Sur l'origine du mal

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Cinci
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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Cinci » dim. 24 déc. 2017, 17:06

Didyme a écrit :
Le péché est certes la conséquence de l’amour de soi mais l’amour de soi n’est pas pour autant l’origine, c’est aussi une conséquence.
La vanité qui serait comme un "amour désordonné de soi" représente un mal moral, et qui n'est peut-être bien que le symptôme pathologique secondaire en effet d'une menace initiale ou d'un danger perçu primitivement. Il s'agit d'un mécanisme compensatoire de défense. Contre quoi? Contre le Père éternel ou contre l'autorité perçue "fantasmatiquement" comme une menace mortelle. Ainsi, pour éviter que ma petite personne ne meure, je deviendrai vaniteux. Compensation.


Evidemment, qu’on s’entende bien, lorsque l’on parle de l’amour de soi, on l’entend dans le sens d’orgueil.
Attention.

L'amour désordonné de soi, c'est la vanité. La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf manifeste un travers vaniteux. Et l'orgueil? C'est assez différent.

Qu'est-ce que l'orgueil?

L'orgueil ne consiste pas dans le fait d'avoir une trop bonne opinion de soi. L'orgueil, au contraire, c'est "se détestant, vouloir se suffire, s'isoler, s'arranger de ce mauvais matériel. Être au moins indépendant puisqu'il n'y a pas moyen d'être heureux. L'orgueil et le désespoir recouvrent la même résignation à étouffer cette soif de bonheur qui continuerait à nous étirer si douloureusement vers les autres." (L. Evely, p. 66)


Car il est vrai que ce n’est pas un mal de s’aimer, tant que l’on s’aime pour ce que l’on est, une œuvre de Dieu.
Oui.

Le problème est lorsque l’on s’aime en s’appropriant ses qualités, en se plaçant comme principe. Tel par exemple, si on est quelqu’un de généreux, penser que l’on est La générosité-même, comme si cette qualité nous appartenait, qu’on en était le fondement, sans comprendre que cette qualité est un don que Dieu nous accorde, Dieu qui lui est La générosité en soi. En gros, il s’agit là de vouloir être Dieu à la place de Dieu, de se prendre pour Dieu, oublier notre place de créature.
Ce serait le refus de l'interdépendance. Recherche d'une autonomie complète illusoire. La chose est mensongère puisque personne ne s'est crée lui-même, personne ne tient sa vie de lui-même, personne ne peut continuer de vivre sans l'apport des autres, etc.


Ce genre d’amour de soi est le péché d’orgueil.
Le désordre qui fait refuser l'apport positif d'autrui, comme pour se dispenser de devoir rendre grâce, louer ou dire merci à qui de droit : cela entre dans le péché d'orgueil. Oui, je suis d'accord. Forme d'isolement. Bouderie en même temps.

Et donc, je pose la question : qu’est-ce qui a fait qu’une création de Dieu, créée bonne (et donc à la base sans ce péché d’orgueil) finisse par pécher ? Qu’est-ce qui a fait émerger cet amour de soi, cet orgueil ? Dieu n’a pas créé la créature en y incorporant ce péché dès l’origine, ça a émergé par la suite. Par conséquent, il ne s’agit pas de l’origine-même mais d’une conséquence. Et une conséquence de quoi ?
C'est ce que j'explique plus haut.

La créature est limitée au départ. Et Dieu lui demande de choisir librement de s'engager dans une avenue nouvelle pleine d'infinie. Et la chose lui apparaît comme pleine d'inconnue, dangereuse et folle. Dieu nous demande de devenir des saints. La chose ne va pas de soi. C'est alors que la crise se produit.

Dieu ne demande pas aux animaux de devenir des saints. et nous n'entendrons jamais parler de péché non plus les concernant.

Le mal moral chez les créatures intelligentes tire son origine des exigences de Dieu pour nous; tel du fait de ce "meilleur" que Dieu ambitionne de nous donner. Parce qu'il veut nous introduire dans sa vie.

