L'Inquisition

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Marc06
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Marc06 » mar. 26 juil. 2011, 18:54

eldjeuvabi a écrit :mon post au début était mon mal être par rapport aux qualificatifs dans l'histoire de 2000ans d'Eglise je crois en l'Eglise une sainte catholique et apostolique , j'avais cité l'inquisition en ex et je me retrouve dans un débat sur les Cathares :cry: :cry:
Bonjour, cela est inévitable ! C'est avec les cathares que l'inquisition a vu le jour.
Fraternellement en Christ par Marie.
Qu'ils soient UN. (Jean 17, 11. 21. 22)

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archi
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par archi » mar. 26 juil. 2011, 20:12

Harfang a écrit :« Il faut se défaire de cette image, propagée par le dix-huitième siècle et un détestable esprit voltairien, soutenant que « des prêtres pouvaient condamner un homme à mort. (…) qui ne sait qu’il est défendu au prêtre d’être chirurgien, de peur que sa main consacrée ne verse le sang de l’homme, même pour le guérir ? (…) Jamais le prêtre n’éleva d’échafaud ; il y monte seulement comme martyr ou comme consolateur ; il ne prêche que miséricorde et clémence ; et sur tous les points du globe, il n’a versé d’autre sang que le sien. » (Lettres à un gentilhomme russe)

L’Eglise s’est bornée à livrer les fautifs au bras séculier qui, lui seul, prononça et exécuta les sentences.
Franchement, c'est de la très mauvaise apologétique. Quand on prononce une sentence d'hérésie et qu'on livre le condamné au bras séculier pour qu'il prononce une peine séculière dont on connaît la teneur, ça ne trompe personne. Je ne pense pas que l'évêque Cauchon, par exemple, ait été surpris à l'énoncé du verdict prononcé contre Jeanne d'Arc. C'est bien lui qui a mené le procès, en sa qualité d'ordinaire du lieu où Jeanne avait été capturé!

A fortiori, quand l'Eglise réclame l'autorité sur le glaive temporel (doctrine médiévale), qui a vocation à exécuter ses décisions, peut-elle se dédouaner de cette façon, précisément là où le glaive temporel, justement, tient compte de ses décisions?

De même, il faut arrêter de dire "on ne peut pas juger selon nos critères actuels". On n'a pas à juger des hommes d'Eglise selon les critères modernes ou anciens, le critère de jugement, c'est l'Evangile, et il ne varie pas au cours des siècles. Sans même rentrer dans les considérations sur tout ce qui a trait à la liberté religieuse (question complexe et disputée), est-ce-que les hommes d'Eglise ont toujours pleinement respecté les critères évangéliques? Pour prendre un autre exemple, est-ce-que l'organisation visible de l'Eglise les a toujours parfaitement suivis? Que penser par exemple, des charges épiscopales cumulées avec des fonctions de la noblesse, au point qu'obtenir la 1ere permettait directement d'obtenir la seconde? Chose qui a duré plus ou moins tout au long du Moyen Age...

Ce qu'il faut surtout répondre aux interrogations légitimes d'eldjeuvabi, c'est que l'Eglise est d'abord une institution sacramentelle, divine, donc sainte, mais que Dieu s'appuie sur des hommes pour prêcher l'Evangile et dispenser Ses sacrements. Et Il sait très bien que parmi ces hommes, il y en a beaucoup de saints, je pense beaucoup plus que partout ailleurs, mais quand même une immense majorité de pécheurs, et parmi eux de très grands pécheurs, certains étant membres voire même ministres de l'Eglise visible, tout en s'étant exclus de l'Eglise invisible (opposition fréquente chez les Pères de l'Eglise). Que si elle a pour objet le Royaume, elle a parfois, malheureusement, à composer avec les grands de ce monde, et que les pécheurs qui la composent ne se sont pas non plus toujours comportés avec l'énergie voulue pour ne pas être absorbée par le monde.

