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par Xavi » mer. 26 sept. 2018, 10:11
Bonjour Carolus,
Il est exact que Jékonias est parfois nommé Joiakin. Ceci répond à la question d’Antoine75. Mais, rien ne permet pour autant de confondre ce Joaikin avec son père Joiakim.
Je ne comprends pas en quoi votre raisonnement vous permettrait d’attribuer le nom de Jékonias à son père du seul fait exact que la déportation a effectivement eu lieu du temps de Jékonias.
Au contraire, le père de Jékonias était déjà mort au moment de l’exil et ce n’est que le fils Jékonias qui peut être situé à l’époque de l’exil.
Il me semble que le nombre des générations (3 x 14) indiqué par le premier évangile reste un point important car il est clair que l’évangéliste n’a pas commis d’erreur et que, s’il y a une omission, c’est qu’elle a du sens.
Je persiste à constater que vous ne pouvez pas calculer les trois listes de 14 générations avec le même critère sans constater une génération absente qui me semble être celle du père de Marie qui pourrait avoir été omis parce que les généalogies juives sont exclusivement masculines.
Mais, vous avez bien fait d’attirer mon attention sur Jékonias car la réflexion sur ce pont permet d’avancer de manière importante.
Pour rappel, dans la première liste depuis Abraham jusqu’à David, il y a bien 14 générations, y compris celle de David qui engendre Salomon.
Dans la seconde liste depuis David jusqu’à la déportation, il y a une omission claire de trois générations bien connues. N’est-ce pas une leçon d’interprétation qui nous invite à être attentif à la possibilité d’autres omissions dans la même généalogie, voire plus précisément à trois autres omissions ?
La seconde liste ne mentionne que 13 générations de Salomon qui engendre Roboam à Josias qui engendre Jékonias, alors qu’il y en a bien une quatorzième omise dès lors que Josias n’est pas le père mais le grand-père de Jékonias. Pourquoi omettre Joakim en contradiction avec le nombre expressément indiqué ? N’est-ce pas pour annoncer une autre omission similaire à la fin de la liste suivante de « 14 » générations ?
La troisième liste, en effet, ne comprend aussi que 13 générations, et encore la dernière dont naquit le Christ n’est qu’en lien indirect, par Marie, épouse de Joseph, avec celles qui précèdent. L’idée subsiste ici qu’en terminant par l’enfantement de Jésus par Marie avec un mot grec semblable (même racine "gen") à celui utilisé pour tous les engendrements qui précèdent, l’évangéliste a discrètement omis le lien entre Jacob et Marie : Joachim, fils de Jacob et père de Marie, qui peut assurer la descendance masculine directe légale de David à Jésus-Christ né sans père humain.
Ainsi, outre la génération omise par la fin de la seconde liste de 14 générations, celle de Joakim, fils de Josias, qui engendre Jékonias, et en écho aux trois premières omissions de cette seconde liste, la fin de la troisième liste a pu omettre deux autres générations, celle de Jacob qui engendre Joachim, le père de Marie, et celle de Joachim qui engendre Marie.
N’est-ce pas ce que peut suggérer l’omission inexpliquée de la seconde liste ?
Les anomalies mathématiques du compte de 3 x 14 générations, que nous présente le premier évangile et l’omission d’une génération à la fin de la seconde liste, nous orientent vers une recherche de la génération manquante à la fin de la troisième liste qui aboutit à Jacob qui engendre Joseph qui n’est pas celui qui engendre le Christ mais seulement l’époux de Marie dont naît le Christ. Mais, pour correspondre aux trois générations omises de la seconde liste, il y a, outre Joakim omis à la fin de la seconde liste, un autre Joachim qui va être omis à la fin de la troisième liste. Est-ce par hasard que le nom omis de la seconde liste c’est « Joakim » ? Le nom qui va être omis dans la troisième liste, ne serait-il pas aussi « Joachim » ?
La construction de la généalogie du premier évangile en 3 x 14 générations, alors qu’on sait qu’il y en a davantage, n’a-t-elle pas pour finalité d’attirer notre attention sur les omissions et ces deux Joachim ne seraient-ils pas essentiels pour la proclamation de l’évangile ?
