Le nom de Dieu

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Peccator
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Le nom de Dieu

Message non lu par Peccator » sam. 24 mai 2014, 23:41

Voilà une question qui me revient chaque fois que je lis l'histoire quelque part.

On connait tous l'histoire du tétragramme, YHVH, le nom de Dieu, qui a été révélé à Moïse, et qui n'est jamais prononcé, à une seule et unique exception : par le Grand-Prêtre, une fois par an à Yom Kippour, dans le Saint des Saints, où il est seul à pouvoir entrer en cette unique occasion (précédé d'un dense nuage d'encens, et attaché à une corde pour qu'on puisse l'en ressortir s'il venait à y mourir).

Et donc, la question qui me vient chaque fois : comment fait le grand-prêtre pour connaître ce fameux nom, si le grand-prêtre précédent ne le lui a pas dit d'une manière ou d'une autre ?
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Re: Le nom de Dieu

Message non lu par gerardh » dim. 25 mai 2014, 9:52

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Bonjour,

Ce nom était connu des israëlites : il n'était pas secret.


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Re: Le nom de Dieu

Message non lu par Pneumatis » ven. 06 juin 2014, 14:04

Bonjour,

La transmission du Nom procède d'une succession sacerdotale. On ne naissait pas Grand Prêtre, même si une généalogie aaronide était un préalable nécessaire. Le Grand Prêtre était investit rituellement dans sa fonction, et ne recevait pas que la prononciation du Nom, mais aussi le vêtement et les ornements sacerdotaux. Je ne peux rien assurer, mais il semble que la transmission du Nom, dès lors qu'elle fut cachée, s'inscrivait dans cette logique d'investiture.

Quoiqu'il en soit, en effet, la prononciation n'a pas toujours été un secret connu du seul Grand Prêtre, et le Nom était, jusqu'à la fin du IIIème s. av. notre ère, utilisé dans la liturgie quotidienne du Temple.
Dans Un écho d’Israel, 31/10/2008, P. Michel Remaud a écrit :Le synode qui vient de se tenir à Rome a repris à son compte une décision de la Congrégation romaine pour le culte divin demandant qu’on n’emploie plus la transcription des quatre consonnes hébraïques – « le Tétragramme sacré » – vocalisées en « Yavhé » ou «Yahweh», dans les traductions, « les célébrations liturgiques, dans les chants, et dans les prières » de l’Eglise catholique.

La tradition juive, et en particulier la Mishna, nous donne des précisions intéressantes sur l’histoire de la prononciation de ce nom.

Jusque vers 200 avant notre ère, le nom divin était prononcé tous matins dans le temple lors de la bénédiction sacerdotale : « Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse rayonner sur toi son visage et t’accorde sa grâce ! Que le Seigneur lève sur toi son visage et te donne la paix. » (Nombres 6, 24-26). Dans le contexte d’origine de cette formule, le verset suivant ajoute : « Ils mettront mon nom sur les fils d’Israël et je les bénirai. » La Mishna précise que le nom était prononcé dans le temple « comme il est écrit », alors qu’on utilisait une autre appellation (kinuy) dans le reste du pays. À partir d’une certaine époque, on cessa de prononcer le nom divin dans la liturgie quotidienne du temple. Le Talmud laisse entendre qu’on prit cette décision pour éviter que certains ne fassent du nom un usage magique.

Selon nos sources, c’est à partir de la mort du grand prêtre Simon le Juste, vers 195 avant notre ère, que l’on cessa de prononcer le nom divin dans la liturgie quotidienne. Il est intéressant de comparer à ce sujet le témoignage du Talmud à celui du livre de Ben Sira (le Siracide, ou l’Ecclésiastique). Simon le juste y est évoqué au chapitre 50 de ce livre, au terme d’un long passage (chapitres 44-50) où est rappelé le souvenir de tous les «hommes illustres» depuis Hénoch, en passant par les patriarches, Moïse, David, Élie etc. Cette énumération se termine par un développement sur le grand prêtre Simon, décrit longuement dans la gloire et la majesté de l’exercice de ses fonctions. Cette description culmine dans la prononciation du nom divin, qui apparaît ainsi comme la conclusion de ces sept chapitres : « Alors il redescendait et élevait les mains sur toute l’assemblée d’Israël, pour donner de ses lèvres la bénédiction du Seigneur et avoir l’honneur de prononcer son nom. Et pour la seconde fois tous se prosternaient pour recevoir la bénédiction de la part du Très-Haut. » (Siracide 50,20-21).