Le mal paraît au moins, déjà, en tant que conséquence du fait que l'être qui serait déjà bon refuse l'objectif de devenir meilleur ou refuse d'aller faire de la place en soi pour du mieux. "Je ne veux pas changer, je ne veux pas être transformé, je ne veux rien perdre, rien sacrifier, etc. Je refuse la proposition!"

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Cinci » dim. 24 déc. 2017, 17:09

ChristopheB,`

J'ai vu le message à la page précédente. D'accord.

Et un joyeux Noël.
:)

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » dim. 24 déc. 2017, 20:29

La question à se poser c’est qu’est ce qui est à l’origine de la chute, de la désobéissance !
On pourrait être tenté de se dire que c’est la tentation, mais la tentation est extérieure à Adam et Eve, elle ne provient pas de leurs âmes. On peut se dire que l’origine, qu’elle soit en l’ange ou en l’humain, doit être semblable. Il faut donc se demander dans ce cas là, qu’est ce qui a fait chuter Satan, ex Lucifer, car en fait le premier péché c’est lui qui la commit, il est la source du péché sur terre.

Ce que je constate, c'est que Adam et Ève n’avaient pas en eux la sagesse, ils n'étaient ni justes, ni prudents, ni tempérants, sinon ils n'auraient pas désobéis. On peut aussi dire qu'ils n’étaient doués d'aucune raison, ce qui est normal, puisqu'ils ne connaissaient ni le bien ni le mal, ils étaient dans l'ignorance, comme le nourrisson qui vient de naître. La seule chose que leurs âmes pouvaient connaître et donc aimer, c'est elle même. Dieu ne faisait que les guider, comme la mère qui amène le petit à son sein, il leur donne à manger, et leur interdit ce qui est vicié. Il ne s’est pas laissé voir d’eux, sinon ils l’auraient compris, aimées, et n’auraient jamais péché.

Ce que l’on peut se dire c’est qu’Adam et Eve se sont conduits comme des enfants, ils ont fait un caprice, ils ont touchés la flamme que Dieu avait interdite, et se sont brûlés gravement. S’ils n’avaient pas ignorés l’avertissement, par manque de confiance, puisque Satan leur a laissé croire que Dieu avait menti, ils ne se seraient pas brûlés.
Il étaient ignorant de la douleur de la flamme, mais ne faut il pas se brûlé une fois, pour ne jamais plus recommencer.

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » lun. 25 déc. 2017, 10:22

Cinci,
Cinci a écrit :
dim. 24 déc. 2017, 14:31
Le "sacrifice que Dieu demande pour le suivre" fait naître une crise de confiance.

Déjà qu'elle connaît insuffisamment Dieu du fait de sa limite,
Je me demande ce qui provoque ce manque de confiance, et je retombe sur la méconnaissance de Dieu. Car en effet comme vous le dite (dans ce fameux texte, avant celui ci, que je n'avais pas compris, et que dans un éclaire de lucidité, Dieu se matin ma permis de comprendre, car en fait il est simple :-D ) pour avoir confiance en quelqu'un, il faut le connaitre.
Mon questionnement est le suivant, Dieu s'est il fait aimé d'Adam et Ève, ou s'est il contenté de les guider ?

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Cinci » mar. 26 déc. 2017, 5:53

Je dirais que Dieu est aimé jusqu'à un certain point par ses créatures. Il est naturellement aimé au départ. Il est aimé par le père Adam pour la raison de tout ce qu'il lui donne. C'est comme le nourrisson qui aime spontanément cette source qui le contente.



La crise survient la journée où apparaît un manque. Que se passe-t-il? Ce Dieu est-il si bon que cela finalement? Qui est ce Dieu en réalité? Dieu cherche à me faire mourir?

Le mal apparaît à l'occasion de la "crise de confiance" provoquée par l'appel de Dieu. C'est que Dieu nous appelle à grandir dans l'ordre de l'amour. Dieu veut que nous nous dépassions. Cette sortie hors de nous-même, ce sacrifice que Dieu demande, mourir à soi-même : c'est une véritable épreuve.

La réponse obéissante de la créature n'est pas garantie pour le coup.

