Re: L'homme, le péché, l'enfer et Dieu
Publié : dim. 26 mars 2017, 0:29
Je vous faisais part de mon impression. La pensée de l'enfer est difficile à avaler.
Pour l'intelligence de la foi
https://cite-catholique.org/
Ce n'est pas du tout ce qu'enseigne l'Eglise ! Lisez par exemple cet extrait du Grand catéchisme de saint Pie X :L'enfer, c'est uniquement être séparé de DIEU. Rien de plus, rien de moins. Pas de flammes qui brûlent, pas de démons qui torturent. Juste l'éloignement de la divinité bienveillante.
C'est faux ! Je ne fais que répéter l'enseignement traditionnel, constant, de l'Eglise. En tant que catholiques, nous ne sommes pas libres de le rejeter. Les vérités de dogme et de morale ne sont par définition jamais datées.Cependant, le catéchisme que vous utilisez est daté. Ce n'est plus un point essentiel de l'enseignement de l'Église.
Attention, tu formules la phrase autrement et on sait qu’une formulation peut tout changer.Cinci a écrit :Faut voir …Tu me demande s’il est possible que des personnes puissent refuser de se convertir, Didyme.Je te répond que la possibilité existe. – Oui, c’est possible. Tu me dis être abasourdi par cette possibilité ? Pourquoi donc ?393 C’est le caractère irrévocable de leur choix, et non un défaut de l’infinie miséricorde divine, qui fait que le péché des anges ne peut être pardonné. « Il n’y a pas de repentir pour eux après la chute, comme il n’y a pas de repentir pour les hommes après la mort » (S. Jean Damascène, F.O.2, 4 : PG 94, 877C).
Catéchisme de l’Eglise catholique
Oui et d’ailleurs, je me demande d’où vient cette idée d’immutabilité de la créature ? C’est une question que j’ai déjà posée plusieurs fois.Cinci a écrit :Tu douterais qu’un enseignement de l’Eglise puisse faire valoir la possibilité d’un endurcissement des personnes, d’une volonté personnelle de se tenir soi-même dans l’impénitence finale, dis-tu ? Pourtant, l’article 393 du Catéchisme indique que des personnes se trouvent déjà dans cette situation de refus obstiné et irrévocable, tout comme ce pourrait l’être pour des hommes.
C’est bien, déjà tu es moins affirmatif quant aux damnés.Cinci a écrit :Oui. Les anges déchus, les damnés éventuels.Didyme a écrit :Posons la question autrement, considères-tu qu’il existe des personnes pour qui la conversion soit impossible ?
Tu fais un progrès par rapport à l’Eglise, toi tu sais déjà que Julius Streicher, Trotsky and co sont bel et bien damnés.Cinci a écrit :A part ça, tout le monde connaît des exemples de personnes qui auront refusé jusqu’à leur dernier souffle d’accepter Dieu, d’accepter de reconnaître leur égarement, d’accepter même de penser que leur choix de vie eusse pu être une erreur, etc.
On connait tous des pharaons d’Egypte, des entêtés, des obstinés, des jusqu’au-boutistes dans leur choix de mort, des Julius Streicher encore capable, sur l’échaffaud, de cracher au visage du bourreau et faire leur salut hitlérien, les deux pieds sur la trappe. Je n’ai jamais lu, vu ou entendu dire que Trotsky aurait manifesté de l’irrésolution quant au bien fondé de ses vues sur le christianisme. Je n’ai jamais eu connaissance qu’un missionnaire chrétien aurait pu réussir à convertir Trotsky.
Ça je n’en doute pas.Cinci a écrit :Ce n’est pas un défaut de l’infinie miséricorde de Dieu, dit le Catéchisme. C’est très important ce point-là.
J’en reviens à cette question initiale et centrale : Comment une créature en arrive-t-elle à un tel refus ? La créature ne s’est pas créée. Tout son être, ce qu’elle est fondamentalement est l’œuvre de Dieu. Et Dieu créé pour le bien, la béatitude est la destinée de l’être créé. Dire qu’elle s’est rendue mauvaise et s’est obstinée de façon à ce que tout, tout, tout, tout mais absolument tout Dieu aura fait ne peut rien y faire mais c’est comme dire que cette créature est fondamentalement mauvaise, qu’il y avait comme un vice de forme. De toute façon dire qu’elle puisse s’obstiner de façon irrévocable c’est comme dire qu’il ne reste rien de Dieu en elle, qu’il n’y a aucun reste bon à sauver. Mais alors, comment une telle créature pourrait subsister en tant que personne ? Si l’être, la vie n’est plus en elle, si son fondement qui est Dieu n’existe plus ? Elle n’est pas Dieu pour vivre sans Dieu.Cinci a écrit :En somme, Dieu aura fait tout, tout, tout, tout mais absolument tout ce Dieu aurait pu divinement faire pour éclairer, guider, interpeller, manifester le vrai aux personnes avant que celles-ci aient pu se résoudre à leur propre impénitence finale. Il n’y a pas à soupçonner Dieu d’indifférence, de mollesse dans son désir de sauver tout le monde, de mauvaises disposition ou d’ignorance. La foi de l’Eglise c’est qu’en dépit de Dieu, de ce qu’il est, de ce qu’il ait : des individus peuvent le refuser ou refuser de se soumettre à son mode relationnel d’être.
