Bonjour Le Béréen,le Béréen a écrit :Bonjour à tous ,
J ’espère que cet échange cordial mais franc dans sa formulation employée, ne vous froisse pas . Dans le cas contraire je tiendrai à m’en excuser
Bien cordialement
L.B.
Que nenni, que nenni ! Vous défendez vos convictions avec autant de fermeté et d'énergie que j'en mets à défendre les miennes. Le choc des dialectiques, ça fait des étincelles et c'est compréhensible.
Ecoutez, afin de clarifier les éventuels échanges à venir, je vais vous dire comment je vois les choses sur l'ensemble des problématiques qui pourraient être abordés dans ce fil.
Si Jérôme de Stridon a traduit adorer, il donna au terme proskunéo le sens qu’on s’attendait de lui au sujet des mages et d’Hérode. Etant moine, son travail fût une commande de Damase 1ier trinitaire comme il se doit. Sa connaissance du grec comme vous le faites remarquer n’est plus suivie par les mêmes instances, puisque ce terme n’est plus traduit par adorer, mais par ‘’lui rendre hommage ‘’
Catéchisme de l'Eglise Catholiqueil y aurait beaucoup à dire, surtout après la mort des apostoliques :Polycarpe, Papias,Clément, Irénée et Justin….Beaucoup furent des hommes issus de l’école d’Alexandrie pétris de philosophie platonicienne qui fit le lit au trinitarisme par inculturation de la pensée grecque
251 Pour la formulation du dogme de la Trinité, l’Église a dû développer une terminologie propre à l’aide de notions d’origine philosophique : " substance ", " personne " ou " hypostase ", " relation ", etc. Ce faisant, elle n’a pas soumis la foi à une sagesse humaine mais a donné un sens nouveau, inouï à ces termes appelés à signifier désormais aussi un mystère ineffable, " infiniment au-delà de tout ce que nous pouvons concevoir à la mesure humaine " (SPF 9).
Vous avez raison de ne pas aller jusque là , car nous serions en pleine déshérence et dans une symbolique non scripturaire interprétative très partisane qui, par des raisonnements spéculatifs bâtissent une théologie sur laquelle un enseignement est ensuite donné et forment une obligation à croire
Ce sont ces 3 passages de votre réponse qui m'incitent à cette clarification parce c'est là que nous sommes au coeur d'une divergence de vues radicale entre nous.
Pour moi, le plus important dans l'analyse de ces problématiques, c'est la valeur de la méthode. Si la méthode est bonne, les conclusions doivent être acceptées, même si elles sont enquiquinantes. A l'inverse, si la méthode est mauvaise, les conclusions les plus séduisantes doivent être rejetées.
Pour vous, le dogme de la Trinité est le fruit d'un processus séculaire d'invention (dites-moi si je me trompe). Pour moi, c'est le fruit d'un processus séculaire de clarification et d'approfondissement de la Révélation. Pour vous, le traducteur force la traduction du texte pour justifier une position dominante ou tendant à le devenir dans l'Eglise ; pour moi, il part de la foi apostolique pour donner une traduction interprétative.
J'ai été fort intéressée par un article de Michel Roquebert, "Les études cathares et le déconstructionnisme" (merci Eric de Carcassonne) et j'ai trouvé qu'il y avait des rapprochements historiographiques et méthodologiques à faire entre le catharisme et les 3 premiers siècles de l'Eglise catholique. De quoi s'agit-il ?
Dans son article, MR met en pièce les travaux d'un groupe de médiévistes pour qui "l'Eglise cathare" est avant tout une construction quasi fantasmatique de l'Eglise catholique pour justifier sa propre politique de monopole sur les âmes. Selon ces travaux, les cathares étaient des sortes de cancres du catéchisme, de pauvres gens sans pouvoir ni savoir que l'Eglise catholique a transformé selon le seul modèle qu'elle connaissait, le sien. C'est pourquoi, lorsque l'Eglise catholique produit des sources sur le catharisme, elle décrit une institution organisée avec des dogmes, des sacrements (ou quasi), une hiérarchie et un corpus de textes fondateurs. Mais dans ses textes, l'Eglise catholique parlerait bien plutôt d'elle-même que des pauvres égarés qui ont tout compris de travers. L'auteur se met alors en devoir de démontrer que les sources catholiques, sont confirmées par d'autres qui ne le sont pas et il s'ensuit notamment, une liste d'hommes qui occupaient des fonctions sacrées dans une institution organisée et consciente d'elle-même. Une Eglise cathare dont l'Eglise catholique n'a pas sous-estimé le danger qu'elle représentait pour elle et sur lequel elle rend un témoignage digne de foi.
En fait, ce que reproche à juste titre, M. Roquebert à ces travaux, ce sont moins les conclusions que la méthode qui consiste à invalider les témoignages, disqualifier les preuves et appauvrir la documentation existante pour la seule raison qu'il s'agit de sources produites par l'Eglise catholique (notamment en taxant de faux tardif tous les documents attestant de l'organisation de cette Eglise cathare). C'est à ce point qu'il y a un rapprochement peut-être audacieux à faire avec les questions qui nous occupent. En fin de compte, il s'agit de refuser à l'Eglise catholique le droit d'être témoin de sa propre histoire : par nature, les pratiques discursives de l'Eglise sont au service d'une stratégie de monopole de pouvoir. Ici, on exagère une réalité ; là, on traficote un texte. C'est très proche des affirmations issues des travaux de la méthode historico-critique. : discréditer au maximum les textes scripturaires et leurs auteurs, supposer que le texte est le fruit d'une stratégie de justification de l'Eglise par elle-même. A ce compte-là, il n'y a plus aucune source recevable concernant les 3 premiers siècles de l'Eglise catholique : il n'y a plus aucun témoignage crédible de la foi apostolique. Par conséquent, il n'y a plus ni foi, ni Eglise catholique, pas plus qu'il n'y a d'Eglise cathare, ni de catharisme.
Dans cette logique, il est inconcevable de considérer que les auteurs sacrés tenaient la foi trinitaire bien qu'ils n'aient pas le mot Trinité. Il n'y a plus un donné de la foi (la foi reçue des Apôtres) qui commande une approche de la Bible ; il y a une vaste entreprise de normalisation et d'homogénéisation au profit non plus d'une Eglise en communion, mais d'un courant dominant trinitaire qui a fini par s'imposer en employant des stratégies plus ou moins discutables.
Il me semble (et si je me trompe, corrigez-moi) que ce que vous nous proposez, dans le débat tel qu'il se présente, à travers la question de la proskynèse, ou de tel ou tel verset, participe de cette même entreprise de déconstruction des sources historiques : ce qui compte est moins le texte, que l'auteur du texte et l'intention plus ou moins honnête ou pernicieuse à l'origine de l'oeuvre.
Dans la joie de Marie,
Teano