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » mar. 26 déc. 2017, 10:13

Cinci a écrit :
mar. 26 déc. 2017, 5:53
La réponse obéissante de la créature n'est pas garantie pour le coup.
Je comprend.

Le prêtre, dans son homélie de Lundi matin, à eu une phrases qui ma frappé, elle correspond parfaitement à nos propos :

"Il faut faire confiance à Dieu, comme Dieu nous fait confiance !"

Je me suis dis que si nous connaissions Dieu, comme Dieu nous connait, la confiance serait partagé et on ne se tournerait plus vers soi même.

Dieu se donne à certain, il donne une foi vivifiante, mais pas à tous ...

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Didyme » mar. 26 déc. 2017, 12:37

Cinci a écrit :L’origine du mal tiendrait en deux choses apparemment.

Pour la réponse : c’est l’imperfection de la créature et le libre-arbitre réel dont celle-ci peut disposer pour faire ce qu’elle veut.

Imperfection ?

Oui ; en le sens que pour crée une autre personne ou un autre être qui ne soit pas lui, une créature qui ne sera pas Dieu : le Père n’a pas le choix que d’amener à l’existence un être limité (… qui n’est pas omniscient, pas omnipotent, pas éternel, etc.) Donc, la créature qui vient à l’existence au début n’est pas une créature parfaite.

Libre-arbitre ?

La créature intelligente possède une faculté de jugement qui lui permet de faire un choix, de s’engager préférentiellement dans une direction plutôt qu’une autre.

Imperfection + libre-arbitre = surgissement du mal tôt ou tard. On parle ici du mal au plan moral.

C’est le mal de la créature qui agira à l’encontre de ses propres intérêts réels cf « Je ne fais pas ce que je veux (le bien que j’aimerais faire), je fais ce (mal) que je ne veux pas » ; ou « Je fais choix d’agir à l’inverse de ce qui serait bien selon Dieu, parce que moi j’estime retirer plus de joie à faire ce que je veux faire et qui me plaît plus. Si vous n’êtes pas d’accord, ça m’est égal. Vous mangerez de la choucroute. Je n’entend pas me sacrifier pour vous ! »


Contre la position de Didyme selon laquelle « le ver serait déjà dans le fruit » au temps zéro :

La créature initiale n’est pas parfaite, mais elle est bonne. Bonne ? Oui ; c’est-à-dire tout le « matériel » qui est donné à la créature au départ est un bon matériel. La vie qui est donnée à la créature est bonne, son être est bon, sa physiologie, son intellect, sa capacité d’exploiter librement son propre potentiel d’une bonne façon, etc. Dieu n’a crée aucun être qui soit par essence vicieux, tordu, malade. Dieu n’a pas non plus glissé à l’insu de l’intéressé une tare morale spéciale dans son psychisme, une propension à trahir la vérité.

Non
Cela me surprend en fait que cet argument soit contre ma position vu qu’en fait je dis la même chose ?!

Je sais que je ne suis pas toujours facile à suivre mais je t’invite à me relire, en particuliers ce post-ci.


D’ailleurs, c’est assez ironique en fait, car tout ce que tu développes par la suite va dans le sens de ce que tu condamnes ici, à savoir des êtres qui de par leur volonté seule font le choix du mal (,Car tu as beau relever le fait d'imperfection, tu remets tout sur la volonté seule au final), et donc des êtres viciés à la base justement car ayant ce mal en leur fondement même pour pouvoir exprimer de manière si absolue ce mal. Car si ce n’est pas d’eux-mêmes, de ce qu’ils sont dès l’origine alors c’est bien qu’il y a eu un autre facteur…

Cinci a écrit :Le mal apparaît comme une conséquence de l’exercice du libre-arbitre de la créature, et qui, elle-même, connaît encore « assez mal » le Père éternel. Nous avons dit que la créature est limitée. Sa connaissance de Dieu est limitée au moment où elle exerce son libre-arbitre. Cette connaissance est limitée mais néanmoins suffisante pour lui faire opter pour Dieu ; bien suffisante en tout cas pour qu’elle puisse avoir le désir de devenir encore meilleur en accordant la préséance à Dieu (« A partir du peu que je connais déjà de Dieu, je souhaite que Celui-ci régne sur moi. Alors où est-ce que je peux signer mon engagement svp ? »)

Ainsi donc …

Les esprits déchus qui deviendront des esprits impurs (démons, mauvais anges, etc.) ou les hommes pécheurs : ce sont des êtres coupables à n’en pas douter. Ce sont de véritables coupables et non pas des personnes irresponsables, des innocents victimes d’une simple méprise, d’un simple manque de connaissance.

