Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

« Assurément, il est grand le mystère de notre religion : c'est le Christ ! » (1Tm 3.16)
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Perlum Pimpum
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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Perlum Pimpum » dim. 30 juil. 2023, 9:45

Xavi a écrit :
lun. 24 juil. 2023, 13:33
Merci à Perlum Pimpum pour ses judicieuses nuances et son rappel pertinent de l’encyclique Humani Generis.

Il développe de belles et justes réflexions sur l’importance de ne pas confondre l’appréhension intuitive que nous pouvons avoir de Dieu et la compréhension rationnelle que nous pouvons en avoir. L’appréhension spirituelle peut être directement et pleinement juste alors que la compréhension qui engage l’humain tout entier avec sa raison cérébrale terrestre ne peut saisir pleinement l’absolu qui est infiniment « au-delà » de sa créature.
Cher Xavi,

Il est hélas malheureux que vous me fassiez dire ce que, loin de dire, je condamne. Tout au contraire de ce que vous me faites dire, je vous ai dit que, quelle soit mystique ou rationnelle, l’assertion sur Dieu est une appréhension, pas une compréhension, et que toute appréhension (ou assertion appréhensive) est légitime dès lors qu’elle est vraie (dès lors que la pensée et conséquemment les mots qui l’expriment est adéquate à la réalité ainsi pensée et dite) : il sera toujours vrai que Dieu est simple, toujours vrai qu’en Dieu tout est un là où n’est pas l’opposition des relations trinitaires, toujours vrai qu’à la Messe la substance du pain est trans-subtantiée en la substance du corps du Christ…

Xavi a écrit :
lun. 24 juil. 2023, 13:33
C’est à cet égard qu’il faut être attentif à la relativité des mots humains, mais cela ne justifie jamais de relativiser la vérité elle-même et n’exclut en rien la justesse des dogmes de l’Église, ni ne justifie de relativiser leur vérité. Ce qui est vrai ne cesse jamais de l’être, mais le sens des mots pour le dire et la compréhension humaine peuvent évoluer et varier selon les contextes.
La relativité des mots humains ne saurait faire oublier que la vérité est dans l’adéquation de la pensée au réel, de sorte que les mots (au sens précis où ils sont employés) en lesquels la pensée se formule auront la même valeur que celle des pensées exprimées par ces mots : si ces pensées sont adéquates à la réalité qu’elles signifient, aussi les mots par lesquels cette pensée s’exprime : le discours est légitime, car il dit vrai. Aussi, ainsi considéré, il n’y a aucune relativité dans les formules dogmatiques portées par les hommes avec l’assistance infaillible du Saint-Esprit. Ce n’est que pour autant qu’on déflore le sens des mots dont usent les formules dogmatiques, que ces formules deviennent relatives. En elles-mêmes elles ne sont aucunement relatives. puisqu’elles affirment ou explicitent infailliblement les vérités de foi. Et indépendamment de toute assistance infaillible de l’Esprit-Saint relativement aux mystères de la foi, la même règle vaut pour les vérités que la raison humaine laissée à ses seules forces peut connaître : il sera toujours vrai que 2 + 2 = 4, ce quelques différents que soient les mots de la langue japonaise ou de la langue créole exprimant respectivement les nombres 2 et 4.

Ceci m’amène à commenter ce passage de votre première intervention :

Xavi a écrit :
ven. 21 juil. 2023, 18:30

Mais, le Pape François termine sa lettre avec une indication qui vaut pour tous et qui définit ce que doit être notre examen de tout écrit concernant la foi catholique : il s’agit toujours de « vérifier » si, dans ce qui est dit ou écrit, il y a un « support théologique adéquat » et le Pape de préciser aussitôt en quoi il convient de juger ce caractère adéquat. Il s’agit de vérifier si les écrits en cause « sont cohérents avec le riche humus de l’enseignement pérenne de l’Église et en même temps prennent en compte le Magistère récent. ».

C’est toujours une double référence qui évalue ainsi la conformité d’un écrit à la foi catholique qui se transmet depuis deux mille ans. C’est, « en même temps », une fidélité sans discontinuité aux enseignements infaillibles du passé qui ne changent pas et une compréhension sans cesse renouvelée de ces mêmes enseignements en communion avec le Magistère actuel.