L'Eglise est fondée sur les Apôtres et leurs successeurs. Rappelons que parmi les 12 Apôtres, il y avait 11 Saints et un traître.

Le miracle de l'Eglise est qu'elle poursuive sa mission 2000 ans plus tard malgré l'indignité de tant de clercs. Et c'est aussi lié à sa constitution divine.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Théo d'Or
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Théo d'Or » mar. 26 juil. 2011, 20:38

Marc06 a écrit :
Théo d'Or a écrit :Reconnaissez qu'un être humain qui ligote un autre être humain sur un bûcher, qui y met le feu et qui regarde le ligoté hurler de douleur avant de le voir périr, c'est quelque chose de nature à épouvanter des gens et les mettre en état de rejet violent sans autre forme de procès! C'est objectivement affreux. Quand j'étais petite, ça m'épouvantait et j'imaginais tout le temps que ça pouvait m'arriver.
Bonjour Theo d'Or, il est nécessaire de replacer les choses dans le contexte de l'époque pour entrevoir ce qui de nos jours est inadmissible. La théologie des cathares enseignait que le monde et l'homme étaient créés par satan. Que le premier rapport qu'eut Eve le fut avec lui même et que donc, toute la descendance des hommes était marqué par ce "père originel". C'est pourquoi, ils n'avaient pas d'enfants et ne se mariaient pas, ils n'avaient également "aucune part au monde", c'est à dire qu'ils ne produisait rien de leurs mains.. Un ami professeur d'histoire au collège m'a affirmé qu'ils enlevaient des enfants et que c'est par ce moyen qu'ils faisaient de nouveaux disciples (CQFD). Les cathares n'étaient pas que des pauvres bougres, des paysans ! Ils furent des seigneurs ! Et le territoire commençait à être morcelé. La question que nous pourrions nous poser aujourd'hui est la suivante : A quoi ressemblerait le monde si l’Église était devenue cathare ?
C'est sûr que quand on prend la peine de comprendre ce qui se passait à cette époque, ça devient compréhensible... Pas acceptable, mais compréhensible!

Cordialement,

Théo d'Or
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Harfang
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Harfang » mar. 26 juil. 2011, 23:08

C’est évidemment faux. Nous savons très bien que l’Église n’est pas sainte. Elle est pleine de corruption, d’hypocrisie, etc. Elle l’est parce qu’elle est une institution humaine. Elle l’est parce qu’elle est composée d’êtres humains faibles, dont certains sont corrompus et hypocrites. Les prêtres et les évêques abandonnent la vraie foi traditionnelle, ou ils sont trop conservateurs et obscurantistes ; parfois, ils sont même pédophiles. La plupart des laïcs sont trop sécularisés et ne prennent pas leur foi assez au sérieux. Etc. L’Église n’est pas sainte parce que nous ne sommes pas saints.

Oui, et pourtant, l’Église est sainte et nous, ses membres, sommes saints. Elle est sainte parce qu’elle est le corps du Christ, nous sommes saints parce que ses membres. Par notre baptême, nous sommes tous incorporés au Christ, et tous consacrés à Dieu. C’est cela qui nous rend saints. Dans ce sens, qui est le sens biblique et le vrai sens chrétien, la sainteté d’une personne n’a rien à voir avec ses qualités vertueuses ; elle est sainte parce que consacrée à Dieu, mise à part pour lui. Quelles que soient nos vertus, quels que soient nos vices, nous sommes tous saints. Si divisée, si corrompue et si hypocrite qu’elle soit, l’Église est sainte aussi.

