Questions sur "l'ange gardien"

« Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ ! » (1Tm 3.16)
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Cinci
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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Cinci » dim. 25 févr. 2018, 0:43

Dans l'introduction de Charles cardinal Journet :
"Et il lui dit : En vérité, en vérité, je vous le dis, vous verrez le ciel ouvert et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l'homme" (Jean 1,51) Les commentaires de nos exégètes sont ici bien courts. Saint Augustin a beaucoup réfléchi sur le sens mystérieux de ces paroles. Elles sont dites immédiatement à Nathanaël, en qui Jésus a reconnu "un vrai israélite", un homme sans duplicité (1,47). Il faut le coeur de Jacob, de celui que l'ange nomme Israël (Gen 32,29), pour comprendre le songe de Bethel (28, 10-19); il faut un coeur pur pour voir les anges.

Mais, comme tant d'autres paroles de Jésus, celles-ci s'adressent, par-delà les auditeurs contemporains, à toute la suite des temps. Et voici la question d'Augustin : Comment les anges de Dieu peuvent-ils monter et descendre au-dessus du Fils de l'homme ? Il règne maintenant en haut dans le ciel de sa gloire, à la droite du Père. Comment peut-il être en même temps en bas, pour que les anges descendent au-dessus de lui ? Seul Jésus peut répondre à pareille question. Il l'a fait, dit saint Augustin, sur le chemin de Damas. C'est d'une lumière venue du ciel que part la voix :"Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? " (Actes 9,4). Le même Jésus est à la fois en haut et en bas. Il est en haut dans le ciel pour illuminer et interpeller. Et il est en bas sur la terre pour être persécuté, dans son Église qui est son Corps (Eph 1,23).

Charles Journet

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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Cinci » dim. 25 févr. 2018, 1:42

Témoignages et confidences

Le pape Pie XI confia à un groupe de visiteurs que, au commencement et à la fin de chacune de ses journées, il invoquait son ange gardien. Il ajouta qu'au fil des heures, il renouvelait souvent cette prière, spécialement lorsque les choses se compliquaient, ce qui arrive fréquemment dans les occupations d'un pape.

Nous tenons à le déclarer, aussi pour remplir un devoir de reconnaissance, poursuivit Pie XI : nous nous sommes toujours senti merveilleusement assisté par notre ange gardien. Très souvent, nous sentons qu'il est là, proche de nous, prêt à nous aider.

Rappelant ensuite les paroles de saint Bernard sur nos devoirs de respect, d'amour et de confiance envers nos anges gardiens [...] de pareilles confidences surprendront des incroyants. Elles étonneront même certains fidèles. Que Pie XI, qui dénonça Staline et ses persécutions en Russie, qui tint tête à Hitler et résista à Mussolini, que ce pape, dont la force indomptable fait penser au courage d'un Grégoire VII, comptât à ce point sur l'assistance de son ange gardien et qu'il l'invoquât souvent au cours de la journée : qui donc l'aurait pensé ? Et qui donc l'aurait cru, si Pie XI lui-même n'en avait fait la confidence dans un discours public.

"Un très beau secret"

Jean XXIII a révélé comment Pie XI recommandait aux représentants du Saint-Siège la dévotion aux anges gardiens. Lors d'une de ses visites au Vatican, Mgr Roncalli s'entendit confier par Pie XI un très beau secret pour faciliter sa mission dans les Balkans; à savoir le recours à la présence agissante des anges source de joie continuelle pour ses protégés, cette présence - expliqua Pie XI à son futur successeur aplanit les difficultés et émousse les oppositions.

Le cardinal Carlo Confalonieri, préfet de la Congrégation pour les évêques, autrefois secrétaire du Pape Pie XI :

Pie XI avait une très grande dévotion envers les anges gardiens. Envers le sien d'abord, puis envers les anges qu'il savait préposés aux charges ecclésiastiques et aux circonscriptions territoriales.

En entrant dans le territoire du diocèse de Milan dont il avait été nommé archevêque par Benoit XV en 1921, Mgr Ratti s'était agenouillé pour baiser la terre que le Seigneur lui confiait et il avait invoqué la protection de l'ange du diocèse. Ainsi avait-il fait - dès qu'il en eut la possibilité - à son arrivée en Pologne, comme visiteur apostolique.


Pie XII a parlé, lui aussi. du rôle des anges dans la vie chrétienne [...]

L'encyclique Humani generis, parut pendant l'année sainte de 1950, signalait aux évêques certaines erreurs qui menaçaient de ruiner les fondements de la doctrine catholique. Parmi les opinions fausses Pie XII dénonçait les vues de certains théologiens "qui se demandent si les anges sont des créatures personnelles". Dénoncer cette erreur, dans un document solennel du Magistère, c'était affirmer implicitement que les anges sont en vérité des créatures personnelles. C'était réaffirmer l'existence des anges à l'encontre de ceux qui la mettent en question, réduisant les anges à des mythes ...

L'allocution adressée le 3 octobre 1958 par Pie XII à sept cent pèlerins américains est un vrai joyau de théologie pastorale. Elle est courte mais dense de doctrine et riche d'applications pratiques.

"... chacun, si humble soit-il, a des anges pour veiller sur lui. Ils sont glorieux, purs, splendides, et cependant ils vous ont été donnés comme compagnon de route : ils sont chargés de veiller soigneusement sur vous, pour que vous ne vous écartiez pas du Christ, leur Seigneur. Et non seulement ils veulent vous défendre contre les dangers qui vous guettent le long de votre chemin, mais ils se tiennent d'une façon active à vos côtés, encourageant vos âmes lorsque vous vous efforcez de monter toujours plus haut dans l'union à Dieu à travers le Christ."