Il est vain, et même nécessairement erroné (car cela supposerait des contradictions dans l’action de l’Esprit Saint au cours de l’Histoire de l’Église), de prétendre opposer l’un et l’autre. Nous sommes sans cesse invités à comprendre ce que dit le Magistère récent ou actuel en cohérence avec l’enseignement de la Foi qui l’a précédé avec la même autorité.
L’opposition pertinente n’est pas entre magistère passé et magistère présent, mais entre magistère infaillible et magistère faillible, entre exercice faillible et infaillible de l’autorité magistérielle.

1. Que le pape puisse errer dans la foi ne peut être sérieusement remis en cause.
[+] Texte masqué

Concile Œcuménique de Constantinople III :

« Après avoir examiné les lettres dogmatiques écrites par Serge, jadis patriarche de cette ville impériale et confiée à la protection de Dieu, à Cyrus, alors évêque de Phasis, ainsi qu'à Honorius, jadis pape de l'ancienne Rome, comme aussi 1a lettre écrite par celui-ci, Honorius, en réponse à ce même Serge, et après avoir trouvé qu'elles contredisent totalement les enseignements apostoliques et les commandements des saints conciles et de tous les saints Pères reconnus, et qu'elles suivent bien plutôt les fausses doctrines des hérétiques, nous les rejetons totalement et nous les abominons comme dommageables pour les âmes. Quant à ceux c'est-à-dire ceux-là même dont nous rejetons les doctrines impies, nous avons jugé que leurs noms également devaient être bannis de la sainte Eglise, à savoir les noms de Serge... qui a commencé à écrire au sujet de cette doctrine impie, de Cyrus d'Alexandrie, de Pyrrhus, de Paul et de Pierre, et de ceux qui ont présidé sur le siège de cette ville confiée à la protection de Dieu et qui ont pensé comme ceux-là ; ensuite également celui de Théodore, jadis évêque de Pharan ; toutes ces personnes ont été mentionnées par Agathon, le pape très saint et trois fois bienheureux de l'ancienne Rome, dans sa lettre à... l'empereur et rejetées par lui comme ayant pensé contrairement à notre foi orthodoxe ; et nous décrétons que ceux- là sont également soumis à l'anathème. Mais avec eux nous sommes d'avis de bannir aussi de la sainte Eglise de Dieu Honorius, jadis pape de l'ancienne Rome, et de le frapper d'anathème, parce que nous avons trouvé dans la lettre écrite par lui à Serge qu'il a suivi en tout l'opinion de celui-ci et qu'il a confirmé ses enseignements. »


Pape saint Léon II, Lettre Regi regum à l’empereur Constantin IV, par laquelle le Pape confirme le Concile de Constantinople III :

« Nous avons appris en effet que le saint et grand synode universel (Constantinople III) a pensé de même que tout le concile réuni autour de ce saint Siège apostolique (Concile de Rome 680), et qu'il a confessé en accord avec nous : Que notre seigneur Jésus Christ est l'un de la sainte et indivisible Trinité, qui existe à partir et en deux natures, sans confusion, sans séparation, sans division ; qu'il est, un seul et même, Dieu parfait et homme parfait , la propriété de chacune des deux natures qui se joignent en lui demeurant sauves ; qu'un seul et même a opéré les choses divines en tant que Dieu, et qu'il a opéré inséparablement les choses humaines en tant qu'homme, à l'exception du seul péché ; et le concile a affirmé en vérité que pour cette raison il a également deux volontés naturelles et deux opérations naturelles par lesquelles est manifestée principalement aussi la vérité de ses natures, pour qu'on reconnaisse en effet clairement la différence, à quelle nature elles appartiennent, à partir desquelles et dans lesquelles existe un seul et même notre Seigneur Jésus Christ ; en raison de cela nous avons effectivement reconnu... que ce saint... sixième synode... s'est attaché sans défaillance à la prédication apostolique, qu'il est en accord en tout avec la définition des cinq saints conciles universels, et qu'il n'a rien ajouté ni retranché aux déterminations de la vraie foi, mais qu'il s'est avancé avec une grande droiture sur le chemin royal et évangélique ; et en eux et par eux a été gardée l'élaboration des saints dogmes et la doctrine des Pères éprouvés de l'Eglise catholique... Et parce que (le synode de Constantinople) a proclamé dans toute sa plénitude... la définition de la foi juste que le Siège apostolique du bienheureux apôtre Pierre, lui aussi...a reçue avec vénération, pour cette raison Nous aussi et, par notre ministère, ce vénérable Siège apostolique, d'un accord unanime, Nous donnons notre assentiment à ce qui a été défini par lui, et Nous le confirmons par l'autorité du bienheureux Pierre... Et de la même manière Nous anathématisons les inventeurs de la nouvelle erreur, à savoir Théodore, l'évêque de Pharan, Cyrus d'Alexandrie, Serge, Pyrrhus ...de même aussi que Honorius qui n'a pas purifié cette Eglise apostolique par l'enseignement de la tradition apostolique, mais a tenté de subvertir la foi immaculée en une trahison impie (texte grec : a permis que l'Eglise immaculée soit souillée par une trahison impie). »


