'Édit de Milan de 313, car la religion catholique avance en statut de «religion tolérée» à «religion d'État», alors il est évident qu'au long du XIX-è siècle et plus particulièrement au début du XX-è on marque un retour en arrière, car de «religion d'État» on arrive de nouveau à «religion tolérée».

Il est donc prévisible que le prochain retour en arrière sera le paganisme, avec obligation d'encenser le buste du Président.

@cmoi: Dans le cas de Jeanne d'Arc, il s'agit d'une terrible erreur judiciaire, sinon d'un coup monté par pression politique compte tenu des conditions du procès. Mais, dans le cas de Marguerite Porete, vous doutez du fait qu'elle fut hérétique, vous pensez que les preuves furent faussées, ou bien quoi exactement vous avez à reprocher à l'enquête et au verdict?

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Suliko » dim. 31 mai 2020, 23:12

Bonsoir,
je répète qu'en tous les cas elle ne peut être antérieure à l'édit de Théodose de 380 ; du reste Wikipedia m'apprend que Saint Gélase Ier régna de 492 à 496 . Pendant au moins 350 ans, je le répète, l'Eglise a vécu sans cette doctrine et par parenthèse,comme aux EEUU, ça ne lui a pas mal réussi, heureusement .
Cet enseignement se retrouve à vrai dire déjà dans la Bible, puisque le peuple élu n'a pas le droit d'apostasier, ce péché étant puni de la peine de mort. De plus, l'empire romain était adepte de la tolérance religieuse : chacun pouvait adopter le culte qui lui plaisait, la seule contrainte étant de rendre à César les honneurs qu'il croyait lui être dû. On ne peut pas pourtant dire que les chrétiens de ces temps de persécutions étaient très attirés par ce type de gouvernance... Si cela avait été le cas, ils auraient décidé d'accorder aux païens une pleine liberté de religion lorsque l'empire est devenu officiellement chrétien. Or, ce n'est pas ce qui s'est passé : le paganisme a été plus ou moins fortement réprimé dès que le christianisme s'est révélé assez fort pour s'imposer.

Cette discussion me fait penser à un extrait de l'"Illusion libérale" de Louis Veuillot :
Chose horrible, et aussi niaise qu'horrible : c'est au peuple du Christ que l'on propose d'accepter, de choisir pour chefs civils des ignorants qui ne savent pas que Jésus-Christ est Dieu, ou des vauriens qui le savent et qui s'engagent à gouverner comme s'ils l'ignoraient. Et l'on promet les bénédictions divines à des hommes, à des sociétés capables de cette folie et de cette bassesse ! Ce n'est pas ce que leur annonce l'Esprit-Saint. Les enfants d'Israël s'étant consacrés à Belphégor, Dieu dit à Moïse : « Prends tous les chefs du peuple, et pends-les à des potences, en plein jour, afin que ma fureur ne tombe point sur Israël. » Voilà une note à mettre dans le dossier de la liberté des cultes. Il est dit ailleurs que « la justice élève les nations et que le péché rend les peuples misérables. » Que fait le Libéralisme de cet oracle ? Le déclare-t-il abrogé, ou veut-il prétendre que la justice dont il est ici question est l'art impraticable de tenir la balance exacte entre Jésus, Luther, Mahomet et Joë Smith, entre Dieu et Belial ? Jésus ne veut point d'un pareil équilibre : « Qui n'est pas pour moi est contre moi. »
« Sachez, empereur, écrivait saint Grégoire-le-Grand, sachez que la puissance vous est accordée d'en-haut afin que la vertu soit aidée, que les voies du ciel soient élargies, et que l'empire de la terre servir l'empire du ciel. » C'est la traduction de Bossuet.
Mais il s'agit bien de ces vieux dictons, de ces vieilles idées divines ! D'abord, le monde a changé, et enfin il faut suivre le courant.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Cinci » dim. 31 mai 2020, 23:48

Salut Gaudens,

Il y a une chose ici ...
Gaudens :

Ce que l'encyclique pontificale peut avoir produit, c'est une défiance accrue de la majorité protestante envers les catholiques dans ce pays. S'il fallut attendre l'élection de Kennedy en 1960 pour que l'image des catholiques soit réhabiitée et 1980 pour que ce pays entame enfin des relations diplomatiques avec le Vatican, ce n'est pas pour rien . Bref,encore une fois, les prises de positions pontificales à teneur politiques ont toujours des conséquences pratiques,concrètes et souvent politiques

Le cinéma à Hollywood dans les années 1930, 1940, 1950 produisait beaucoup de films de qualité, des films au scénario bien ficelé, complexe, intelligent, nuancé et ... et très favorables à l'Église catholique. "Surprise !" ... dans un pays pourtant protestant majoritairement. Il y avait à l'époque, disait-on, un lobby catholique à Hollywood.

