Bonjour à tous ,
Au sujet d’une utilisation ‘imprécise’ qui ferait perdre du tranchant au mot et d’avoir fait l’impasse sur la connaissance du culte impérial des peuples d’orient…
Pour le premier reproche :
Je pense avoir ‘affûté’ le sens du mot, faisant remarquer d’emblée, que ce terme ne signifiait pas qu’adorer comme il m’était affirmé lors du premier message , et qu’il avait une définition plus large. C’est l’inverse de l’accusation de ‘réduction’ qui m’est prêtée. j’ai rendu toute la dimension que recouvre le mot. Réducteur un premier temps et maintenant trop émoussé puisque pas assez ‘aiguisé’, les deux extrêmes en quelques sorte…
II ne doit pas être utilisé sans discernement.
Dans le verset Matt.2 :11 cité comme preuve que Jésus était Dieu, je faisais remarquer que les mages et Hérode n’étaient venus adorer Jésus comme tel, puisqu’ils n’avaient aucune connaissance de son avenir dans le dessein divin en tant que Rédempteur.
Leur prosternation ne pouvait être que d’une valeur révérencielle. Pour Hérode on sait son motif : il n’avait pas dans l’esprit de vouloir ‘adorer Dieu’; il s’accrochait à son trône craignant cette prophétie de l’annonce qu'’un roi des Juifs pouvait l’évincer.
Le sens ‘adoration’ qu’on accorde au terme, ne peut se déterminer que par ce qui motive celui qui accompli cet acte.
Dans le cas des mages et d’Hérode : aucune indication qu’ils venaient y adorer le Dieu de la Bible.
Pour le second point :
Vous me reprochez de n’avoir pas pris la dimension de la prosternation dans le culte impérial ‘typique des peuples d’Orient’…
J’aurais pu ’faire plus long’’ il est vrai, et citer le livre biblique d’Esther, où le culte envers Artaxerxès (le terme empereur n’est pas usité dans la Bible, même pour le chef d’un empire : on le nomme Roi – Tout comme dans l’Apocalypse il est parlé du Roi des Rois) était de mise sous peine de mort. Mardochée faillit en faire les frais pour ne pas avoir voulu se prosterner devant Hamman représentant le monarque aux portes du palais de Suse. Le texte nous est parvenu par la Stuttgartensia et nous donne une traduction spécifique : 'adorer', employé pour Hamman : προσεκύνουν. On voit donc ici que si l’on ne fait pas la différence en oubliant les protagonistes, on serait par l’emploi du mot sans discernement, dans l’obligation d’adorer des êtres humains par le simple fait que ce terme leur est associé ou parce qu’ils l’exigent sous peine capitale en cas de refus.
Pour votre appel aux traductions et références latine :
Si Jérôme de Stridon a traduit adorer, il donna au terme proskunéo le sens qu’on s’attendait de lui au sujet des mages et d’Hérode. Etant moine, son travail fût une commande de Damase 1ier trinitaire comme il se doit. Sa connaissance du grec comme vous le faites remarquer n’est plus suivie par les mêmes instances, puisque ce terme n’est plus traduit par adorer, mais par ‘’lui rendre hommage ‘’ comme déjà signalé dans la T.O.B.- La Colombe –la Nouvelle Bible Segond qui rompt avec la version de 1910, qui elle indiquait ‘adorer’. Pourquoi ce changement ? Il est donc notoire que ce passage n’inclue pas d’adoration de la part de ces personnages et que même les trinitaires l’admettent en haut lieu.
Pour le reste, je ne m’attarderai pas sur les références faites à la traduction latine de Jérôme, les textes grecs et hébreux sont suffisants puisque nous en possédons. Et donc évitent de mettre une langue intermédiaire source d'erreur potentiel.
Pour finir cet échange, vous me proposez ceci :
‘’Les Mages ont, je vous le rappelle, présenté des offrandes d’or (royauté), d’encens (divinité) et de myrrhe (mort). Leur geste a du sens : témoigner de la royauté du Christ, de sa divinité et de sa mort. Donc, oui, ce récit de Matthieu fait encore état de la divinité du Christ et de l’adoration authentique des Mages. Tenait-il fermement la foi trinitaire qui est la nôtre ? Je n'irai pas jusque là. Mais étaient-ils suffisamment amis de Dieu bien que païens, pour le reconnaître dans l'Enfant Jésus, je le pense très possible.’’
Vous avez raison de ne pas aller jusque là , car nous serions en pleine déshérence et dans une symbolique non scripturaire interprétative très partisane qui, par des raisonnements spéculatifs bâtissent une théologie sur laquelle un enseignement est ensuite donné et forment une obligation à croire
Pour ce qui est des ‘pères de l’Eglise’:
il y aurait beaucoup à dire, surtout après la mort des apostoliques :Polycarpe, Papias,Clément, Irénée et Justin….Beaucoup furent des hommes issus de l’école d’Alexandrie pétris de philosophie platonicienne qui fit le lit au trinitarisme par inculturation de la pensée grecque ( voir le Timée de Platon dans ses échanges avec Socrate et Hermocrate). Théologie grecque trinitaire développée ensuite au travers des écrits de Philon qui influença les pères dit post-apostoliques.
Je ne citerai que :
Méthode de Pisidie
Démontre que la culture et la philosophie grecques ont fourni le cadre de la pensée “ chrétienne ” moderne :
“ Presque tous les Pères de l’Église, écrit-il, considéraient les éléments grecs comme très utiles, et ils les empruntèrent à l’Antiquité grecque classique, s’en servant comme de moyens de comprendre et d’exprimer correctement les vérités chrétiennes. ”
Référence : ‘’ Le marchepied grec du christianisme (gr.),’’
Grégoire de Nazianze, Basile le Grand et Jean Chrysostome
Au sujet de Basile le Grand, on lit dans: “ Ses écrits révèlent une intimité de toute une vie avec Platon, Homère, les historiens et les rhéteurs, qui eurent une influence certaine sur son style. [...] Basile resta un ‘ Grec ’. ” On peut en dire autant de Grégoire de Nazianze. “ Dans son esprit, la meilleure preuve de la victoire et de la supériorité de l’Église est le fait qu’elle adopte entièrement les traditions de la culture classique. ”
Les Pères de l’Église grecque (angl.)
J ’espère que cet échange cordial mais franc dans sa formulation employée, ne vous froisse pas . Dans le cas contraire je tiendrai à m’en excuser
Bien cordialement
L.B.