Salut Cinci,
merci pour ce texte et à priori, je ne ressens pas de gêne dans ce que j’y lis. Il souligne même ce point :
Cinci a écrit : ↑jeu. 04 mai 2017, 21:00
Si elles peuvent s'écarter dans une autre direction que celle qui aura été prévue, il n'y aura plus de sûre prescience du futur, mais plutôt une opinion incertaine : ce qu'il serait sacrilège, à mon sens, de croire à propos de Dieu.
Et
Mais, diras-tu, s'il est en mon pouvoir de changer d'intention, je viderai la providence de son objet, puisque je changerai peut-être ce dont elle a la connaissance préalable. Je répondrai bien sûr que tu peux modifier ton intention : mais puisque la vérité de la providence voit tout aussi bien comme présent que tu le peux et si tu vas le faire et quel changement tu vas faire, tu ne peux éviter la prescience divine
Mais je reste sur l'opposition du titre "libre-arbitre vs hasard".
J’ai dernièrement buté de nouveau sur un commentaire du père Sébastien Antoni dans Pèlerin qui nie le destin au nom de la toujours liberté. Je crois que ce qui me heurte là-dedans c’est que ça m’apparaît être une approche sans Dieu. Ça ne le rend plus présent, souverain, créateur mais extérieur, indifférent, spectateur.
Moi je crois au destin, nous sommes destinés
par ce que nous sommes en interaction avec l’extérieur. C’est une chimère que cette vision de la liberté qui ne répondrait à aucune logique, à aucune impulsion, à aucune source. Quel que soit la vision qu’on en ait, il y a toujours une forme de destin.
Croire en une liberté qui exclut toute destinée, écartant Dieu, c’est retirer tout sens à la vie, aux événements, aux épreuves, à la souffrance. Lorsqu’un malheur nous tombe dessus, on ne peut plus dire « c’est la volonté de Dieu » et en tirer un enseignement mais on est réduit à une sorte de fatalité de « cela n’a pas de sens, Dieu n’a rien à voir là-dedans. C’est simplement pas de chance ou encore c’est l’absurde qui régit ce monde ». Il n’y a plus rien de constructif, plus de bien tiré de ce mal. De même, lorsque nous chutons, on ne peut plus dire « Dieu a permis cette chute » avec l’arrière-plan de pédagogie ou de valeur à en retirer, mais on est réduit à s’accabler et à être confronté à un Dieu indifférent et extérieur à nos vies.
Mais le destin ne nie en rien le libre-arbitre, je ne vois pas pourquoi on voudrait tant opposés les deux. Quand bien même nos choix sont « influencés », ils demeurent nos choix libres, un mouvement de notre volonté et non pas un choix forcé. Par exemple, nous sommes en période d’élection présidentielle, on peut vouloir à la base voter pour tel candidat puis un autre tient un discours qui nous fait changer notre vote. Ce n’est pas parce que notre choix aura été influencé que ce n’est plus un choix libre.
Je ne sais malheureusement plus où j’avais lu ça mais quelqu’un disait que si une personne connaissait à un instant t chaque propriété de l’univers, chaque donnée, il connaitrait l’avenir. Qui de mieux que le Créateur peut correspondre à cette personne ? Lui qui a tout créé et connait par conséquent parfaitement chacune de ses créations. Je pense que connaissant sa création et sa créature, il connait dans sa prévoyance, dans sa prescience comment chacune va évoluer. Prescience qui est d’une certaine façon la conséquence logique du statut de créateur. Celui qui est à l’origine de toute chose et connait parfaitement toute chose en connait logiquement la fin, l’aboutissement. Tout instant est dans son champ de vision (passé, présent et à venir) parce qu’il contient toute chose en lui, l’origine, le temps lui-même. Et s’il est l’origine, il est la fin. S’il est le principe, toute connaissance alors il connait le Tout (début et fin), tout ce qui existe et qui sera.
Notre volonté, notre liberté résulte tout de même de cette base créée. Alors après, il y a le péché.
Péché qui plus qu’une conséquence du libre-arbitre comme on le dit trop souvent est surtout une conséquence de notre état de créé et donc de fini, de faillible, d’imparfait. Est-ce que Dieu savait où ses créatures allaient faillir et les conséquences de ces chutes. Je pense que oui, que Dieu connaissant la faillibilité de ce qui est créé savait certainement comment chacun allait faillir. Il connait la base et je pense qu’il sait comment elle va évoluer avec ses caractéristiques propres. D’où la prévoyance dès l’origine de la rédemption. Il fallait remédier à la faillibilité (inéluctable) du créé par la participation à la divinité, à la perfection, à l’infaillibilité à travers la résurrection, rendu semblable au corps du Christ. Il fallait bien que la semence que nous sommes soit créé, passe par le créé premièrement, meurt de cette faillibilité du créé pour ressusciter infaillible à travers le Christ qui est venu habiter le créé pour le relever, l’élever, le lier à l’incréé.
Et ceci ne retire en rien la question de responsabilité de la créature. C’est bien la créature qui chute, de par sa volonté. Il faut bien condamner ses manquements, il faut nommer le péché, manifester la nature faillible. Il faut que la créature soit confrontée à ses manques, à sa petitesse, à sa condition pour venir vers Dieu. Tout cela est un formidable enseignement pour la création, la connaissance d’elle-même et de Dieu, de la place de chacun.