Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

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Marc Oh
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Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Marc Oh » lun. 20 mars 2017, 18:20

En ce qui concerne la pratique de notre religion et en France, Je fait parti de ces catholiques qui constatent qu'il y a ceux qui « suivent » Rome (en particulier Redemptionis Sacramentum) et ce qui se fait ici ou là et qui est très variable. Ce me parait dommage pour une Église sensée être universelle. Je remarque le degré d’incompréhension et la forte tension qu’il y a entre nous sur ce forum (même si nous sommes tous a priori bienveillant :) ). Nous sommes il me semble aussi tellement sur nos gardes. Moi comme d'autre, je me suis senti rejeté, jugé et condamné. J’ai même entendu d’un prêtre que nos bouches étaient dégoûtantes et que la liturgie des heures (recommandé aux laïcs par Vatican II) c’était pour les moines. C’est pour moi déchirant et j’en soufre lorsque j’écoute de tels propos (que je n’écoute plus d’ailleurs). Même déchirement quand la nature sacrificielle de la messe est totalement escamoté au profit de la commémoration de la scène (avec une grosse miche farinée sur l’autel). J’habite en ville et je peu choisir mon lieu de culte heureusement.
J’apprécie la messe de la forme ordinaire célébré avec l’esprit de la présentation général du missel romain (très largement ignoré). Mais justement pas sur ce sujet que j’aimerai vous entendre.
J’ai écouté les trésors de Vatican II dont on parle peu, ce qui concerne la christologie. Je suis ravie, je comprend dans une langue moderne de quoi il s’agit. J’ai entendu tellement de choses sans fondement sur notre dernier concile, le prétendu « esprit du concile » qui défonce le marbre au marteau piqueur, bref des excès qui engendre d'autres excès!


J’aimerai donc vous lire concernant le « traditionalisme » mais pas sur des aspects concernant la pratique religieuse ou du moins pas la liturgie. Bref ses fondements, ce qu’il est ou ce qu’il n’est pas.
On m’a parler du subjectivisme...
Merci par avance de vos apports

Marc
Dernière modification par Marc Oh le mer. 22 mars 2017, 12:17, modifié 2 fois.
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » lun. 20 mars 2017, 20:36

J'ai un peu de mal à comprendre votre texte. Vous êtes passé par un logiciel de traduction ?

Dans quelle ville avez-vous vu une miche enfarinée sur l'autel ? Je croyais que ce genre de chose avait disparu depuis les années 70.

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Marc Oh » lun. 20 mars 2017, 21:23

Merci Pierre, de votre franchise. Je suis dyslexique et je n'ai pas besoin de nouvelles technologies pour pondre des textes alambiqués. Je vais couper mes phrases en petits bouts d'habitude ça rend tout plus claire.
La miche sur l'autel c'était pour la "déco" du Jeudi saint. C'est en effet interdit de déposé quoi que soit sur l'autel du sacrifice quoi que se soit d'autre que nécessaire (pas de fleur, ect...) s’agissant de nourriture (expressément interdit dans l'église sauf eurologie mais pas sur l'autel) c'est d'autant plus grave que c'est du pain qui est de nature à être consacré! mais c'est une autre histoire et justement pas de cela (les abus liturgiques) dont je voulais vous interroger. C'était à Tours, pour répondre à vos question, et je pense que l'ignorance y est pour beaucoup.
je corrige et attend vos avis.
à bientôt de vous lire

Marc
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Message non lu par Pierre Carhaix » lun. 20 mars 2017, 23:09

Toutes mes excuses !

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » lun. 20 mars 2017, 23:12

Marc Oh a écrit :
lun. 20 mars 2017, 18:20
J’aimerai donc vous lire concernant le « traditionalisme » mais pas sur des aspects concernant la pratique religieuse ou du moins pas la liturgie. Bref ses fondements, ce qu’il est ou ce qu’il n’est pas.
Comme traditionnaliste, j'aime partir de la racine des mots, des définitions etymologiques. «Tradition» vient d'un verbe latin qui signifie transmettre, passer plus loin, confier à quelqu'un. Comme dans poculum alicui tradere = transmettre la coupe à quelq'un (Cicero, cité par Gaffiot).

