Je ne suis pas venu abolir, mais parfaire

« Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ ! » (1Tm 3.16)
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wanderer
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Je ne suis pas venu abolir, mais parfaire

Message non lu par wanderer » lun. 14 mars 2005, 19:30

Question qui a vu le jour dans un autre fil.

Je rappelle le début de la conversation.

Guelfo a écrit
Or donc, en ce qui concerne la polygamie et d'ailleurs la lapidation, que je sache, le Christ ne nous a jamais ordonné d'empêcher les Juifs de respecter la Torah. Je vous conseille par ailleurs de méditer ce qu'Il dit lorsque la foule s'apprête à lapider la femme adultère: non pas "la Torah c'est fini mes gaillards puisque Je vous le dis", mais "que celui qui n'a jamais péché jette la première pierre", ce qui démontre une fois de plus la grande finesse du message du Christ.

De la même manière, le Christ nous a dit qu'Il n'est venu ni ajouter, ni retrancher un mot de la Loi.

Il s'ensuit, me semble-t-il, que nous n'avons pas reçu le droit d'empêcher d'autres de vivre comme ils l'entendent tant qu'ils ne violent pas le droit naturel. Dès lors que celui-ci existe de toute éternité, et qu'il ne fait aucun doute que Dieu a autorisé les Juifs à être polygames, dire que la polygamie serait interdite par le droit naturel est tout simplement faux, à moins de considérer que la Bible contient des dispositions contraire au droit naturel. En ce qui concerne la lapidation, que je sache, l'Eglise n'interdit pas la peine de mort.
Wanderer a écrit
Je ne suis pas d'accord avec vous, prenons un autre exemple.

Citation:

3 Des Pharisiens l'abordèrent pour le mettre à l'épreuve, et dirent : " Est-il permis
à l'homme de répudier sa femme pour quelque motif que ce soit? "
4 Il répondit : " N'avez-vous pas lu que celui qui (les créa), au commencement, les
fit mâle et femelle,
5 et qu'il dit : A cause de cela, l'homme quittera son père et sa mère, et
s'attachera à sa femme, et les deux deviendront une seule chair?
6 Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Que l'homme ne sépare donc
pas ce que Dieu a uni ! "
7 Ils lui dirent : " Pourquoi donc MoÏse a-t-il prescrit de donner un acte de divorce
et de la répudier? "
8 Il leur dit : " C'est à cause de votre dureté de cœur que Moïse vous a permis de
répudier vos femmes : mais, au commencement, il n'en fut pas ainsi.
9 Or je vous dis que celui qui répudie sa femme, si ce n'est pour adultère, et en
épouse une autre, commet un adultère. "
10 Ses disciples lui dirent : " Si telle est la condition de l'homme avec sa femme,
mieux vaut ne pas se marier. "
11 Mais il leur dit : " Tous ne comprennent pas cette parole, mais ceux à qui cela
a été donné.
12 Car il y a des eunuques qui sont venus tels du sein de leur mère; il y a aussi
des eunuques qui le sont devenus par le fait des hommes; et il y a des eunuques
qui se sont faits eunuques eux-mêmes à cause du royaume des cieux. Que celui
qui peut comprendre, comprenne ! "



L'Eglise a-t-elle enseignéee que les juifs avaient le droit de divorcer? Ca m'étonnerait beaucoup. Le CEC enseigne que l'AT contient de l'imparfait et du provisoire, je trouve cette expression très juste. Vous trouvez que la lapidation est un acte légitime alors?

Citation:

De la même manière, le Christ nous a dit qu'Il n'est venu ni ajouter, ni retrancher un mot de la Loi.



Que pensez-vous de ce que Jésus enseigne sur le Sabbat?
Guelfo a écrit
Sur le premier point, il me semble que le message fondamental est que le Christ n'est pas venu modifier la loi hébraïque mais nous en révéler la signification profonde.

J'hésite toujours avant de tenter d'interpréter un texte biblique, dès lors que je n'ai pas été formé pour, mais essayons.

La manière dont je comprends ce texte est que la loi est un minimum; son but est pragmatique, c-à-d organiser harmonieusement la société, et ses moyens doivent l'être tout autant. Une loi que personne n'applique est lettre morte et donc facteur de désordre. Si Moïse a autorisé la répudiation, c'est donc pour des motifs pragmatiques, et il ne s'agit nullement d'une sanction morale de la répudiation.