Le mal moral découle donc d’un mauvais usage du libre-arbitre.
Je suis d’accord sauf que … il m’apparaît juste que ce mauvais usage du libre-arbitre est une conséquence et non l’origine. Tu me développes des raisons qui font que telle personne va en faire un mauvais usage, ça ne répond aux choses qu’en surface. Pourquoi un tel va finir par mal en user ? Est-il une mauvaise personne ? Mais comment une personne devient-elle mauvaise ? Elle ne l’est pas devenue comme par enchantement. Et donc selon la position qui veut que cette personne soit devenue mauvaise de par sa volonté seule, alors cela signifie qu’elle était mauvaise dès son origine car ce qui est bon à l’origine ne peut pas exprimer le mal à l’arrivée s’il n’y a nul autre facteur, interaction que sa volonté seule. Pour que le bon devienne le mauvais, il faut qu’il y ait eu autre chose qui produise ce changement de la volonté.

Et pour qu’une personne soit irrémédiablement mauvaise à l’arrivée, il faudrait que le mal soit confondu avec son être profond, avec ce qu’elle est fondamentalement.

Cinci a écrit :La possibilité que le mal survienne dans la création vient encore de ce que Dieu veut la « plus grande des dignités » pour ses créatures intelligentes.

Le Père veut des êtres libres, qui veulent le « bien pour le bien », qui veulent aimer les autres de par une décision qui sera vraiment la leur. Le Père veut des êtres qui vont faire des choix d’eux-mêmes de devenir semblable à Lui (semblable à Jésus …)Parce que le Père ne veut pas contraindre personne, alors le champ est libre pour que du mal puisse apparaître à un moment donné.
Mais la créature perd sa dignité en tombant dans le péché justement…
Romains 1 : 28, Jude 1 : 6

De même encore une fois, qu’elle perd sa liberté…

Supposons comme cela semble être effectivement le cas, qu’il y a en chacun une part qui ne consent pas au péché et n’y a jamais consenti, cette part esclave de la loi de Dieu, né de Dieu, qui ne veut que le bien. Et ceci en chacun car tous sont créés de Dieu. Alors lorsque nous chutons, ceci est une violence faite à cette part de nous, cette part vraiment libre car vraiment ce qu’elle est à l’origine, voulue par Dieu. Et lorsque le péché prend place en nous, il nous asservi, il fait perdre sa liberté à ce moi profond. Il nous tente, nous fait perdre la raison.
Evidemment, ceci n’est pas audible lorsque l’on pense que des personnes peuvent être foncièrement mauvaises, sans nuances.

Il y a quelque chose de beau dans ce que renvoi une telle idée de la liberté et de la dignité mais attention à ne pas confondre liberté et esclavage, dignité et être indigne.

Par ailleurs, lorsque je lis la Bible, je ne me rappel pas avoir déjà vu Dieu, Jésus signifier comme une approbation d’une telle « liberté ». De la compassion, de la miséricorde pour l’égarement, la faiblesse oui mais en aucun cas une approbation d’une liberté conduisant à la déchéance. Toujours il blâme, condamne, voir punit. Dis-moi, où vois-tu Dieu manifester une telle approbation de l’expression d’une telle forme de « liberté » et de « dignité », qui pourtant ne serait rien d’autre que ce qu’il veut comme tu l’affirmes. On ne le voit même pas tenter de prendre des gants en ce qui concerne le péché.
D’ailleurs, pourquoi donc Dieu voudrait-il convertir, sortir le pécheur de sa condition si celui-ci ne faisait rien d’autre qu’exprimer sa liberté et son choix ? Pourquoi donc le blâmerait-il ? Pourquoi donc le condamner ?? Pourquoi s’il n’y avait pas cette part de nous prisonnière du péché ?