Le traditionalisme est, donc, transmettre ce qu'on a reçu. Le traditionalisme catholique est la foie de nos ancêtres, de ma grand-mère, de mon grand-père.

Ce que le traditionalisme n'est pas ?
-Il n'est pas immobilisme. Il n'est pas figé, il n'est pas muséification. Il est vivant. Le traditionalisme n'est pas transmettre comme un tuyau transmet l'eau, mais vivre. On a reçu la foie vivante, on transmet la foi vivante, car nous ne sommes pas la religion du Livre, mais la religion de la Vie.
-donc il n'est pas archéologie. On ne fait pas des choses parce que ceux il y a 20 génération l'ont fait, car nos grands-mères n'ont pas vécu il y a 20 générations. Par exemple, on peut rencontrer un argument plaidant pour la communion habituelle sous les deux espèces: c'est comme ça qu'on a fait à la Cène, la première Messe. Ce n'est pas un argument traditionaliste, c'est de l'archéologie biblique, de la panoplie des protestants. Ce n'est pas de cette manière que nos grand-mères avaient l'habitude de communier.
-il n'est pas passéisme en ce qui concerne les acquisitions de la technique. Les traditionalistes utilisent beaucoup l'Internet et ils ont l'habitude d'éclairer leurs maisons à l'électrique. Si Dieu le Fils aurait choisi de venir de nos jours, il est très probable qu'il ne serait pas entré dans la cité sur une ânesse, mais plutôt au bord d'un Renault Clio. Mais il est certain qu'il aurait prêché la même doctrine.
-finalement, le traditionalisme ce n'est pas le rejet de la nouveauté. Mais ni faire de la nouveauté un critère de valeur et adopter des nouveautés par amour de la nouveauté. Tout dépend du sens de la nouveauté. Est-ce cette nouveauté dans le sens de la tradition ? Elle l'a soutient, elle l'enrichit ? Par exemple, la pratique de l'adoration eucharistique est très nouvelle. Quand grand-maman était jeune, ça n'existait pas, en tout cas pas dans la façon organisée et formelle de nos jours. Un jour, le saint curé d'Ars se rend compte qu'il a oublié le saint ciboire sur l'autel et rentre dans l'église pour le remettre dans le tabernacle. En rentrant, il voit, abasourdi, un paysan, un de ses ouailles, qui regardait, agenouillé, le saint ciboire. Pas seulement il regardait, mais il disait quelque chose difficilement intelligible. «Mais qu'est-ce que vous faites là-bas ?». «Je Le regarde et Il me regarde. Je Lui parle et Il me parle» répond, sereinement, le paysan. Eh bien, les traditionalistes ont adopté à bras ouverts cette nouveauté. Parce qu'il s'agit 1) d'une nouveauté dans le sens de la tradition 2) d'une nouveauté qui vient à l'appui de la tradition (=de ce qu'on a reçu) et 3) d'une nouveauté développé d'une façon organique.

Fraternaliter in Christo,
A.

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Marc Oh » mar. 21 mars 2017, 0:47

je témoigne que j'ai expérimenté les choses incroyable que l'on peu vivre pendant l'adoration du saint sacrement exposé. Le sentiment d’être compris, aimé, et sentir la tendresse de Dieu... Cela est sûrement évident pour beaucoup d'entre vous mais pour moi et ma misère ce ne l'était pas. Cela nous éloigne du sujet.
Même s'il y a bien entendu un lien je ne suis pas très sur: vous distinguez traditionalisme de la Tradition (avec un grand T)? Je précise que je parle de celle qui conjointement aux Saintes Écritures constituent la Révélation. Sans Tradition (celle des Apotres et des Pères de l’Église car on est rarement original dans le domaine) l’Écriture est amputée. La liturgie est une façon pour notre foi vivante (et transmise) en cette révélation de s'exprimer.
merci.
Marc Oh!
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » mar. 21 mars 2017, 7:18

