Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

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prodigal
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mer. 22 mars 2017, 19:09

Cher Héraclius,
je n'en suis pas si sûr.
Il est clair que le traditionalisme d'aujourd'hui n'est pas celui d'hier, de même que le catholicisme conciliaire d'aujourd'hui ne ressemble que de très loin au modernisme d'hier. Il est clair aussi que saint Thomas d'Aquin est lu et approuvé par les intégristes (mais pas seulement par eux cela va de soi).
Cependant il ne s'appelle pas traditionalisme pour rien, ce n'est pas innocent de choisir ce nom. Il me semble que le choix de ce nom, même s'il n'est pas officiel, trahit un certain mépris de la raison supposée devoir s'incliner systématiquement devant la Tradition (avec une majuscule) c'est-à-dire devant l'autorité, mais pas celle du pape et des évêques, non, devant l'autorité des traditionalistes eux-mêmes, en tant qu'ils sont (croient-ils) les seuls représentants de l'Eglise de toujours.
Mais peut-être que je me trompe, je ne demande pas mieux dans ce cas que d'être détrompé, et très sincèrement je serais ravi d'apprendre que les courants traditionalistes ne sont pas du tout infectés par ce fidéisme rampant que je viens de tenter de décrire. Cela faciliterait considérablement les discussions. :fleur:
Je m'aperçois que, sans me prendre pour lui bien évidemment, je pose aux traditionalistes la même question que celle du pape Benoit XVI adressée aux musulmans à Ratisbonne! C'est la question de la confiance que nous pouvons avoir en la raison, question qui me semble essentielle dans la perspective ouverte sur ce fil par Marc Oh.
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Pierre Carhaix
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » mer. 22 mars 2017, 21:54

prodigal a écrit :
mer. 22 mars 2017, 16:03
Cher Altior,
je n'ai actuellement pas accès à ma bibliothèque, mais en fouinant sur Internet j'ai trouvé ceci, extrait de l'Encyclopedia Universalis, qui révèle qu'en effet je me suis trompé, la condamnation du traditionalisme étant légèrement antérieure à Vatican 1. Mais je ne pense pas que cette erreur change quelque chose sur le fond.
TRADITIONALISME, philosophie
Doctrine selon laquelle les formes politiques et religieuses doivent être conservées, dès lors qu'elles sont traditionnelles, consacrées par le passé. Qu'on échoue à les justifier intellectuellement n'est pas une objection, car leur valeur ne tient pas au fait qu'on peut les vérifier ou non par voie critique (enquête et raisonnement sont faillibles, superficiels, inadéquats) ; elle tient au fait que la société, qui s'est édifiée bien avant l'apparition de la science, a dû connaître et satisfaire ses besoins profonds de manière spontanée, c'est-à-dire à partir d'une révélation congénitale. C'est cette révélation qui est le fondement de tout, y compris de la vérité. Et c'est par la tradition, chargée de transmettre la révélation initiale, que la vérité peut être connue (le traditionalisme conduit au fidéisme, parce qu'il réserve à la foi issue de la révélation et communiquée par tradition de déterminer même les vérités de raison). Historiquement, cette doctrine a été celle de Bonald, de Joseph de Maistre, de Bautain, de Bonnety. Elle repose sur une conception précise de l'autorité et de l'obéissance : l'homme est « un être essentiellement enseigné ». Il doit recevoir la vérité d'en haut, comme héritage collectif. Cet héritage ne peut venir que de la société, parce que la fondation de celle-ci coïncide avec une Révélation qui apporte toutes les vérités nécessaires, avec une Parole qui les authentifie et qui, d'ailleurs, pour certains traditionalistes, fut à l'origine d'une langue universellement comprise, véhicule de connaissances indispensables en matière d'organisation, de morale, de religion. Si, au contraire, l'homme entend user du sens propre, de la raison individuelle, il préfère la nouveauté à la « vérité oubliée » et il introduit l'erreur, puisque la nouveauté est « sans ancêtres », c'est-à-dire sans garantie, et devrait rester « sans postérité », faute de paternité légitime. Le traditionalisme fut condamné en 1855 par l'Église romaine, qui tint à réhabiliter l'usage normal de la raison et du raisonnement.