D’où conséquemment la réflexion des canonistes sur le Pape hérétique.

Ainsi le canon Si Papa du Décret de Gratien (distinction 40, canon 6) : « Si papa suae et fraternae salutis negligens reprehenditur inutilis et remis-sus in operibus suis, et insuper a bono taciturnus, quod magis officit sibi et omnibus, nichilominus innumerabiles populos cateruatim secum ducit, primo mancipio gehennae cum ipso plagis multis in eternum uapu-laturus. Huius culpas istic redarguere presumit mortalium nullus, quia cunctos ipse iudicaturus a nemine est iudicandus, nisi deprehendatur a fide devius ; pro cuius perpetuo statu uniuersitas fidelium tanto instantius orat, quanto suam salutem post Deum ex illius incolumitate animaduer-tunt propensius pendere. »

Nul ne peut juger le Pape, sauf s’il a dévié dans la foi…


D’où encore cet enseignement du Pape Innocent III, pourtant farouche partisan des prérogatives pontificales, donné en ses Sermons :

« La foi m’est tellement nécessaire que si je n’ai que Dieu pour juge de les autres péchés, pour le péché contre la foi, et pour lui seul, l’Église pourrait me juger, parce que qui ne croit pas est déjà jugé. » (Sermon II, In consecratione pontificis). « Pour cause de véritable fornication l’Église romaine pourrait démettre le pontife romain. Je ne parle pas de fornication charnelle mais spirituelle, c’est-à-dire causée par l’infidélité de l’erreur, parce que qui ne croit pas est déjà jugé. » (Sermon III, In consecratione pontificis). « Puisqu’il peut d’autant moins être jugé par les hommes, qu’il est d’autant plus jugé par Dieu. Je dis d’autant moins, parce qu’il peut être jugé par les hommes, ou peut être manifesté / déclaré avoir été jugé [judicatus ostendis], s’il est évident qu’il s’est perdu dans l’hérésie, parce que qui ne croit pas est déjà jugé. »


Et on verra les canonistes médiévaux équipoller le schisme et le scandale grave (énorme - l’énormité est un concept juridique antique et médiéval) à l’hérésie.

2. Conséquemment, le « support théologique adéquat » ne sera tel qu’autant que le magistère actuel s’exprimant failliblement sera en accord avec le magistère passé s’exprimant infailliblement…
[+] Texte masqué

Soit donc, de facto, le magistère actuel réitère avec d’autres mots les enseignements passés, ou tout au moins s’exprime dans le même sens et dans la même pensée que précédemment en donnant un développement homogène de la doctrine catholique. Soit, tout au contraire, il attente à la foi par des enseignements impies.

Prétendre qu’il ne pourrait jamais se trouver de contradiction entre le magistère passé et le magistère présent ou futur, prétendre que ne sera au pire qu’une apparence de contradiction, Iiée à l’emploi de nouveaux vocables, mais jamais de contradiction véritable, prétendre ainsi, c’est postuler contre toute évidence la totalité des enseignements pontificaux être marqués d’infaillibilité. Une tel postulat ne relève pas du catholicisme, mais du papisme le plus forcené.