Marc Oh a écrit :
mar. 21 mars 2017, 0:47
je témoigne que j'ai expérimenté les choses incroyable que l'on peu vivre pendant l'adoration du saint sacrement exposé. Le sentiment d’être compris, aimé, et sentir la tendresse de Dieu... Cela est sûrement évident pour beaucoup d'entre vous mais pour moi et ma misère ce ne l'était pas. Cela nous éloigne du sujet.
Même s'il y a bien entendu un lien je ne suis pas très sur: vous distinguez traditionalisme de la Tradition (avec un grand T)? Je précise que je parle de celle qui conjointement aux Saintes Écritures constituent la Révélation. Sans Tradition (celle des Apôtres et des Pères de l’Église car on est rarement original dans le domaine) l’Écriture est amputée. La liturgie est une façon pour notre foi vivante (et transmise) en cette révélation de s'exprimer.
merci.
La Tradition (avec un grand T), la Sainte Tradition, est une des quatre sources de notre foi. Et encore une des deux sources primaires, la Sainte Tradition ayant le même rang que la Sainte Ecriture. Par contre, le traditionalisme n'est pas source, mais attitude. Méthode. Façon de penser et façon de vivre. Une option fondamentale si vous voulez. Un peu comme la droite et la gauche sont des options fondamentaux en politique. D'ailleurs, l'adhésion ou non à la tradition est l'ultime critère qui distingue droite et gauche. On ne peut pas être en même temps traditionaliste et de gauche, tout comme on ne peut pas être en même temps moderniste et de droite. Traditionalisme et modernisme se distinguent et s'opposent, tout comme droite et gauche se distinguent et s'opposent, la seule différence est que le binome traditionalisme/modernisme va bien au-delà de la politique et transperce toutes les aspects de la vie, jusqu'aux fondements philosophiques, jusqu'au Weltanscauung. Le monde va depuis le cosmos vers le chaos ou bien depuis le chaos vers le cosmos ? Voilà une question fondamentale. Car, si le monde va depuis le cosmos vers le chaos, alors on doit être traditionaliste pour faire tarder sa dégénérescence (et, si possible, par la grâce de Dieu, obtenir sa réversion). Par contre, si le monde va depuis le chaos vers le cosmos, alors on doit être moderniste, car le plus on change plus vite, le plus le monde s'épanouit et se rapproche de son accomplissement.

On est traditionaliste si on est adepte de la première possibilité de réponse. C'est ce que les traditionalistes lisent dans la Bible, qui commence avec l'Âge d'or et finit avec l'Apocalypse. Avons-nous une meilleure image de Dieu que les Apôtres et les Pères ont eu ? Si la réponse est «oui», alors on se place dans le modernisme, car on parle évolution par rapport à un «moment zéro» du christianisme. Si la réponse est «non», alors on se place dans le traditionalisme, car on parle dissolution, on parle d'une perte, par rapport au même moment.

Y a-t-il une troisième voie entre le traditionalisme et le modernisme, pourrait-on trouver une «porte royale» entre les deux? À mon avis, non. C'est comme le mirage d'un centre, toujours imaginaire, en politique. Un centre qui pourrait, peut-être théoriquement, exister, mais qui n'existe pas en pratique. Néanmoins, il y a des catholiques qui se disent «conservateurs» tout comme il y a des politiciens qui se réclament «de centre». En réalité, on voit bien qu'on est soit de droite, soit de gauche. Des uns l'assument, des autres ne l'assument pas. Les autruches aussi sont soit de droite, soit de gauche, leurs particularité est qu'elles vivent dans le déni: elles se disent toutes centristes mais leur centre c'est le sable dans lequel elles ont enfoncé leurs têtes. La question que je pose à un catholique qui se réclame ni-ni ou bien qui se dit «conservateur» est très simple: conserver quoi exactement ? La réponse habituelle est «conserver le Christ». Mais alors, de quel Christ et de quel christianisme parle-t-on ? D'un Christ qui a fait la révolution ou d'un Christ qui a fait le retour aux fondements de la foi ? Essayer de sortir du binome traditionalisme/modernisme? Il s'agit dans le meilleur des cas d'une l'utopie et dans le pire d'une ignorance. Un philosophe que j'estime beaucoup disait «sortir d'un ancien encadrement c'est entrer dans un encadrement nouveau».