Alors qu'on incline parfois à restreindre la mission des anges gardiens à un rôle de défense et de protection, spécialement sur le plan matériel, Pie XII avec toute la tradition chrétienne va plus loin : notre ange gardien, dit-il, s'emploie aussi à notre sanctification, il met tout en oeuvre pour favoriser notre ascension spirituelle et pour développer notre vie d'intimité avec Dieu. Notre ange gardien est un maître d'ascèse et de mystique; c'est un guide et un entraîneur vers les cîmes.

Pie XII termine son allocution en exhortant les fidèles à entretenir dès ici-bas des relations de familiarité avec leurs invisibles compagnons de route, appelés à devenir un jour leurs visibles compagnons d'éternité. "Nous ne pouvons vous quitter ... sans vous exhorter à réveiller et à aviver en vous le sens du monde invisible qui vous entoure - car les choses que l'on voit ne durent qu'un temps, alors que celles qu'on ne voit pas sont éternelles (II Cor 4,18) - et à entretenir une certaine familiarité avec les anges, dont la constante sollicitude s'emploie à votre salut et à votre sanctification. Si Dieu le veut, vous passerez une éternité de joie avec les anges : apprenez à les connaître dès maintenant." (p.24)

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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Cinci » dim. 25 févr. 2018, 19:09

Jean XXIII

Jean XXIII considère le culte envers les anges gardiens comme une dévotion essentielle du chrétien. Rien d'étonnant à cela, puisque, selon la remarque du cardinal Daniélou, "les plus grands parmi les saints et les hommes de Dieu ont vécu dans leur familiarité, depuis saint Augustin à John Henry Newman".

Jean XXIII était d'ailleurs tellement persuadé de l'existence des anges aux côté des humains que, contemplant la foule de pèlerins et de touristes rassemblés le dimanche sur la place Saint-Pierre, pour la récitation de l'angélus et pour la bénédiction du Pape, il pensait aux multitudes tout aussi nombreuses d'anges gardiens invisiblement présents sur la même place. Ainsi en agissait d'ailleurs un évêque particulièrement cher à Jean XXIII, saint François de Sales, qui, avant de prêcher, se plaisait à promener ses regards sur l'assistance pour saluer et invoquer, invisiblement présents, les anges gardiens de ses auditeurs.

Dans une lettre adressée à Soeur Angèle Roncalli, une de ses nièces religieuses, , alors qu'il était nonce en France, le futur Pape Jean XXIII s'abandonna à quelques confidences sur ses relations avec les anges [...] "... Moi-même, je récite la prière Ange de Dieu, qui êtes mon gardien au moins cinq fois par jour, et souvent je m'entretiens spirituellement avec lui, toujours dans le calme et dans la paix. Quand je fois faire visite à quelque personnage important pour traiter des affaires du Saint-Siège, j'engage mon ange à se mettre d'accord avec celui de la personne haut placée pour qu'il influe sur ses dispositions. C'est là une petite dévotion que m'a rappelée plusieurs fois le saint Père Pie XI, de vénérée mémoire, et que je trouve très fructueuse."

Cette intimité de Jean XXIII avec le monde invisible se révélait dans des expressions qui au cours de la journée revenaient fréquement sur ses lèvres dans ses entretiens avec certains visiteurs "Mon bon ange m.a inspiré ceci, mon bon ange m'a inspiré cela"; "Mon bon ange m'a réveillé ce matin". Terminons cette évocation des rapports de Jean XXIII avec le monde des anges sur un fait peu connu, qui a eu une influence incalculable sur les destinées de l'Église et, par contrecoup, sur celles du monde. Dans une confidence à un évêque canadien, Jean XXIII attribue à une inspiration de son ange gardien l'idée de la convocation du XXIe Concile oecuménique.

S'agirait-il d'une apparition ? Non pas. A plusieurs reprises Jean XXIII a déclaré publiquement que l'idée d'un concile lui était venue pendant qu'il priait. Dans son entretien avec le prélat canadien le Pape a simplement précisé que c'est par l'entremise de son ange gardien que Dieu lui avait donné cette inspiration.

On ne trouvera rien d'étonnant dans cette façon de procéder de Dieu, pour peu qu'on se souvienne d'une règle de conduite dans l'histoire du salut : lorsqu'il communique aux hommes non pas une grâce surnaturelle, mais une idée, une suggestion, une inspiration, Dieu se sert de l'intermédiaire de l'ange gardien. Celui-ci agit secrètement sur les facultés de l'homme. Ainsi Dieu a-t-il usé de l'Intermédiaire des anges pour communiquer sa loi à Moïse et pour inspirer chacun des prophètes.

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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Cinci » dim. 25 févr. 2018, 19:31

Associés au gouvernement divin

L'enseignement solennel de Paul VI vient couronner les témoignages de ses trois prédécesseurs. Dans la profession de foi du 30 juin 1968, en clôture de l'Année de la foi, le Chef de l'Église mentionne à deux reprises les anges : au début, pour affirmer leur existence, et à la fin, pour rappeler leur participation au gouvernement divin du monde.

[...]

"Gouvernement divin" : cette expression rejoint celle même de saint Thomas qui consacre la troisième section de la première partie de la Somme théologique précisément au gouvernement divin. Cette section contient la question 113, qui traite de la garde des hommes par les anges.

Comme le souligne la profession de foi de Paul VI, anges et bienheureux sont associés "à des degrés divers" au gouvernement du monde par Dieu. Les élus intercèdent pour les hommes, tandis que les anges gardiens, eux, non seulement prient pour les hommes, mais agissent directement autour d'eux et sur eux. S'il y a intercession chez les bienheureux, il y a chez les anges intercession et intervention directe : ils sont à la fois les avocats des hommes auprès de Dieu et les ministres de Dieu auprès des hommes.

"Notre désir est que s'accroisse la dévotion aux anges gardiens". C'est pour répondre à ce souhait du Pape Jean XXIII, initiateur de l'actuel renouveau de l'Église que, tout laïc que nous soyons, nous avons entrepris d'écrire cet essai sur le rôle des anges dans la vie quotidienne des hommes.