Le Christ dit donc "à ceux qui peuvent comprendre" que si on a une quelconque exigence morale envers soi-même, on ne peut se satisfaire de la simple obéissance à la Loi, qu'après tout même les méchantes gens doivent respecter.
Voilà, je pense que la clarté de la discussion originale a été conservée. Non?

C'est à moi de répondre, mais pas tout de suite, il faudrait que je bosse un minimum. :)

A nos anciens Testaments, la questions est difficile. Les autres sont évidemment invités à discuter sur ce sujet, il n'ya pas que Guelfo et moi!

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Message non lu par guelfo » lun. 14 mars 2005, 19:35

Ah, vous m'avez devancé ! :)
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Message non lu par VexillumRegis » mar. 15 mars 2005, 9:12

Bonjour à tous,

Cette question des rapports entre la Loi mosaïque et la Loi évangélique est intéressante à plus d'un titre.

[align=justify]"Des Pharisiens, l'ayant abordé, lui demandèrent s'il est permis à un mari de répudier sa femme. C'était pour le mettre à l'épreuve. Il leur répondit : "Que vous a ordonné Moïse?" Ils dirent : "Moise a permis de dresser un acte de divorce et de répudier." Jésus leur dit : "C'est à cause de votre dureté de cœur qu'il a écrit pour vous cette loi. Mais, au commencement de la création, Dieu les fit mâle et femelle. A cause de cela, l'homme quittera son père et sa mère et s'attachera à sa femme, et les deux ne seront qu'une seule chair. Ainsi ils ne sont plus deux, mais une seule chair. Que l'homme donc ne sépara pas ce que Dieu a uni !" (Marc X, 2-9)

"C'est à cause de votre dureté de coeur qu'il a écrit pour vous cette loi. Mais au commencement de la création (...)" - Voilà me semble-t-il le passage important. Le divorce et la répudiation sont ainsi historiquement datés, mais il y eut un temps où cela ne fut pas ainsi. Eve a été tiré du sein d'Adam (Genèse II, 22) : les deux ne forment qu'une seule chair, qu'un seul être ; ils constituent en quelque sorte le type de l'union conjugale, où les deux mariés ne s'appartiennent plus (1 Cor. VII, 4 s.) mais se donnent entièrement l'un à l'autre. Ainsi la répudiation et le divorce (et plus généralement l'ancienne Loi) ne furent qu'un pis-aller établis pour un peuple "dur de coeur", encore sous le joug de la faute originelle.

"La Loi a été notre pédagogue pour nous conduire au Christ" (Ga. III, 24) ; elle contient du provisoire et du perfectible ; elle est une "malédiction" (Ga. III, 13) en ce sens qu'elle rend compte par ses imperfections de l'infidélité d'Israël. "Mais lorsque est venue la plénitude des temps, Dieu a envoyé son Fils, formé d'une femme, né sous la Loi, pour affranchir ceux qui sont sous la Loi, afin de nous conférer l'adoption" (Ga. IV, 4). Par le Christ, nous sommes délivrés de la Loi de servitude et élevé au rang de fils adoptifs de Dieu ; la grâce a pris la place des préceptes mosaïques.

Je vous renvoie à Marc VII, 18-21 : les interdits alimentaires sont de la même manières dépassés par la Loi évangélique, venue parfaire l'ancienne Loi.[/align]

Bien à vous dans le Christ,

- VR -

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Message non lu par guelfo » mar. 15 mars 2005, 11:31

Attention, je pense qu'il faut bien distinguer deux problèmes:

1. les chrétiens sont-ils tenus de respecter la Loi mosaïque ?
2. la Loi mosaïque serait-elle contraire au Christianisme ?

Se pose également le problème du statut d'Israël (pas le pays, le peuple).
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Message non lu par Charles » mar. 15 mars 2005, 14:13

guelfo a écrit :Attention, je pense qu'il faut bien distinguer deux problèmes:

1. les chrétiens sont-ils tenus de respecter la Loi mosaïque ?
La question s'est posée aux apôtres et la réponse est non. Pas de circoncision ni de cashrout.
guelfo a écrit :2. la Loi mosaïque serait-elle contraire au Christianisme ?
Elle lui est sans doute effectivement contraire sur de nombreux point. Cependant le Décalogue par exemple est toujours valable : voir le premier commandement de Jésus qui reprend le premier du Décalogue.

Concernant la lapidation, il est évident que Jésus passe à quelque chose de complètement différent.

Pour comprendre ce passage, globalement de l'AT au NT, il me semble qu'il faut relire les passages des Epitres relatifs à la liberté du chrétien ainsi que ceux de l'Evangile relatifs au joug (ou au fardeau) de Jésus.