Ce qui ne veut pas dire que le péché que nous trouvons en nous-mêmes et dans l’Église n’a pas d’importance. C’est précisément parce que nous sommes saints qu’il nous sied de nous comporter comme des saints. Si, malgré le fait d’être saints, nous sommes quand même égoïstes et sécularisés, il y a une tension entre ce que nous sommes et ce que nous faisons. Si l’Église sainte ne se comporte pas selon ce qu’elle est, elle n’est pas fidèle à elle-même. Parce qu’elle est sainte, son manque de sainteté fait problème. Parce que nous sommes saints, notre manque de sainteté fait problème. Sainte, l’Église l’est déjà ; seulement, elle devrait se comporter comme si elle l’était. Saints, nous le sommes déjà ; à nous de le vivre.
http://www.dominicains.be/Domini/index. ... Itemid=410


Maintenant, peut-on considérer l'Inquisition et la guerre contre les cathares comme des dérives ( puisqu'il en est fait mention ), pour la seule raison que cela heurte nos consciences contemporaines ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit. « L'Inquisition c'est affreux, les croisades c'est du fanatisme...etc. » : ces réactions épidermiques sont-elles fondées ?

M'est avis qu'une institution naît avec un saint Dominique et si puissamment soutenue pendant des siècles par l'Église ne peut être une déviance. Si le principe était si contraire à l'Évangile, l'Église ne l'aurait jamais tolérer, ni Dieu ne l'aurait permis.
Pareil pour le catharisme : au lieu d'être pétrifiés d'effroi, soyons plutôt admiratif de ce que l'Église ait si vivement réagi, conjointement avec le pouvoir temporel, pour écraser une redoutable hérésie mettant en péril des légions d'âmes et des royaumes entiers.
« O Crux Ave Spes Unica ! »
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Théo d'Or » mer. 27 juil. 2011, 1:17

Harfang a écrit : Maintenant, peut-on considérer l'Inquisition et la guerre contre les cathares comme des dérives ( puisqu'il en est fait mention ), pour la seule raison que cela heurte nos consciences contemporaines ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit. « L'Inquisition c'est affreux, les croisades c'est du fanatisme...etc. » : ces réactions épidermiques sont-elles fondées ?
Bien oui, ne fut-ce que par l'idée de se faire massacrer! Vous ne voudriez pas que votre famille soit soumise au risque de se faire décapiter par des talibans très convaincus quand même?
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Anne » mer. 27 juil. 2011, 1:56

Théo d'Or a écrit : Reconnaissez qu'un être humain qui ligote un autre être humain sur un bûcher, qui y met le feu et qui regarde le ligoté hurler de douleur avant de le voir périr, c'est quelque chose de nature à épouvanter des gens et les mettre en état de rejet violent sans autre forme de procès! C'est objectivement affreux. Quand j'étais petite, ça m'épouvantait et j'imaginais tout le temps que ça pouvait m'arriver.
Avec raison...

Mais, dans un passé pas si lointain, on pendait des gens (c'était pas toujours réussi du premier coup), on en fusillait, on en passait à la chaise électrique, etc.

De nos jours, il y a des pays où on injecte des poisons aux condamnés (ça non plus, ça ne fonctionne pas à tous coups), on lapide (si, si !), ou on pend les gens (si, si) à des grues (pour être certain que tout le monde voie bien) ou à des viaducs...
"À tout moment, nous subissons l’épreuve, mais nous ne sommes pas écrasés;
nous sommes désorientés, mais non pas désemparés;
nous sommes pourchassés, mais non pas abandonnés;
terrassés, mais non pas anéantis…
".
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Anne » mer. 27 juil. 2011, 2:31

gerardh a écrit : "Bonjour,
Quel était le but de l'Inquisition ? D'instruire les faits d'hérésie et de confier les hérétiques au pouvoir séculier, d'où il était évident qu'ils seraient châtiés. Est-ce une caractéristique de l'époque qu'on ne peut juger sans anachronisme ? C'est à mon sens au bas mot une importante régression par rapport aux débuts du christianisme. Ainsi par exemple dans les Actes, l'apôtre Paul ne se permit pas même une parole injurieuse contre l'Artémis-Dyane des éphésiens".