3. Accessoirement, quant au Pape François.
[+] Texte masqué

Lorsque le Pape François bénit l’idole de la Pachamama puis processionne à sa suite avant de la placer dans une église romaine, il pose une suite d’actes objectivement idolâtriques, comme vous le savez pertinemment pour avoir fréquenté l’Encyclique Veritatis Splendor. Il ne s’agit pas de dire que le Pape serait formellement idolâtre (c’est-à-dire coupable d’un péché d’idolâtrie) - je laisse à Dieu le soin d’en juger - mais seulement de dire qu’il a posé des actes qui, dans leur matérialité objective, sont des actes idolâtriques. Qu’il a posé des actes objectivement idolâtriques, au risque plus qu’évident de scandaliser le peuple chrétien, ou du moins ce qu’il en reste… On comprend donc aussi pourquoi ces actes font poindre en beaucoup, dont beaucoup ne sont pas traditionalistes, un fort soupçon d’hérésie…

Aussi, plutôt que de nous inviter à souscrire inconditionnellement aux enseignements pontificaux présents et futurs, motif pris que l’attitude contraire « supposerait des contradictions dans l’action de l’Esprit Saint au cours de l’Histoire de l’Église », aurait été plus pertinent, me semble-t-il, de conseiller de considérer les assertions du Pape actuellement régnant avec prudence et circonspection.

Cordialement.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Xavi » lun. 31 juil. 2023, 11:05

Bonjour Perlum Pimpum,
Perlum Pimpum a écrit :
dim. 30 juil. 2023, 9:45
Xavi a écrit :
lun. 24 juil. 2023, 13:33
Merci à Perlum Pimpum pour ses judicieuses nuances et son rappel pertinent de l’encyclique Humani Generis.
Il développe de belles et justes réflexions sur l’importance de ne pas confondre l’appréhension intuitive que nous pouvons avoir de Dieu et la compréhension rationnelle que nous pouvons en avoir. L’appréhension spirituelle peut être directement et pleinement juste alors que la compréhension qui engage l’humain tout entier avec sa raison cérébrale terrestre ne peut saisir pleinement l’absolu qui est infiniment « au-delà » de sa créature.
Il est hélas malheureux que vous me fassiez dire ce que, loin de dire, je condamne. Tout au contraire de ce que vous me faites dire, je vous ai dit que…
Désolé pour ce malentendu. C’est bien un développement de ma part que vous citez et non, comme vous le pensez, des pensées que je vous ferais dire.

En ce qui concerne ce que vous avez écrit, je me suis limité à dire que vous aviez développé « de belles et justes réflexions » qui me semblent concerner « l’importance de ne pas confondre l’appréhension intuitive que nous pouvons avoir de Dieu et la compréhension rationnelle que nous pouvons en avoir », et il s’agit bien ici de mon point de vue et non du vôtre, ce qui vaut aussi pour le développement qui suit.

Votre point de vue est différent et même contraire. Vous considérez les mots du langage humain de la même manière que « 2 + 2 = 4 » en pensant que c’est seulement si on « déflore le sens des mots » que les formules « deviennent relatives ».

Mon approche des mots humains est, en effet, différente et plus nuancée.

Perlum Pimpum a écrit :
dim. 30 juil. 2023, 9:45
L’opposition pertinente n’est pas entre magistère passé et magistère présent, mais entre magistère infaillible et magistère faillible, entre exercice faillible et infaillible de l’autorité magistérielle.
1. Que le pape puisse errer dans la foi ne peut être sérieusement remis en cause.
2. Conséquemment, le « support théologique adéquat » ne sera tel qu’autant que le magistère actuel s’exprimant failliblement sera en accord avec le magistère passé s’exprimant infailliblement
Cela me semble exact et vous avez raison de considérer qu' il ne serait pas justifié d’inviter « à souscrire inconditionnellement aux enseignements pontificaux présents et futurs, motif pris que l’attitude contraire « supposerait des contradictions dans l’action de l’Esprit Saint au cours de l’Histoire de l’Église » », car cette absence certaine de contradictions ne concerne, bien sûr, que l’enseignement infaillible de l’Église et non toute parole du Pape actuel.

