Message non lu
par gerardh » sam. 09 janv. 2016, 15:50
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Bonjour Théodore,
Merci pour votre message constructif et serein. Il tente d’analyser les positions des uns et des autres, et pour ce qui me concerne, il développe une argumentation qui n’est pas fausse mais qui est très partielle et devrait aller beaucoup plus loin qu’un simple syllogisme aussi pertinent soit-il.
Vous mentionnez en fait in petto les assurances données à de nombreuses reprises dans la Parole et notamment dans le NT, que quiconque à la foi en Jésus Christ et à son œuvre expiatoire à la croix, possède la vie éternelle et le salut éternel. La foi ce n’est pas seulement une pétition de principe, mais une conviction profonde du cœur (en plus de la conscience).
Mais en plus, vous ne mentionnez pas la vérité qui est que, corrélativement à la foi, le chrétien est une personne née de nouveau (d’une vie qui est éternelle) et scellée du Saint Esprit (personne divine qui vient faire son habitation en elle pour l’éternité), et cela transforme son être. En d’autres termes, même s’il garde son ancienne nature pécheresse (le « vieil homme » ou « la chair »), il acquiert une nouvelle nature d’essence divine (le « nouvel homme »). Or ce qui est éternel (la vie éternelle, le Saint Esprit), ne peut pas être enlevé, sinon la vie ne serait plus éternelle, le Saint Esprit devrait s’en aller de la personne régénérée et la nouvelle nature ne serait que conditionnelle. Cela n’est ni scripturaire ni possible. Le chrétien peut éventuellement chuter, voire « faire naufrage quant à la foi », mais il ne peut pas perdre son salut.
De tout cela résulte, pourvu qu’on s’en empare, la certitude absolue de posséder le salut et la vie éternelle. Cela peut être profondément ancré dans l’esprit du chrétien, sans pour autant être, ni une illusion, ni une autosuggestion, ni une quelconque méthode Coué. A noter que selon les passages bibliques, le salut et la vie éternelle peuvent être acquis dès la conversion, ou alternativement être considérés dans leurs conséquences glorieuses futures bien qu’avec toute certitude pour le présent.
Alors on peut se demander pourquoi la plupart des catholiques (et bien d’autres) n’ont pas les mêmes certitudes, pourtant faciles à saisir. Une première hypothèse est que beaucoup, même en toute sincérité, ne possèdent pas vraiment la vie de Dieu en eux. A noter que ce n’est pas le fait en soi d’être baptisé qui confère cette vie divine ou toute autre administration de sacrement, mais la conversion. Une deuxième idée est qu’ils ont mal été enseignés, ou l’ont été par des personnes qui elles-mêmes étaient aveugles quant à ces vérités. Par exemple, nous voyons dans les épîtres que Paul combat énergiquement des tendances de certains au légalisme, c'est-à-dire entre autres la nécessité d’avoir des règles de conduite et donc de devoir mériter quelque chose en plus de la croix de Christ. Une troisième hypothèse est que beaucoup sont encore des nouveau-nés dans la foi et ont besoin, après avoir bu du lait, de nourriture solide. Notamment certains peuvent ne pas être encore affranchis, c'est-à-dire libérés du péché, tel que cela est enseigné et explicité dans les derniers versets de Romains 7 et les premiers paragraphes de Romains 8.
Alors, comme vous le soulignez, vient la question des personnes qui ont « apostasié de la foi ». Sur ce point, et en conséquence de ce je viens d’écrire, je rejoins la pensée commune (qui n’est pas spécifiquement calviniste), que ces personnes n’avaient pas en fait la foi, dans le sens de foi véritable. Dans la sphère du royaume de Dieu (notion qui n’a pas exactement la même acception que le terme église ou assemblée), une parabole nous indique qu’il y a un mélange de bon grain et d’ivraie. Des personnes, seraient-elles baptisées, seraient-elles sincères, seraient-elles dévouées et ayant la forme de la piété, constituent en fait cette ivraie. Beaucoup restent dans cet état, mais d’autres renient carrément les choses qui leur ont été enseignées et deviennent des ennemis ouverts de Dieu et des chrétiens. L’épître aux Hébreux parlent sévèrement de ces personnes, indiquant qu’elles ont perdu l’accès futur à la foi, ce qui n’est pas le cas de la plupart des « chrétiens seulement de nom ».