Dans la catégorie, si vous faites une petite recherche, fouillant bien dans les cartons : les films américains y présentaient systématiquement la figure du prêtre comme celle d'un honnête homme, d'une sorte d'incorruptible pratiquement : tête solide, brave, un vrai mâle, personnage viril, à la fois capable de faire front contre des politiciens corrompus que des personnages mafieux, etc.

Si vous ne l'avez pas déjà vu, pensez au vieux film américain de 1944 (un bijou de film) qui raconte la vie de sainte Bernadette Soubirou avec Jennifer Jones qui y jouait merveillement là-dedans,. Vincent Price et d'autres. Fallait y voir la figure du prêtre aussi ! A des années-lumières de distance de tout ce que le cinéma nous présente aujourd'hui !

https://www.youtube.com/watch?v=-6zAoq8tRfI

et

Il y en avait bien d'autres du genre croyez-moi. Comme celui de Michael Curtiz de 1938 Les anges aux figures sales. C'est un Pat O'Brien qui y jouait une figure d'homme admirable.

https://alarencontreduseptiemeart.com/a ... res-sales/

Ou encore le film de Frank Capra (un catholique incidemment) de 1946 It'a a Wonderful Life avec l'acteur Jimmy Stewart, qui présentait de manière réaliste et intelligente toute la morale de l'Église catholique dans le fond, critique comprise du capitalisme corrupteur et remise en perspective du "rêve américain", avec l'air de ne pas y toucher.

https://fr.wikipedia.org/wiki/La_vie_es ... ilm,_1946)


Il y aurait certainement moyen d'expliquer tout cela après coup.

:?:

Vous dites que le lancement d'une encyclique de Léon XIII aurait pu provoquer (par exemple) des réactions de recul (défiance) chez les Américains, dans leur façon de percevoir les catholiques ? Pourtant, comme je vous ferais remarquer par la présente : Hollywood véhiculait une image extrêmement positive des catholiques américains, et ce, bien des années avant la nouvelle ère conciliaire. Il faut croire que les dégâts que vous soulevez n'étaient pas si important que ceux spontanément imagés ou alors que les décideurs américains poursuivaient d'autres objectifs stratégiques plus importants, en lien avec les catholiques et méritant peut-être de ne pas prêter trop d'attention au document pontifical.

Après ? Un autre élément qui mérite réflexion : ce n'est bien qu'après Vatican II que le contraire se produit. Curieux ! Malgré toutes ces ouvertures au monde des successeurs de Pie XII, mais l'image des catholiques n'aura pas cessé de se détériorer. Vous devez bien vous en douter. Après la survenue de mai 68 et la prise de pouvoir culturelle des libéraux aux États-Unis (le Vietnam, la contreculture, faites l'amour pas la guerre ...), les catholiques devront traîner depuis ce temps une image perpétuelle de crypto-fascistes, de tyrans dans l'âme, ou d'une foule de malheureux dirigés par des prêtres louches, une hiérarchie parfaitement "réac" (le panzercardinal et le pape polonais avec sa morale de vieux jeu, les hypocrisies et blabla). Maintenant, c'est : "Dégagez-moi tous ces vieux barbons de la curie".

Mais disons quand même qu' il y a bien des liens diplomatiques qui auront été noués officiellement. C'est vrai. Resterait à savoir si la chose aura pu être profitable pour quelqu'un et sinon qui ... pour les paroissiens italiens ? les évêques américains ? pour le consolidement de l'Union européenne ? Ce serait dur à évaluer comme ça. Les catholiques seraient-ils devenus de meilleures personnes entre ceux d'aujourd'hui ou ceux du temps de Frank Capra ? Il aurait fallu savoir si les liens étaient si mauvais que cela entre Pie XII et la Maison-Blanche pour commencer.

Mon idée c'est qu'il ne faudrait peut-être pas non plus s'exagérer l'impact produit par des lettres encycliques sur le grand publique. Bon, à moins que les politiciens ... quand ces derniers voudraient donner un retentissement à ...