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mar. 21 mars 2017, 12:42

Permettez à l'autruche que je suis d'assumer totalement son refus de l'un et de l'autre, comme de toute fermeture d'esprit en général.
Le traditionalisme croit que ce qui est passé est forcément supérieur à tout ce qui peut se dire depuis, le modernisme croit que ce qui vient après est toujours supérieur à ce qu'il y avait avant, c'est d'ailleurs en gros ce que vous expliquez.
Mais en vérité, comme le chante Brassens, le temps ne fait rien à l'affaire. Pourquoi tout simplement ne pas préférer la vérité et la justice d'où qu'elles viennent et quelles que soient les moments de leur apparition?
Concrètement, rien n'empêche évidemment d'aimer la tradition, puisqu'elle est le trésor qui nous est transmis. Mais il ne nous est pas transmis de fermer notre esprit.
Le traditionalisme est une idée moderne, et le modernisme est une vieillerie. Les deux, traditionalisme et modernisme, ont été rejetés par l'Eglise dès le dix-neuvième siècle. Sans doute à l'époque les autruches trônaient-elles sur le siège de Pierre. :siffle:
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » mar. 21 mars 2017, 20:58

prodigal a écrit :
mar. 21 mars 2017, 12:42
Mais il ne nous est pas transmis de fermer notre esprit.
Mais qui a parlé de fermeture d'esprit ? Justement parce que la fermeture d'esprit ne nous a pas été transmise, elle ne peut pas être traditionnelle. Là même chose on pourrait dire concernant le modernisme: on peut dire beaucoup de choses sur les modernistes, mais on ne peut pas dire qu'ils manifestent fermeture d'esprit. Ou bien vous pensez que ce sont les autruches qui se mettent à côté du problème qui sont les seuls ayant ce trait mal défini et qui ne satisfait pas les rigueurs du langage théologique qui est «l'ouverture d'esprit» ?
Les deux, traditionalisme et modernisme, ont été rejetés par l'Eglise dès le dix-neuvième siècle. Sans doute à l'époque les autruches trônaient-elles sur le siège de Pierre
Parlons documents. Je suis prêt à mettre des documents sur la table, selon lesquelles l'Église du 19-ème siècle a rejeté le modernisme. Êtes vous prêt, à votre tour, d'ouvrir les documents selon lesquelles elle a rejeté le traditionalisme ?

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mar. 21 mars 2017, 23:10

Je faisais allusion au rejet par Vatican I (j'ai bien dit I) du traditionalisme en tant que courant philosophique, représenté essentiellement par de Bonald, selon lequel c'est la tradition qui représente la source ultime de toute connaissance, ce qui revient à nier la valeur de la raison.
Le traditionaliste en effet se trompe gravement sur la vérité dès lors qu'il en fait quelque chose de figé et qui interdit tout examen critique. La théologie catholique n'est pas, contrairement à ce que pensent les anticléricaux (et les traditionalistes) un ensemble de formules répétées sans variation depuis des siècles, mais un effort pour mieux pénétrer les mystères du salut.
Bien entendu, vous êtes en droit de me répondre que ceux qui aiment la tradition ne sont pas des traditionalistes en ce sens, de même qu'on n'est pas moderniste pour aimer le jazz, par exemple. C'est bien cela que je veux dire. Les "-ismes" sont des fermetures à la vérité, et il est absurde et injustifiable d'exiger de choisir entre un -isme et un autre. Sinon, il faudrait changer l'appellation de l'Eglise, et supprimer le beau mot de "catholique".
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » mer. 22 mars 2017, 0:07

