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par Didyme » dim. 26 mai 2019, 21:52
J'ai l'impression que cette dualité que l'on trouve en l'homme, plus que le résultat d'un péché originel est surtout comme un tiraillement entre ses deux origines. Car l'homme a son origine à la fois en Dieu et du néant. Il provient de la volonté divine, de son acte créateur, de son amour qui lui donne l'être à chaque instant. Et cette part liée à Dieu, cette part de bon, qui est l'être, ou comme dirait Saint Paul, l'homme intérieur, l'entendement, d'autres diraient la conscience ou encore la fine pointe de l'âme, ce qui est né de Dieu, cette part ne veut que Dieu (Romains 7).
Mais il y a que si nous sommes bien créés par Dieu, nous sommes créé du néant. Nous ne sommes rien en nous-mêmes. Nous sommes un néant, un vide, comme le dirait Angèle de Foligno :
"Me souvenant de la puissance inénarrable, et voyant l'abîme de la descente, je sentis ce que j'étais ; c'était le rien, absolument rien, un néant, et dans ce néant rien, rien, excepté l'orgueil !", "Quand l'amour est parfait, l'âme, après avoir (198) senti Dieu, sent sa part propre, qui est le néant et la mort : elle se présente avec sa mort, avec sa pourriture ; elle s'humilie, elle adore, elle oublie toute louange ou tout bien qui revienne à elle-même ; elle a une telle conscience de ses vides et de ses maux qu'elle sent sa délivrance entière au-dessus de la puissance des saints, et réservée à Dieu seul."," Gloire soit au Dieu tout-puissant à qui il a plu de nous tirer du néant pour nous faire à son image et ressemblance."
Et c'est comme s'il y avait en nous cette part de nous qu'est le néant qui nous tirait vers le néant, ce néant que nous sommes, le vide, l'absence d'amour. Curieuse analogie avec le péché également qualifié de néant, absence d'amour. On retrouve comme l'expérience de Saint Paul qui parle à la fois de cette part de lui, l'homme intérieur soumis à la loi de dieu, mais aussi de cette autre loi dans nos membres, qui n'est pas l'être car non associé ici à la volonté mais plutôt tel une puissance qui est soumise à la loi du péché, ce néant (Romains 7).
Alors, tant que que nous sommes soutenue par la grâce, notre personne semble pouvoir résister au péché. Mais lorsque Dieu nous remet à nous-mêmes, nous ne pouvons que constater notre néant, notre misère, notre faiblesse et notre chute. C'est me semble-t-il ce que relate le récit de la Genèse. Bien davantage qu'une épreuve visant à donner l'occasion à l'homme d'exprimer sa valeur, sa foi, sa vertu, il s'agit surtout de montrer à l'homme son besoin de Dieu et de la grâce, et son manque. Car si l'épreuve de la tentation dans la Genèse avait débouchée sur une victoire de l'homme, alors que Dieu s'était fait absent (chose que l'on peut comprendre par l'idée qu'il ait retiré sa grâce pour remettre l'homme à lui-même), cela aurait été la démonstration de l'auto-suffisance de l'homme, qu'il possédait le bien en lui-même sans besoin de la grâce, que sa vertu était SA vertu, la ressource était en lui et donc non plus comme don de Dieu !
Mais il me semble que la foi témoigne de tout l'inverse.
La chute dans le récit de la Genèse ne me paraît par conséquent ne pas être à considérer comme un acte manqué, une sortie de route mais plutôt comme un enseignement, une leçon sur la condition humaine et le besoin continuel de Dieu.
Cela fait partie de l'histoire de l'homme et de la pédagogie divine.
L'autre est un semblable.