Bien à vous

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Message non lu par guelfo » mar. 15 mars 2005, 15:03

Charles a écrit :
guelfo a écrit :Attention, je pense qu'il faut bien distinguer deux problèmes:

1. les chrétiens sont-ils tenus de respecter la Loi mosaïque ?
La question s'est posée aux apôtres et la réponse est non. Pas de circoncision ni de cashrout.
Notons que cela ne s'est pas fait sans heurts et que le débat a été gagné "par défaut", suite à la disparition de l'Eglise de Jérusalem qui défendait ce point de vue.
Charles a écrit :
guelfo a écrit :2. la Loi mosaïque serait-elle contraire au Christianisme ?
Elle lui est sans doute effectivement contraire sur de nombreux point. Cependant le Décalogue par exemple est toujours valable : voir le premier commandement de Jésus qui reprend le premier du Décalogue.

Concernant la lapidation, il est évident que Jésus passe à quelque chose de complètement différent.

Pour comprendre ce passage, globalement de l'AT au NT, il me semble qu'il faut relire les passages des Epitres relatifs à la liberté du chrétien ainsi que ceux de l'Evangile relatifs au joug (ou au fardeau) de Jésus.
Comment interprètes-tu alors que le Christ dit Lui-même qu'Il n'est rien venu ajouter ou retirer de la Loi, ce qui a quand même une signification très précise dans le contexte juif ?
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Message non lu par Christian » jeu. 17 mars 2005, 9:56

Charles
La question [du respect de la loi mosaïque] s'est posée aux apôtres et la réponse est non. Pas de circoncision ni de cashrout.
Sans avoir étudié cette question, j’hasarderai deux hypothèses pour expliquer l’affranchissement des apôtres de cette loi de Moïse :

La première est circonstancielle. Quand on propage une nouvelle religion en opposition frontale avec celle des autorités du moment (la divinité de l’Empereur, etc.), il vaut mieux ne pas augmenter encore le coût à l’entrée. La circoncision d’adultes, pratiquée par le shohet ou le barbier local avec l’hygiène du temps, ne devait pas être une plaisanterie (pour les effets, voir Gn 34, 22-25 !).

La seconde raison, certainement plus profonde, d’abandonner les pratiques de l’AT, circoncision et cacherout, tient à leur spécificité hébraïque même. Elles sont le signe de l’Alliance entre Dieu et Son peuple. La cacherout tient le Juif à l’écart de la table de l’étranger, elle le ramène chaque jour à sa communauté. La circoncision indélébile lui interdit à tout jamais d’être goy.

Mais lorsque le Seigneur commande d’enseigner ‘toutes les nations’ et envoie à Pierre une vision d’animaux impurs avec l’ordre de les manger, puis de baptiser Cornelius, ces marqueurs n’ont plus de sens. Si tous les mâles ont vocation d’être circoncis, ce n’est pas plus une distinction de l’être.

Il existe bien sûr d’autres raisons aux tabous alimentaires (prendre conscience de notre relation à la nature, que nous devons détruire pour survivre, etc.) et à la circoncision, mais on peut trouver à leur expression des substituts moins astreignants.

Voilà, je pense, une piste. Il en existe sûrement d’autres.

A vous

Christian

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Message non lu par Shaka » jeu. 17 mars 2005, 11:16

Il faut bien distinguer la loi de la coutume rituelle archaïque, la première a un contenu rationnel, la seconde que l'on rencontre dans les sociétés primitives, même si elle a un fondement pratique (comme tend à le montrer le structuralisme et les études ethnologiques de Claude Lévi-Strauss) ne dépasse pas le cadre de l'explication mythologique ou superstitieuse.
La circoncision, tout comme l'excision sont des mutilations correspondant à des pratiques tribales rentrées dans les moeurs du clan: elles n'ont pas la force d'une loi morale, le tabou n'est pas la morale. Le Christ parle de la loi, il ne parle pas des stratagèmes mis en place par le clan pour perpétuer une superstition.
Les mutilations pratiquées dès la naissance pour d'obscures raisons communautaires devraient être formellement interdites par les Etats.
Le moine, cet arhat qui a mis fin au flux impur, a vécu noblement, fait ce qu'il devait faire, déposé son fardeau, atteint le but et brisé les entraves du devenir et s'est libéré par la Connaissance exacte, ô moines, le voici celui qui reconnaît à fond le nirvana comme étant le nirvana. Il ne forge pas la notion : je suis le nirvana, je suis du nirvana, mien est le nirvana; et il ne se complaît pas dans le nirvana. Pourquoi cela? C'est que sa Connaissance est parfaite.