prodigal a écrit :
mar. 21 mars 2017, 23:10
Je faisais allusion au rejet par Vatican I (j'ai bien dit I) du traditionalisme en tant que courant philosophique, représenté essentiellement par de Bonald,
Je ne garde pas le souvenir d'avoir lu, parmi les documents du Concile V-1, le nom de de Bonald. Je comprends que vous faites un allusion. Pourriez-vous être plus explicit, en vous référent à un titre et un paragraphe ?
C'est bien cela que je veux dire. Les "-ismes" sont des fermetures à la vérité, et il est absurde et injustifiable d'exiger de choisir entre un -isme et un autre. Sinon, il faudrait changer l'appellation de l'Eglise, et supprimer le beau mot de "catholique".
Pour «christianisme» ?

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » mer. 22 mars 2017, 2:24

prodigal a écrit :
mar. 21 mars 2017, 12:42
Permettez à l'autruche que je suis d'assumer totalement son refus de l'un et de l'autre, comme de toute fermeture d'esprit en général.
Le traditionalisme croit que ce qui est passé est forcément supérieur à tout ce qui peut se dire depuis, le modernisme croit que ce qui vient après est toujours supérieur à ce qu'il y avait avant, c'est d'ailleurs en gros ce que vous expliquez.
Mais en vérité, comme le chante Brassens, le temps ne fait rien à l'affaire. Pourquoi tout simplement ne pas préférer la vérité et la justice d'où qu'elles viennent et quelles que soient les moments de leur apparition?
Concrètement, rien n'empêche évidemment d'aimer la tradition, puisqu'elle est le trésor qui nous est transmis. Mais il ne nous est pas transmis de fermer notre esprit.
Le traditionalisme est une idée moderne, et le modernisme est une vieillerie. Les deux, traditionalisme et modernisme, ont été rejetés par l'Eglise dès le dix-neuvième siècle. Sans doute à l'époque les autruches trônaient-elles sur le siège de Pierre. :siffle:
Laissons tomber les "ismes" cinq minutes. Pourquoi allez vous à l'église assister à la messe, communier ? Oui c'est vrai, pourquoi répétez vous cet acte vieillot et poussiéreux venu des époques antérieures ?
Et pourquoi lisez vous la bible, ce vieux livre écrit il y a des siècles ?
Et ce ne sont que des exemples.

Je vous livre quelques éléments de réponse : tout homme est travaillé par la question de son origine. Dès son enfance. Cette question est essentielle pour savoir où l'on va, et ce que l'on fait. Sinon, on bascule dans la vie animale et instinctive, où l'on agit sans se poser de questions, pour satisfaire ses instincts immédiats.
Pourquoi lisez-vous des livres ?
Encore mieux, pourquoi apprenez vous un langage ? Pourquoi portez vous un nom ?
Ne remarquez vous pas que la société moderne capitaliste fait tout pour vous arracher à un quelconque enracinement, à une quelconque origine ? Pourquoi selon vous ?
Et l'autre élément essentiel, c'est le récit. Le récit commun collectif. Parce que l'autre question essentielle concerne le rapport, le lien avec les autres, qui donne un repère. Ce repère est fourni par le récit commun et collectif : la Bible, mais aussi Homère, les mythes grecs antiques, l'Histoire, les fables, les contes, les oeuvres d' art. Bref, tout ce que le capitalisme assoiffé d'or et d'argent exècre et tente s'extirper pour nous transformer en chiffres sans âmes. Et c'est cela, la tradition au sens large.
Lorsque votre maman vous chantait une berceuse, elle vous transmettait tout ceci ! Elle faisait de vous un humain.