Journaliste continuellement mêlé au monde, nous n'ignorons pas certes combien l'existence des anges gardiens est aujourd'hui contestée. Nous savons pertinemment qu'à parler de leur présence agissante dans toutes les allées et venues des hommes, nous nous exposons à nous voir classé parmi les naïfs et les attardés.

N'importe !

La mise en question de cette vérité révélée, rappelée avec tant de force par les papes contemporains, n'est-elle pas motif supplémentaire de témoigner bien haut de notre foi en la présence agissante des anges gardiens ?

Cesserions-nous d'affirmer l'existence des myriades d'étoiles du firmament, si des myopes outrecuidants se mettaient à nier la réalité des astres ?

Si tel est, selon la doctrine catholique, le rôle des anges gardiens dans la vie quotidienne des hommes, pourquoi nous parle-t-on si rarement d'eux ? N'y aurait-il pas un lien profond entre l'actuel crise de la foi et le déclin de la croyance aux anges ?

p.32

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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Anne » lun. 26 févr. 2018, 3:22

Dans une lettre adressée à Soeur Angèle Roncalli, une de ses nièces religieuses, , alors qu'il était nonce en France, le futur Pape Jean XXIII s'abandonna à quelques confidences sur ses relations avec les anges [...] "... Moi-même, je récite la prière Ange de Dieu, qui êtes mon gardien au moins cinq fois par jour, et souvent je m'entretiens spirituellement avec lui, toujours dans le calme et dans la paix.
Pour les intéressés, si vous le permettez, Cinci, la prière à l'ange gardien:

Ange de Dieu,
Vous qui êtes mon Gardien,
C'est à vous que la Bonté divine m'a confié ;
Eclairez-moi,
Gardez-moi,
Dirigez-moi,
Et gouvernez-moi.
Ainsi soit-il.


Et une méditation de Dom Vandeur sur le site: Chemin d'amour vers le Père.
"À tout moment, nous subissons l’épreuve, mais nous ne sommes pas écrasés;
nous sommes désorientés, mais non pas désemparés;
nous sommes pourchassés, mais non pas abandonnés;
terrassés, mais non pas anéantis…
".
2 Co 4, 8-10

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Cinci » lun. 26 févr. 2018, 17:34

Je continue ...


Affreusement mièvres

Il est encore un autre responsable du déclin de la foi dans les anges : un certain art religieux frelaté, dont les oeuvres trahissent plus qu'elles ne traduisent la nature des anges.

Comme l'on comprend que certaines représentations charnelles de l'ange puissent détourner les chrétiens de la dévotion aux anges. Les angelots charnus ou mignons de nos églises sont une odieuse caricature des anges, tout comme les Vierges mignardes ou doucereuses sont une pauvre représentation de la Mère de Dieu. A quel point ces anges mièvres diffèrent des apparitions angéliques rapportées par Daniel ou par l'auteur de l'Apocalypse ! Ces apparitions effraient ! Devant elles, le prophète et l'évangéliste se prosternent la face contre terre. Le choc produit sur saint Jean est tel que l'Apôtre croit se trouver en présence de la divinité. L'ange l'invite à se relever et à réserver à Dieu seul ces actes d'adoration.

A l'opposé, on a relevé combien les anges des cathédrales gothiques et ceux de Fra Angelico incitent à la prière. "La dévotion aux anges s'alimentent au contact de pareilles oeuvres. Rien qu'à les contempler, nous nous sentons plus purs, plus désireux de voir et d'aimer Dieu".

Reconnaissons toutefois qu'il n'est pas facile pour un peintre ou pour un sculpteur de représenter un ange. Outre d'éminentes qualités techniques et artistiques et de solides connaissances religieuses, il lui faudrait peut-être pour s'acquitter dignement de sa tâche, une certaine familiarité avec ces êtres tout spirituels.

[...]

L'apparente inutilité des anges est une autre source de difficulté pour la foi en leur assistance. L'homme moderne croit pouvoir tirer des seules forces de la nature ce qu'autrefois on attendait des interventions d'en haut. "Jadis, disait un prédicateur qui se voulait avancé, jadis les paysans faisaient les processions des Rogations pour obtenir de bonnes récoltes. Aujourd'hui, ils sont plus évolués, ils emploient des engrais !" La chimie a remplacé la prière ...

On fait un raisonnement semblable à propos des anges. Les dispositifs de sécurité, les assurances maladies et accidents, les services de police, les progrès de la médecine, etc., tout cela semble protéger suffisamment l'homme moderne contre les infortunes de la vie. Dès lors, plus de place pour Dieu et ses anges dans les difficultés de la vie quotidienne. Comme si Dieu n'avait pas averti les hommes qu'ils peinent en vain si le Seigneur ne soutient pas leurs efforts ! Les engrais préservent-ils les campagnes de la grêle et du gel, des inondations et de la sécheresse ?

Qu'on le veuille ou non, en fin de compte "les biens et les maux, la vie et la mort, la pauvreté et la richesse, tout vient de Dieu".

Si, dans le passé on a parfois penché vers un extrême, il ne faudrait pas aujourd'hui verser dans l'autre excès contraire. Si hier certains chrétiens donnaient peut-être trop aux anges, sans doute leur donne-t-on aujourd'hui trop peu. Quelles que soient les découvertes des sciences, le principe de saint Thomas reste vrai : à savoir que pour toutes ses interventions matérielles dans l'univers, Dieu se sert du ministère des anges. Ils sont comme les bras et les mains de Dieu.

"Ministère" : ce mot renferme la solution d'une autre difficulté : celle qui ferait de l'ange un concurrent de Dieu. L'idée de cette concurrence porterait à éliminer l'ange purement et simplement comme un comparse encombrant.