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Cinci » lun. 01 juin 2020, 2:02

Cmoi,

Un mot ....
Cmoi :

La question du "hors de l'Eglise pas de salut" n'a pas été abordée mais elle est selon moi sous-jacente au fait que vous ayez fait cette entorse. Il faudrait la traiter plus tard plus en détail. Pour d'autres religions ce pourra être la question de la métempsychose, qui a pour conséquence les castes, les vaches sacrées, etc. : vous voyez que le religieux peut sérieusement "polluer" alors la vie civile.
Si l'enseignement de l'église est vrai il ne peut pas polluer la vie civile. Cela ne ferait aucun sens. La vérité vous rendra libre. Il se peut toujours qu'une vérité désagréable à entendre pour celui-là qui aimerait mieux ne pas la voir serait tenu aussi pour un polluant dans son environnement. Oui, mais ça ... le problème alors n'est pas dans la vérité elle-même, comme il se trouve plutôt dans les représentations que l'autre se fait.

cmoi
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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » lun. 01 juin 2020, 6:11

Bonjour Cinci et à tous,
Cinci a écrit :
lun. 01 juin 2020, 2:02
Si l'enseignement de l'église est vrai il ne peut pas polluer la vie civile. Cela ne ferait aucun sens. La vérité vous rendra libre. Il se peut toujours qu'une vérité désagréable à entendre pour celui-là qui aimerait mieux ne pas la voir serait tenu aussi pour un polluant dans son environnement. Oui, mais ça ... le problème alors n'est pas dans la vérité elle-même, comme il se trouve plutôt dans les représentations que l'autre se fait.
C’est tout à fait exact et je suis entièrement d’accord avec vous ; je serais sinon un traître ! D’ailleurs j’ai pris pour exemple une autre religion. Pour prendre en exemple une religion chrétienne, il faudrait que celle-ci se soit alors détournée de son idéal par le péché, ce qui est hélas trop souvent arrivé (abus de pouvoir, usage indu de la violence, corruption, favoritisme, attachement exagéré aux biens de ce monde, etc.) et qui conduit à se méfier de certains idéaux qui une fois atteints favorisent un certain relâchement des moeurs et aboutissent au contraire du but espéré, à cause de la faiblesse de notre nature, et du coup cela discrédite ceux qui le portent : nous.
Il y a pour le résumer, deux grandes conceptions chrétiennes sur le sujet. L’une a été fortement théorisée et par des théologiens « officiels », l’autre a cru pouvoir s’en passer tant elle s’abouchait directement aux évangiles. Elle a commencé à le faire comme officiellement par certains mouvements chrétiens anarchistes, comme Tolstoï en est un fier précurseur (en France Romain Rolland). Gandhi n’a jamais caché que son mouvement pacifiste était inspiré de Tolstoï et notamment de sa lecture du petit livre « le royaume des cieux est en vous ». Martin Luther King en a repris le flambeau en Amérique. Ce courant a donc dépassé les frontières du christianisme (il rejoint aussi le bouddhisme), mais y trouve bien sa source.
Ce qui n’est pas le cas de l’autre. Quand je lis Suliko écrire :
Suliko a écrit :
dim. 31 mai 2020, 23:12
Cet enseignement se retrouve à vrai dire déjà dans la Bible, puisque le peuple élu n'a pas le droit d'apostasier, ce péché étant puni de la peine de mort. De plus, l'empire romain était adepte de la tolérance religieuse : chacun pouvait adopter le culte qui lui plaisait, la seule contrainte étant de rendre à César les honneurs qu'il croyait lui être dû. On ne peut pas pourtant dire que les chrétiens de ces temps de persécutions étaient très attirés par ce type de gouvernance... Si cela avait été le cas, ils auraient décidé d'accorder aux païens une pleine liberté de religion lorsque l'empire est devenu officiellement chrétien. Or, ce n'est pas ce qui s'est passé : le paganisme a été plus ou moins fortement réprimé dès que le christianisme s'est révélé assez fort pour s'imposer.
Je ne peux m’empêcher de me dire que les chrétiens, au lieu de continuer à vivre des évangiles, ont donc imité un ancien potentat païen, et précisément sur le seul point qui le leur avait rendu odieux er persécuteur (ce qui psychologiquement et humainement (mais non surnaturellement, spirituellement, par la morale du pardon) s’explique fort bien). Car s’il n’y avait pas eu cette exigence de culte rendu à César, il n’y aurait pas eu de persécution ce qui donne à celle-ci un petit côté fort caricatural qu’on retrouve dans bien d’autres épisodes de persécution. Ainsi au Japon. Un grand film l’a illustré il y a peu, mais on peut lire aussi l’histoire des martyrs de Tsuwano par Takashi Nagai (le Gandhi japonais, un chrétien qui devrait être canonisé) et qui correspond à la dernière vague des persécutions. Si on caricature à peine, les bourreaux eux-mêmes suppliaient les chrétiens ne serait-ce que de « faire semblant » pour ne plus avoir à leur faire du mal !