Car pourquoi en avons-nous besoin ? Parce que nous ne sommes pas Dieu. Nous ne sommes pas omniscients, omnipotents, ni autosuffisants. Nous avons besoin de tout un faisceau de rites, histoires, symboles, langages, pour nous relier, nous les humains, entre nous à travers le temps et l'espace, parce que nous sommes faibles, misérables, chétifs, vulnérables, fragiles.

N'étant pas Dieu, nous n'avons pas la science infuse. D'où la nécessité d'une tradition.

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par apatride » mer. 22 mars 2017, 4:25

En espérant ne pas être hors-sujet, mais puisqu'on parle de Tradition, je pense à cette courte citation de Chesterton, tirée de son somptueux "Orthodoxie" :
"Il est une chose que, depuis mon enfance, je ne suis jamais parvenu à comprendre. Où les gens ont-ils puisé l'idée que la démocratie puisse s'opposer d'une certaine manière à la tradition ?

La tradition, de toute évidence, n'est que la démocratie prolongée à travers le temps. C'est la confiance faite à un chœur de voix humaines ordinaires plutôt qu'à quelque récit isolé ou arbitraire. Celui qui oppose un texte d'histoire allemande à la tradition de l'Eglise catholique en appelle très exactement à l'Aristocratie. Il en appelle à la supériorité d'un seul spécialiste contre la vulgaire autorité d'une foule.

Il est très facile de comprendre pourquoi une légende est traitée, et doit être traitée, avec plus de respect qu'un ouvrage historique. La légende est généralement l'oeuvre de la majorité des membres d'un village, une majorité d'hommes sains d'esprit. Le livre est généralement écrit par le seul homme du village qui soit fou. Ceux qui allèguent contre la tradition que les hommes de jadis étaient des ignorants peuvent aller soutenir ce point de vue au Carlton Club. Qu'ils tirent donc en même temps argument de ce que les bas quartiers sont peuplés d'ignorants ! Cela ne nous convaincra pas.

Si dans les affaires courantes nous attachons une si grande importance à l'opinion des hommes ordinaires quand elle se manifeste massivement, il n'y a pas de raison de dédaigner l'histoire ou la fable des hommes ordinaires de jadis. La Tradition étend le droit de suffrage au Passé. C'est le vote recueilli de la plus obscure de toutes les classes, celle de nos ancêtres. C'est la démocratie des morts. La tradition refuse de se soumettre à la petite oligarchie arrogante de ceux qui n'ont fait que de naître. Les démocrates n'admettent pas que des hommes soient disqualifiés du fait de leur naissance ; la tradition n'admet pas qu'ils le soient du fait de leur mort.

La démocratie nous interdit de négliger l'opinion d'un honnête homme même s'il est notre valet de chambre. La tradition nous requiert de ne pas négliger l'opinion d'un honnête homme, même s'il est notre père. Moi, en tout cas, je ne peux séparer les deux idées : démocratie et tradition ; il me semble évident qu'elles sont une seule et même idée. Les morts siégeront dans nos conseils. Les anciens Grecs votaient avec des cailloux ; les morts voteront avec des pierres tombales. C'est tout à fait régulier et officiel : la plupart des pierres tombales, comme la plupart des bulletins de vote, sont marqués d'une croix.

Je dois le dire, si j'ai eu un préjugé, ce fut toujours un préjugé en faveur de la démocratie et donc de la tradition. (...) Par inclination je suis plus tenté d'accorder foi à la masse des travailleurs qu'à cette classe fermée de littérateurs ennuyeux à laquelle j'appartiens. Je vais jusqu'à préférer les caprices et les préjugés des gens qui voient la vie de l'intérieur aux démonstrations les plus claires de ceux qui la voient de l'extérieur. Je croirai toujours plus volontiers aux fables contées par des vieilles femmes qu'aux faits rapportés par des vieilles filles. Aussi longtemps que l'esprit est fécond, qu'il donne libre cours à sa fantaisie !"