Cinci a écrit :Oui, mais …

Pourquoi faudrait-il qu’un être qui soit bon au départ, sans malice, aille faire un mauvais choix et jusqu’à préférer le contraire du peu qu’il pourrait déjà connaître de Dieu ?

C’est parce que la créature limité qui doit faire un choix trouve devant elle des biens véritables, et non pas des maux. Et pour entrer plus avant dans la connaissance de Dieu, il lui faudrait sacrifier ces biens que son œil aperçoit en premier. Le pécheur fait tout simplement choix de s’agripper aux biens crées qu’il connaît. Il refuse de devoir sacrifier ceux-ci. Un être bon peut s’arrêter à tel bien relatif et ne pas désirer dépasser ce stade. C’est comme dans l’épisode du jeune homme riche que relate l’Evangile. Le sujet fini par refuser de suivre Jésus dans son projet de fou cf folie de l’amour divin.

L’impureté consiste à préférer des biens inférieurs à des biens supérieurs.
Oui mais réaction qui m'apparaît plus comme une conséquence que comme l'origine.
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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Didyme » mar. 26 déc. 2017, 14:30

Cinci a écrit :
dim. 24 déc. 2017, 17:06
Evidemment, qu’on s’entende bien, lorsque l’on parle de l’amour de soi, on l’entend dans le sens d’orgueil.
Attention.

L'amour désordonné de soi, c'est la vanité. La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf manifeste un travers vaniteux. Et l'orgueil? C'est assez différent.

Qu'est-ce que l'orgueil?

L'orgueil ne consiste pas dans le fait d'avoir une trop bonne opinion de soi. L'orgueil, au contraire, c'est "se détestant, vouloir se suffire, s'isoler, s'arranger de ce mauvais matériel. Être au moins indépendant puisqu'il n'y a pas moyen d'être heureux. L'orgueil et le désespoir recouvrent la même résignation à étouffer cette soif de bonheur qui continuerait à nous étirer si douloureusement vers les autres." (L. Evely, p. 66)
Je ne sais pas, j'ai toujours lu orgueil comme une satisfaction de soi, une prétention. Après, l'orgueil peut peut-être effectivement amener à dire "je vaux mieux que ça, à refuser ses limites et à s'élever, mais la satisfaction de ses qualités, de ses réussites est déjà une forme d'orgueil.

J'ai lu que l'orgueil se rapporte plus à l'opinion que nous avons de nous-mêmes et la vanité à celle que nous voudrions que les autres aient de nous.

Après, que ce soit l'un ou l'autre, de toute façon c'est bien ces formes d'amour de soi que l'on montre du doigt pour le présent problème. Merci de préciser les nuances qui sont toujours bonnes à expliciter.

Cinci a écrit :C'est ce que j'explique plus haut.

La créature est limitée au départ. Et Dieu lui demande de choisir librement de s'engager dans une avenue nouvelle pleine d'infinie. Et la chose lui apparaît comme pleine d'inconnue, dangereuse et folle. Dieu nous demande de devenir des saints. La chose ne va pas de soi. C'est alors que la crise se produit.

Dieu ne demande pas aux animaux de devenir des saints. et nous n'entendrons jamais parler de péché non plus les concernant.

Le mal moral chez les créatures intelligentes tire son origine des exigences de Dieu pour nous; tel du fait de ce "meilleur" que Dieu ambitionne de nous donner. Parce qu'il veut nous introduire dans sa vie.

Le mal paraît au moins, déjà, en tant que conséquence du fait que l'être qui serait déjà bon refuse l'objectif de devenir meilleur ou refuse d'aller faire de la place en soi pour du mieux. "Je ne veux pas changer, je ne veux pas être transformé, je ne veux rien perdre, rien sacrifier, etc. Je refuse la proposition!"
Cela m'apparaît toujours comme la conséquence, non comme l'origine.