J'avais posté aussi un autre message désapprouvé comme étant lui aussi HS :

"Quid du sac de Béziers et du bûcher de Montségur ?
[+] Texte masqué
Voyez s'qui arrive quand on publie au bon endroit... :diable:
Veuillez relire la partie sur le contexte de l'époque. Vous verrez aussi dans les informations déjà fournies que les cas remis au bras séculier représentaient 2% ou moins des cas "inquisitionnés".

Ensuite, ce n'est pas comme, si un bon matin, un Pape s'était levé du mauvais côté du lit et avait décidé de mandater quelqu'un pour aller annihiler ces :censure: de Cathares et autres hérétiques...
Le pape Alexandre III ( pontificat de 1061 à 1073) affirma que « mieux vaut absoudre les coupables, que de s’attaquer par une excessive sévérité à la vie d’innocents. L’indulgence sied mieux aux gens d’Eglise que la dureté ». L’Eglise préfère utiliser la persuasion pour éteindre une hérésie. Contre les cathares, le combat est donc avant tout un combat théologique. Entre 1119 et 1215, sept conciles analysent et condamnent les thèses des soi-disant « Vrais Chrétiens ». Un vaste effort missionnaire est lancé. Le pape fait appel à des personnalités très connues de l’époque, comme le bénédictin Bernard de Clairvaux ( 1090 – 1153), un des réformateurs cisterciens
.

Notez les dates. Notez quelle est la "première offensive". À moins que ce ne soit une "défensive"... Ça continue jusqu'au siècle suivant, avec les "soldats" de l'Abbaye de Citeaux...
La sanction la plus grave de l’Eglise est l’excommunication. Cette sanction conduit à la privation des sacrements parmi lesquels il y a bien entendu la communion eucharistique et l’absolution. A l’époque, être excommunié c’est être mis au ban de la collectivité. Ainsi, celui qui décède excommunié n’a plus le droit d’être enterré dans le cimetière paroissial. Et quand c’est un prince qui est excommunié, ses vassaux sont déliés du serment de fidélité à son égard. C’est toute l’organisation féodale qui est prise de délire. L’évêque se sent donc investit d’une mission de traquer et de bannir l’hérésie. Il l’extermine c’est-à-dire, dans le sens littéral du terme, il la met « hors frontière » ( lat. exterminus = frontière).
L'autre offensive/défensive...
Un an plus tard, en 1205, l’évêque d’Osma en Espagne traverse le Languedoc en compagnie du sous-prieur de son chapitre, un certain Dominique de Guzman. Ils décident de se consacrer à la lutte contre l’hérésie en rompant avec le luxe de leur charge. Ainsi dépouillés, ils parcourent la campagne pieds nus, sans équipage et sans argent. Ils sillonnent les routes, donnant des conférences. Dominique fonde le monastère de Fanjeaux en 1206 qui recueille des femmes hérétiques converties. En 1214, les moines mendiants qui le suivent installent leur maison mère à Toulouse. Les Dominicains sont nés. Entre-temps, les cisterciens sont découragés par leurs maigres résultats et préfèrent abandonner leur entreprise spirituelle.
Il vient alors un moment où la méthode douce ne donne rien et où le politique prend le dessus (on pourrait d'ailleurs songer à ce bon Mgr Cauchon et à Jeanne-d'Arc... Son procès était-il un prétexte à se débarrasser d'une empêcheuse d'envahir en rond ou la "vraie affaire" ?)
Des seigneurs méridionaux et, plus en encore, des villes s’associent à la croisade. Pourtant, les intérêts des villes sont, face à la croisade, très différents des seigneurs ruraux. Ceux-ci se sentent menacés dans leurs biens par les petits barons croisés : ils ont beaucoup à perdre. Et de fait, la croisade donne lieu à la dépossession de nombreux seigneurs méridionaux et à l’installation de nouveaux maîtres. Quant aux villes, elles ont à gagner des franchises à la disparition de leur suzerain. Pour elles, la croisade est bénéfique, d’autant qu’elles la ravitaillent et en tirent aussi des profits matériels. Cela souligne qu’il n’existe à l’échelle du Midi aucune solidarité face à la croisade. Le monde féodal était à l’époque une juxtaposition de cellules territoriales étroites et les antagonismes les plus marqués opposaient souvent des voisins très proches. Cette dés-unité explique que Simon de Montfort s’y maintiendra durant neuf années, malgré ses effectifs très réduits.
Après quelques assassinats de catholiques, excommunications, anathèmes, et autres opportunistes qui espèrent peut-être mettre leurs grosses pattes sur les biens de l'Église:
C’est à cette époque qu’à lieu un sombre épisode. Deux cent vingt-cinq « Parfaits » refusent d’abjurer et montent sur un bûcher géant. Aux yeux de certains, le bûcher de Montségur symbolise la cruauté absolue des adversaires des cathares à savoir l’Eglise catholique et les gens du Nord. Or, il faut d’abord se rappeler que la prise de Montségur est d’abord un acte de guerre, accompli par des soldats et que l’hérésie était considérée comme un crime social.
Vous pourriez aussi, peut-être, méditer sur ce que serait votre groupe, et bien d'autres, si l'Église n'avait veillé au grain jusqu'à ce que vous ayez tous le loisir de vous partir en affaires chacun de votre côté... :siffle:

Source (un bon résumé de l'affaire) :
http://www.catho.be/fileadmin/user_uplo ... 5422-1.doc
"À tout moment, nous subissons l’épreuve, mais nous ne sommes pas écrasés;
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Raistlin
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Raistlin » mer. 27 juil. 2011, 9:36

gerardh a écrit :C'est à mon sens au bas mot une importante régression par rapport aux débuts du christianisme.
Hé oui, que voulez-vous, l'Homme est pécheur, même le chrétien. Je suis sûr de ne pas avoir besoin de vous rappeler les exactions des réformateurs pour vous en convaincre.

Au demeurant, l'Inquisition eut le mérite de mettre en place un vrai procès pour éviter justement les justices expéditives. On peut certes s'interroger sur la légitimité de poursuivre une hérésie en justice mais le fait est que l'Inquisition fut vraiment un progrès en terme de justice, progrès dont notre système judiciaire actuel s'inspire largement.

Par exemple, lors de la vague de paranoïa au sujet des sorcières, l'Inquisition permit de limiter les condamnations abusives au contraire des pays protestants qui, eux, s'en donnaient à coeur joie ! C'est notamment pourquoi on ne brûla aucune sorcière en Espagne (ou quasiment aucune), au plus fort de l'Inquisition espagnole. Hé oui, de ce que j'en sais, la chasse aux sorcières fut un phénomène essentiellement protestant... ce qui devrait vous faire réfléchir sur l'utilité de l'Inquisition.

Hé oui Gérard, attention aux préjugés anticléricaux, ils sont bien souvent erronés.
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Suliko
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Suliko » mer. 27 juil. 2011, 10:17

Bien oui, ne fut-ce que par l'idée de se faire massacrer! Vous ne voudriez pas que votre famille soit soumise au risque de se faire décapiter par des talibans très convaincus quand même?
Je voudrais tout de même rappeler que l'inquisition a été crée pour lutter contre les hérésies chrétiennes et non contre les autres religions, qui n'étaient pas concernées...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par gerardh » mer. 27 juil. 2011, 12:03

______

Bonjour Raistlin,

Si des personnes dites protestantes ont commis des exactions, et je veux bien croire qu'il y en a eu, je les réprouve sans barguiner. Les protestants ont eu souvent le tort de faire alliance avec les puissants de ce monde et leurs armées : cela est contraire à l'esprit du christianime.