Le christianisme a fait peur à certains puissants qui y virent un risque pour leur pouvoir (avec ou sans exigence de culte), cela n’est plus vrai aujourd’hui que si le puissant a des choses à se reprocher, chacun le sait, chrétien ou non, et les médias aussi. Voir Solidarnosc. Donc le risque de persécution a perdu ce qui nous donnait le droit de vouloir maintenir une « pression » par la force ou la détention d’un pouvoir politique à connotation ouvertement religieuse (si tout un peuple est chrétien, il n’y a pas besoin de cette connotation, elle est implicite et il est inutile de la théoriser, elle va de soi, participe de l’élan social et on ne le fait que s‘il y a des lacunes, donc eu péché).

Le rôle politique du chrétien est de renverser les systèmes abusifs, dictatures ou pas. De défendre les opprimés. Cela peut se faire en s‘emparant du pouvoir, mais quant à le conserver, cela devrait être ensuite confié à des forces séculières impartiales et indépendantes ne répondant pas aux serviteurs du culte (leurs actes relèvent de leur foi et de leur conscience droite, en ce sens de l’église, mais non de sa hiérarchie ni de ses clercs, ce qui arrive quasiment toujours dans l’autre courant ! en dépit de ses belles promesses théoriques…) et n’ayant aucun compte à leur rendre - ils ne sont pas Dieu ni infaillibles sur ce sujet. Autrement dit Etat et Eglise doivent être séparés, et ne se réunir qu’en Dieu : cette entente est soumise à délibération et suppose examen pour avoir lieu, elle ne va pas de soi sinon en Lui, ce serait sinon priver les chefs civils de leur responsabilité et donner un pouvoir non religieux aux potentats religieux – le droit de se servir de l’excommunication comme chantage politique.

D'ailleurs cette théorie contraire ne s’est mise en place que lorsque l’emprise sur les chefs civils était suffisamment forte pour que ce chantage agisse… Ils s’en seraient bien gardés sans quoi, ce ne sont pas des « martyrs » dans l’âme à ce sujet, plutôt le contraire : prêts à faire des concessions pour être protégés quand ils ont besoin pour cela de la force.

S’il m’arrive de défendre ma positon par des propos « limite » qui ne seraient sinon pas les miens, c’est en raison de l’excès opposé et bien masqué de ces théories qui prennent faussement les habits et l’autorité de l’agneau.
Si l’orthodoxe Nebularis n’a cessé de se servir ici de cet abus temporel des papes pour critiquer la mission surnaturelle de celui-ci, comme d’une décrédibilisation, c’est bien parce qu’il y a eu abus.

Pendant 500 ans 48 papes se sont succédé, qui ont beaucoup connu de persécutions, mais tous les illustres pères et nombreux docteurs de l’église sur cette période (dans sa « cité de Dieu », titre prédestiné à en traiter le sujet, Augustin lui-même n’en souffle mot…) ont préféré combattre les hérésies et schismes, plutôt que de s’inspirer du livre d’Esther, du gérant astucieux, et d’imiter la démarche de Mardochée pour écarter ces persécutions.

Je préfère une église dont le pape est obligé de vivre en semi-clandestinité pour sauver sa tête, qu’une où il ne se déplace que sur un trône avec de nombreux porteurs, et ne se lève devant personne pour faire sentir son « pouvoir ». Quelle piètre application de la morale évangélique ! -se faire le dernier, etc. Aucune « cérémonie » de lavement des pieds n’y portera symboliquement remède…

S’il y a bien un sujet (délicat pour les catéchistes de tous poils) sur lequel l’accomplissement par le nouveau de la morale de l’ancien testament, a abouti à préconiser une attitude diamétralement opposée, c’est bien celui-là. L’usage de la force (donc du meurtre, soyons clair) pour des raisons religieuses excluant la légitime défense, car c’est bien cela que prônent les exemples donnés par Suliko, est une abomination ! On voit à regret qu’elle n’a pas vécu les horreurs d’une guerre (j’ose lui pardonner ainsi, car sans quoi… « ils ne savent pas ce qu’ils font » ne s’y appliquerait même pas…) ! Il ne s’agit ni plus ni moins que de fatwas chrétiennes (le qualificatif étant abusif comme pour un effet de style)…
La façon dont en général le catéchiste s’en sort, c’est en expliquant que c’était nécessaire pour donner au peuple élu une viabilité qui lui permette de remplir sa mission.

