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Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : sam. 30 nov. 2019, 14:56
par Trinité
Carhaix a écrit :
sam. 30 nov. 2019, 14:27
Trinité a écrit :
ven. 29 nov. 2019, 23:52


Vous avez un peu raison également!
Dans mon village il y a un prêtre pour 4 églises situées 7 à 8 kms les unes des autres!
La paroisse principale, il y a deux messes le dimanche 9h30 et 11 hOO.
Dans les 3 autres églises, il y a une messe le samedi soir alternativement dans le courant du mois.
Lorsque je vais à la messe de temps en temps le samedi soir, dans ma petite église de 1200 habitants(cette église est récente également, 50 ans à peu près...), il y a au maximum 50 personnes...il est vrai que sa capacité maxi ne doit pas dépasser 100 personnes!
Il y a un phénomène également qui se passe, et qui n'est pas négligeable. C'est qu'à l'instar de tout le reste, les personnes sont attirées par les grandes villes et quelles viennent certainement plus facilement à la messe à Vannes maintenant qu'autrefois!
Et donc les chiffres sont faussés, si tous les ruraux catholiques de votre département affluent à Vannes le dimanche pour la messe. Il faudrait faire un ratio entre le nombre églises, le nombre de fidèles, et le nombre d'habitants dans le département.
En effet!

Il faut considérer cependant ,comme je vous l'ai dit au préalable qu'il y a 4 nouvelles églises à Vannes depuis 60 ans !

Pas facile de faire une statistique objective avec tout cela!

Un constat à Vannes, les églises sont pleines!

P.S :

Ah au faite !

Une église à Vannes pratique alternativement le dimanche matin à 9h00 le rite extraordinaire et à 10h30 le rite ordinaire! ;)

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : sam. 30 nov. 2019, 22:28
par Trinité
Merci suroît!

O.K.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : sam. 30 nov. 2019, 23:41
par Trinité
Je viens d'écouter jean-luc Marion suroît,
Pourquoi je me décarcasse, à essayer de données des statistiques! :D
Bon!
Les miennes sont locales, peut-être un peu plus crédibles...une idée intéressante qu'il mentionne, et que j'avais déjà soulevée antérieurement.
En substance :" est- ce que les gens qui allaient à l'église hier, sont plus croyants que ceux qui vont à l'église aujourd'hui"?

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 0:30
par Carhaix
Suroît a écrit :
sam. 30 nov. 2019, 15:22
Bonjour,

Puisque la discussion prend la voie d'une réflexion statistiques dans le domaine de la pratique religieuse, visant à dénombrer le nombre de catholiques et leur ratio dans la population, je vous propose cette réflexion du philosophe catholique Jean Luc Marion sur ce problème.

Il faut taper sur you tube "Jean-Luc Marion interview Télévision Lituanienne".
Dans cette vidéo d'une heure, le problème est traité de 13mn03 à la 24ème minute environ. Son point de vue est intéressant et pose de vraies questions. Bonne écoute pour ceux que cela intéresse.
J'ai écouté et j'ai trouvé le discours absurde. Évidemment, personne ne peut connaître la qualité de la foi. Mais est-ce la question qui angoisse notre société ? Non. La question qui angoisse la société est de nature purement sociologique. Il n'y a aucune "bêtise épistémologique" à aborder ce sujet fondamental. Je pense que par obsession du politiquement correct, le philosophe fait exprès d'éluder. Mais son observation n'apporte rien, finalement. C'est juste l'art de regarder ailleurs pour éviter de voir le problème.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 1:04
par Cendrine
Les propos de Jean-Luc Marion sont assez hasardeux car il semble vouloir prendre pour religion ce qui, en réalité, pourrait n'être que croyances éparses et flottantes. Si Jean-Luc Marion a raison et que les gens désertent les églises alors qu'ils continuent à être croyants, en quoi croient-ils alors ? Je le demande sincèrement et sans ironie. On aurait aimé des exemples précis. Quel raisonnement tiendrait une personne qui est croyante mais qui reste loin des églises ?

Ou bien alors Monsieur Marion parle d'autres croyances en réalité. L'horoscope, les vibrations tellurico-cosmiques, le Grand Sachem, Johnny-Christ ? Et là je comprendrais mieux ce qu'il veut dire quand il dit qu'il ignore le sens du mot religion. La religion n'est pas un vague sentiment démultiplié plus ou moins océanique et inconsistant.

Les séminaires diocésains terminent de se vider, mais, selon lui, jamais les prêtres n'ont été aussi nombreux ? Il se demande s'il y a réellement moins de fidèles qu'avant ? On a envie de lui demander comment il fait pour être aussi impeccable à la sortie de son hibernation !

Le problème c'est que JL Marion mélange un peu tout : il fait par exemple référence à la Constitution Européenne et nous dit que les catholiques n'étaient pas contents de voir niées les origines chrétiennes de l'Europe. Mais cela suffit-il à arguer que la pratique religieuse ne s'est jamais aussi bien portée ?