Un exemple ? Le Pape Jean XXIII aimait attribuer à l'inspiration de son ange gardien les pensées heureuses qui lui venaient tout à coup au cours de la journée. N'est-ce pas là une pieuse exagération, dira-t-on ou une simple façon de parler, puisque selon la collecte pour demander la paix, c'est de Dieu même que nous arrivent "les saints désirs, les sages conseils et les bonnes oeuvres "? Bref, de deux choses l'une : ou ces inspirations proviennent de Dieu, ou elles proviennent de l'ange gardien. Mais pourquoi ne proviendraient-elles pas, à des titres différents, et de l'un et de l'autre ? Pourquoi ne pas voir en Dieu leur source et dans l'ange leur canal ? Entre la source et le canal il n'y a ni opposition ni concurrence, mais continuité et collaboration. Reconnaître le rôle secondaire du canal n'est pas nier la fonction primordiale de la source.

Une notion étriquée de Dieu, qui voit en lui un justicier plus qu'un père, peut également ébranler la foi dans la garde des anges. En effet, comment croire qu'un Dieu terrible puisse confier amoureusement chaque homme à un ange qui l'accompagne dans toutes ses allées et venues ? Pour comprendre ce geste d'un Dieu qui est amour, "dans un monde corrompu, où tout se vend et s'achète" (Pie XI), et pour ne pas mesurer les attributs divins à l'aune des vertus humaines, il importe de s'élever au-dessus des notions courantes. C'est ardu. C'est rare. C'est même impossible aux seules forces humaines. Pour réaliser ce dépassement, l'homme a besoin d'une énergie surnaturelle. "Elles sont bien rares les âmes qui ne mesurent pas la bonté divine à leurs courtes pensées", pourrait-on dire avec Thérèse de Lisieux.

L'homme hésite, en effet, à admettre que Dieu confie la garde de chaque créature humaine à l'un de ces êtres resplendissants d'intelligence, de force et de beauté. Seul l'esprit éclairé par une foi vivante peut admettre ce prodige d'amour qui ravissait saint Bernard :"C'est là un merveilleux effet de sa bonté et un des plus grands témoignages de son amour que nous puissions recevoir. Dieu commande à ses anges, à ces esprits si élevés, si heureux, si proches de lui, si unis à lui, si attachés à lui. ses vrais amis et ses familiers : et c'est pour nous qu'il leur commande de descendre sur la terre." "Que les miséricordes infinies de Dieu nous obligent à chanter ses louanges et à annoncer ses merveilles aux enfants des hommes."

Pourquoi d'ailleurs s'étonner que Dieu députe ses anges au service de l'homme - se demande encore l'abbé de Clairvaux - s'il leur a envoyé son propre Fils ? Le roi même des anges est venu, non pour être servi, mais pour servir et pour donner sa vie pour une multitude d'hommes. En nous révélant la bonté incommensurable de Dieu, le dogme de l'Incarnation et de la Rédemption projette un surcroît de lumière sur l'enseignement de l'Église touchant la garde des anges.

Plus nous prenons les idées d'un monde sécularisé comme critère de la vérité religieuse, plus l'existence des anges gardiens devient problématique. Au contraire, plus nous prenons comme règle la parole même de Dieu, telle que l'interprète l'Église catholique, plus les difficultés s'estompent. Une foi vigoureuse les éclaircit, comme un coup de vent dissipe le brouillard.

p. 60

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Re: Mon ange marchera devant toi

Message non lu par Cinci » lun. 26 févr. 2018, 18:26

Chasse aux anges

Une dernière catégorie de difficultés peut tenir à certaines expressions de l'Écriture sainte elle-même, lorsqu'elle parle de l'activité des anges.

Paul VI relève, en effet, que les difficultés de la foi proviennent aussi "des études philologiques, exégétiques, historiques, appliquées à cette première source de la vérité révélée qu'est l'Écriture Sainte". Privée du complément apporté par la Tradition et par l'assistance autorisée du Magistère de l'Église, même l'étude de la Bible seule est pleine de doute et de problèmes qui déconcertent la foi plus qu'ils ne l'affermissent.

Citons au hasard quelques passages de l'Écriture Sainte susceptible de dérouter les lecteurs non initiés. Le livre de Daniel nous montre des anges en conflit les uns avec les autres (10,13). Nous croyons les anges en possession d'un bonheur sans ombre et Isaïe (33.7) annonce que les anges de la paix pleureront. Tandis que le deuxième Livre des Rois (19,35) attribue à un ange exterminateur la mort de 185 000 guerriers assyriens en une seule nuit, des exégètes, forts du témoignage de l'historien grec Hérodote, attribuent cette hécatombe à une peste propagée par une invasion de rats. Est-ce Dieu lui-même ou est-ce un ange qui apparut à Moïse dans le buisson ardent ? L'expression "ange du Seigneur" (ou ange de Yavhé) désigne-t-elle Dieu ou un ange ?

La Tradition aide à éclairer ces difficultés. Comme l'explique saint Thomas, les expressions employées par Daniel et par Isaïe ne sont pas à prendre au sens littéral. Elles traduisent des réalités spirituelles par des images tirées de la vie humaine.

Une invasion de rats dans le camp syrien n'exclut pas l'Intervention d'un ange exterminateur. Pourquoi celui-ci n'aurait-il pas mobilisé une armée de rats pour propager la peste ? L'emprise d'un pur esprit sur les animaux est dans l'ordre des choses. Le pâtre agit sur les sens extérieurs des bêtes (ouïe, toucher, etc.) ; l'ange, sur leurs sens intérieurs (imagination, mémoire). Par le biais de leurs sens intérieurs, l'ange peut contrôler le comportement extérieur des animaux.

