Oui, Aristote a raison. Mais il n'a jamais dit, je crois, que
tous les "animaux politiques" avaient les compétences, les connaissances et le talent requis pour gouverner. Les hommes ne sont pas égaux. Je crache sur cette idée d'égalité, peut-être le plus vil des mensonges modernes. Comme si Arnaud Beltrame était l'égal d'Abdelhamid Abaaoud. Comme si François Hollande était l'égal de César...
Je ne méprise pas "le peuple". Je dis que l'immense majorité de la population, moi y compris, n'a aucune légitimité pour diriger le pays. Par manque de connaissances, par manque de compréhension des enjeux. Par carence de fer, aussi. Un dirigeant faible ne vaut rien.
Comment émettre un avis éclairé sur une chose dont nous ne percevons pas la complexité cachée ? Tout problème politique amène une infinité de questions fines et profondes. Je ne fais aucune confiance au gilet jaune moyen pour comprendre et démêler ce genre de subtilités.
Régner demande de la hauteur de vue : une vue d'aigle. Les démocraties produisent rarement autre chose que des taupes.
Décidément, les démocrates me font bien rire, avec leur culte de la foule, de la masse, du bétail :
le plus grand nombre a toujours raison !, bêlent-ils. Eh bien moi, je préfère avoir tort avec Nietzsche :
Après tout cela, ai-je encore besoin de dire qu’eux aussi seront des esprits libres, de très libres esprits, ces philosophes de l’avenir, bien qu’il soit certain qu’ils ne seront pas seulement des esprits libres, mais quelque chose de plus, quelque chose de supérieur et de plus grand, quelque chose de foncièrement différent, qui ne veut être ni méconnu, ni confondu ? Mais, tout en disant cela, je sens envers eux, autant qu’envers nous-mêmes, qui sommes les hérauts et les précurseurs, nous autres esprits libres ! — je sens le devoir d’écarter de nous un vieil et stupide préjugé, une ancienne méprise, qui, depuis trop longtemps, ont obscurci comme d’un brouillard l’idée d’« esprit », lui enlevant sa limpidité. Dans tous les pays de l’Europe, et aussi en Amérique, il y a maintenant des gens qui abusent de ce mot.
C’est une espèce d’esprits très étroits, d’esprits bornés et attachés de chaînes, qui aspirent à peu près au contraire de ce qui répond à nos intentions et à nos instincts, — sans compter que l’avènement de ces nouveaux philosophes les fait demeurer fenêtres fermées et portes verrouillées. Pour le dire sans ambages, ils font malheureusement partie des niveleurs, ces esprits faussement dénommés « libres » — car ce sont les esclaves diserts, les plumitifs du goût démocratique et des « idées modernes » propres à ce goût. Tous hommes sans solitude, sans une solitude qui leur soit propre ; ce sont de braves garçons à qui l’on ne peut dénier ni courage ni mœurs honorables, si ce n’est qu’ils sont sans liberté et ridiculement superficiels, surtout avec cette tendance qui leur fait voir, à peu près, dans les formes de la vieille société, la cause de toutes les misères humaines et de tous les déboires : par quoi la vérité finit par être placée sur la tête !
Ce à quoi ils tendent de toutes leurs forces, c’est le bonheur général des troupeaux sur le pâturage, avec la sécurité, le bien-être et l’allègement de l’existence pour tout le monde. Les deux rengaines qu’ils chantent le plus souvent sont « égalité des droits » et « pitié pour tout ce qui souffre », et ils considèrent la souffrance elle-même comme quelque chose qu’il faut supprimer. Nous, qui voyons les choses sous une autre face, nous qui avons ouvert notre esprit à la question de savoir où et comment la plante « homme » s’est développée le plus vigoureusement jusqu’ici, nous croyons qu’il a fallu pour cela des conditions toutes contraires que, chez l’homme, le danger de la situation a dû grandir jusqu’à l’énormité, le génie d’invention et de dissimulation (l’« esprit »), sous une pression et une contrainte prolongée, se développer en hardiesse et en subtilité, la volonté de vivre se surhausser jusqu’à l’absolue volonté de puissance.
Nous pensons que la dureté, la violence, l’esclavage, le péril dans l’âme et dans la rue, que la dissimulation, le stoïcisme, les artifices et les diableries de toutes sortes, que tout ce qui est mauvais, terrible, tyrannique, tout ce qui chez l’homme tient de la bête de proie et du serpent sert tout aussi bien à l’élévation du type homme que son contraire. Et, en ne disant que cela, nous n’en disons pas assez, car, tant par nos paroles que par nos silences en cet endroit, nous nous trouvons à l’autre bout de toute idéologie moderne, de tous désirs du troupeau. Serions-nous peut-être les antipodes de ceux-ci ?