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mer. 22 mars 2017, 16:03

Cher Altior,
je n'ai actuellement pas accès à ma bibliothèque, mais en fouinant sur Internet j'ai trouvé ceci, extrait de l'Encyclopedia Universalis, qui révèle qu'en effet je me suis trompé, la condamnation du traditionalisme étant légèrement antérieure à Vatican 1. Mais je ne pense pas que cette erreur change quelque chose sur le fond.
TRADITIONALISME, philosophie
Doctrine selon laquelle les formes politiques et religieuses doivent être conservées, dès lors qu'elles sont traditionnelles, consacrées par le passé. Qu'on échoue à les justifier intellectuellement n'est pas une objection, car leur valeur ne tient pas au fait qu'on peut les vérifier ou non par voie critique (enquête et raisonnement sont faillibles, superficiels, inadéquats) ; elle tient au fait que la société, qui s'est édifiée bien avant l'apparition de la science, a dû connaître et satisfaire ses besoins profonds de manière spontanée, c'est-à-dire à partir d'une révélation congénitale. C'est cette révélation qui est le fondement de tout, y compris de la vérité. Et c'est par la tradition, chargée de transmettre la révélation initiale, que la vérité peut être connue (le traditionalisme conduit au fidéisme, parce qu'il réserve à la foi issue de la révélation et communiquée par tradition de déterminer même les vérités de raison). Historiquement, cette doctrine a été celle de Bonald, de Joseph de Maistre, de Bautain, de Bonnety. Elle repose sur une conception précise de l'autorité et de l'obéissance : l'homme est « un être essentiellement enseigné ». Il doit recevoir la vérité d'en haut, comme héritage collectif. Cet héritage ne peut venir que de la société, parce que la fondation de celle-ci coïncide avec une Révélation qui apporte toutes les vérités nécessaires, avec une Parole qui les authentifie et qui, d'ailleurs, pour certains traditionalistes, fut à l'origine d'une langue universellement comprise, véhicule de connaissances indispensables en matière d'organisation, de morale, de religion. Si, au contraire, l'homme entend user du sens propre, de la raison individuelle, il préfère la nouveauté à la « vérité oubliée » et il introduit l'erreur, puisque la nouveauté est « sans ancêtres », c'est-à-dire sans garantie, et devrait rester « sans postérité », faute de paternité légitime. Le traditionalisme fut condamné en 1855 par l'Église romaine, qui tint à réhabiliter l'usage normal de la raison et du raisonnement.

Cher Pierre Carhaix,
personne ne songe à nier la valeur de la tradition. C'est la valeur du traditionalisme qui est en cause. Voilà pourquoi tout naturellement j'ai parlé des mots en -isme. Evidemment ce n'est pas une faute en soi de finir par isme, et on peut conserver les mots "christianisme" et "catholicisme" sans m'offenser! :D
Cher apatride,
le texte de Chesterton me plaît bien, car avec son côté taquin bien connu il associe à la tradition la démocratie, valeur moderniste par excellence! (évidemment il fait çà pour embêter les modernistes). C'est assez drôle.
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Héraclius » mer. 22 mars 2017, 18:49

Le traditionnalisme fidéiste n'a pas grand' chose à voir avec le traditionnalisme post-vatican II (qui théologiquement et philosophiquement descend justemment plutôt du courant néothomiste rationnaliste adversaire du traditionnalisme fidéiste).
''Christus Iesus, cum in forma Dei esset, non rapínam arbitrátus est esse se æquálem Deo, sed semetípsum exinanívit formam servi accípiens, in similitúdinem hóminum factus ; et hábitu invéntus ut homo, humiliávit semetípsum factus oboediens usque ad mortem, mortem autem crucis. Propter quod et Deus illum exaltávit et donávit illi nomen, quod est super omne nomen, ut in nómine Iesu omne genu flectátur cæléstium et terréstrium et infernórum.'' (Epître de Saint Paul aux Philippiens, 2, 7-10)

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