Quant à l'emploi alternatif du nom de Dieu (ou de Yavhé) et de celui de l'ange, une distinction de saint Thomas résout le problème. C'est toujours au nom de Dieu que l'ange intervient : aussi bien, l'auteur sacré attribue-t-il l'intervention tantôt à Dieu lui-même, tantôt à l'ange, cause instrumentale. "De même dit-on parfois que le Pape absout une personne, même quand l'absolution est donnée par quelqu'un d'autre. "

Cette alternance d'expressions complémentaires se rencontrent d'ailleurs dans la vie quotidienne. Lorsqu'au nom du Saint-Père le cardinal secrétaire d'État adresse un message à une Semaine sociale, les journaux parlent indifféremment de la lettre du Pape ou de la lettre du cardinal, sans opposer une instance à l'autre. Elles constituent toutes deux une unité morale, comme la forment, sur un autre plan et d'une autre façon, Dieu et l'ange qu'il dépêche parmi les hommes. Cette unité morale n'entraîne pas une identité physique entre le mandant et l'exécutant, qui restent des êtres concrets distincts.


[...]

Le mouvement de démythisation semble porter certains interprètes à écarter systématiquement les anges de la Bible, au bénéfice d'une force supérieure, Dieu, ou au bénéfice de forces naturelles inférieures. On attribue à Dieu ce que la Bible affirmera de l'ange du Seigneur, comme on prêtera aux forces naturelles ce que la Bible attribue à l'intervention d'un ange. C'est la phobie des anges !

[...]

On éviterait ces erreurs, source de trouble pour les fidèles, si, en plus des sciences profanes, on éclairerait la Bible aussi par la Tradition et par le Magistère, selon la norme rappelée par Paul VI; de même aussi si l'on se réglait moins sur la mentalité d'un monde sécularisé et si l'on ne prenait pas pour parole d'Écriture certains slogans aussi superficiels que péremptoires : "Les gens n'admettraient jamais cela !" "Aujourd'hui il n'y a plus personne au monde pour croire que ..."

Ainsi lue en dehors de l'éclairage de l'Église, l'Écriture Sainte elle-même, avec un art religieux frelaté, avec l'idolâtrie de la technique, avec la sécularisation et la contestation, peut corroder la foi en l'existence des milliards d'anges que Dieu s'associe pour gouverner le monde (cf. Paul VI, Profession de foi)

p. 62

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Cinci » mar. 27 févr. 2018, 17:59

Et maintenant il y a un passage qui est très intéressant dans le livre. L'auteur s'exprime à l'occasion d'un commentaire de Jean de la Croix.

Voici :

... saint Jean de la Croix propose aussi à l'imitation des âmes ferventes la sérénité des anges devant le mal, spécialement devant les péchés du prochain, objet souvent d'un zèle improductif et de lamentations stériles. Au fur et à mesure de son avancement spirituel, l'âme modifie son attitude envers les fautes du prochain. De l'indifférence initiale, elle passe à la sévérité et au trouble; plus tard, elle entre dans la sérénité et renonce à la critique, sans pour autant approuver le mal. "L'élévation de l'âme établie d'une manière définitive dans l'état d'union est si grande que si auparavant elle était ballottée par les eaux de la douleur et affligée par l'amertume que lui causaient les péchés du prochain, désormais elle ne l'éprouve plus quoi qu'elle reconnaisse plus parfaitement que jamais la nocivité du péché ... Cette âme est dans un état qui ressemble à celui des anges qui comprennent mieux que personne les effets du mal sans en ressentir de douleurs, et qui s'acquittent des oeuvres de miséricorde sans éprouver de compassion affligeante."

Dans sa sagesse, observe saint Augustin, Dieu préfère tirer le bien du mal, plutôt que de ne permettre aucun mal.

En ce sens très précis, l'épreuve, en raison du bien que Dieu peut en tirer, est préférable à l'absence d'épreuve. Elle ressemble à un tunnel sombre qui débouche sur la lumière. Contemplant toutes choses en Dieu, l'ange perçoit cette issue lumineuse, qui échappe si facilement aux regards myopes de l'homme.

Dom Paul Renaudin, o.s.b., commente : "La misère qui nous entoure, et celle qui est installée au coeur même de l'homme, ne sont que le champ d'action de la Miséricorde et de la Grâce, l'occasion de la Rédemption. Ayez confiance, le monde est enclos, enveloppé, emporté dans l'immense Bonté divine. Dans le Dialogue de saint Catherine de Sienne, le Père éternel répond aussi à la demande de la sainte : "Je ferai miséricorde au monde, miséricorde à l'Église ... parce que je t'ai montré que la miséricorde est ma propriété distinctive". "Il ne faut pas dire : ceci est plus mauvais que cela; car toute chose en son temps sera reconnue bonne, lit-on déjà dans l'Ancien Testament. (Ecclésiastique 33,34)

A la fin : voilà le mot-cié, qui éclaire le problème du mal. L'ange voit la fin, qui explique les contrariétés déconcertantes et les épreuves crucifiantes; l'homme réduit aux seules lumières de sa raison, ignore cette fin et il s'insurge contre la souffrance; le croyant, doté d'une foi débile, la supporte de mauvais gré, tandis que le chrétien à la foi virile croit en cette issue heureuse. Et plus il croit vigoureusement au sein de la nuit, plus il participe - sans jamais l'égaler - à la sérénité imperturbable des anges devant le mal, aussi par un rejaillissement des actes de foi sur son intelligence, sur sa volonté et sur sa sensibilité. La paix profonde est une caractéristique des amis de Dieu. Elle réside au tréfonds de leur âme et elle déborde jusque sur leur visage et dans leur regard.

p. 120


Encore :

Harmonie parfaite

Un autre trait de la sainteté des anges gardiens remplissait d'admiration Thomas d'Aquin [...] Chez l'ange gardien, explique Thomas, les interventions dans la vie quotidienne des hommes sont comme une mise en application des pensées et des desseins contemplés en Dieu. De même que le sculpteur en taillant un bloc de marbre réalise au-dehors l'idée qu'il porte au-dedans de lui, ainsi l'ange, en préservant l'homme d'un faux pas, en éclairant son esprit, en lui rappelant une résolution oubliée, en lui suggérant un geste de bonté, en l'amenant à prier, réalise dans le monde les desseins contemplés en Dieu.