_________

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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par eldjeuvabi » jeu. 28 juil. 2011, 10:00

Les protestants ont eu souvent le tort de faire alliance avec les puissants de ce monde et leurs armées : cela est contraire à l'esprit du christianime. Que dire de Richelieu et Mazarin et touts les autres .......... :siffle: :siffle: :siffle: :siffle:

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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Raistlin » jeu. 28 juil. 2011, 10:22

gerardh a écrit :Si des personnes dites protestantes ont commis des exactions, et je veux bien croire qu'il y en a eu, je les réprouve sans barguiner. Les protestants ont eu souvent le tort de faire alliance avec les puissants de ce monde et leurs armées : cela est contraire à l'esprit du christianime.
Ce qui nous ramène au fait que nous sommes tous pécheurs, l'Église le sait fort bien.

Mais quant à l'Inquisition, si les abus constatés furent bien antichrétiens, il n'est pas légitime de la condamner en bloc sans discernement. En effet, les anticléricaux notoires oublient un peu trop souvent que l'Inquisition a été fondée dans un vrai désir de justice quant aux accusations d'hérésie et que, de fait, elle permit de réfréner la fureur des foules ou du pouvoir séculier dans nombre de cas. Donc oui, il y eut des dérives mais il y eut aussi de bonnes choses.

Ainsi, les condamnations du genre "l'Inquisition fut contraire à l'esprit de l'Évangile" sont simplistes et partisanes. Il faut creuser un peu pour se faire une idée juste de la question et ne pas s'en tenir à un vernis bien souvent hérité d'une propagande anticléricale.
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par archi » jeu. 28 juil. 2011, 22:14

Raistlin a écrit :Ainsi, les condamnations du genre "l'Inquisition fut contraire à l'esprit de l'Évangile" sont simplistes et partisanes. Il faut creuser un peu pour se faire une idée juste de la question et ne pas s'en tenir à un vernis bien souvent hérité d'une propagande anticléricale.
Ce n'est pas ce qui a été dit, mais puisqu'il faut creuser, creusons. En fait, la question n'est pas de savoir si l'Inquisition a été plus juste que les autres institutions judiciaires de son époque, si les abus ont été plus ou moins limités, etc... La question est de savoir si le fait de condamner à mort les hérétiques se justifie ou non. Que nous enseigne la Tradition de l'Eglise?

Permièrement, il y a bien une chose qu'il faut remarquer, c'est que dans l'ancienne Alliance, la loi de Moïse mettait volontiers à mort les hérétiques. D'ailleurs, le prétexte de la condamnation à mort du Christ, c'était bien le fait de se proclamer Fils de Dieu, considéré comme un blasphème. Plus généralement, l'ancien judaïsme était une religion tout à fait guerrière.

Oui mais voilà, le Christ a cherché à convaincre par la Parole, pas à faire triompher militairement Israël, malgré les souhaits de certains. Il aurait évidemment pu le faire s'Il l'avait voulu. De celui qui refuse d'écouter l'Eglise, le Christ dit simplement "qu'il soit pour toi comme le païen et le publicain" (Mt 18,17). Saint Paul, qui pourtant, lorsqu'il était juif pourchassait les hérétiques avec vigueur pour les livrer à la justice du Grand-Prêtre, une fois converti, prêche le même comportement que le Christ, l'excommunication (cf 1Tim1, 2Tim2, Tite 3).

Si on se transpose aux premiers siècles du christianisme, les Pères de l'Eglise étaient nettement opposés à la violence contre les hérétiques. On trouvera un éventail de citations là, extraites de la thèse du Frère Basile (abbaye du Barroux) sur la liberté religieuse:
http://v.i.v.free.fr/spip/spip.php?article4368 "La liberté religieuse chez les Pères de l’Eglise avant l’Edit de Milan (313)"
et là:
http://v.i.v.free.fr/spip/spip.php?article4368 "La liberté religieuse chez les Pères de l’Eglise après l’Edit de Milan et avant l’Eglise d’Etat".