Mais, il reste toujours nécessaire de faire l’effort d’essayer de comprendre autant que possible le sens de chacune de ses paroles ou de ses actes selon les critères qu’il a lui-même rappelés et donc en conformité avec l’enseignement infaillible de l’Église, avec l’affection et la bienveillance toujours essentielles à une juste compréhension dans la communion de l’Église.

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Perlum Pimpum » lun. 31 juil. 2023, 12:28

Bonjour Xavi,


:!: Quant à la relativité des vocables.

Votre position suscite en moi un réel et profond malaise, pour cette raison que les formules dogmatiques sont des jugements mobilisant des concepts exprimés par des mots. Le risque plus qu’évident à vouloir changer les mots des formules dogmatiques motifs pris d’une prétendue relativité des mots, est d’aboutir à la relativité des formules dogmatiques, autrement dit au modernisme.

Si donc vous employez des mots nouveaux pour dire à frais nouveaux des vérités déjà dites, il vous faudra encore, pour éviter l’écueil de la corruption doctrinale, définir ces mots nouveaux, de sorte qu’en cette définition vous donniez l’assurance d’une conformité de la nouvelle formule à la vérité exprimée par l’ancienne. Lors, pourquoi ne pas tout simplement user des anciennes formules, en définissant les mots dont elles usaient au sens qu’ils avaient quand elles étaient prononcées ? Pourquoi ? Si ce n’est pas pour corrompre la doctrine, pourquoi en prendre le risque ?

User de nouveaux vocables pour dire à frais nouveaux des choses déjà dites - déjà définies comme étant de foi - ne peut rien apporter de plus que ce qui était déjà dit, ni échapper au besoin de définir les nouveaux vocables, de sorte que mieux vaut garder les anciens, en expliquant leur sens, afin d’éviter le pire : la relativisation des formules doctrinales, autrement dit des vérités de foi qu’elles expriment, sous couvert de relativisation des mots.

Le dénigrement des vocables scolastiques, de la technicité et de la profondeur conceptuelle dont usait le magistère instruit par ses théologiens scolastiques, conduit inexorablement à l’affadissement des nouvelles formules, à un affranchissement conscient ou inconscient des vérités anciennement proclamées, à un relativisme doctrinal, et par delà, à l’hérésie.

Le Pape Pie XII (Humani Generis) a très clairement dénoncé le danger : « En ce qui concerne la théologie, le propos de certains est d'affaiblir le plus possible la signification des dogmes et de libérer [en libérant] le dogme de la formulation en usage dans l'Eglise depuis si longtemps et des notions philosophiques en vigueur chez les Docteurs catholiques… Or, il ressort, avec évidence, de ce que nous avons dit, que tant d'efforts non seulement conduisent à ce qu'on appelle le relativisme dogmatique, mais le comportent déjà en fait : le mépris de la doctrine communément enseignée et le mépris des termes par lesquels on le signifie le favorisent déjà trop… Voilà pourquoi négliger, rejeter ou priver de leur valeur tant de biens précieux qui au cours d'un travail plusieurs fois séculaire des hommes d'un génie et d'une sainteté peu commune, sous la garde du magistère sacré et la conduite lumineuse de l'Esprit-Saint, ont conçus, exprimés et perfectionnés en vue d'une présentation de plus en plus exacte des vérités de la foi, et leur substituer des notions conjecturales et les expressions flottantes et vagues d'une philosophie nouvelle appelées à une existence éphémère, comme la fleur des champs, ce n est pas seulement pécher par imprudence grave, mais c'est faire du dogme lui-même quelque chose comme un roseau agité par le vent. Le mépris des mots et des notions dont ont coutume de se servir les théologiens scolastiques conduit très vite à énerver la théologie qu'ils appellent spéculative et tiennent pour dénuée de toute véritable certitude, sous prétexte qu'elle s'appuie sur la raison théologique. »

Bien évidemment, passant des formules dogmatiques à leurs transcriptions pastorales, il faut pouvoir dire en mots simples les vérités techniquement exprimées. Mais exciper de cette nécessité pastorale pour prétendre modifier les formules dogmatiques, c’est risquer sinon souhaiter la corruption doctrinale.


:!: Quant aux enseignements pontificaux non marqués d’infaillibilités.