Son argument choc final n'arrange en rien le côté biaisé et vague de ses propos : "avant les gens allaient tous à la messe et n'y croyaient pas, mais maintenant les gens y croient, est-ce un progrès ?". Au passage, qu'est devenue sa négation de la baisse des fidèles ? Ils sont invisibles, mais tout aussi nombreux, et avec, en prime, une foi (en quoi ?) bien plus vivace à présent qu'ils sont comme absents sans l'être tout à fait ?

Le pompon c'est l'allégation selon laquelle aujourd'hui rares seraient les personnes à pouvoir dire si elles sont catholiques ou non, que cela dépendrait des évènements extérieurs, de l'humeur ou de l'envie. Ceci placé sous le signe d'une pseudo-humilité laissant croire que nous pouvons renier notre foi au Christ car c'est lui seul qui peut dire si nous sommes catholiques ou non. J'ai dû réécouter plusieurs fois pour être sûre d'avoir bien compris. On devient chrétien par le baptême, on mûrit dans notre foi en apprenant à la connaître et en la chérissant pour l'amour du Christ et d'autrui, mais on ne cesse pas de le devenir chaque fois qu'on chute ou qu'on est fragile. C'est précisément parce que nous sommes petits, fragiles et faibles que nous avons besoin du Christ.

On peut ne pas être obsédé par le nombre des fidèles, se sentir impuissant face à la désertion de la foi au Christ (car les gens sont libres de faire ce qu'ils veulent, heureusement !) mais cela ne nous exonère pas de la nécessité de voir le réel dans toute sa criante vérité. Peut-être que ce qui fonde cette fameuse division qui était déplorée par Carhaix au début de ce fil, c'est la volonté ou le refus de voir la réalité au dehors et au dedans de nous ?

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 2:34
par Carhaix
Suroît a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 0:59
Bonsoir Trinité et Carhaix,

Je ne compte pas spécialement rentrer dans cette discussion sur la question de savoir s'il y a division ou pas dans le phénomène que vous soulevez (je pense que cela relève de la question de savoir où une communauté met le fondement de l'unité, où est-ce qu'elle place le curseur).

Sur Jean Luc Marion, dont le propos touche indirectement au sujet traité, je crois que précisément, il met l'accent sur le fait qu'on ne peut pas juger de la foi d'autrui, et que moi-même je ne peux jamais prétendre juger jusqu'au bout de ma propre foi. En bonne théologie, comme il le dit lui-même, nul ne peut juger de cela si ce n'est Dieu lui-même, et c'est bien pourquoi il est question d'un Jugement dernier, c'est-à-dire d'une révélation de qui je suis en vérité, pleinement et totalement. Jean-Luc Marion est enraciné dans la tradition, grand lecteur d'Augustin. Ce Saint Augustin qui disait que Dieu est plus intime à moi-même que moi-même. Ce que l'évangile nomme le "secret" du coeur, lieu intime où seul Dieu voit ce qui s'y joue.
Sur cette base, Jean Luc Marion, avec des mots parfois un peu cru, ne fait que poser la question de savoir comment la sociologie, à l'aide d'instrument de mesure, peut prétendre dénombrer le nombre de catholiques croyants, puisque le secret est précisément secret, en un sens ontologique, constituant l'être le plus intime de la personne. Ce lieu secret est inaccessible au sociologue et aux outils de mesure statistiques, de même qu'il est inaccessible à tout le monde, à commencer peut-être par moi-même.
La sociologie ne peut qu'analyser des comportements extérieurs, des pratiques comportementales à partir de signes visibles et marqués. Or, ces comportements peuvent autant être des pratiques sociales convenues que des gens qui vivent leur foi en profondeur. Nul ne peut le décider et le savoir. Tout ce que peut dire la sociologie, c'est qu'il y a plus ou moins de gens qui vont à la messe, mais pas de dire qu'il y a plus ou moins de catholiques en France ou ailleurs. Il y a une inacessibilité de principe à cette deuxième question.

La phrase relevée par Trinité se pose sous forme de question et fait allusion à un lieu commun des tenants de la disparition du catholicisme, lieu commun consistant à dire que la messe, largement pratiquée il y a plusieurs décennies, n'est plus une référence pour les sociétés contemporaines, concluant de cela que la foi chrétienne serait en déclin, en voie de disparition. Jean Luc Marion dit simplement que cela ne prouve rien quant à la réalité de la foi, sa diminution ou sa progression, et que ce n'est pas parce qu'il y a 40% de gens en moins qui vont à la messe qu'il y a 40% de catholiques en moins. Le catholicisme a beaucoup été critiqué par toutes sortes de personnes ( à tort ou à raison) d'avoir imposé, par le passé, ses moeurs et de ne reposer que sur une pratique massive, conventionnelle et routinière de rites sans rien derrière, et Jean Luc Marion constate que maintenant qu'on ne peut plus le soupconner de cela au vu de son recul en terme de pratique sociale, on lui dit qu'il est en train de disparaître.