Le service des hommes n'est pas pour les anges une interruption de leur activité principale; il n'est pas pour eux une activité secondaire, un passe-temps ou, pis encore, une corvée [...] Le service des hommes est un élément de l'activité essentielle des anges gardiens et une source de leur béatitude sans ombre.

"Demeurer dans le Christ", ce n'est pas seulement lui faire quelques visites au cours de la journée : messe, récitation de l'office, méditation, lecture spirituelle ou quelque pratique de piété. "Demeurer dans le Christ" c'est, comme dit l'expression, "séjourner en permanence chez lui par la foi, l'espérance et la charité, et être constamment mû par son Esprit. Les anges gardiens nous apparaissent comme des modèles parfaits : ils demeurent en Dieu, même quand ils visitent la terre.

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Fleur de Lys » lun. 05 mars 2018, 3:12

Bonjour à tous,

J'aurais quelques questions sur les anges gardiens, j'espère que vous ne les trouverez pas trop naïves :oops:
Y en a-t-il un par personne?
Sont-ils anges depuis la nuit des temps, n'ayant rien à voir avec des proches décédés qui seraient au ciel?
Et les non croyants ont-ils un ange gardien?

Faut-il les prier pour qu'ils agissent? Ou bien agissent-ils parfois "gratuitement"? Je pense notament aux enfants, trop petits pour prier.

Merci!

Altior
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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Altior » lun. 05 mars 2018, 7:38

Bonjour, Fleur de Lys!
Fleur de Lys a écrit :
lun. 05 mars 2018, 3:12
Y en a-t-il un par personne?
Affirmatif.
Chaque personne (vivante) a un ange assigné par Dieu pour être gardien jusqu'à sa mort.
Sont-ils anges depuis la nuit des temps, n'ayant rien à voir avec des proches décédés qui seraient au ciel?
Affirmatif.
Les anges sont des existences différentes et ne doivent pas être confondus avec les saints. Les saints sont ceux qui, pour un certain temps, ont vécu sur la terre exactement comme nous vivons et qui, sur la base d'une vie bonne (ou, du moins, d'une mort bonne) sont maintenant au Ciel et se réjouissent de la vision béatifique.
Les anges sont des existences qui n'ont jamais vécu sur la terre. Ils sont des existences célestes dès leur début. Leur début est avant la Création de l'Homme et avant la Création visible. Leur nombre reste fixe, Dieu ne fait pas de nouveaux anges, mais fait de nouveau âmes humains.
Les anges dépassent largement les Hommes en capabilité, grâce, puissance, perfection et connaissance. Ils sont des êtres surhumains. Dans l'hiérarchie du Ciel les anges occupent une place plus éminente que les saints, à l'exception unique de la Sainte Vierge qui les dépasse. Regina Caeli n'est pas un ange, mais un être humain: la Sainte Vierge.

Tout comme dans le cas des saints, les anges ont, à leur tour, une hiérarchie. D'ailleurs, le mot «hiérarchie» signifie littéralement «classement des anges». Il y a neuf classes d'anges.
Et les non croyants ont-ils un ange gardien?
Affirmatif.
La question «a-t-on un ange depuis la conception/naissance ou bien on a un ange à partir du baptême ?» a été (et reste encore) un sujet de débat. Ce n'est pas une question dogmatiquement fermée. Toutefois, la réponse affirmative est largement prévalante parmi les pères et les docteurs de l'Église. Donc, on peut affirmer avec quasi-certitude que chaque être humain vivant sur la terre, croyant ou non-croyant, a un ange gardien et cela depuis le début de son existence.
Faut-il les prier pour qu'ils agissent? Ou bien agissent-ils parfois "gratuitement"? Je pense notament aux enfants, trop petits pour prier.
Les anges sont assignés en tant qu'anges gardiens pour nous aider, pour nous servir, pour nous proteger (gardien = protecteur). Ils prient aussi pour nous beaucoup plus que nous prions pour eux.

Fraternellement en Christ,
A.

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Fleur de Lys » lun. 05 mars 2018, 10:13

Je vous remercie, Altior, pour votre réponse toujours si précise!

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par SergeA » lun. 05 mars 2018, 11:43

Altior a écrit :
lun. 05 mars 2018, 7:38
Sont-ils anges depuis la nuit des temps, n'ayant rien à voir avec des proches décédés qui seraient au ciel?
Affirmatif.
Les anges sont des existences différentes ....
Il semble que cela soit le cas. Mais des proches décédés peuvent agir sur nous via notre ange gardien. C'est pour cela que parfois, on ressent "très fort" la présence de ces proches.
.........................................................................................................................................................................................

"Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme, et de toute ta pensée."

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Cinci » lun. 05 mars 2018, 15:54

Bonjour,

Fleur de Lys a écrit :
J'aurais quelques questions sur les anges gardiens, j'espère que vous ne les trouverez pas trop naïves :oops:
Y en a-t-il un par personne?
Voici ce que rapportait Georges Huber de son côté :

"... la théologie catholique enseigne qu'un ange gardien est proposé à la garde de chaque être humain, sans distinction de religion, de race, d'âge ou de sexe. Nulle exception à cette règle. Saint Thomas d'Aquin pousse la rigueur de sa logique jusqu'à affirmer que même l'Antéchrist bénéficiera de l'assistance d'un ange gardien. Celui-ci l'empêchera de commettre toutes les iniquités qu'il aurait voulues dans sa haine de Dieu. Aussi bien pouvons-nous penser que des persécuteurs de l'Église et des ennemis du christianisme comme un Callès, un Hitler ou un Staline, ou les tortionnaires des camps de Dachau ou de Buchenwald, auraient commis des crimes plus grands encore sans les interventions secrètes des anges. En effet, ne suffit-il pas parfois d'un retard, d'un oubli ou d'un accident de santé pour empêcher un crime ? Pour les anges, ce sont là des effets faciles à procurer.