Mais après, pour l'explication pourquoi pas, ça peut faire partie des réactions de la créature, du processus, de la maturation de la création.
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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Didyme » mar. 26 déc. 2017, 14:41

Je ne sais pas si je me trompe mais tes explications Cinci me renvoie l'idée que Dieu a créé des êtres, des personnes, qu'il a ensuite mis à l'épreuve, confronté à certaines situations pour voir leur expression, qu'elles révèlent ce qu'elles sont ?

Ça me fait poser la question :

Qu'est-ce que Dieu a créé ? Et plus précisément, qu'est-ce que Dieu a créé chez l'homme ? A-t-il créé son corps ? Son âme ? Son identité ? Sa volonté ? Sa liberté ? Etc.

Et je poserai aussi la question : qu'est-ce que Dieu n'a pas créé ?
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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Cinci » mer. 27 déc. 2017, 3:53

Didyme a écrit :
Mais après, pour l'explication pourquoi pas, ça peut faire partie des réactions de la créature, du processus, de la maturation de la création.
Oui, c'est ce que je pense.

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » mer. 27 déc. 2017, 17:36

Cinci a écrit :
sam. 23 déc. 2017, 18:00
Le mal apparaît comme une conséquence de l'exercice du libre-arbitre de la créature, et qui, elle-même, connaît encore "assez mal" le Père éternel. Nous avons dit que la créature est limitée. Sa connaissance de Dieu est limitée au moment où elle exerce son libre-arbitre. Cette connaissance est limitée mais néanmoins suffisante pour lui faire opter pour Dieu; bien suffisante en tout cas pour qu'elle puisse avoir le désir de devenir encore meilleur en accordant la préséance à Dieu ("A partir du peu que je connais déjà de Dieu, je souhaite que Celui-ci régne sur moi. Alors où est-ce que je peux signer mon engagement svp?")

C'est parce que la créature limité qui doit faire un choix trouve devant elle des biens véritables, et non pas des maux. Et pour entrer plus avant dans la connaissance de Dieu, il lui faudrait sacrifier ces biens que son oeil aperçoit en premier. Le pécheur fait tout simplement choix de s'agripper aux biens crées qu'il connaît. Il refuse de devoir sacrifier ceux-ci. Un être bon peut s'arrêter à tel bien relatif et ne pas désirer dépasser ce stade. C'est comme dans l'épisode du jeune homme riche que relate l'Évangile. Le sujet fini par refuser de suivre Jésus dans son projet de fou cf folie de l'amour divin.
J’avais écrit ceci :
Christophe B a écrit :
sam. 23 déc. 2017, 11:45
Nous sommes créé sans la vision béatifique, comme les anges avant nous, ne connaissant pas Dieu notre âme se tourne vers elle, puisqu’elle est son seul objet d’amour. A moins que Dieu lui donne la foi et ne l’attire a Lui, dans ce cas nous l’aimons assez pour y croire, mais sommes nous prêt à Lui donner tout.
Pour que nous voulions lui donner tout, il faut que Dieu vienne touché notre âme, sinon nous ne connaissons Dieu que comme si nous en avions entendu parler, nous ne le connaissons pas personnellement. Mais c’est Dieu seul qui fait la démarche de s’unir à nous, c’est Lui qui nous amène à nous perfectionner, on ne peu le faire seul.
En fait je ne parle pas de la connaissance de Dieu comme on peu le connaitre dans la bible, j'en parle comme d'une connaissance mystique.

Didyme a écrit :
mar. 26 déc. 2017, 14:41
Qu'est-ce que Dieu a créé ? Et plus précisément, qu'est-ce que Dieu a créé chez l'homme ? A-t-il créé son corps ? Son âme ? Son identité ? Sa volonté ? Sa liberté ? Etc.
Dieu a créé tout ça, mais avant tout il nous a créé à son image, mémoire, intelligence et volonté. Il a fait de nous des êtres pensants, avec une âme faite pour le recevoir.
Didyme a écrit :
mar. 26 déc. 2017, 14:41
Et je poserai aussi la question : qu'est-ce que Dieu n'a pas créé ?
Le mal…, le péché.