Par ailleurs, il n'y a pas très longtemps, j'entendais des personnes de 50 et 60 ans parler de leur enfance catholique (aucun d'entre eux ne se dit catholique aujourd'hui). Ils parlaint d'une sorte d'obligation de la confession. À chaque fois, disaient-ils, ils se demandaient ce qu'ils pourraient bien dire au curé. Certains disaient qu'ils avaient péché en se frottant un peu les parties intimes, d'autres s'inventaient des tentations gourmandes, etc., et tout cela pour trouver quelque chose à dire, même si c'était faux ou absurde. Ils étaient enfants, et manifestement cette confession ne provenait nullement d'un appel intérieur et sincère, mais seulement d'une routine familiale dans le cadre de la pratique religieuse. Ils le vivaient comme une contrainte dont ils s'amusaient étant petits. A l'adolescence, tous sont tombés d'accord pour penser qu'il s'agissait d'une intrusion illégitime dans leur intimité, surtout au moment des premières expérience, et ce jusqu'à l'entrée dans l'âge adulte. Ils sont partis et tous disent clairement ne plus vouloir entretenir le moindre lien avec l'Eglise, et ce depuis environ 40 ans. Ils ne connaissent plus rien du tout de l'Eglise, si ce n'est leur vague souvenir du dimanche matin et de quelques habitudes sociales contractées dans leur enfance.
Combien de personnes de cette génération sont dans ce cas? J'ai l'impression que c'est très répandu comme discours, mais ce n'est qu'une impression.
Carhaix
J'ai écouté et j'ai trouvé le discours absurde. Évidemment, personne ne peut connaître la qualité de la foi. Mais est-ce la question qui angoisse notre société ? Non. La question qui angoisse la société est de nature purement sociologique. Il n'y a aucune "bêtise épistémologique" à aborder ce sujet fondamental. Je pense que par obsession du politiquement correct, le philosophe fait exprès d'éluder. Mais son observation n'apporte rien, finalement. C'est juste l'art de regarder ailleurs pour éviter de voir le problème.
Ce philosophe ne partage pas votre angoisse ou cette angoisse sociale que vous soulignez. Il ne fait que suspendre son jugement sur cette problématique sociologique, disant qu'elle ne peut pas toucher au coeur de la question, et ne restera qu'à un niveau numérique superficiel qui ne dit rie de la réalité profonde de la société. C'est une perception déformée du réel à ses yeux.
Ce sont deux sujets différents. La qualité de la foi individuelle ou dans un groupe n'est pas le sujet. Lorsqu'on se demande combien de gens pratiquent, on ne se demande pas si leur foi est parfaite. On se demande seulement s'ils pratiquent. Cette donnée est-elle insignifiante ? Sur quoi se base-t-on pour l'affirmer ? Imaginons que zéro personne ne pratique. Ce sera sans conséquence sur le paysage social ? Les conséquences seront la fin de tout catéchisme, donc de toute transmission, la fermeture des églises, leur probable destruction pour la plupart d'entre elles, la fin des signes visibles de toute vie religieuse. C'est insignifiant ? Sans conséquence ? Dans le domaine de la culture, et de la civilisation, et même dans la formation de la pensée, de la mentalité, et enfin sur le plan philosophique, les conséquences sont immenses. Ce philosophe affirme lui-même que la philosophie ne peut pas fermer les yeux sur la théologie. Que reste-t-il de la théologie si la pratique religieuse disparaît totalement ?

Alors je répète mon objection que vous avez éludée pour répondre à côté : parler de la qualité de la foi, alors que l'on parle de la pratique religieuse dans le paysage de la société, c'est changer sciemment de sujet, pour ne pas avoir à aborder un sujet qui dérange.

Et quel est l'argument qui permet de dissocier foi et pratique ? Croyez-vous en Zeus ? Ou en Apollon ? Ou en Athéna ? Et sinon, n'est-ce pas essentiellement parce que cette religion est morte depuis 1500 ans ? Bien évidemment, si la pratique religieuse cesse, la croyance qui lui est associée (qu'elle soit parfaite ou non, ce n'est pas le sujet) disparaîtra inéluctablement quelques générations plus tard.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 2:45
par Carhaix
Et accessoirement, je me demande ce que la remarque de Marion vient faire sur ce fil. Si vous pouvez m'éclairer...

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 8:58
par Altior
Bonjour, Carhaix!
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 2:34
Bien évidemment, si la pratique religieuse cesse, la croyance qui lui est associée (qu'elle soit parfaite ou non, ce n'est pas le sujet) disparaîtra inéluctablement quelques générations plus tard.
Cette évidence est un cas particulier (et, malheureusement extrême) de la loi selon laquelle il existe un rapport biunivoque entre le fond de la foi (c'est à dire la foi même) et la forme de la foi (la pratique, la façon de rendre culte). L'une est influencée par l'autre et, à son tour, influence l'autre. C'est une évidence que le fond génère la forme, mais il est tout aussi vrai que la forme génère le fond. Lex credendi, lex orandi, mais aussi lex orandi, lex credendi. Nous prions (et nous pratiquons en général) selon notre foi, mais aussi notre foi est façonnée selon la manière dont nous prions (et, plus généralement, nous pratiquons).