Cher Pierre Carhaix,
personne ne songe à nier la valeur de la tradition. C'est la valeur du traditionalisme qui est en cause. Voilà pourquoi tout naturellement j'ai parlé des mots en -isme. Evidemment ce n'est pas une faute en soi de finir par isme, et on peut conserver les mots "christianisme" et "catholicisme" sans m'offenser! :D
Cher apatride,
le texte de Chesterton me plaît bien, car avec son côté taquin bien connu il associe à la tradition la démocratie, valeur moderniste par excellence! (évidemment il fait çà pour embêter les modernistes). C'est assez drôle.
Vous mélangez deux choses qui n'ont rien à voir. Le traditionalisme est une philosophie, comme vous le relevez, bien précise, au 19ème s., qui revendique haut et fort cette appellation face au courant libéral, ou libéralisme catholique, qui gagne l'Église à cette époque, et qui fut également condamné.

Aujourd'hui, le mot traditionalisme est surtout employé de l'extérieur, et généralement dans un sens péjoratif, dénué de sens précis, et certainement pas en tant que philosophie clairement identifiée et revendiquée, pour désigner un courant dans l'Église actuelle, qui principalement reste attaché au missel de 62, au catéchisme traditionnel et au magistère classique de l'Église. Les personnes concernées par ce mouvement ne se donnent pas forcément le nom de traditionalistes, même si l'expression "tradi" est passé dans le langage courant. Un tradi ne dit pas qu'il adhère au traditionalisme, mais se définit d'abord comme catholique attaché à la tradition.

Ce n'est pas tout à fait la même chose.

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Pierre Carhaix
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » mer. 22 mars 2017, 22:02

prodigal a écrit :
mer. 22 mars 2017, 19:09
Cher Héraclius,
je n'en suis pas si sûr.
Il est clair que le traditionalisme d'aujourd'hui n'est pas celui d'hier, de même que le catholicisme conciliaire d'aujourd'hui ne ressemble que de très loin au modernisme d'hier. Il est clair aussi que saint Thomas d'Aquin est lu et approuvé par les intégristes (mais pas seulement par eux cela va de soi).
Cependant il ne s'appelle pas traditionalisme pour rien, ce n'est pas innocent de choisir ce nom. Il me semble que le choix de ce nom, même s'il n'est pas officiel, trahit un certain mépris de la raison supposée devoir s'incliner systématiquement devant la Tradition (avec une majuscule) c'est-à-dire devant l'autorité, mais pas celle du pape et des évêques, non, devant l'autorité des traditionalistes eux-mêmes, en tant qu'ils sont (croient-ils) les seuls représentants de l'Eglise de toujours.
Mais peut-être que je me trompe, je ne demande pas mieux dans ce cas que d'être détrompé, et très sincèrement je serais ravi d'apprendre que les courants traditionalistes ne sont pas du tout infectés par ce fidéisme rampant que je viens de tenter de décrire. Cela faciliterait considérablement les discussions. :fleur:
Je m'aperçois que, sans me prendre pour lui bien évidemment, je pose aux traditionalistes la même question que celle du pape Benoit XVI adressée aux musulmans à Ratisbonne! C'est la question de la confiance que nous pouvons avoir en la raison, question qui me semble essentielle dans la perspective ouverte sur ce fil par Marc Oh.
Cette question ne se pose pas puisqu'il n'existe pas d'opposition entre raison et foi dans le courant tradi.

Vous confondez réellement deux choses différentes. Et le rapprochement que vous opérez est anachronique.

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archi
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par archi » mer. 22 mars 2017, 22:08