D’abord ils jouissent d’une présomption d’orthodoxie (présomption simple, non-irréfragable), de sorte que ce n’est pas le premier olibrius venu qui peut les contester. Ensuite, ainsi que vous le notez, ils doivent être lus en bonne part dès celle-ci pouvoir se trouver sans forcer le sens des textes. Ceci dit, je sais des assertions du Pape François méritant qu’on s’arrache les cheveux, qu’on se déchire le vêtement, et qu’on se recouvre la tête de cendres.


Cordialement.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Xavi » lun. 31 juil. 2023, 13:25

Bonjour Perlum Pimpum,

Je comprends tout-à-fait les dangers et les déviations que vous mettez en évidence et je suis bien d’accord sur les précisions que vous indiquez et sur l’attitude qu’il convient d’avoir par rapport aux mots mêmes des formules dogmatiques.

Vous citez de manière pertinente les excellents avertissements du Pape XII.

Et vous avez raison de ressentir, en lisant mes réflexions sur la relativité des mots qui est difficile à comprendre et à intégrer de manière juste, un « réel et profond malaise » face aux perversions possibles que vous rappelez.

Il faut rester attentif à tout ce que vous indiquez. Respecter les dogmes c’est bien sûr aussi respecter les mots par lesquels ils sont exprimés. Les mots nouveaux sont souvent plein de pièges nouveaux.

Mais, le contexte, les connaissances, et le sens même des mots évoluent parfois (pas toujours) d'une manière qui peut altérer la compréhension et, ici, l’application concrète est difficile, car cela demande du discernement pour veiller sans cesse au trésor de la foi, sans aucun relativisme, et le risque d’hérésie est bien réel. C’est bien pourquoi nous ne pouvons jamais nous limiter ni à la Bible, ni aux écrits anciens du Magistère dans le passé, mais que nous avons sans cesse besoin du Magistère actuel.

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la fo

Message non lu par Perlum Pimpum » lun. 31 juil. 2023, 20:49

Cher Xavi,
Xavi a écrit :
lun. 31 juil. 2023, 13:25

Mais, le contexte, les connaissances, et le sens même des mots évoluent parfois (pas toujours) d'une manière qui peut altérer la compréhension et, ici, l’application concrète est difficile, car cela demande du discernement pour veiller sans cesse au trésor de la foi, sans aucun relativisme, et le risque d’hérésie est bien réel. C’est bien pourquoi nous ne pouvons jamais nous limiter ni à la Bible, ni aux écrits anciens du Magistère dans le passé, mais que nous avons sans cesse besoin du Magistère actuel.
N’oubliez tout de même pas que l’autorité de l’Écriture est celle de Dieu révélant, laquelle prime l’autorité de l’Église. L’autorité de Dieu révélant est la règle suprême de la foi. L’autorité de l’Église, règle prochaine de la foi, est subalternée à la règle suprême de la foi, l’autorité de Dieu révélant.

Quant à la Tradition constitutive, la règle divine et la règle ecclésiale se conjoignent, la révélation divine étant donnée par les organes ecclésiaux vétéro et néo testamentaires (l’Église d’avant l’Église était déjà l’Église, pour reprendre une formule du cardinal Journet).

Quant à la Tradition continuative, l’Église, règle prochaine de la foi, n’est règle infaillible qu’en usant du charisme d’infaillibilité magistérielle. De sorte que, quant aux enseignements pontificaux non-marqués d’infaillibilité, rien ne prémunit qu’ils n’attentent pas à l’autorité de Dieu révélant…

À votre formule : « nous ne pouvons jamais nous limiter ni à la Bible, ni aux écrits anciens du Magistère dans le passé, mais… nous avons sans cesse besoin du Magistère actuel », que je ne conteste pas dans ce qu’elle a de vrai, j’oppose donc cette autre : « jamais le magistère suprême simplement authentique ne sera légitime à attenter à la règle suprême de la foi ». Un Pape ne sera jamais légitime à prostituer l’Ecriture en ses enseignements faillibles. Je vous l’écrit en ayant un exemple très précis à l’esprit…

Catholique, oui. Papiste, non.