Il est raconté qu'un jour, après que le journaliste Henry Stanley retrouva l'explorateur (et missionnaire!) David Livingstone qui s'était un peu «perdu» en Afrique les deux hommes, le premier plus jeune, le deuxième à son âge mûr, se baladaient en pleine solitude dans la jungle. Le temps du repas étant venu, à sa grande surprise, Stanley regarde comme Livingstone fait sortir de son sac une nappe, des serviettes et tout ce qu'il faut pour un repas trop «formel» par rapport aux conditions existantes et à leur complète solitude. On dirait qu'il se croyait dans un salon londonien de cette époque de la Reine Victoria. Voyant l'étonnement de Stanley, Livingstone s'explique. Toute cette parure qu'il avait portée dans son sac pendant des années était son aide pour ne pas (re)devenir un sauvage après des années passées en contrées sauvages.

Parce qu'il est Dimanche matin, bientôt, cher Carhaix, je vais m'endimancher comme on disait jadis. C'est à dire je vais mettre mes meilleurs vêtements. Parce que je crois que je vais à un grand repas. J'aurais fait la même chose si le maire du coin m'avait invité à déjeuner avec, alors d'autant plus je fais ça puisque je crois que le Roi des rois m'attend à un repas dans lequel il se fera Lui-même nourriture pour tous les convives, servie par son lieutenant nommé par Lui. Et si je ne ferai pas ça ? Si je ne m'endimancherai pas ? Si je mettrai mes jeans et mon tee-shirt avec il comandante Ché ? Alors, je vais subir quelque chose de très sérieux: petit à petit je perdrai ma foi. Sans me rendre compte au début. Mon attitude aurait changé: je me croirais à un pique-nique entre potes. D'abord, m'agenouiller deviendrait une attitude absurde. Puis, dans un deuxième temps, faire une prière assis deviendrait tout aussi absurde. Enfin, garder le silence n'aurait plus sa place, on est venu au pique-nique pour se parler, quoi! Mais ce n'est pas moi seul qui va subir tout ça. Ceux qui s'endimancheront encore vont se sentir pas comme il faut. Ils s'agenouilleront un peu contre leur plein gré, embarrassés par moi, qui reste assis dans l'attente de ce petit chips qui est la marque du repas fraternel de chaque dimanche. Même le prêtre va renoncer à une bonne partie de ses vêtements. Porter une chasuble richement ornée, en contraste criant avec mon tee-shirt Ché Guévara, ne serait-il pas un peu saugrenu ? Alors, à bas la chasuble. Puis, même l'aube, quoique gardée en tant que vêtement, se verra transformée, car une aube trop longue et surtout dentellée devient un fardeau pendent un pique-nique. L'étole ? Bon, disons que ça va encore pour un temps, pourvu qu'elle perde son caractère baroque pour ressembler à un foulard. La manipule ? Allons, soyons sérieux, même les garçons qui servent aux grands restos commencent à en renoncer. Nous sommes sous un clocher à la campagne, pas à La Tour d'Argent, au bords de la Seine, quoi!

Allez, frère Carhaix! À table avec le Seigneur et bon Dimanche!

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 11:30
par Carhaix
Altior a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 8:58
Bonjour, Carhaix!
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 2:34
Bien évidemment, si la pratique religieuse cesse, la croyance qui lui est associée (qu'elle soit parfaite ou non, ce n'est pas le sujet) disparaîtra inéluctablement quelques générations plus tard.
Cette évidence est un cas particulier (et, malheureusement extrême) de la loi selon laquelle il existe un rapport biunivoque entre le fond de la foi (c'est à dire la foi même) et la forme de la foi (la pratique, la façon de rendre culte). L'une est influencée par l'autre et, à son tour, influence l'autre. C'est une évidence que le fond génère la forme, mais il est tout aussi vrai que la forme génère le fond. Lex credendi, lex orandi, mais aussi lex orandi, lex credendi. Nous prions (et nous pratiquons en général) selon notre foi, mais aussi notre foi est façonnée selon la manière dont nous prions (et, plus généralement, nous pratiquons).

Il est raconté qu'un jour, après que le journaliste Henry Stanley retrouva l'explorateur (et missionnaire!) David Livingstone qui s'était un peu «perdu» en Afrique les deux hommes, le premier plus jeune, le deuxième à son âge mûr, se baladaient en pleine solitude dans la jungle. Le temps du repas étant venu, à sa grande surprise, Stanley regarde comme Livingstone fait sortir de son sac une nappe, des serviettes et tout ce qu'il faut pour un repas trop «formel» par rapport aux conditions existantes et à leur complète solitude. On dirait qu'il se croyait dans un salon londonien de cette époque de la Reine Victoria. Voyant l'étonnement de Stanley, Livingstone s'explique. Toute cette parure qu'il avait portée dans son sac pendant des années était son aide pour ne pas (re)devenir un sauvage après des années passées en contrées sauvages.