Le premier Joachim engendre Jékonias, et l’autre Marie, l’immaculée conception, pleine de grâces
Le premier Joakim est un maudit « traîné et jeté loin des portes de Jérusalem » (Jér. 22, 19) qui déclare « je n’écouterai pas » (Jér. 22, 21). Il va enfanter Jékonias, le plus maudit des descendants de David dont il est dit « je te jetterai, toi et ta mère qui t’a enfanté, sur une autre terre où vous n’êtes pas nés ; et là, vous mourrez » (Jér 22, 26) et « Ainsi parle le Seigneur : Au sujet de cet homme, inscrivez : « Sans postérité ; individu qui n’a pas réussi dans sa vie » car aucun de ses descendants ne réussira à siéger sur le trône de David et à dominer encore en Juda. » (Jér 22, 30).
Le second Joachim est un béni. Il enfante la plus bénie de toutes les femmes.
Jékonias, enfanté par Joakim, n’est-il pas l’exact contraire de la Vierge Marie, enfantée par un autre Joachim, la malédiction contraire à la bénédiction de la conception immaculée de celle qui est pleine de grâces ?
Si, comme vous Carolus, beaucoup de commentateurs s’accrochent à considérer la généalogie de St Matthieu comme la généalogie légale de Joseph et du Christ (et non sa généalogie réelle par Marie), malgré le texte contraire de Luc qui présente clairement cette généalogie légale de Joseph et malgré tous les autres arguments en sens contraire qui ont été présentés dans ce fil de discussion, n’est-ce pas, en réalité, à cause de ce Jékonias, parce que le prophète Jérémie l’a maudit et que beaucoup en déduisent qu’il ne peut pas être réellement l’ancêtre du Christ Jésus ?
La malédiction de Jérémie privant à jamais les descendants de Jékonias du trône de David est probablement ce qui explique la volonté de voir plutôt dans la généalogie du premier évangile une généalogie légale de Joseph, qui n’est pas le père réel de Jésus, plutôt qu’une généalogie de Jésus par Marie. De là, il ne resterait plus que la possibilité de rattacher la généalogie de St Luc à Marie, mais les messages qui précèdent ont relevé tout ce qui contredit cette approche.
L’interprétation de la malédiction de Jékonias est cependant bien délicate et touche le cœur de l’Évangile. Ce qui reste certain, c’est que le premier évangile fait du Christ un descendant direct de ce Jékonias, contrairement à la prophétie de Jérémie. Mais, n’est-il pas celui qui rachète toute malédiction ?
La première liste de 14 générations dans la généalogie de St Matthieu s’arrête déjà sur un premier péché grave d’adultère et de meurtre dont pourtant est engendré le Christ : le roi David engendre Salomon de la femme d’Urie (Mt 1, 6).
La seconde liste de 14 générations s’arrête sur un autre grand pécheur : Jékonias.
Au lieu de fuir devant cette plongée des racines du Christ dans le péché et la malédiction, au lieu de refuser d’accepter la vérité de cette généalogie par laquelle commence l’évangile, ne faut-il pas convertir notre propre regard ?
Le Christ ne vient-il pas porter et racheter « tous » les péchés du monde et de l’histoire ?
Son sacrifice serait-il inefficace pour certains péchés ? Ne peut-il délivrer l’humanité de « toute » malédiction ?
Croyons-nous que le Christ n’ait pas racheté par sa croix la malédiction de Jékonias ?
Bien au contraire, l’évangile de Matthieu nous introduit d’emblée dans la bonne nouvelle du Christ : là où le péché a abondé, sa grâce a surabondé.
La prophétie contre Jékonias s’est réalisée dans l’histoire en ce sens que ses descendants ont en effet été privés du trône de David et n’ont jamais régné sur le royaume terrestre d’Israël, mais la Bonne Nouvelle, c’est que toute malédiction cesse dans et par le Christ.
En reconnaissant que le Christ, Fils de David, qui siégera à jamais sur le trône de David, est un descendant du maudit Jékonias, c’est déjà la bonne nouvelle de l’Évangile que Matthieu proclame.
Plus la réflexion avance, plus il me paraît manifeste que la généalogie de Jésus-Christ du premier évangile est bien la généalogie légale autant que naturelle du Christ par Marie.