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Didyme » mer. 27 déc. 2017, 23:03

Christophe B a écrit :
sam. 23 déc. 2017, 11:45
J’ai fais l’amalgame de l’amour de soi et de l’absence d’amour pour Dieu, je me suis tellement axé sur l’amour de soi, que j’en ais oublié l’origine. En effet si Dieu ne se cachait pas, ne nous laissais dans l’ignorance de Lui même, nous le connaîtrions et s’est Lui que nous aimerions. Mais si Dieu ne s’était pas caché de nous, nous n’aurions pas le choix de vouloir le chercher, de le trouver en nous et de l’aimer. Mais comme dit Blaise Pascal : « Tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais point déjà trouvé ». Dieu fait le premier pat, par le don de la foi, il nous conduit à Lui. Mais ceci n’enlève pas cela, et même avec la foi on peut encore péché.
Je ne sais pas trop, beaucoup disent que c'est notre péché qui coupe notre relation à Dieu, qui nous le voile. Et non pas Dieu qui se cache.

Après, peut-être qu'il pourrait effectivement se dévoiler malgré notre péché mais que notre condition rendrait sa vision douloureuse. Il se donne certainement à voir à ceux qui peuvent supporter de par leur avancement spirituel à en voir un certain éclat.

Peut-être aussi qu'il fait silence dans une démarche pédagogique.

Comme le faisait remarquer Origène, il permet que certains tombent plus bas pour les guérir plus sûrement.

Christophe B a écrit :On le pourrait, mais il faudrait être pour cela, créé sans le péché, dans la vision de Dieu, donc parfais. On a un devenir en Dieu, celui d’être Dieu en Dieu, celui là ce fait qu’après la mort corporel, dans l’éternité, quand nous serons Saint.
Nous somme créé pécheur pour une juste cause.

Pour appuyer ma pensé (encore de Saint Augustin):

« Comme on doit tout rapporter à la beauté de l'univers, l'oeil ne voit-il pas d'autant mieux chaque chose que les nuances sont plus variées, et pourrait-on concevoir la perfection dans l'ensemble si ce qui est moins grand ne relevait la présence de ce qui est plus grand? Ainsi dois-tu juger des différences des âmes, et tu comprendras que la misère que tu déplores a pour effet de montrer combien s'harmonise avec la beauté de l'univers l'existence de ces âmes qui ont dû devenir malheureuses pour avoir voulu pécher. Loin d'avoir dû ne les pas créer, Dieu mérite nos hommages pour avoir fait des créatures qui leur sont bien inférieures.

Mais on semble comprendre encore trop peu ce que je viens de dire et l'on réplique puisque notre misère donne le dernier trait à la perfection de l'univers, donc il lui manquerait quelque chose si nous étions toujours heureux; donc encore, si l'âme ne tombe dans la misère qu'en péchant, nos péchés mêmes sont nécessaires à l'oeuvre de Dieu. Comment alors, punit-il ces péchés sans lesquels sa créature n'eût été ni accomplie ni parfaite?
Je réponds: ni les péchés ni les souffrances ne sont nécessaires à la beauté du monde, mais, à proprement parler, les âmes elles-mêmes qui pèchent si elles veulent et qui deviennent malheureuses après avoir péché. »
Oui enfin, de ce que je connais de la pensée de Saint Augustin, surtout en rapport à la doctrine de la double-prédestination, l'idée c'est que Dieu a créé des damnés pour faire ressortir par contraste la beauté des élus. En gros, peu importe ce que subiront éternellement ces âmes, pour ne pas en dire plus, l'important est que les élus en soient davantage glorifiés ...

Inutile de dire comme j'apprécie une telle approche. À moins que je ne me trompe.
L'autre est un semblable.

Christophe B
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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » ven. 29 déc. 2017, 12:34

Dydime,

Je ne sais pas trop, beaucoup disent que c'est notre péché qui coupe notre relation à Dieu, qui nous le voile. Et non pas Dieu qui se cache.
Il est sûr que notre péché dissuade Dieu de s’unir à nous, il nous faut vouloir aller vers Lui, et être dans la démarche de l’abandon pour qu’il consente à la divine union. Mais Dieu n’est pas pressé, il fait tout pour que nous allions à Lui, que ce soit dans cette vie ou dans l’autre.