Parce qu'il est Dimanche matin, bientôt, cher Carhaix, je vais m'endimancher comme on disait jadis. C'est à dire je vais mettre mes meilleurs vêtements. Parce que je crois que je vais à un grand repas. J'aurais fait la même chose si le maire du coin m'avait invité à déjeuner avec, alors d'autant plus je fais ça puisque je crois que le Roi des rois m'attend à un repas dans lequel il se fera Lui-même nourriture pour tous les convives, servie par son lieutenant nommé par Lui. Et si je ne ferai pas ça ? Si je ne m'endimancherai pas ? Si je mettrai mes jeans et mon tee-shirt avec il comandante Ché ? Alors, je vais subir quelque chose de très sérieux: petit à petit je perdrai ma foi. Sans me rendre compte au début. Mon attitude aurait changé: je me croirais à un pique-nique entre potes. D'abord, m'agenouiller deviendrait une attitude absurde. Puis, dans un deuxième temps, faire une prière assis deviendrait tout aussi absurde. Enfin, garder le silence n'aurait plus sa place, on est venu au pique-nique pour se parler, quoi! Mais ce n'est pas moi seul qui va subir tout ça. Ceux qui s'endimancheront encore vont se sentir pas comme il faut. Ils s'agenouilleront un peu contre leur plein gré, embarrassés par moi, qui reste assis dans l'attente de ce petit chips qui est la marque du repas fraternel de chaque dimanche. Même le prêtre va renoncer à une bonne partie de ses vêtements. Porter une chasuble richement ornée, en contraste criant avec mon tee-shirt Ché Guévara, ne serait-il pas un peu saugrenu ? Alors, à bas la chasuble. Puis, même l'aube, quoique gardée en tant que vêtement, se verra transformée, car une aube trop longue et surtout dentellée devient un fardeau pendent un pique-nique. L'étole ? Bon, disons que ça va encore pour un temps, pourvu qu'elle perde son caractère baroque pour ressembler à un foulard. La manipule ? Allons, soyons sérieux, même les garçons qui servent aux grands restos commencent à en renoncer. Nous sommes sous un clocher à la campagne, pas à La Tour d'Argent, au bords de la Seine, quoi!

Allez, frère Carhaix! À table avec le Seigneur et bon Dimanche!
En fait, Altior, je suis vraiment frappé par l'absurdité extraordinaire du propos de Marion, auquel Suroît emboîte le pas. La foi sans la pratique ne peut évidemment pas se maintenir. Qu'un individu isolément puisse entretenir un lien intime, en dehors de tout cadre religieux, avec Dieu, ou avec une forme quelconque de présence surnaturelle (les esprits, les fantômes, les phénomènes paranormaux, l'horoscope, les extraterrestres, la Déesse-Mère, etc.), c'est vraiment enfoncer les portes ouvertes. Quel scoop ! En quoi cela éclaire la question si la foi "chrétienne", et plus précisément "catholique", va se maintenir dans la société occidentale ? En rien. C'est vraiment changer de sujet pour ne pas parler du sujet, et éviter d'aborder un sujet sensible, si ce n'est explosif. C'est en fin de compte une pirouette guère héroïque : sauver son image au sein de la bien-pensance médiatique, et donc sa réputation, pour ne pas passer pour un "réactionnaire". Il s'en tire à très bon compte, mais nous fait du Michel Serres bien conforme à la pensée unique promue (et rigoureusement encadrée) par le régime en place.

Et au passage, il accuse la "bêtise" de ceux qui s'intéressent au sujet interdit, au Tabou ! Nous voilà presque dans 1984 et la minute de la haine contre les "pensées crimes".

Pourtant, son idée, très "honnête" et peu dangereuse, est d'une absurdité béante : si la foi, c'est penser à Dieu dans son coin sans aucune pratique religieuse associée, et donc sans aucun partage social, comment cette foi peut-elle se former ? Sur quelle théologie peut-elle s'appuyer ? Sur qu'elles prières ?

Admettons, l'Église disparaît. Une génération plus tard, plus personne n'est entré dans une église de sa vie, n'a même pas l'idée de ce que peut être une pratique religieuse, n'a même jamais ouvert une Bible, ni même vu de crucifix ou de représentation de Jésus-Christ (sauf dans les musées) : comment peut-il avoir l'idée d'entretenir un lien personnel avec Jésus-Christ ? C'est la négation de l'évangélisation que de croire que la foi chrétienne pourrait surgir d'elle-même, sans contexte général, culturel, éducatif, social. Même ceux qui, aujourd'hui, comme Suroît (d'après ce que j'ai compris), n'ont aucune foi, aucune pratique (mais viennent quand même hanter les forums catholiques, on se demande pourquoi d'ailleurs, vrai mystère), ont une idée de Jésus-Christ, une idée assez vivace et non pas seulement muséale (comme on peut avoir une idée de Zarathoustra, Cybèle, Mythra, Wotan, Zeus...), précisément parce qu'ils vivent dans une société où le christianisme est encore vivant ; et ce qui le rend vivant, ce n'est pas ce qui se passe dans les vagues pensées intimes de tout un chacun, mais bel et bien son expression extérieure, physique, matérielle, que l'on appelle "pratique religieuse".