Cordialement.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Gaudens » mar. 01 août 2023, 9:58

Cher Xavi, à deux reprises vous avez souhaité de la bienveillance et de l'affection vis à vis du pape actuel.
Bienveillance,je veux bien ;"vouloir du bien à " c'est une forme de l'amour dont le Christ nous fait un commandement dans nos relations les uns avec les autres. Certes on dit souvent que l"amour ne se commande pas mais je crois justement que c'est confondre amour et affection,celle-ci ne se décrétant pas. Et là, en ce qui me concerne au moins, désolé,vous m'en demandez trop . Benoit XVI m'inspirait une profonde affection , en plus de mon estime et de mon admiration mais pas son successeur. Mais cela n'a pas à intervenir dans le genre de débat que vous avez avec Perlum Pimpum. C'est simplement de l'humain.

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la fo

Message non lu par aldebaran » mar. 01 août 2023, 17:15

Perlum Pimpum a écrit :
lun. 31 juil. 2023, 20:49
Cher Xavi,
Xavi a écrit :
lun. 31 juil. 2023, 13:25

Mais, le contexte, les connaissances, et le sens même des mots évoluent parfois (pas toujours) d'une manière qui peut altérer la compréhension et, ici, l’application concrète est difficile, car cela demande du discernement pour veiller sans cesse au trésor de la foi, sans aucun relativisme, et le risque d’hérésie est bien réel. C’est bien pourquoi nous ne pouvons jamais nous limiter ni à la Bible, ni aux écrits anciens du Magistère dans le passé, mais que nous avons sans cesse besoin du Magistère actuel.
N’oubliez tout de même pas que l’autorité de l’Écriture est celle de Dieu révélant, laquelle prime l’autorité de l’Église. L’autorité de Dieu révélant est la règle suprême de la foi. L’autorité de l’Église, règle prochaine de la foi, est subalternée à la règle suprême de la foi, l’autorité de Dieu révélant.

Quant à la Tradition constitutive, la règle divine et la règle ecclésiale se conjoignent, la révélation divine étant donnée par les organes ecclésiaux vétéro et néo testamentaires (l’Église d’avant l’Église était déjà l’Église, pour reprendre une formule du cardinal Journet).

Quant à la Tradition continuative, l’Église, règle prochaine de la foi, n’est règle infaillible qu’en usant du charisme d’infaillibilité magistérielle. De sorte que, quant aux enseignements pontificaux non-marqués d’infaillibilité, rien ne prémunit qu’ils n’attentent pas à l’autorité de Dieu révélant…

À votre formule : « nous ne pouvons jamais nous limiter ni à la Bible, ni aux écrits anciens du Magistère dans le passé, mais… nous avons sans cesse besoin du Magistère actuel », que je ne conteste pas dans ce qu’elle a de vrai, j’oppose donc cette autre : « jamais le magistère suprême simplement authentique ne sera légitime à attenter à la règle suprême de la foi ». Un Pape ne sera jamais légitime à prostituer l’Ecriture en ses enseignements faillibles. Je vous l’écrit en ayant un exemple très précis à l’esprit…

Catholique, oui. Papiste, non.

Cordialement.
Bonjour Perlum Pimpum,
J'ai archivé votre explication qui me parait simple et déterminante. Je crois comprendre l'idée de Tradition constitutive et de Tradition continuative.
J'ai simplement une question qui vous paraîtra sans doute idiote ou entachée d'ignorance vous m'en pardonnerez, mais où s'arrête l'une (et donc où commence l'autre)?
Bref comment les deux se définissent elles, et selon quelle autorité?
Merci.

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Re: Le Pape François éclaire l’intelligence de la foi

Message non lu par Perlum Pimpum » mar. 01 août 2023, 19:42

Bonsoir Aldebaran,

Je ne sais pas pourquoi certaines personnes s’imaginent que je suis un ogre. Si je peux répondre à vos questions, je le ferais, sans qu’il vous soit besoin de vous excuser de m’interroger. Je ne considère pas qu’ignorer soit idiot, et moins encore que soit idiot d’admettre avec simplicité ignorer ce qu’on ignore. Ignorants, nous le sommes tous, la somme de nos savoirs n’étant rien comparée à celle de nos lacunes. Je vais donc tenter de vous répondre avec clarté, en espérant dissiper ce que mes précédents propos pouvaient avoir d’obscur.