Bonjour,
Altior a écrit :
mar. 21 mars 2017, 7:18
La Tradition (avec un grand T), la Sainte Tradition, est une des quatre sources de notre foi. Et encore une des deux sources primaires, la Sainte Tradition ayant le même rang que la Sainte Ecriture. Par contre, le traditionalisme n'est pas source, mais attitude. Méthode. Façon de penser et façon de vivre. Une option fondamentale si vous voulez. Un peu comme la droite et la gauche sont des options fondamentaux en politique. D'ailleurs, l'adhésion ou non à la tradition est l'ultime critère qui distingue droite et gauche. On ne peut pas être en même temps traditionaliste et de gauche, tout comme on ne peut pas être en même temps moderniste et de droite. Traditionalisme et modernisme se distinguent et s'opposent, tout comme droite et gauche se distinguent et s'opposent, la seule différence est que le binome traditionalisme/modernisme va bien au-delà de la politique et transperce toutes les aspects de la vie, jusqu'aux fondements philosophiques, jusqu'au Weltanscauung. Le monde va depuis le cosmos vers le chaos ou bien depuis le chaos vers le cosmos ? Voilà une question fondamentale. Car, si le monde va depuis le cosmos vers le chaos, alors on doit être traditionaliste pour faire tarder sa dégénérescence (et, si possible, par la grâce de Dieu, obtenir sa réversion). Par contre, si le monde va depuis le chaos vers le cosmos, alors on doit être moderniste, car le plus on change plus vite, le plus le monde s'épanouit et se rapproche de son accomplissement.

On est traditionaliste si on est adepte de la première possibilité de réponse. C'est ce que les traditionalistes lisent dans la Bible, qui commence avec l'Âge d'or et finit avec l'Apocalypse. Avons-nous une meilleure image de Dieu que les Apôtres et les Pères ont eu ? Si la réponse est «oui», alors on se place dans le modernisme, car on parle évolution par rapport à un «moment zéro» du christianisme. Si la réponse est «non», alors on se place dans le traditionalisme, car on parle dissolution, on parle d'une perte, par rapport au même moment.
Là-dessus je suis complètement d'accord avec vous. N'oublions pas que notre religion a été transmise par le témoignage des Apôtres qui ont vu le Christ et à qui l'Esprit Saint a "enseigné toutes choses" à la Pentecôte. Dès lors, il nous fait retrouver laborieusement ce qui leur a été infus à ce moment zéro. Nous n'avons pas à innover, à oser prétendre mieux connaître ou comprendre les choses qu'eux, simplement à retrouver autant que possible ce qu'ils ont transmis. Dans le meilleur des cas, ce que nous savons est identique à ce qui leur a été transmis par le Fils et le Saint-Esprit, mais c'est peu probable.

[quote: 2 Thessaloniciens, 2:15]Ainsi donc, frères, tenez bon, et gardez ferme les traditions que nous vous avons enseignées, soit de vive voix, soit par lettre.[/quote]
[quote: Epître de Jude, 3] Bien-aimés, j’avais la ferme intention de vous écrire au sujet du salut qui nous est commun ; or me voici dans l’obligation de le faire pour vous exhorter à combattre pour la foi qui a été transmise aux fidèles une fois pour toutes.[/quote]

Peut-on être fidèle aux Apôtres et donc à la foi chrétienne si on fait peu de cas de ce principe de base?

Il me semble néanmoins déceler une contradiction dans vos propos:

Le traditionalisme est, donc, transmettre ce qu'on a reçu. Le traditionalisme catholique est la foie de nos ancêtres, de ma grand-mère, de mon grand-père.

Ce que le traditionalisme n'est pas ?
-Il n'est pas immobilisme. Il n'est pas figé, il n'est pas muséification. Il est vivant. Le traditionalisme n'est pas transmettre comme un tuyau transmet l'eau, mais vivre. On a reçu la foie vivante, on transmet la foi vivante, car nous ne sommes pas la religion du Livre, mais la religion de la Vie.
-donc il n'est pas archéologie. On ne fait pas des choses parce que ceux il y a 20 génération l'ont fait, car nos grands-mères n'ont pas vécu il y a 20 générations. Par exemple, on peut rencontrer un argument plaidant pour la communion habituelle sous les deux espèces: c'est comme ça qu'on a fait à la Cène, la première Messe. Ce n'est pas un argument traditionaliste, c'est de l'archéologie biblique, de la panoplie des protestants. Ce n'est pas de cette manière que nos grand-mères avaient l'habitude de communier.
La "religion vivante" est justement le leitmotiv habituel des modernistes et tend à justifier toutes les innovations. Mais ce que nous devons viser, est-ce la foi de nos grand-mères (qui a connu un gros problème de transmission ces dernières décennies... était-elle si vivante que cela?) ou la foi des Apôtres? Devons-nous faire quelque chose parce que nos grand-mères le faisaient, ou parce que les Apôtres le faisaient? Est-ce-que les différences ont si peu d'importance, ou est-ce-que ce que nous faisons est à la fois une expression de notre foi et une façon de la diriger et de la mettre en pratique? Lex orandi, lex credendi...