Donc non, Suroît (via Marion), désolé, mais vous racontez n'importe quoi : mesurer la pratique religieuse catholique en étudiant sa manifestation sociale, par l'assistance à la messe, la fréquentation des sacrements, la visite des églises, le versement du denier du culte, le nombre de prêtres officiant et desservant des lieux de culte, l'état des grandes manifestations symboliques que sont les mariages, baptêmes, funérailles, les messes de Pâques et de Noël, le nombre d'églises en activité et leur taux de fréquentation, tout cela a grandement du sens, et dit bel et bien quelque chose de très significatif sur l'état de la vivacité catholique d'une population, et ne constitue en rien une "bêtise épistémologique". Jusqu'à preuve du contraire.

Les huit minutes de Marion n'apportent justement aucun argument pour étayer la qualification de cette soi-disant "bêtise". C'est bien cela, le problème. L'insignifiant Michel Serres n'aurait sans doute pas fait mieux en terme d'incantation conformiste.

Et tout cela pour faire passer en réalité l'idée que l'Occident doit accepter de perdre son identité, car c'est bien cela, le but réel de cette intervention.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 11:56
par Carhaix
Suroît a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 11:28
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 2:34
Ce sont deux sujets différents. La qualité de la foi individuelle ou dans un groupe n'est pas le sujet. Lorsqu'on se demande combien de gens pratiquent, on ne se demande pas si leur foi est parfaite. On se demande seulement s'ils pratiquent. Cette donnée est-elle insignifiante ? Sur quoi se base-t-on pour l'affirmer ? Imaginons que zéro personne ne pratique. Ce sera sans conséquence sur le paysage social ? Les conséquences seront la fin de tout catéchisme, donc de toute transmission, la fermeture des églises, leur probable destruction pour la plupart d'entre elles, la fin des signes visibles de toute vie religieuse. C'est insignifiant ? Sans conséquence ? Dans le domaine de la culture, et de la civilisation, et même dans la formation de la pensée, de la mentalité, et enfin sur le plan philosophique, les conséquences sont immenses. Ce philosophe affirme lui-même que la philosophie ne peut pas fermer les yeux sur la théologie. Que reste-t-il de la théologie si la pratique religieuse disparaît totalement ?

Alors je répète mon objection que vous avez éludée pour répondre à côté : parler de la qualité de la foi, alors que l'on parle de la pratique religieuse dans le paysage de la société, c'est changer sciemment de sujet, pour ne pas avoir à aborder un sujet qui dérange.

Et quel est l'argument qui permet de dissocier foi et pratique ? Croyez-vous en Zeus ? Ou en Apollon ? Ou en Athéna ? Et sinon, n'est-ce pas essentiellement parce que cette religion est morte depuis 1500 ans ? Bien évidemment, si la pratique religieuse cesse, la croyance qui lui est associée (qu'elle soit parfaite ou non, ce n'est pas le sujet) disparaîtra inéluctablement quelques générations plus tard.
Vous prenez un cas extrême, le cas où il n'y aurait plus un catholique sur le territoitre.
Peut-être que cela dépend beaucoup des témoignages qu'on a autour de soi. Il est clair qu'il n'est pas question de prôner une foi sans aucune pratique, sinon les conséquences que vous soulignez sont inévitables. Mais le propos de Jean Luc Marion ne dit pas cela pour autant.
Le fait est qu'une partie très conséquente de la population francaise a recu cette pratique et cet enseignement de l'Eglise durant toute leur enfance. Et beaucoup de ceux-là n'ont rien retenu et ne connaissent strictement rien de la théologie qui sous tendait leur éducation religieuse, et ils ne retiennent rien du catéchisme. Ils le disent eux-même! Moi qui n'ait pas recu une éducation catholique, j'en connais bien plus qu'eux sur leur propre provenance religieuse dans laquelle ils ont grandis pendant 18 ans! C'est bien la preuve que l'imposition d'une pratique, d'une forme de vie religieuse, quand elle est en rupture avec le fond de la foi, ne permet pas une transmission automatique et féconde. Oui, forme et fond sont solidaires et sont en constant rapport, mais pas nécessairement dans un rapport d'enrichissement et de sens. Ce rapport, quand il n'est pas harmonieux, peut entraîner un violent rejet de la forme et aussi du fond. Le petit exemple que je vous ai donné sur le témoignage de la pratique de la confession des petits est révélateur sur ce sujet. Il y a eu un problème de transmission, en tout cas c'est évident autour de moi tellement les cas s'accumulent dans ce que j'entends depuis que je sui né sur cette question. Je crois que Jean Luc Marion veut simplement souligner cela quand il parle de la critique d'un "catholicisme sociologique" par le passé, sans juger pour autant de la qualité de la foi. Cela ne fait pas de lui un "vandale" ou un "nihiliste", loin de là. Et c est peut-être un point de vue plus lucide que vous ne le pensez.
Qu'il faille une transmission pratique et théorique pour que la foi continue de vivre, sans doute. La question est comment transmettre pour que cette foi soit recue correctement et puisse croître. Là il y a peut-être eu un problème dans la manière de faire. Tout remettre sur le dos de l'évolution de la société est une solution. Mais je ne suis pas certain que ce soit aussi simple que cela.
La foi (le fond) n'a pas grandi en harmonie au diapason d'une pratique (la forme) sociale majoritaire en France, et il semble même que pour certains, cette forme sociale de vie soit venue étouffer la foi qui était peut-être là, ce qui a éventuellement causé une grande désaffection du catholicisme. Forme et fond devrait se soutenir mutuellement. Quand elles ne le font pas, elle risquent de s'exclure et de se faire mutuellement obstacle, et on perd l'un ou l'autre, ou les deux. On ne peut plus reprocher au catholicisme d'aujourd'hui ce type de présence formelle et sociologique qui lui a été reproché par le passé.