Si le Dieu de l’AT a aussi déclaré qu’il n’avait que faire de nos holocaustes (et comme on le comprend en se mettant à sa place !) ce n’est pas pour ensuite donner aux conquêtes par les armes le but d’abolir les faux cultes, et de prôner le vrai !
Les armes de la police et des tribunaux ne sont rien d‘autre alors que le prolongement de celles utilisées dans une guerre… Et elles portent atteinte à la liberté de conscience. Elles ne « convertissent » rien. Elles exhaussent l’hypocrisie que le Christ a tant conspué.

Si Léon XVIII a si bien glosé sur le sujet, c’est que son pontificat vivait la question Romaine comme un aiguillon, il n’était pas même le chef temporel sur son sol, or il le fit de façon très théorique. Tout comme dans sa façon d’aborder la question sociale dans « rerum novarum ». Quelques conclaves et encycliques plus tard sur cette question, et le pape reconnaitra en 1945 que l’Eglise avait « perdu » le monde ouvrier - qui pourtant était en quelque sorte le cœur de sa cible d’apostolat !
On ne pouvait le gagner en se rangeant du côté du pouvoir et des riches, en tenant des propos hautement intellectuels auxquels il ne comprenait rien et le traitant en se bouchant le nez ! Mais lui portait tout le poids du labeur du jour…
Dieu sachant tout utiliser, ces encycliques sont de vrais trésors et utiles aujourd’hui, de même que les théories sur la politique décrivent bien un idéal, celui que connaîtra par exemple l’Eglise après la fin des temps, mais qui suppose en attendant que nous ayons su donner la priorité dans notre attitude à la paix, une paix qui ne doit rien à la fureur des armes, des inquisitions, des autodafés, etc. Ni donc à la mainmise sur un pouvoir séculier.

Une autre façon de la préserver, c’est de tenter de réunir les chrétiens séparés, car en chef d’états ils finissent par se guerroyer pour des questions qui ne sont plus que religieuses : un comble !

Altior, au vu du restant à traiter, je répondrai succinctement à votre question : ne connaissez-vous pas déjà par prétérition la réponse ?
Bien des mystiques furent "inquiétés" par l'inquisition, dont la vie était pour la plupart exemplaire en tous points et fort vertueuse, parce qu'on leur cherchait des noises sur une doctrine qui utilisait un style ou des mots qui pour être inhabituels ne représentaient aucun danger à l'égard des dogmes.

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Gaudens » lun. 01 juin 2020, 12:06

Bonjour Suliko,Cinci,lLtior,Cmoi ...,

J'écrivais plus haut qu'on ne revient jamais exactement en arrière, ce que montre bien l'analogie très imparfaite développée par Altior:
Le paganismme romain n'était pas a-religieux ni anti-religieux au contraire il voulait capitaliser toutes les religions à la fois ,sous le commun culte rendu obligatoirement à l'empereur avant que les chrétiens s'en voient exempter à partir de 312 . La période de liberté religieuse que nous connaissons aujourd'hui est de plus en plus a -religieuse , plus encore que souvent anti-religieuse.Ce n'est donc pas exactement un retour à l'arrière mais un nouveau détour du chemin. Que sera demain ?

Inétéressante,votre description de la perception du catholicisme et des catholiques par le cinéma hollywoodien, Cinci ( qui pourrait être l'embryon d'un master d'une école de cinéma un de ces jours...). Etant peu cinéphile, je fais entièrement confiance à votre description. Peut-être y avait-il un petit groupe actif et créatif de philo-catholiques à Hollywwod , en effet mais cela ne fait pas tout le monde médiiatique (la presse écrite devait donner un écho bien différent ?) et encore moins la société entière et surtout pas le monde politique (ce que semble admettre votre phrase de conclusion inachevée). >Au moment de l'élection de Kennedy , la suspicion contre les catholiques était bien repérée par la presse d'alors en Europe.