À partir de Simon le Juste et jusqu’à la ruine du temple, le nom ne fut plus entendu «comme il est écrit» que dans la liturgie du Yom Kippour, au temple de Jérusalem, où le grand prêtre le prononçait dix fois dans la journée. « Les cohanim et le peuple présents dans le parvis, lorsqu’ils entendaient le nom explicite sortant de la bouche du grand prêtre, tombaient à genoux, se prosternaient et tombaient la face contre terre en disant : béni soit le nom glorieux de son règne pour toujours. » La formule vaut d’être relevée : la Mishna ne dit pas que le grand prêtre prononçait le nom divin, mais que le nom « sortait de sa bouche ». Il semble d’ailleurs que, vers la fin de la période du second temple, le grand prêtre ne prononçait plus le nom qu’à voix basse, si l’on en croit un souvenir d’enfance de Rabbi Tarphon (I-IIe s.) qui raconte que, même en tendant l’oreille, il n’avait pas pu entendre le nom. La formule de l’Exode « C’est mon nom pour toujours » (Exode 3,15), moyennant un jeu de mots sur l’hébreu, est interprétée par le Talmud de Jérusalem : « C’est mon nom pour être caché. »

Aujourd’hui, le nom divin n’est plus jamais prononcé. Dans l’office synagogal de Yom Kippour, qui remplace la liturgie du temple par le récit de ce qui s’y déroulait lorsque le temple existait, on se prosterne dans la synagogue lorsqu’on rappelle – sans le prononcer -que le grand prêtre prononçait le nom divin.

Risquons ici un rapprochement qui n’engage que son auteur. On sait que le Nouveau Testament et les premiers Chrétiens, en désignant Jésus par le terme de « Seigneur » (kurios), lui ont appliqué délibérément le terme utilisé en grec pour traduire le nom divin. Dans la tradition liturgique du judaïsme, ce nom divin n’était prononcé que dans la liturgie du pardon des péchés, le jour de Kippour. Peut-être faut-il voir une allusion à cette tradition, et au pouvoir purificateur du Nom, dans ce verset de la première épître de saint Jean : « Vos péchés vous sont pardonnés par son nom. » (1 Jean 2, 12).
Source du texte : :arrow: http://www.avinou.org/?page_id=937 (la revue Un Echo d'Israël n'est malheureusement plus publiée).
Site : http://www.pneumatis.net/
Auteur : Notre Père, cet inconnu, éd. Grégoriennes, 2013

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Re: Le nom de Dieu

Message non lu par Peccator » ven. 06 juin 2014, 16:50

Merci beaucoup Pneumatis, c'est l'exposé le plus riche que j'ai pu lire sur cette question. :supertop:
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Re: Le nom de Dieu

Message non lu par Invité » mar. 08 juil. 2014, 22:37

Peccator a écrit :comment fait le grand-prêtre pour connaître ce fameux nom, si le grand-prêtre précédent ne le lui a pas dit d'une manière ou d'une autre ?
Jolie question !
YHVH, le nom de Dieu, qui a été révélé à Moïse, nous l'a aussi été révélé
Son nom est : JE SUIS
Il nous a donné l'Etre, le Souffle divin, la Lumière et la Vie. Il s'est donc donné lui-même.
Véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire TOUT homme.

Seul le Grand-Prêtre pouvait prononcer le Nom, pourquoi ?`
S'agissait-il d'une question de prononciation ou de capacité à prendre conscience qu'il était le dépositaire du Souffle de Dieu ?
la Mishna ne dit pas que le grand prêtre prononçait le nom divin, mais que le nom « sortait de sa bouche »
Dans l'ancien testament, tout est préfiguration du Messie. (1, Cor 10,1-2)
Qui est le nouveau Grand-Prêtre, la manifestation visible du Dieu invisible ?
Il nous invite à faire de même, à être une nation de prêtre, pouvant prononcer le Nom, et réaliser le royaume de Dieu qui est en nous, ou plutôt en lequel nous sommes.
Dire à la suite de Jésus : JE SUIS.

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Re: Le nom de Dieu

Message non lu par Peccator » mer. 09 juil. 2014, 15:24

Certes... Et je suis d'accord avec vous (et n'aurais pas pu le dire aussi bien, donc merci beaucoup).

Mais bon, ma question était beaucoup plus terre-à-terre que cela ;) Je m'intéresse aux aspects concrets du rituel, pas à sa signification spirituelle.
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