Les changements disciplinaires, liturgiques, etc... sont rarement anodins. Dans certains cas, il peut ne s'agir que de détails. Je pense que c'est finalement assez rare. Dans d'autres cas, ils trahissent un changement psychologique chez ceux qui en sont à l'origine et chez ceux qui les adoptent, qui peut être lié aux conditions extérieures - si tel est le cas, le changement de conditions extérieures est généralement décelable, y compris du point de vue de l'historien - mais qui peut aussi marquer une déviation de la foi, ou une perte de sens. Enfin, quand ces changements sont forcés sur des fidèles qui n'étaient pas encore prêts à les accueillir, il peut arriver que ces changements provoquent eux-mêmes une déviation dans la compréhension de la foi ou la façon de l'accueillir.

Conserver les traditions de nos grand-mères permet certes de conserver ce qui n'a pas encore dévié depuis l'époque des Apôtres. Cela conserve aussi tout ce qui l'a été. Je pense que la conservation de la foi apostolique impose aussi de mettre à l'épreuve ce qui nous a été transmis. Au fur et à mesure, certaines choses ont été écrites, à commencer par les Evangiles, et en continuant par les dogmes, les canons ecclésiaux et les écrits des Pères, ce qui permet justement d'attester ce qui a été la Tradition à une époque et d'évaluer notre fidélité à travers les siècles.

Vous prenez l'exemple de la Communion sous les Deux Espèces, qui est conforme à l'ordre du Christ tel que consigné dans les Saintes Ecritures, "prenez et buvez-en tous", et qui est conforme à ce qui a été transmis par les Apôtres puisque c'était la coutume universelle dans l'Eglise au 1er millénaire. Au second, l'Eglise latine s'est singularisée en introduisant progressivement un changement disciplinaire (pour des raisons qui mériteraient d'être approfondies), dans un domaine qui est loin d'être un détail liturgique puisqu'il s'agit de la matière même du Sacrement central de la vie ecclésiale. Pouvons-nous affirmer sans aucun doute que ce changement soit anodin ou "protestant", comme vous dites? Les Pères du Concile de Trente n'ont pas osé le faire.

Il est vrai que là où la Communion sous les Deux Espèces est réapparue dans l'Eglise catholique ces dernières décennies, cela s'est souvent accompagné d'une perte de la plupart voire tous des signes extérieurs de respect pour la Très Sainte Eucharistie, respect attesté sous une forme ou sous une autre depuis les débuts de l'Eglise. Le résultat n'a donc pas forcément été très convaincant. La matière du Sacrement que nous offre gratuitement Dieu ne suffit pas, la tournure d'esprit pour le recevoir importe tout autant. Mais cela ne change rien au problème de base.

Retrouver la Tradition apostolique dans sa plénitude est aussi un devoir de chrétien.

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

Altior
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » mer. 22 mars 2017, 22:10

prodigal a écrit :
mer. 22 mars 2017, 16:03

TRADITIONALISME, philosophie (...)
Doctrine selon laquelle les formes
Cher Prodigal,

Il est facile de voir que ce texte que vous avez lu dans cette encyclopédie (qui, pourtant, ne cite pas un document papal identifiable) n'a rien à voir avec le traditionalisme catholique, celui qui, du point de vu philosophique, s'appui sur le thomisme plutôt que sur le bonaldisme, qui est en filiation de l'archevêque Lefebvre plutôt que de Joseph de Maistre. Il me semble que l'encyclopédie parle ici des prémices de ce courent qui est devenu, au XX-ème siècle, «l'école de la tradition» dont le porte-étendard fût Renée Guénon et dont d'autres membres éminents ont été le suisse F. Schuon, l'italien Evola, l'indien Coomaraswami. C'est une expression moderne de l'ancienne philosophie de la Gnose, qui n'a rien à voir avec le christianisme et non plus avec le traditionaisme. On n'enseigne pas à la caté de ma paroisse cette philosophie dangereuse.