Enfin Suliko,vous semblez en être réduite à vous prévaloir des préceptes les plus violents de l'ancienne loi (la condamnation à mort pour apostasie).Je vous ferais remarquer:

-que cette prescription n'empêchait pas un grand nombre d'apostasie au fil de l'histoire du peuple élu (adoration des baals, des divinités gréco-romaines, de l'empereur romain ,etc... contre lesquelles s'élevaient régulièrement les prophètes,peut-être sans succès !

-que vous risquez de faire frémir d'horreur les jeunes qui découvrent la foi chrétienne sur ce fil (Jeune Foi et autres...) dont j'espère qu'ils ne liront pas ce fil de discussion. Quelle image leur donnez-vous de la foi chrétienne à l'heure où la presciption coranique de la mise à mort des apostats révulse avec raison l'humanité entière. Pardon d'être un peu personnel mais je me demande dans quel milieu vous vivez , intellectuellement et concrètement pour penser que ce type de justification serait de nature à entrainer l'adhésion d'esprit et de coeur de qui que ce soit aujourd'hui.L'intelligence de l'esprit n'est pas tout comme Cmoi vous l' a fait remarquer ... A contrario je suis tombé hier sur un numéro de Famillle Chrétienne de décembre 2019 évoquant la n-ième crise libanaise de cette année là (hélas,pas résolue) ; Mgr Gollnisch ,directeur de l'Oeuvre d'Orient y écrit ,entre autres :"Il serait incompréhensible que la liberté religieuse soit remise en question dans le seul pays qui la garantit! Avant de la remettre en cause (Note perso : par une éventuelle remise en cause du confessionnalisme dans ce pays) je souhaiterais que les autres pays de la région progressent vers une pleine liberté religieuse". Encore une fois,n'allons pas refuser (très théoriquement aujourd'hui ,certes) une liberté que nous revendiquons pour nous même,un discours totalement inacceptable pour les neuf dixième de l'humanité .

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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » lun. 01 juin 2020, 15:59

Altior,

Je me donne le temps de vous répondre un peu plus, sur la parenthèse que vous aviez relevé et qui vous a choqué.
Concernant Jeanne d'Arc, son procès ne pourrait-il être vu comme une pertinente illustration des dangers à ce qu'il y ai collusion entre les 2 pouvoirs? !!

Concernant celle qui est une de mes mystiques préférées (elle vaut largement Jean de la Croix, les 2 Thérèse, etc ) connaissez-vous son livre ou êtes-vous seulement allé vous "documenter" sur internet ?
Il est un des tout premiers chefs-d'oeuvres de la mystique autant que de la littérature du moyen-âge - et en plus il est écrit en français !
Dans un français savoureux, original, plein d'audaces incroyables, et à une époque où la femme, à moins d'être une aristocrate d'un certain rang, c'était presque pas une personne...
Il a depuis marqué profondément des tas d'âmes amoureuses du Christ, dont maître Eckhart (qui fut presque condamné pour cela, ce qui revient plus et avec le recul, à la réhabiliter de ce soutien) et jusqu'à Simone Weil qui le lit vers la fin de sa vie et en fut éblouie.
Après avoir été une première fois tancée, elle le donna pour examen à 3 de plus réputés théologiens de son époque, qui n'y virent aucune hérésie, mais lui recommandèrent la prudence car elle pourrait être "mal comprise".
Elle continua à le prêcher alors qu'elle en avait été interdite, pendant 10 ans, au risque de sa vie, mais le moment venu du procès (qui ne tire pas son explication de cette rébellion, car on l'avait choisie juste pour bouc-émissaire), elle fit comme Jésus : elle refusa de se défendre et en donna juste la belle raison.
Ceux qui l'accusaient et qui avaient "chargé la barque" en prévision des difficultés à soutenir leur cause (triés sur le volet pour être crédibles vu ses soutiens) en furent pour leur frais et, plutôt que de s'adoucir, car ils n'envisageaient pas sérieusement de la brûler, se vexèrent et la condamnèrent avec hauteur mais sans panache.
Aucun des hommes glorieux et férus en théologie qui l'appréciaient n'a bougé son Saint Esprit pour la défendre. Des reines l'ont louée, et tant d'autres...
Elle est à mes yeux une authentique martyre et si je l'ai citée, elle, ce n'est pas pour rien. (Car sinon il y aurait débat possible si je citais par exemple des cathares, car de toute façon les motifs ne justifiaient pas un tel châtiment extrême. Puisque ses adversaires ont voulu en faire un exemple, elle en est bien devenu un et qui les blâme).
Parce qu'en dehors de cette courte phrase que vous releviez , mes contributions vont bien plus loin que la polémique que vous avez soulevée comme pour vous empêcher de les prendre au sérieux.