La présence invisible, mais agissante d'un ange gardien aux côtés de chaque homme, invite à considérer d'une façon plus profonde le problème du salut éternel des non chrétiens, soit ceux de l'Antiquité païenne, soit ceux d'aujourd'hui en Asie ou en Afrique. "Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à la connaissance de la vérité." (1 Timothée 2,4). Or, pour éclairer l'intelligence humaine Dieu se sert non seulement des éducateurs et des maîtres, mais aussi des anges. Ceux-ci sont un canal normal dans la transmission de la vérité.

Aristote n'a-t-il pas entrevu que des hommes supérieurs bénéficient de la motion d'un principe extérieur à la raison humaine comme saint Thomas le souligne dans son traité des dons du Saint Esprit ?


Et pour les clients plus difficiles, en délicatesse avec la prose, la philosophie, les raisonnements de simples laïcs :
En bref

Les anges sont des créatures spirituelles qui glorifient Dieu sans cesse et qui servent ses desseins salvifiques envers les autres créatures : "Les anges concourent à tout ce qui est bon pour nous." (Saint Thomas d'Aquin).

Les anges entourent le Christ , leur Seigneur. Ils le servent particulièrement dans l'accomplissement de sa mission salvifique envers les hommes.

L'Église vénère les anges qui l'aident dans son pèlerinage terrestre et qui protègent tout être humain.

Dieu a voulu la diversité de ses créatures et leur bonté propre, leur interdépendance et leur ordre. Il a destiné toutes les créatures matérielles au bien du genre humain. L'homme et toute la création à travers lui, est destiné à la Gloire de Dieu.

(Catéchisme de l'Église, 1992, cf 350-353)

Il ajoutait :

Connaître Dieu, l'aimer et le servir, aimer les hommes pour Dieu : c'est le but de toute vie humaine, et c'est précisément à aider l'homme dans sa marche vers cette fin que vise toute l'activité des anges gardiens. Or la prière n'est-elle pas le ressort intime de cette montée vers Dieu ?

On comprend dès lors le rôle capital joué par les anges dans la prière officielle de l'Église comme aussi dans la prière personnelle.

Les anges éveillent, stimulent, soutiennent et appuient la prière des hommes. Ils participent à la liturgie de l'Église de la terre, comme celle-ci s'associe spirituellement à la liturgie de l'Église du ciel. Erik Peterson a recueilli dans la liturgie et la littérature religieuse des premiers siècles chrétiens un ensemble impressionnant de témoignages sur cette réciproque participation cf. Le livre des anges, Paris, 1953.

(Georges Huber, p. 109)

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Cinci » lun. 05 mars 2018, 17:14

Fleur de Lys a écrit :
Sont-ils anges depuis la nuit des temps, n'ayant rien à voir avec des proches décédés qui seraient au ciel?
Le catéchisme fait remarquer :
En tant que créatures purement spirituelles, ils ont intelligence et volonté : ils sont des créatures personnelles et immortelles. Ils dépassent en perfection toutes les créatures visibles.
Sur le plan théologique ou philosophique, disons qu' il n'y a pas de risque d'aller confondre les uns avec les autres.

C'est sûr que les proches ou les familiers n'ont rien à voir avec les saints anges de Dieu. A part ça, les saints de l'Église n'occupent pas le même champ d'activité qui serait celui que les anges posséderaient naturellement en propre. Il n'y a pas de saint de l'Église qui obtient le ministère spécial relatif au bon fonctionnement des lois physiques de l'univers. Ce n'est pas le prophète Jérémie qui vient faire l'annonce à Marie pour commencer. Et, en 2018, le dernier héritier mâle de la branche d'Orléans ne serait jamais confié à la veille régulière du curé d'Ars; je voudrais voir le prêtre qui nous enseignerait quelque chose d'aussi cocasse !


Quand on parle des anges, on parle bien des anges et de leur activité à eux.

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Re: A propos des Anges gardiens

Message non lu par Cinci » mer. 14 mars 2018, 1:19

Une autre belle page sur les anges par Georges Huber :


Présence amie dans la solitude ...

Le culte des anges semble aujourd'hui apte à remédier à un malaise fréquent : le sentiment de solitude et d'insécurité.

S'il est exact que la foi chrétienne va s'affermissant dans les élites, il est aussi vrai qu'elle va diminuant dans les multitudes. Le nombre de chrétiens cohérents semble décroître.

Par ailleurs un complexe d'isolement menace d'envahir les minorités fidèles et de paralyser leur élan. Des confidences révèlent que ces douloureux sentiments existent jusque dans les foyers réputés chrétiens et dans des communautés religieuses : "Je me sens seul ... Je ne trouve pas d'appui dans mon entourage ... Je dois nager à contrecourant ..." Une mentalité d'agenouillement devant le monde étouffe les efforts de montée spirituelle. Et que dire des hommes et des femmes qui, à longueur d'années, vivent seuls dans leur fidélité à Dieu, sans le réconfort de présences amies et de rencontres stimulantes ...

Or quelle lumière, quel appui, quelle joie pour ces hommes et ces femmes, s'ils arrivaient à réaliser la présence continuelle d'un ange à leur côté ! Prise de conscience non pas conceptuelle à la manière d'un séminariste qui entendrait un exposé théorique sur les anges, mais prise de conscience concrète et vivante, à la manière d'un homme en tête à tête avec un ami très cher.

