Altior,
Petite foi, celle qui est conditionnée: si le prêtre du coin me donne cette «chose-là», alors j'ai la foi. S'il me refuse, alors je laisse tomber la foi.
Sa foi ne pouvait pas être bien grande. C'est sûr. Comme c'est souvent le cas chez les néophytes ou les chrétiens qui la redécouvre après des décades.
Elle est tout aussi absurde après Amoris Laetitia, car on donne feu vert à la communion tandis qu'on maintient le feu rouge au remariage. Le monsieur dont vous parlez a la même raison de laisser tomber sa petite foi, car le méchant prêtre du coin qui le juge à la place de Dieu lui donnera cette chose-là, mais il refuse de le marier avec sa concubine.
Il était civilement marié avec sa nouvelle femme.Il ne se trouvait pas dans l'état de concubinage. D'une manière ou d'une autre, je suis d'accord que la situation n'est pas idéale.
Je lui avais bien parlé d'une possible procédure d'annulation du premier mariage. Sauf que dans le contexte de l'époque, son imaginaire était marqué d'une forte impression à l'effet que la hiérarchie de l'Église ne lui donnerait aucune chance. A tort ou à raison, c'est le sentiment dominant qui se dégageait à l'époque. Aujourd'hui? avec le pape François? Sans doute que son impression n'aurait pas été la même.
Vous ajoutez plus loin :
Le but de l'Église c'est le salut des âmes, non pas de donner des envies de faire des tours dans sa cour. C'est la différence entre l'épouse de Christ, la vraie Église et la prostituée, la fausse Église. Quant à la privation et à l'interdiction, c'est le péché continué, c'est le vice celui qui interdit. Pour qu'un sacrement soit efficace, ce n'est pas assez d'être administré et de l'avoir reçu, encore faut-il que celui qui le reçoit soit dans la bonne disposition de l'âme. Autrement, si le pénitent ne réalise pas qu'il est en état de péché mortel, s'il ne pense pas d'en finir, n'imaginez pas qu'une fois les mots «Ego te absolvo» soient prononcés, l'absolution est là. N'imaginez pas qu'une fois le Très Saint Sacrement consommé, le Christ travaille en lui. La meilleure preuve est qu'à l'Église d'à côté de moi pas mal de gens qui vivent en concubinage et qui pratique la contraception communient chaque Dimanche et cela bien avant Amoris Laetitia et continuent de vivre en concubinage et à pratiquer la contraception. Le Christ ne travaille pas en eux tout autant qu'il ne l'a fait en Judas l'Iscariote.
Votre remarque peut contenir une part de vrai de façon générale. Admettons. Seulement, elle ne peut pas s'appliquer à un cas particulier comme celui que je viens de dire.
En l'occurrence, notre homme est remarié civilement depuis des années et a des enfants avec sa nouvelle femme : il ne peut pas revenir en arrière. Il ne peut pas abandonner ses enfants pour faire plaisir à l'évêque, tenter de retrouver la première femme qui l'a jeté et qui se sera elle-même remariée. Il ne peut pas se trouver dans un état de "péché mortel", pas avec cette condition présente d'homme marié avec des enfants; condition dont le pape Jean-Paul II disait "que toute l'Église devrait la considérer avec charité".
Il ne peut pas être en situation de "péché mortel" quand il n'aura même jamais eu la conscience de devoir pécher gravement au départ, en se considérant plutôt comme une victime des manoeuvres de sa première femme. Ce n'est pas lui qui demande le divorce. Ensuite, n'ayant toujours pas la foi jusque-là, il n'a pas la conscience non plus de pécher gravement en se remariant. En se remariant ainsi il n'y a pas chez lui cette petite lumière qui permettrait de penser que sa volonté eût été pleinement engagé à souhaiter rompre avec la loi divine cf Thomas d'Aquin "Qu'Il vaut mieux suivre sa conscience même erronée ... que si l'on est convaincu que l'eucharistie serait un sacrement du diable il vaudrait mieux la refuser, etc."
Faut voir
Si Altior marié devait divorcer et qu'il devait ensuite se remarier, avec l'état de la conscience éclairée qui est celle d'Altior, alors nous pourrions dire qu'Altior pèche gravement et mortellement.
Mais si c'est le catholique lambda, sans foi, éloigné de l'Église, mal instruit des choses de la foi, qui croirait bien plutôt très bien agir en se remariant, alors celui-là ne pèche pas mortellement, n'ayant pas pécher contre sa conscience. Si on veut voir du péché dans le fait du remariage dans ce dernier, il faudrait dire que celui-là pouvait jouir de circonstances atténuantes et qui viennent diminuer la gravité du péché commis, en sorte que le péché passe de la catégorie mortelle à la catégorie vénielle. Et c'est cela qui expliquerait sans doute qu'un pape Jean-Paul II pouvait s'exprimer comme il le faisait en 1981.
Bref, tout ne peut pas être appliqué de façon mécanique, automatique. Toutes ces décisions reposent aussi dans la bonne foi de celui qui témoigne de sa situation, l'évêque doit bien faire confiance dans une certaine mesure à ce que la personne lui rapporte d'elle-même, la personne connaît l'état de sa propre conscience, etc.