Last but not least, cette citation de St Jean Chrysostome:
St Jean Chrysostome a écrit :Tuer un hérétique, c'est introduire sur la terre un crime inexpiable.
Je reprends une citation du 1er des liens ci-dessus, qui va à l'essentiel:
Saint Cyprien a écrit :En ce temps-là, à la vérité, on tuait avec le glaive, alors que la circoncision charnelle était encore en vigueur : maintenant que la circoncision spirituelle existe pour [chez] les serviteurs de Dieu, c’est avec le glaive spirituel que l’on tue les orgueilleux et les révoltés, en les rejetant hors de l’Église. Ils ne peuvent, en effet, vivre dehors, puisqu’il n’y a qu’une maison de Dieu, et que, hors de l’Église, il n’y a de salut pour personne.
C'est bien là la différence entre l'ancienne et la nouvelle alliance, la circoncision charnelle est remplacée par la circoncision spirituelle, le glaive spirituel remplace le glaive charnel. Et de fait, les Pères, lisant et méditant la Sainte Ecriture, donc l'Ancien Testament avec ses récits guerriers et parfois, l'ont toujours considérée comme un symbole du combat spirituel, intérieur, contre les démons. De même, l'hérésie se combat par la prédication, pas par le glaive temporel. On ne peut ignorer que c'est là la Tradition de l'Eglise, telle qu'elle se révèle dans l'Ecriture et dans le consensus des Pères.

Il semblerait (je suis preneur de plus de précisions si quelqu'un en a à fournir) que le fait de mettre à mort les hérétiques ait commencé à prendre de l'importance vers le tournant du millénaire, plus chez les souverains temporels que chez les ecclésiastiques, qui se sont peu à peu alignés. D'après Wikipedia (article sur l'Inquisition),
Les premières formes de répression étaient apparues au début du Xe siècle : à Noël 1022, Robert le Pieux avait fait brûler dix clercs de la cathédrale d'Orléans. C'était le premier bûcher de l'histoire de la lutte contre hérésie en Occident. Faisant suite à l'accord de Vérone entre Lucius III et Frédéric Barberousse, la décrétale Ad abolendam (1184) fait ainsi de la répression de l'hérésie un élément constitutif du pouvoir de l'Empereur.
(1022, c'est bien sûr le XIe Siècle et pas le Xe mais c'est un détail).

Je ne vois pas comment on peut voir là autre chose qu'une déviation, par rapport au christianisme de l'époque patristique, déviation qui se traduit par un retour à l'esprit charnel de l'Ancienne Alliance plutôt qu'à l'esprit spirituel de la Nouvelle... donc bel et bien une déviation dans le mauvais sens.

On peut d'ailleurs se demander l'origine du changement qui est manifeste aux alentours de l'an mil et dans la suite du Moyen-Age, pas seulement dans les faits externes (notamment les bouleversements de la Papauté, la crise profonde aux Xe-début XIe Siècles puis la réforme grégorienne) mais surtout dans les mentalités, le point dont nous discutons ici en témoigne comme l'apparition de la scolastique avec Abélard, ainsi que le divorce progressif entre le mysticisme (de plus en plus sentimental) et la théologie (de plus en plus rationnelle). Ce point que je cherche toujours à expliquer me paraît tout à fait essentiel ici, notamment parce que l'esprit de lutte est inhérent à l'homme (et surtout à l'homme masculin), et un esprit de lutte qui ne trouve pas à s'exprimer dans un mysticisme pleinement complet, intégrant l'ascétisme et le combat - spirituel - pour la foi, dégénérera inévitablement en mentalité belliqueuse et en violence. On doit cependant dire qu'un esprit de lutte qui ne s'engage pas pour la foi s'engagera pour autre chose, et qu'un esprit belliqueux qui n'est plus soumis à la religion risque de devenir encore pire.