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Message non lu par guelfo » ven. 18 mars 2005, 11:46

La circoncision n'est certainement pas une "superstition", et chercher à l'interdire est un acte tyrannique.

Je ne cache d'ailleurs pas que les velléités autoritaires - pour ne pas dire plus - de Shaka commencent à sérieusement m'étonner.

Vous je ne sais pas, mais moi je ne connais aucun catholique dans la vie réelle qui justifie les croisades et les bûchers. Soit Shaka a un réel problème, soit il fait de la provocation.
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Message non lu par Shaka » mar. 22 mars 2005, 13:01

guelfo a écrit :La circoncision n'est certainement pas une "superstition", et chercher à l'interdire est un acte tyrannique.
Rectification: Mutiler un enfant qui vient de naître est un acte tyrannique: arbitraire et cruel.

guelfo a écrit :
Je ne cache d'ailleurs pas que les velléités autoritaires - pour ne pas dire plus - de Shaka commencent à sérieusement m'étonner.

Vous je ne sais pas, mais moi je ne connais aucun catholique dans la vie réelle qui justifie les croisades et les bûchers. Soit Shaka a un réel problème, soit il fait de la provocation.
Justifier les croisades ??? tu ne me confondrais pas avec le Pape Urbain II ?
Le moine, cet arhat qui a mis fin au flux impur, a vécu noblement, fait ce qu'il devait faire, déposé son fardeau, atteint le but et brisé les entraves du devenir et s'est libéré par la Connaissance exacte, ô moines, le voici celui qui reconnaît à fond le nirvana comme étant le nirvana. Il ne forge pas la notion : je suis le nirvana, je suis du nirvana, mien est le nirvana; et il ne se complaît pas dans le nirvana. Pourquoi cela? C'est que sa Connaissance est parfaite.

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Message non lu par guelfo » mar. 22 mars 2005, 13:54

Je prends note pour les croisades. Par contre, tu as clairement écrit que la raison historique et la parole du p'tit père Hegel imposaient d'éliminer les hérétiques.
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Message non lu par Shaka » mar. 22 mars 2005, 18:07

guelfo a écrit :Je prends note pour les croisades. Par contre, tu as clairement écrit que la raison historique et la parole du p'tit père Hegel imposaient d'éliminer les hérétiques.
Tu n'as pas encore compris que la Raison au travers de l'Histoire a ses raisons que l'individu ne connaît pas, d'autre part l'Histoire comporte en elle un négatif inéliminable qui sert à la réalisation du positif, le sens implique le non sens.
Il y a aussi autre chose que tu n'as pas saisi, c'est qu'il ne s'agit pas de la parole de Hegel ou de je ne sais quel autre individu en particulier, mais de la réalisation de l'être en sa vérité. Le subjectivisime de l'individu n'a ici sa place que comme un moment de l'Histoire à sursumer.
Le moine, cet arhat qui a mis fin au flux impur, a vécu noblement, fait ce qu'il devait faire, déposé son fardeau, atteint le but et brisé les entraves du devenir et s'est libéré par la Connaissance exacte, ô moines, le voici celui qui reconnaît à fond le nirvana comme étant le nirvana. Il ne forge pas la notion : je suis le nirvana, je suis du nirvana, mien est le nirvana; et il ne se complaît pas dans le nirvana. Pourquoi cela? C'est que sa Connaissance est parfaite.

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Message non lu par Christian » mer. 23 mars 2005, 9:25

Bonjour Shaka,
...la Raison au travers de l'Histoire a ses raisons que l'individu ne connaît pas, d'autre part l'Histoire comporte en elle un négatif inéliminable qui sert à la réalisation du positif...
Marx, lecteur de Hegel, annonce qu’il connaît ces raisons et quel sens a l’Histoire. Votre utilisation du mot ‘individu’ au singulier collectif indique votre scepticisme à cet égard. Personne ne sait où est le terminus. Admettons. Mais cette ignorance universelle n’est-elle pas une excellente justification du libéralisme pur et dur ?

Adam Smith, of course, le pensait. Sa ‘main invisible’ est celle de la Providence. Vous ajoutez, en outre, que le ‘négatif’ de l’Histoire est ‘inéliminable’. Comment justifiez-vous alors de brutaliser les gens pour qu’ils vous suivent si vous ne savez pas où aller ? Et si par hasard vous marchiez dans la bonne direction, comment justifiez-vous de les brutaliser pour les entraîner où ils allaient de toute façon ?