Quand on dit que Dieu se cache, c’est qu’il ne dévoile pas tout, car nul ne peu voire Dieu sans mourir. Il s’est fait connaître par les testaments, et nous savons dorénavant que « qui a vue le Fils, voit le Père », mais que partiellement, nous ne connaissons de Lui que son amour pour nous.

Au commencement les anges ne voyaient pas Dieu, ils n’avaient pas la vision béatifique, ils ne Lui étaient pas unis non plus, il leurs étaient caché, comme à notre âme ; mais de par leurs haute intelligence, ils ont eu la ferme conviction d’être créés.
Par autosuffisance, certains ont fait le choix d’ignorer Dieu en eux, ils s’en sont détournés et se sont centrés sur eux.
Étaient ils prédestinés ? C’est une autre question.

Adam et Ève non plus ne voyaient pas Dieu, et comme ils étaient d’intelligence moyenne, Dieu s’est fait connaître à eux, ils l’entendaient parler. Mais à l’heure du choix, parce qu’ils n’étaient pas unis à Lui, ils l’ont ignorés, et préférer être eux même comme des Dieu.

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Christophe B » sam. 30 déc. 2017, 17:54

Un petit texte, d'un grand Monsieur, qui vient étayer la théorie -> connaissance = amour = confiance = obéissance.

« L’amour véritable et parfais se mesure à la grande espérance et à la confiance que l’on a en Dieu, car aucune chose ne se mesure mieux, l’amour accompli, que la fidèle confiance. La fidèle confiance révèle combien une personne aime l’autre ; et toute la fidèle confiance que l’on ose avoir en Dieu, on la trouve vraiment en Lui, et mille fois d’avantage. De même qu’un homme ne peut jamais trop aimer Dieu, jamais un homme ne pourrait avoir trop de fidèle confiance envers Dieu. Tout ce que l’on peut faire par ailleurs n’est pas aussi avantageux que la grande fidèle confiance envers Dieu. Avec tous ceux qui ont eu ainsi grandement confiance en Lui, il n’a jamais manqué d’accomplir de grandes choses. Chez tous ceux- là, il a bien montré que cette fidèle confiance a l’amour pour origine, car l’amour n’a pas seulement fidèle confiance, il a aussi un vrai savoir et une certitude exempte de doute. - Maître Eckhart - »

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Re: Sur l'origine du mal

Message non lu par Cinci » dim. 31 déc. 2017, 1:59

Didyme a écrit :
Je ne sais pas si je me trompe mais tes explications Cinci me renvoie l'idée que Dieu a créé des êtres, des personnes, qu'il a ensuite mis à l'épreuve, confronté à certaines situations pour voir leur expression, qu'elles révèlent ce qu'elles sont ?

Dieu n'a pas le choix. Tout comme dans le fait de vouloir créer un être autonome différent de Lui. Cette création ne lui laisse aucun choix sinon de créer un être imparfait au départ.


Dans l'exemple du jeune homme riche : on a un bon candidat en partant. C'est Dieu qui l'a crée. Il est obéissant, bien disposé envers la loi de Moïse. Le Père éternel l'aime, Jésus l'aime. Merveilleux ! Ah mais la perfection ? Il manque à cette bonne créature d'être parfaite. "Si tu veux être parfait, alors suis-moi." Ça, c'est l'épreuve. - Ah non ! Je ne peux pas me résoudre à laisser aller mes richesses. Quand même ! C'est insensé. Je tiens à mon or. C'est trop me demander.

C'est là comme le schéma de la naissance du mal métaphysique. Désobéissance. Refus de la créature.


L'épreuve à surmonter est la condition afin de pouvoir entrer dans la dynamique qui est celle de Dieu et c'est une dynamique de sacrifice. L'épreuve n'est pas un piège, pas une fantaisie arbitraire d'un Dieu pervers qui aime voir les gens souffrir. C'est comme le passage, l'étape de maturation à traverser afin d'avoir accès à la vie divine.

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