Aldebaran,
Vous avez beau quérir un extrait de Thomas d'Aquin mais que votre extrait va juste pouvoir vous servir à illustrer une chose : le docteur angélique veut appuyer sur le fait qu'un miracle religieux chrétien tire sa source en Dieu.
Et alors personne ne va dire le contraire entre nous. Tout comme dans le Catéchisme de l'Église : Thomas tient à détromper celui-là qui croirait et professerait qu'une créature humaine (ou angélique peu importe) pourrait produire par elle-même et par elle seule (sans Dieu) un authentique miracle.
Mais ...
Thomas d'Aquin ne s'attache pas à nier le fait qu'un Apôtre aurait pu être l'instrument, comme l'agent secondaire ou le lieu de la manifestation d'un vrai miracle évangélique, d'un vrai miracle religieux aussi vrai que celui réalisé par Jésus en Galilée avec un infirme.
Pierre est lui aussi capable de faire ce que Jésus a fait. Avec la grâce, Dieu présent et bien sûr désireux ... alors Pierre, alors Paul ...
Il en va des miracles accomplis par les apôtres comme des miracles accomplis par le Christ; ce sont des signes attestant l'authenticité de leur mission de prédicateurs de l'Évangile (Mc 16,20). "Le Seigneur rendait témoignage à la prédication de sa grâce en opérant signes et prodiges par leurs mains." Dans les lettres de Paul, le miracle accrédite l'apôtre et sa parole. "Les traits de l'apôtre, vous les avez vus se réaliser parmi vous : parfaite constance, signes, prodiges et miracles" ( 2 Co 12,12)
Dans le même sens, l'Épitre aux Hébreux parle du salut qui nous fut annoncé d,abord par le Seigneur et qui nous a été confirmé par ceux qui l'ont entendu, Dieu y joignant son témoignage par des signes et des prodiges, et par les miracles divers et des répartitions de l'Esprit selon sa volonté" (Hé 2,3-4)
source : René Latourelle s.j, Du prodige au miracle, p. 160 - ... a d'abord enseigné la théologie fondamentale ... durant trente ans à l'Université Grégorienne de Rome où il a été doyen de la Faculté de théologie pendant douze ans.
Le professeur Latourelle n'aurait pas eu de "scrupules" à évoquer des miracles opérés par les mains des apôtres. J'oserais croire que le professeur de l'Université Grégorienne à Rome eût été un aussi bon connaisseur de Thomas d'Aquin que vous. J'imaginerais mal qu'il aurait pu colporter à ce sujet des idées hétérodoxes à Rome, pendant trente ans et à titre de doyen.
Il n'y a rien d'hétérodoxe pour la foi catholique à dire que les apôtres peuvent opérer des miracles (on le voit dans le NT !), comme il n'y a rien d'hétérodoxe à penser et dire que le Père Adam aurait pu lui aussi opérer quelque miracle, dans sa condition de justice originelle, lui-même marchant alors avec Dieu. Il n'y a pas un seul évêque de Rome qui pourrait objecter doctrinalement un mot contre ça.
Il y a une énorme différence entre le Christ et les Apôtres. Il n'en change rien que sur le plan du miracle, ces derniers peuvent être l'occasion de cette sorte de phénomène joliment dépeint par Maurice Blondel ... divine philanthropie dont parlait saint Paul, qui s'harmonisant dans son langage et ses condescendances, fait transparaître par des signes anormaux son anormale bonté (M. Blondel, art. "miracle" dans A. Lalande, Vocabulaire philosophique, p. 631)
Ou comme Latourelle le dit s'inspirant de Teilhard de Chardin : " ... c'est une oeuvre de la toute-puissance de Dieu, "contraire à la nature" dans son aspect le plus frappant de prodige, mais en réalité supérieur à la nature, la transcendant, comme oeuvre de la Cause première et comme signe de la transformation gratuite de l'homme et de l'univers par Dieu qui sauve et renouvelle tout, non seulement en apparence, mais en vérité, non seulement pour les hommes et les femmes d'hier, mais pour ceux et celles d'aujourd'hui et de tous les temps."