La Tradition constitutive est constitutive du donné formellement révélé, c’est-à-dire de la Révélation, que Dieu donne par l’entremise d’hommes que le Saint-Esprit inspire. Les paroles et les écrits inspirés sont autant ceux de Dieu révélant que ceux des hommes dont Dieu use comme d’instruments intelligents et libre pour révéler ce qu’Il veut l’être. Et pour éviter que les instruments humains dont il use puissent altérer le message que Dieu veut donner à tous les hommes par l’entremise de ceux qu’il s’est choisit pour être le canal de sa Révélation, Dieu les inspire, de sorte que, par delà les conditionnements humains des organes de la Révélation, ce qu’ils disent sous l’inspiration est véritablement ce que le Dieu Vrai et Vérace dit par eux. L’inspiration est donc le moyen de la Révélation, la grâce spéciale que Dieu confère aux organes de sa Révélation pour pouvoir la constituer au travers eux. Dans la Tradition constitutive, c’est Dieu qui parle par le moyen des organes inspirés dont il use. Et ce que Dieu enseigne ainsi est constitutif de la Révélation qu’il nous transmet (d’où donc Tradition constitutive), à laquelle l’assentiment de foi théologale est dû à raison de l’autorité de Dieu révélant.

La Tradition continuative est la retransmission au fil des siècles de ce que Dieu nous a transmis, étoffée des explicitations infaillibles du magistère que le Saint-Esprit assiste. L’assistance diffère de l’inspiration en ce qu’elle n’a pour effet, ni de constituer une nouvelle révélation, ni d’ajouter des révélations à celles données dans la Révélation, mais seulement de donner à l’Eglise d’expliciter infailliblement le donné divinement révélé. De sorte que ce que Dieu nous transmet dans la Tradition continuative est retransmis de génération en génération (transmission continuée) étoffé des explicitations par lesquelles le magistère divinement assisté précise le sens véritable de la Révélation pour écarter les interprétations erronées qui y attentent. Ce processus de retransmission et d’explication est celui de la Tradition continuative.

Qu’il s’agisse de Tradition constitutive ou de Tradition continuative, « Tradition » peut signifier soit l’acte même de transmettre, soit ce qui est transmis.



Quant aux révélations privées, elles diffèrent de la Révélation (encore dite révélation publique), parce qu’elle ne procèdent pas d’une inspiration mais d’une illumination. La différence est que dans l’inspiration, l’autorité de Dieu révélant est engagée dans la totalité de ce que dit l’homme inspiré. Au contraire, dans l’illumination, l’autorité de Dieu est engagée dans ce qu’il révèle ou montre au mystique, mais non dans le discours par lequel le mystique va dire sa vision. Autrement dit, le discours mystique peut comporter des éléments n’engageant pas l’autorité de Dieu.

Quant aux traditions doctrinales, elles diffèrent de la Tradition continuative, étant des explicitations théologiques non-infailliblement consacrées par le magistère, donc propres à certains courants doctrinaux du catholicisme (augustinisme, thomisme, scotisme, suarezianisme… ) ou communs à la plupart d’entre eux (on parle alors de doctrine commune, c.-à-d. communément enseignée).

Quant aux enseignements magistériels non marqués d’infaillibilité, donc potentiellement faillibles, est difficile sinon impossible de les colloquer dans la Tradition continuative ; encore que, pour autant qu’ils soient de fait exempts d’erreurs, ils peuvent être autant de jalons à un enseignement infaillible ultérieur.

Quant à la Tradition vivante, c’est affaire de définition. Pour certains, simple synonyme de Tradition continuative. Pour d’autres, inclusive de tout enseignement magiériel faillible, au risque de colloquer l’erreur dans la Tradition.
« L’âme bavarde est vide intérieurement. Il n’y a en elle ni vertus fondamentales ni intimité avec Dieu. Il n’est donc pas question d’une vie plus profonde, d’une douce paix, ni du silence où demeure Dieu. L’âme qui n’a jamais goûté la douceur du silence intérieur est un esprit inquiet et elle trouble le silence d’autrui. J’ai vu beaucoup d’âmes qui sont dans les gouffres de l’Enfer pour n’avoir pas gardé le silence. »

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