Vous savez maintenant un peu mieux mes références (outre Jean-Paul II pour la repentance). Mais c'est que simplement, comme tout un chacun, je me suis senti en les découvrant plus attiré par elles que par d'autres, comme quoi elles représentaient mieux à mes yeux ma foi et que je sentais entre elles et moi une affinité.
En l'occurence, il ne s'agit pas de "grande théologie" abstraite, mais d'une parole de feu qui se prolonge depuis Jésus et qui surtout a fait la preuve de son efficacité. Car il faudrait citer aussi Mandela (maltraité par un état très chrétien mais pratiquant encore le racisme) et, je le crois, la responsable actuelle de la Birmanie.
En tant qu'ancien orthodoxe, vous connaissez sûrement ces 2 princes Russes canonisés pour avoir refusé de se défendre et sachant qu'ils allaient être assassinés : ils sont du lot !
Du même ordre : Saint Louis, qui ne tirait pas profit de ses victoire en écrasant ses vaincus.
Car là où les bouddhistes supportent par compassion et se taisent, c'est le christianisme qui apprend à se défendre pacifiquement et résister au nom de la vérité - et donc à faire preuve de magnificence et de libéralité quand on est en situation de force.
Comme le fit cette mystique, en accord complet avec son oeuvre. N'est -elle pas une sorte de fol-en-Christ ? Lesquels forment le plus pur fleuron des saint en orthodoxie, mais avec lesquels le christianisme catholique donc romain a toujours eu du mal à composer (Saint François excepté) ?
On parle de canoniser bientôt un autre de mes aimés : Charles de Foucauld.
Je les préfère de beaucoup à un saint (?) Cyrille d'Alexandrie...
.

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Suliko » lun. 01 juin 2020, 16:25

Bonjour,
Enfin Suliko,vous semblez en être réduite à vous prévaloir des préceptes les plus violents de l'ancienne loi (la condamnation à mort pour apostasie).Je vous ferais remarquer:
Non. Je répondais simplement à votre affirmation selon laquelle avant l'édit de Théodose, on ne trouve nulle trace de la doctrine traditionnelle sur la question de la liberté religieuse. C'est faux, puisque la Bible témoigne du contraire. C'est tout. Inutile de surinterpréter mes propos.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Relations Église-État

Message non lu par cmoi » lun. 01 juin 2020, 20:29

Suliko a écrit :
lun. 01 juin 2020, 16:25
Bonjour,
Enfin Suliko,vous semblez en être réduite à vous prévaloir des préceptes les plus violents de l'ancienne loi (la condamnation à mort pour apostasie).Je vous ferais remarquer:
Non. Je répondais simplement à votre affirmation selon laquelle avant l'édit de Théodose, on ne trouve nulle trace de la doctrine traditionnelle sur la question de la liberté religieuse. C'est faux, puisque la Bible témoigne du contraire. C'est tout. Inutile de surinterpréter mes propos.
Mais enfin voyons ce n’est pas mieux de surinterpréter la bible ! Car le passage que vous citez, du moins sa signification, est à reprendre comme une exception au regard de la parole du Christ (qui savait de quoi il parlait, je pense que vous en conviendrez) en Luc 6 :35, qui mentionne bien les apostats et qui fait penser à d’autres passages où « Dieu fait lever son soleil sur les bons comme sur les méchants ».
J’expliquais que « c’était nécessaire pour donner au peuple élu une viabilité qui lui permette de remplir sa mission » mais il y a autre chose aussi, c’est le côté allégorique quand il s’agit du peuple élu. Car il représente chacun d’entre nous, notre âme, et illustre en tant que tel notre dialogue avec Dieu. La sanction représente la perte de la grâce. Il serait sinon possible de citer bien d’autres passages de la bible qui traitent de la question d’une toute autre manière.
Gaudens a raison, en citant ce passage mais en omettant ses sens allégoriques, vous prônez son sens littéral.
Ne vous arriverait-il pas parfois d’imiter une certaine église, du moins en certaines de ses parties enfumées où l’encens ne prédomine pas, et qui, quand elle a dit une bêtise, arrive à lui trouver ensuite un sens juste pour ne pas avoir à se déjuger : elle croit cela grandement nécessaire à sa prétention de détenir la vérité ! Or si le Christ peut se permettre de parler avec autorité, c’est qu’il n’a nul besoin de s’en donner l’usage. Pour nous autres il serait plus probant de faire excuse et reconnaître notre erreur qui peut n’être que de distraction (Satan nous trompe !) Je ne crois pas vous avoir jamais vu le faire, mais ne vous forcez pas...
Derrière l’orgueil de l’église, peut se cacher la nécessité de se mettre au service d’une intégrité nécessaire à préserver, et dont on a une fausse idée.
Pourquoi faut-il que toute discussion devienne polémique ? Est-il nécessaire de discuter ainsi, serait-on en désaccord ? Avez-vous entendu parler de ces formations à la communication non violente ? Peut-être faudrait-il qu’elles soient assurées par des traditionnalistes pour que vous leur accordiez crédit…
D’ailleurs je préfère ceux qui en appliquent les règles sans avoir eu besoin de les apprendre, j’ai toujours en cela une sainte méfiance à l’égard des références, diplômes etc. qui ne servent qu’aux moins doués mais qui servent quand même car tout le monde a des lacunes et peut s’améliorer.
Est-il nécessaire de sans arrêt donner ses sources ? On peut avoir une opinion et chercher et trouver comment l’appuyer par l’écriture et la tradition, ou lire celles-ci et chercher comment les comprendre au mieux et s’y plier. La seconde méthode est plus longue mais plus fiable, elle ne « morcelle pas ».