la démocratie, valeur moderniste par excellence!
J'espère que vous êtes au courent du fait que les sociétés traditionnelles ont connu la démocratie depuis l'antiquité profonde. Néanmoins, il reste quelque chose de vrai dans ce que vous dites: pour les tradis, la démocratie est une façon parmi d'autres de designer un gouvernement, avec ses avantages et ses désavantages. La prétendue supériorité de la démocratie est un sujet à débattre. Ce que le modernisme a apporté est le fait que cette prétendue supériorité n'est plus un sujet de débat. Cela est devenu un dogme, que pourtant jamais Dieu n'a révélé. De qui disiez-vous qu'ils font preuve de fermeture d'esprit ?

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mer. 22 mars 2017, 22:33

Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 21:54
Vous mélangez deux choses qui n'ont rien à voir. Le traditionalisme est une philosophie, comme vous le relevez, bien précise, au 19ème s., qui revendique haut et fort cette appellation face au courant libéral, ou libéralisme catholique, qui gagne l'Église à cette époque, et qui fut également condamné. Pierre Carhaix
Si vous permettez je ne les mélange pas puisque je les distingue; comme vous avez pu le voir. Mais je m'interroge sur les similitudes, qui ne se limitent peut-être pas au fait d'avoir le même nom.
Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 21:54
Un tradi ne dit pas qu'il adhère au traditionalisme, mais se définit d'abord comme catholique attaché à la tradition. Pierre Carhaix
C'est son droit le plus strict. Je n'ai aucun problème avec ces personnes, pourvu qu'elles ne prétendent pas m'imposer de penser la même chose qu'elles.
Altior a écrit : Cher Prodigal,
Il est facile de voir que ce texte que vous avez lu dans cette encyclopédie (qui, pourtant, ne cite pas un document papal identifiable) n'a rien à voir avec le traditionalisme catholique, celui qui, du point de vu philosophique, s'appui sur le thomisme plutôt que sur le bonaldisme, qui est en filiation de l'archevêque Lefebvre plutôt que de Joseph de Maistre. Il me semble que l'encyclopédie parle ici des prémices de ce courent qui est devenu, au XX-ème siècle, «l'école de la tradition» dont le porte-étendard fût le Français Renée Guénon et dont d'autres membres éminents ont été le suisse F. Schuon, l'italien Evola, l'indien Coomaraswami. C'est une expression moderne de l'ancienne philosophie de la Gnose, qui n'a rien à voir avec le christianisme et non plus avec le traditionaisme. On n'enseigne pas à la caté de ma paroisse cette philosophie dangereuse. Altior
Je connais ces penseurs dont vous parlez. Il s'agit encore d'autre chose. Mais constatez que le modernisme condamné au dix-neuvième siècle n'a pas grand chose de commun non plus avec celui que certains reprochent au pape François.
Et donc, en bonne logique, vous trouverez comme moi que ce n'est pas plus mal d'éviter ces mots trompeurs et qui ne font que raviver inutilement des tensions, non?
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » mer. 22 mars 2017, 23:06