Bref, moindre mal par rapport à une société païenne ou athée, peut-être. Reste qu'on est dans un autre esprit que celui de l'Evangile.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Raistlin
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par Raistlin » ven. 29 juil. 2011, 9:41

Merci archi pour ces précisions. Effectivement, tuer l’hérétique ne sera jamais une option fidèle à l’Évangile. Cependant vous oubliez un détail de poids : l'Inquisition n'avait pas pour fondement de tuer l'hérétique mais de faire que son procès soit juste. En cela, l'Inquisition ne me semble pas avoir été contraire à l'Évangile puisqu'il s'agissait, du moins à ses débuts, d'empêcher les condamnations hâtives. Les préjugés actuels voient l'Inquisition comme une institution fondé pour traquer l'hérétique alors qu'il s'agissait plutôt d'assurer aux accusés un vrai procès.
En outre, et cela a été mentionné, les tribunaux de l'Inquisition furent d'une grande clémence envers les hérétiques formels (même s'il y eut des abus dans l'autre sens, ne le nions pas) – surtout comparés aux tribunaux séculiers – visant leur conversion et non pas la coercition.

Quant à ce que vous appelez une déviation par rapport à l’époque patristique, j’y vois pour ma part un phénomène d’ordre social : une fois devenue religion d’État dans certains pays, d’autres problèmes que ceux de l’époque patristique se posaient. Il ne s’agit pas de légitimer l’exécution de l’hérétique mais il faut aussi comprendre que pour les sociétés moyenâgeuses, la religion avait valeur de ciment social. Devant la crise sociale et religieuse que représentaient les cathares (sans oublier qu’ils ne se contentaient pas de prêcher le faux, ils s’attaquaient aussi physiquement aux catholiques), une réponse devait être apportée. L'Inquisition était-elle la réponse la plus « évangélique » disponible ? Peut-être bien... Il faut toujours se méfier de la tentation de croire que l’Évangile peut être vécu dans toute sa radicalité par une société sur Terre, fut-elle chrétienne. L’Évangile transcende notre monde et jamais une société ne sera parfaitement évangélique ne serait-ce que parce que les Hommes qui la composent ne seront pas tous des saints.

Pour conclure rapidement, l'Inquisition dans son ensemble ne fut certainement pas un modèle de vie évangélique. Pour autant, elle ne fut pas non plus anti-évangélique. Elle répondait à un problème d'ordre social, problème auquel l'Évangile et les Pères ne donnent pas forcément de réponse toute faite et prête à l’emploi. L’Église à l’époque a répondu du mieux qu’elle pouvait (et rappelons que l’Église du Moyen-âge était tout autant guidée par l’Esprit-Saint que celle du temps des apôtres, des Pères ou du nôtre). Aurait-elle pu mieux faire ? Ce n’est pas sûr compte tenu des circonstances. Donc oui, c’est important de prendre acte des limites propres à l’Inquisition (ou plutôt aux Inquisitions car il y eut beaucoup, dont certaines à la botte du pouvoir séculier ce qui fut toujours regrettable), mais il ne s’agit pas non plus de la condamner à l’emporte-pièce.

P.S. : Je précise d’emblée que je ne prône pas un retour à l’Inquisition, quand bien même nous serions dans une société pleinement catholique. Il s’agit simplement de se faire une idée aussi juste que possible de l’Inquisition et non pas de céder aux préjugés.
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Re: Eglise et histoire : l'Inquisition et le catharisme

Message non lu par gerardh » ven. 29 juil. 2011, 22:37

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Bonjour Raistlin, vous écrivez :
pour les sociétés moyenâgeuses, la religion avait valeur de ciment social
C'est exactement l'argument développé par les pays musulmans pour justifier les exactions et les persécutions contre les chrétiens.


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