Moi non plus.Cinci a écrit :L’Eglise n’a jamais enseigné à qui que ce soit que Dieu se devait fatalement de réussir à convertir tout le monde, que la responsabilité de notre salut lui incomberait à lui seul, en sorte que tous nous serions assurés d’aboutit en paradis et peu importe nos décisions, choix de vie, façons de se comporter avec autrui.
« Dieu est sauveur de tous les hommes, principalement des croyants », ce qui peut dénoter le bien fondé des pratiques de l’Eglise. Et les prières n’en ont rien de caduc. Sinon, pourquoi prierait-on pour les âmes du purgatoire ? Ce n’est pas parce qu’elles finiront près de Dieu qu’on ne prie pas pour elles.Cinci a écrit :Prétendre savoir d’avance que tous les hommes seront nécessairement sauvés : ce serait non seulement revendiquer pour soi un savoir que l’Eglise ne possède pas, mais encore annuler d’avance tout le bien fondé des pratiques de l’Eglise ainsi que rendre caduc les prières des fidèles.
Et combien de saints préféraient l’idée de l’enfer plutôt que la damnation d’une seule âme ?Cinci a écrit : « Dieu est tellement bon …. » Non, il est question de la « crainte de Dieu ». Les saints redoutaient la possibilité de l’enfer pour eux-mêmes, craignaient, redoutaient, étaient parfois vert de peur juste à l’idée de leur propre bêtise, leur propre capacité d’aller refuser Dieu. Cette peur véritable, cette peur fondée, constitue le tremplin amenant la personne à mettre sa confiance dans Dieu, comme disait le père Varillon.
Une partie de la préface de « Quel enfer ? » faite par Gustave Martelet, un des grands théologiens français contemporains. Expert au Concile Vatican II, ancien membre de la commission théologique internationale.Finalement, il faut en revenir à l’hypothèse envisagée par le dernier concile : « Si dans la formulation de la doctrine, qu’il faut soigneusement distinguer du dépôt de la foi, il est arrivé que sur certains point on ne s’est pas montré assez attentif, il faut y remédier en temps opportun d’une façon appropriée. » Cette situation étant réellement la nôtre devant une vision maximaliste de l’enfer, nul mieux qu’un Jean Elluin ne peut nous aider à sortir de pareille impasse. Impasse qui n’est pas celle de la foi, mais d’une intelligence de la foi qui s’appuie encore sur des figures abîmées de la conscience humaine, pour mal interpréter les textes judiciaires de l’Evangile. Or l’Eglise elle-même nous met sur le chemin dans lequel un Jean Elluin s’est résolument engagé et désire nous engager, quand elle refuse de déclarer jamais que Judas est sûrement damné.
C'est faux. Il y a par exemple consensus pour affirmer que Judas est damné. Ce jugement figure dans les Ecritures saintes elles-mêmes, et notamment dans l'Evangile selon saint Jean, 17-12 :Puis, il y a que l’Eglise n’a jamais dit de quiconque qu’il était damné.
Ce qui relie le langage de l'Église à celui de l'Écriture, c'est qu'il est sans litotes. Cependant les deux diffèrent en ce que l'Écriture parle d'ordinaire en des images que l'Église, s'agissant de l'enfer, ramène à une seule, terrible d'ailleurs en son unicité : celle d'"un feu éternel". Sans affirmer avec force le caractère métaphorique de ce "feu", de peur qu'on n'évacue la dévoration spirituelle que le feu symbolise, le magistère s'interdit toutes les imaginations dans lesquelles la prédication populaire s'est longtemps et bien en vain complue.
De nos jours, les historiens (Delumeau 1983 ; Minois 1991 et 1994) stigmatisent sans peine de tels excès. L'"infernalisme", sous toutes ses formes, a plus discrédité la foi qu'il n'a formé des cœurs vraiment chrétiens. Il a contribué à créer un monde culturel vidé de Dieu par défiguration de son vrai visage. Quoi qu'il en soit de ces excès, l'enseignement du magistère n'a jamais reposé sur eux, mais bien sur la seule Écriture et sur ce qu'elle nous révèle concernant le jugement.
En effet.Suliko :
Je constate en passant que l'extrait du catéchisme du concile de Trente ne soulève pas l'enthousiasme...