prodigal a écrit :
mer. 22 mars 2017, 22:33
Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 21:54
Vous mélangez deux choses qui n'ont rien à voir. Le traditionalisme est une philosophie, comme vous le relevez, bien précise, au 19ème s., qui revendique haut et fort cette appellation face au courant libéral, ou libéralisme catholique, qui gagne l'Église à cette époque, et qui fut également condamné. Pierre Carhaix
Si vous permettez je ne les mélange pas puisque je les distingue; comme vous avez pu le voir. Mais je m'interroge sur les similitudes, qui ne se limitent peut-être pas au fait d'avoir le même nom.
Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 21:54
Un tradi ne dit pas qu'il adhère au traditionalisme, mais se définit d'abord comme catholique attaché à la tradition. Pierre Carhaix
C'est son droit le plus strict. Je n'ai aucun problème avec ces personnes, pourvu qu'elles ne prétendent pas m'imposer de penser la même chose qu'elles.
Altior a écrit : Cher Prodigal,
Il est facile de voir que ce texte que vous avez lu dans cette encyclopédie (qui, pourtant, ne cite pas un document papal identifiable) n'a rien à voir avec le traditionalisme catholique, celui qui, du point de vu philosophique, s'appui sur le thomisme plutôt que sur le bonaldisme, qui est en filiation de l'archevêque Lefebvre plutôt que de Joseph de Maistre. Il me semble que l'encyclopédie parle ici des prémices de ce courent qui est devenu, au XX-ème siècle, «l'école de la tradition» dont le porte-étendard fût le Français Renée Guénon et dont d'autres membres éminents ont été le suisse F. Schuon, l'italien Evola, l'indien Coomaraswami. C'est une expression moderne de l'ancienne philosophie de la Gnose, qui n'a rien à voir avec le christianisme et non plus avec le traditionaisme. On n'enseigne pas à la caté de ma paroisse cette philosophie dangereuse. Altior
Je connais ces penseurs dont vous parlez. Il s'agit encore d'autre chose. Mais constatez que le modernisme condamné au dix-neuvième siècle n'a pas grand chose de commun non plus avec celui que certains reprochent au pape François.
Et donc, en bonne logique, vous trouverez comme moi que ce n'est pas plus mal d'éviter ces mots trompeurs et qui ne font que raviver inutilement des tensions, non?
Il y a clairement une filiation entre le modernisme du 19e, et le modernisme du 20e-21e s, puisque c'est exactement le même courant qui a évolué (je n'y range pas de pape en particulier, d'ailleurs, mais ce courant continue d'avoir une grande influence dans l'Église).
Mais il n'y a aucune filiation entre le traditionalisme de René Guénon et le traditionalisme qui existe depuis 1969, consécutif à la promulgation du nouveau missel. Ça n'a rien à voir. Ça porte le même nom, mais il n'y a strictement aucune parenté entre les deux. Même pas de filiation. René Guénon a même rejeté le catholicisme, puis il est parti en Égypte pour y fonder une loge soufie, comme il considérait que la grande Tradition primordiale s'était maintenue dans le soufisme.

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » mer. 22 mars 2017, 23:39

Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 23:06
Mais il n'y a aucune filiation entre le traditionalisme de René Guénon et le traditionalisme qui existe depuis 1969, consécutif à la promulgation du nouveau missel. Ça n'a rien à voir. Ça porte le même nom, mais il n'y a strictement aucune parenté entre les deux. Même pas de filiation.
Oui, c'est ce que je viens de dire.
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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » jeu. 23 mars 2017, 0:36

prodigal a écrit :
mer. 22 mars 2017, 23:39
Pierre Carhaix a écrit :
mer. 22 mars 2017, 23:06
Mais il n'y a aucune filiation entre le traditionalisme de René Guénon et le traditionalisme qui existe depuis 1969, consécutif à la promulgation du nouveau missel. Ça n'a rien à voir. Ça porte le même nom, mais il n'y a strictement aucune parenté entre les deux. Même pas de filiation.
Oui, c'est ce que je viens de dire.
Bien. Dans ce cas nous pouvons lever la séance, puisque nous parvenus à un heureux accord.

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Altior » jeu. 23 mars 2017, 6:31

Pierre Carhaix a écrit :
jeu. 23 mars 2017, 0:36
Bien. Dans ce cas nous pouvons lever la séance, puisque nous parvenus à un heureux accord.
Séance levante, je vous dis au revoir. À Dimanche, à la Messe. En latin, ça va de soi. Et surtout n'oubliez pas vos chapelets!

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Re: le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Marc Oh » jeu. 23 mars 2017, 11:18

Ceci est très intéressant, merci de vos apports. Il y semble-t-il des problèmes de lexiques d'où l'importance de bien définir de quoi on parle au juste. J'aimerai avoir des références des condamnations pour apprécier ce qui l'a été vraiment par le magistère. Nous somme dans un domaine ou l’ennemie doit certainement jouer de l'enfumage à gogo pour nous détournée de notre quette. Nous somme si misérable... et prompt à nous étriper!
Merci encore

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Re: Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » jeu. 23 mars 2017, 13:37