Il nous souvient d'avoir lu une page émouvante de César Angelini, écrivain italien contemporain. L'auteur raconte qu'ayant assisté dans une antique abbaye au chant de Complies, il fut bouleversé par les paroles de la Collecte, récitée par le Père Abbé avec une conviction communicative dans le silence du sanctuaire : "Visitez, Seigneur, cette demeure ... Que vos anges y habitent et qu'ils nous conservent dans la paix,"

César Angelini regagna sa cellule. La porte fermée, il eut la certitude très nette de n'être pas seul. Il percevait une présence mystérieuse. Il sentait qu'un ange était là, pour lui, pour lui seul. L'écrivain fut alors envahi d'une joie profonde, telle qu'il n'en avait jamais connue.

"La foi est l'acte de croire ce qu'on ne voit pas", affirme saint Augustin, et Newman définit le chrétien "un homme qui croit ce qu'il ne voit pas". Ainsi en va -t-il des chrétiens qui croient sans réserves à la présence de l'ange gardien : l'invisible pour eux est une réalité incontestable, une réalité quasiment visible.

Comme les rayons X

Pour comprendre la vigueur de cette certitude et pour ne pas reléguer celle-ci dans la catégorie du rêve ou de l'autosuggestion, il convient de se reporter à une vérité de la psychologie religieuse chère à saint Thomas : la supériorité des forces surnaturelles qui dérivent de Dieu, sur les énergies naturelles qui tiennent à la nature humaine. Par la foi l'homme participe à la connaissance que Dieu a de lui-même et de la création. Par la foi l'homme voit en quelque sorte son ange gardien avec les yeux de Dieu. Par la foi le chrétien discerne une présence là où un esprit réduit à ses seules forces naturelles ne perçoit aucune réalité.

Cette pénétration de la foi pourrait être comparée aux rayons X. Tandis que la lumière du soleil et la lumière électrique s'arrêtent à la surface des corps, les rayons X, eux, traversent la chair et atteignent jusqu'à l'ossature. Celle-ci existait réellement, même si les rayons du soleil et la lumière électrique ne l'éclairaient pas. De même les anges existent-ils réellement, même si les flashs des reporters, les tests de psychologues, les enquêtes de sociologues et les reportages de journalistes n'en font pas état.

Pour découvrir certaine réalités, il faut des instruments spéciaux. Telles étoiles ne sont visibles qu'au télescope. Niera-t-on l'existence de ces astres, simplement parce que l'homme de la rue ne les voit pas à l'oeil nu ?

Qu'on nous permette de revenir sur un épisode de l'Écriture Sainte, riche d'enseignements, qui révèle le supplément de connaissance procuré à l'homme par la foi. La scène se passe à Dothan, résidence du prophète Élisée et de son serviteur Giezi. Le roi de Syrie a fait cerner de nuit la ville par des chevaux et des chars et une compagnie importante. Le lendemain matin, l'homme de Dieu aperçut en sortant l'armée qui cernait la ville avec des chevaux et des chars. Son serviteur lui dit : "Ah ! Monseigneur, qu'allons-nous faire ? - N'aie pas peur, répondit Élisée. ceux qui sont avec nous sont en plus grand nombre que ceux qui sont avec eux."

Cette supériorité, Élisée la connaissait par la foi. Doté d'une foi moins lucide, Giézi ignorait cette supériorité. Le serviteur avait besoin d'une lumière d'en haut. "Élisée fit alors cette prière : Seigneur, ouvrez-lui les yeux pour qu'il voie". Et Dieu ouvrit les yeux du serviteur, qui vit "la montagne couverte, autour d'Élisée, de chevaux et de chars de feu". Cette armée céleste était une révélation de la puissance des anges.

Lucie-Christine, à qui sa foi intense donnait de croire aux anges comme si elle les voyait de ses yeux de chair, estime que si nous pouvions voir continuellement les anges qui nous entourent et nous protègent, nous perdrions le sentiment de nos maux : mais il ne doit pas en être ainsi sur la terre.

Nous verrions en effet que les forces mauvaises qui nous inquiètent et parfois même nous affolent, soit dans la vie quotidienne soit sur le plan de la politique internationale et de la vie de l'Église, sont en toute vérité contrôlées par la Providence. Celle-ci utilise les forces du mal pour purifier les amis de Dieu, comme le dentiste se sert de la fraise pour évider une dent cariée. Jamais, à aucune heure de l'histoire, Dieu ne perd le contrôle absolu de la situation. Toujours, même aux époques les plus sombres de l'histoire de l'Église et de la vie des peuples, les anges fidèles dominent les menées des anges rebelles. Le dernier des bons anges commande à Lucifer lui-même, prince des rebelles, et se fait obéir de lui, affirme saint Thomas.

Cette suprématie tient au fait que la volonté du bon ange adhère pleinement aux desseins de Dieu, qui se réalisent infailliblement, toujours et partout. "Quiconque, homme ou ange, adhère à Dieu, devient spirituellement un avec Lui, et, par là même, supérieur à toute créature."

La familiarité avec les anges donne un sentiment de sécurité. Nos compagnons invisibles nous communiquent quelque chose de la paix qu'ils puisent en Dieu, lui qui est vraiment "le Seigneur de l'histoire" (Pie XII)

Je ne crois pas. écrit un théologien, que toutes les perfections , que toutes les beautés d'un globe comme la terre contient, puissent se comparer à la perfection et à la beauté d'un ange.

C'est aussi le sentiment de sainte Angèle. En prière, dans la cathédrale de Foligno, elle avait invoqué les anges. Ils lui apparurent : "La présence des anges l'inonda d'une joie telle, que "si je ne l'avais pas sentie, je n'aurais pas cru la vue des anges capable de la donner."

p. 152

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