Le lien avec le sujet? Il n'est pas direct. Vous étiez parti sur une joute statistique qui n'était pas directement lié à ce sujet. Je pensais que cette vidéo proposait une réflexion pertinente d'un académicien sur cette question. Elle a fait réagir, voilà tout.
Maintenant, la question de savoir s'il faut se mettre debout ou à genoux touche un problème de forme important sur le fond à vos yeux, et notamment sur l'unité visible de la communauté dans la manière de célébrer sa foi, unité formelle censée traduire une unité de fond. Il semble que certains se demandent pourquoi le clergé ne veut pas trancher et imposer une forme particulière. Mais peut-être que le clergé ne souhaite pas imposer une forme qui risquerait de créer des divisions plus profondes encore, d'autant plus que vous mettez en avant le fait que debout ou à genoux, cela peut correspondre à la manière dont l'individu vit le fond de sa foi à travers une forme particulière. Mitterrand disait à peu près qu'en politique, il n'y a parfois pas de meilleure solution que l'absence de solution. C'est triste mais il semble que tout cela soit très politique.
Je ne m'interroge absolument pas sur des solutions à mettre en œuvre aujourd'hui. Si vous avez un peu lu ce que j'ai écrit, de façon un peu attentive (ce dont les forumeurs sont de moins en moins coutumiers), vous verrez que ce n'est pas du tout le sujet qui me préoccupe, car j'estime qu'il est TROP TARD, et que le mal est fait. Ce mal est datable et remonte précisément à la réforme liturgique. Enfin bref, je vais devoir réécrire ce que j'ai lu ci-dessus, donc Suroît : cf ci-dessus !

Quant au reste, je trouve que vous perdez de vue que la société n'est pas statique mais évolue. Ce qui existe aujourd'hui n'existera plus demain. Aujourd'hui, des tas de gens, comme vous le reconnaissez, sont dans un entre-deux : ils baignent dans une culture catholique, qu'ils ont rejetée et connaissent peu dans le détail. Ils sont entre un avant (lorsque la pratique religieuse était très présente, d'où la force de cet héritage culturel qui nous affecte vous et moi : en ce qui me concerne, je n'ai reçu aucune éducation religieuse, mais c'est mon intérêt pour l'art et la musique, conjuguée à la fréquentation d'amis catholiques pratiquants, qui m'ont amené à la foi, donc à cause d'une ambiance culturelle vivace dans laquelle je baignais, et sans laquelle je n'aurais jamais seulement eu l'idée de me convertir), et un après qui est pour l'heure inconnu, mais qui viendra certainement. Et dans cet après, le contexte que ma génération et la vôtre ont connu n'existera PLUS ! L'époque que vous connaissez n'est pas ÉTERNELLE ! Elle change, elle évolue ! Lorsque vous serez vieux, vous ne reconnaîtrez plus le monde que vous avez connu ! Et donc oui, il est tout à fait possible, et même probable, voire certain, que la pratique catholique va disparaitre du paysage, c'est inéluctable si on prolonge les courbes.

Alors que viennent faire là dedans des écarts tels que : bah de toute façon, ma pauv'dame, qui sait si autrefois les gens avaient vraiment la foi, était-ce vraiment mieux que maintenant, etc. ? C'est l'art d'enterrer la tête dans le sable pour ne pas VOIR le phénomène en train de s'accomplir ! Ne pas le voir, mais surtout ne pas en PARLER, et interdire aux autres de le faire. C'est de la MAUVAISE FOI dans toute sa splendeur.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 12:39
par Levergero
"Alors que viennent faire là dedans des écarts tels que : bah de toute façon, ma pauv'dame, qui sait si autrefois les gens avaient vraiment la foi, était-ce vraiment mieux que maintenant, etc. ?" écrit Carhaix.