Cher Marc Oh,
je vais essayer de résumer en ne gardant que ce qui peut (peut-être) faire l'accord de tous ceux qui sont intervenus.
Traditionalisme peut se dire en trois sens.
1) doctrine selon laquelle la tradition est la seule source valable de connaissance (ce qui implique qu'elle doive être inconditionnellement suivie). Cette doctrine a été condamnée par l'Eglise au dix-neuvième siècle
2) sensibilité qui porte à préférer certaines formes de piété (messe de saint Pie V, chapelet, etc.) dites traditionnelles.
3) courant de l'Eglise catholique (ou qui se divise en schismatiques et non schismatiques) critique à l'égard du concile Vatican II et se référant à l'Eglise tridentine comme modèle.
Le problème dont je n'ai pas la solution est de savoir dans quelle mesure le courant tradi au sens 3 n'est pas conduit nécessairement à dériver vers une certaine forme de fidéisme qui rappelle la doctrine condamnée au sens 1. Le traditionalisme au sens 2 est, lui, parfaitement légitime.
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Re: Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » jeu. 23 mars 2017, 21:05

Bon, ben, faut tout recommencer à expliquer, visiblement.

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Re: Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par prodigal » ven. 24 mars 2017, 12:42

Je vous en prie, faites!
Je pense que vous ne contesterez pas le fait que ces trois significations du mot "traditionaliste" existent.
Si vous voyez un quatrième sens qui mérite d'être retenu, c'est à vous de le préciser.
Et si c'est le problème que je pose que vous ne comprenez pas, je vous renvoie aux messages précédents, et me tiens à votre disposition pour des explications supplémentaires.
Que puis-je faire de mieux?
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Re: Le traditionalisme : fondement en dehors de la pratique

Message non lu par Pierre Carhaix » ven. 24 mars 2017, 21:16

prodigal a écrit :
ven. 24 mars 2017, 12:42
Je vous en prie, faites!
Je pense que vous ne contesterez pas le fait que ces trois significations du mot "traditionaliste" existent.
Si vous voyez un quatrième sens qui mérite d'être retenu, c'est à vous de le préciser.
Et si c'est le problème que je pose que vous ne comprenez pas, je vous renvoie aux messages précédents, et me tiens à votre disposition pour des explications supplémentaires.
Que puis-je faire de mieux?
Vous partez du principe que le traditionalisme actuel est potentiellement schismatique ou hérétique, et vous organisez votre réflexion de sorte à l'orienter dans cette direction. En fait, vous ne faites que chercher un angle d'attaque, comme d'autres dans d'autres discussions récentes, pour laisser sous-entendre en conclusion : vous voyez, les traditionalistes sont suspects, ils mènent à l'hérésie ou au schisme.

En quoi pouvez vous faire mieux, dites vous ? En essayant d'être bienveillant dans vos intentions, peut-être ?

Allez... Je ne vais pas essayer de vous convaincre, puisque vos idées sont faites. Simplement le rapprochement que vous faites entre le traditionalisme ou bonaldisme, doctrine (notez bien ce mot, doctrine), ou système philosophique politique et religieux, défendu par de Bonald et Joseph de Maistre, en réaction au libéralisme contemporain, et à la Révolution française, condamné par l'Église en 1855, et le mouvement dit traditionaliste, qualificatif donné par les observateurs extérieurs (journalistes, notamment), qui n'est pas une doctrine, ni un système politico religieux, mais un courant de l'Église, courant parmi d'autres courants très divers qui composent l'Église, ce rapprochement que vous faites est un non-sens, un anachronisme (de Bonald et de Maistre n'ont plus d'adeptes depuis le 19e s., personne ne se revendique de leur pensée), en plus d'être faux.

Il n'y a pas trois points mais deux. D'un côté une doctrine du début du 19ème, et de l'autre un courant actuel de l'Église. Vous tentez artificiellement de diviser le courant tradi en deux groupes pour pouvoir mieux le condamner, car lorsqu'on est dans le groupe 2, on peut aussi être dans le 3, même si le courant tradi est très divers, allant des catholiques modérés qui essaient de rester dans leur paroisse, jusqu'aux sédévacantistes les plus extrémistes. Et à côté de ça, on peut être dans le groupe 2, et ne pas se sentir trafitionaliste. Cette distinction que vous faites entre deux familles traditionalistes nettement séparées l'une de l'autre, ne correspond pas à la réalité. On pourrait tout au plus faire des sous groupes, entre lesquels les gens sont très mobiles. Et aucun d'eux n'a quelque chose à voir avec de Bonald.

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