Cordialement

Christian

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Message non lu par Shaka » mer. 23 mars 2005, 11:41

Christian a écrit : Marx, lecteur de Hegel, annonce qu’il connaît ces raisons et quel sens a l’Histoire. Votre utilisation du mot ‘individu’ au singulier collectif indique votre scepticisme à cet égard. Personne ne sait où est le terminus. Admettons. Mais cette ignorance universelle n’est-elle pas une excellente justification du libéralisme pur et dur ?
Ce serait le cas si l'individu était une réalité achevée, un absolu mesure de toutes choses, y compris de l'histoire, c'est ce que prétend Marx (se proclamant lui-même disciple hérétique de Hegel) en absoluitisant les individus empiriques dans leur singularité matérielle. Mais Hegel dit clairement que "L'incarnation christique est le gond autour duquel tourne l'histoire universelle", et nous nous ne sommes pas que des individus, nous sommes aussi esprit communautaire et conscience religieuse et c'est uniquement un mode de penser historiquement déterminé, accordant le primat à l'individu qui nous fait croire que la conscience quelque soit son contenu se détermine toujours comme conscience individuelle. Par exemple, Hegel en voyant Napoléon a pu dire "J'ai vu passer la Révolution à cheval", il faut bien comprendre qu'il ne voulait pas dire par là que Napoléon était un serviteur zélé des idées révolutionnaires, sur le plan individuel c'était un homme égocentrique, arriviste, aux ambitions démesurées, mais il n'était pas qu'un individu il était aussi l'incarnation de l'esprit de son temps.
La réalisation du sujet ne s'identifie pas absolument à la réalisation de l'individu, cette dernière est bien plutôt un moment appelant à être dépassé.

Chez les mystiques on trouve également le dépassement de l'individu:

"Padre Pio abhorre la maxime : " Chacun pour soi; Dieu pour tous " C'est trop égoïste, trop de ce monde pour lui. Il lui oppose celle-ci, de son cru " Dieu pour tous : mais personne pour soi seul. ")"

Padre dit à ses enfants spirituels : " Du pain et des coups aident souvent à faire de beaux garçons."

"Un jeune homme lui avoua qu'il craignait de l'aimer plus que Dieu. Ce à quoi le Padre répliqua : " Vous devez aimer Dieu d'un amour infini à travers moi. Vous m'aimez parce que je vous guide vers Dieu qui est le bien suprême. Je ne suis qu'un moyen. Si je vous guidais vers le mal, vous cesseriez de m'aimer. "

L'ignorance universelle de l'individu peut donc être vaincue pour peu que l'individu se désaisisse de son être singulier et l'assume dans l'universel.


Christian a écrit :
Adam Smith, of course, le pensait. Sa ‘main invisible’ est celle de la Providence. Vous ajoutez, en outre, que le ‘négatif’ de l’Histoire est ‘inéliminable’. Comment justifiez-vous alors de brutaliser les gens pour qu’ils vous suivent si vous ne savez pas où aller ? Et si par hasard vous marchiez dans la bonne direction, comment justifiez-vous de les brutaliser pour les entraîner où ils allaient de toute façon ?

Cordialement

Christian
Il ne s'agit pas d'une justification morale, avant de penser le devoir être, il faut d'abord penser l'être et le sens de l'être est sa propre justification, d'où l'expression "il fallait bien et il faut bien en passer par là", c'est parce que la réalité est telle qu'elle ne doit pas être qu'elle a du sens, il ne sert à rien de vouloir s'abstraire de l'histoire pour pouvoir la morigéner, d'abord parce qu'il est impossible de s'en abstraire (nous sommes des résultats historiques et pas des spectateurs impartiaux jugeant à distance) et ensuite parce qu'elle le fait d'elle-même en passant, en faisant et en défaisant.
Le moine, cet arhat qui a mis fin au flux impur, a vécu noblement, fait ce qu'il devait faire, déposé son fardeau, atteint le but et brisé les entraves du devenir et s'est libéré par la Connaissance exacte, ô moines, le voici celui qui reconnaît à fond le nirvana comme étant le nirvana. Il ne forge pas la notion : je suis le nirvana, je suis du nirvana, mien est le nirvana; et il ne se complaît pas dans le nirvana. Pourquoi cela? C'est que sa Connaissance est parfaite.

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