Sur un sujet comme celui-ci, le bon sens chrétien serait suffisant pour l’aborder, quitte à ce que chacun s’inspire de ce qu’il connaît de ces deux supports mais non pour s’en prévaloir. Sinon la discussion est fermée. Et c’est lassant. Plus personne ne voudra vous contredire et vous croirez avoir convaincu ou du moins « gagné ». Ce n’est pas ce que pour ma part je recherche…
A l’évidence, je ne vais pas m’adresser à la bonne personne, mais tout de même, réfléchissez-y : vous n’acquerrerez jamais la vérité qui rend libre si vous considérez que celle du passé à laquelle vous êtes attachée comme un fil à la patte, a besoin de vous pour être défendue.
La vérité a besoin de se détacher de nous, comme un petit œuf, pour grandir et s’affirmer.

Le silence des saints est parfois plus éloquent que leurs paroles ou écrits. Ainsi, dans la cité de Dieu d’Augustin, il se dégage en filigrane une ligne de force qui dirait quelque chose comme : les chefs terrestres ici-bas s’occupent de choses périssables qui ne méritent pas qu’on s’y intéresse (et qui souvent nous pervertissent) au détriment de ce qui est impérissable,. Nous, chefs spirituels annonçons et sommes les prophètes d’un autre royaume et nous nous privons pour celui qui nous y donnera affectation et affection, de ce qu’ici nous pourrions déjà prendre d’équivalent. Nous fléchirons (il ne s’agit pas d’adoration !) devant ceux qui y règnent, s’ils ne veulent pas reconnaître cette fin. Mais nous les aurons prévenus des suites… Les autres nous les bénirons. Notre rôle s’arrête là.

Comment savoir, quand ainsi se dessine plusieurs courants contradictoires dans la tradition, lequel est le bon ?
Votre réponse est toujours la même : elle a déjà été dite, la vérité. Mais en cela vous ne pensez pas au Christ ! Si vous le faisiez, vous sauriez que ce n’est pas un dernier mot, de dire cela…
La vérité, vous ne pourrez l’attraper si vous en restez à une vision comme celle-là. Car la vérité est encore à venir… Et que le Christ est la vérité.
Chercheriez-vous à vous en passer ? ( - Là, oui, je suis polémique et je m‘en excuse, c’était juste pour vous montrer la différence… pas agréable à entendre, n’est-ce pas ?)
Réfléchissez : si elle a déjà été dite et que cela ne dépende pas du Christ, alors il y a un moment où ce n’était pas le cas, et qui vous dit que ce moment est passé ?
S’il y a encore une histoire, elle doit la comprendre, le fera-t-elle si elle en oublie quelque chose ?
Je me doute que vous cherchez à accumuler les connaissances pour éviter cela, mais ce n’est pas la bonne voie ; même si elle est certes limitée, une partie vous en restera toujours obscure.
Il faut donc obéir à un autre critère…
Bon, mais je vais m’arrêter là, car j’ai l’air de donner une leçon, et franchement cela ne me plaît pas…

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