Ce qui est, d’après ce que j’ai compris, propre à un certain calviniste, c’est ce que j’ai appelé une acception outrée de la notion, pourtant scripturaire, de prédestination. Selon leur théorie, Dieu avait une pré connaissance et même une prédétermination de qui serait sauvé et qui ne le serait pas (ce qui est vrai), et ils en concluent faussement que les futurs élus, quoiqu’ils fassent ou ne fassent pas, seraient sauvés, et de même que les autres seraient perdus. Cela, considéré isolément est une hérésie, car elle fait fi d’un autre aspect de la vérité qui est la responsabilité de chacun de croire au Fils de Dieu. Certes ces deux aspects semblent antinomiques, mais c’est la logique de Dieu, bien plus élaborée que la logique humaine. Dans nos milieux chrétiens on emploie l’image d’une personne se trouvant devant un portail au fronton duquel est inscrit « crois au Seigneur Jésus et tu seras sauvé ». Cette personne peut ou non franchir ce portail. Si elle le franchit, et seulement dans ce cas, elle peut voir une autre inscription au revers du portail indiquant « élu en Christ avant la fondation du monde ».
Vous adhérez, dites-vous « à la doctrine catholique et traditionnelle de la justification ». Quelle est cette doctrine et en quoi se distingue-t-elle de la doctrine biblique ? Je voudrais vous rappeler qu’il y a eu en 1999 un consensus écrit entre les catholiques et les luthériens sur cette doctrine et celle qui est sous-jacente du salut par la foi ou par la foi et les œuvres. Je ne suis pas d’accord avec 100 % de ce texte, mais il est intéressant. Dommage que le haut clergé catholique, sans doute effrayé par ses audaces, ait tenté d’en limiter largement la portée.
Vous indiquez du côté catholique que « le salut n'est pas un processus instantané correspondant à la conversion initiale (ce qu'en théologie catholique on appelle la justification initiale, qui est le fait de la seule foi) mais un processus graduel de coopération (ce mot étant correctement compris) avec la grâce », Il y a là à mon sens une grave confusion. On est chrétien de par la conversion ou on ne l’est pas. Cette conversion peut être instantanée et elle peut-être plus ou moins s’étaler sur une certaine période, mais quand elle est là, elle l’est, et définitivement. Certes, ensuite le chrétien est exhorté à faire des progrès spirituels et à tendre vers la sainteté pratique. Il y a, selon notre jargon, une possible confusion entre notre position en Christ, qui est parfaite, et notre marche chrétienne, avec « des faux pas inscrits sur la poussière ». Ces faux pas, notamment ces péchés, interrompent momentanément notre communion avec Dieu, mais ne remettent pas en cause notre salut éternel. Comme cela est indiqué par la Christ en Jean 13 : « celui qui a tout le corps lavé n’a besoin que de se laver les pieds, mais il est tout net ».
Même si j’emploie parfois moi-même ce qualificatif, il n’y a pas de péché « grave », tous les péchés étant réprouvés par Dieu. La Parole parle de « blasphème contre le Saint Esprit » et de « péché à la mort ». Le premier, pour autant qu’il puisse être commis, peut être pardonné dans notre époque qui est l’ère de la grâce. Le second peut entraîner la mort physique par le gouvernement de Dieu, mais ne remet pas en cause le salut éternel du coupable.
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gerardh le sam. 09 janv. 2016, 23:14, modifié 1 fois.