Dans les villages et les petites villes, le "qu'en dira-t-on" avait beaucoup d'importance et les gens tenaient à être vus à la sortie de la messe le dimanche pour ne pas faire l'objet de ragots de la part des bien pensants...Mais étaient-ils vraiment pratiquants ? Va savoir...

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 12:46
par Carhaix
Levergero a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 12:39
"Alors que viennent faire là dedans des écarts tels que : bah de toute façon, ma pauv'dame, qui sait si autrefois les gens avaient vraiment la foi, était-ce vraiment mieux que maintenant, etc. ?" écrit Carhaix.

Dans les villages et les petites villes, le "qu'en dira-t-on" avait beaucoup d'importance et les gens tenaient à être vus à la sortie de la messe le dimanche pour ne pas faire l'objet de ragots de la part des bien pensants...Mais étaient-ils vraiment pratiquants ? Va savoir...
Et alors ?

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 13:52
par Carhaix
Suroît a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:00
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 11:56
Je ne m'interroge absolument pas sur des solutions à mettre en œuvre aujourd'hui. Si vous avez un peu lu ce que j'ai écrit, de façon un peu attentive (ce dont les forumeurs sont de moins en moins coutumiers), vous verrez que ce n'est pas du tout le sujet qui me préoccupe, car j'estime qu'il est TROP TARD, et que le mal est fait. Ce mal est datable et remonte précisément à la réforme liturgique. Enfin bref, je vais devoir réécrire ce que j'ai lu ci-dessus, donc Suroît : cf ci-dessus !

Quant au reste, je trouve que vous perdez de vue que la société n'est pas statique mais évolue. Ce qui existe aujourd'hui n'existera plus demain. Aujourd'hui, des tas de gens, comme vous le reconnaissez, sont dans un entre-deux : ils baignent dans une culture catholique, qu'ils ont rejetée et connaissent peu dans le détail. Ils sont entre un avant (lorsque la pratique religieuse était très présente, d'où la force de cet héritage culturel qui nous affecte vous et moi : en ce qui me concerne, je n'ai reçu aucune éducation religieuse, mais c'est mon intérêt pour l'art et la musique, conjuguée à la fréquentation d'amis catholiques pratiquants, qui m'ont amené à la foi, donc à cause d'une ambiance culturelle vivace dans laquelle je baignais, et sans laquelle je n'aurais jamais seulement eu l'idée de me convertir), et un après qui est pour l'heure inconnu, mais qui viendra certainement. Et dans cet après, le contexte que ma génération et la vôtre ont connu n'existera PLUS ! L'époque que vous connaissez n'est pas ÉTERNELLE ! Elle change, elle évolue ! Lorsque vous serez vieux, vous ne reconnaîtrez plus le monde que vous avez connu ! Et donc oui, il est tout à fait possible, et même probable, voire certain, que la pratique catholique va disparaitre du paysage, c'est inéluctable si on prolonge les courbes.

Alors que viennent faire là dedans des écarts tels que : bah de toute façon, ma pauv'dame, qui sait si autrefois les gens avaient vraiment la foi, était-ce vraiment mieux que maintenant, etc. ? C'est l'art d'enterrer la tête dans le sable pour ne pas VOIR le phénomène en train de s'accomplir ! Ne pas le voir, mais surtout ne pas en PARLER, et interdire aux autres de le faire. C'est de la MAUVAISE FOI dans toute sa splendeur
Je ne perds pas de vue l'idée que la société évolue. La figure de ce monde passe, disait Paul. Seulement je ne partage pas les prophéties du grand soir ou de la grande débâcle, c'est selon, et ce relativement à tous les sujets. Je suis sceptique, c'est tout! L'évolution des courbes est ce qu'elle est, mais sachez qu'elles peuvent recevoir des inflexions, et dans les deux sens. Il est vrai que des tendances et des dynamiques se dessinent, mais de là à fixer le destin d'une civilisation de manière certaine, c'est oublier que le présent est à faire et à vivre, c'est oublier ses ressources peut-être insoupconnées, et c'est avoir une conception tout aussi statique de la société, et ce par anticipation. Vous semblez dire que le catholicisme est déjà mort, au fond, et qu'il est comme un grand cadavre à la renverse, où seuls des asticots lui donnent un semblant de vie. C'est pas évident à mes yeux!
Il semblerait que l'inflexion des dernières décennies ne vous soit pas favorable. Qui peut dire ce qu'il en sera demain? Il faudrait un point de vue Absolu pour trancher la question, point de vue inaccessible à l'homme. C'est ce que dit Jean Luc Marion. Sans doute que le mot "bêtise" dessert son propos et peut montrer une forme d'arrogance. Mais enfin qui n'a jamais cédé à ces facilités? Pour avoir lu cet auteur, sa philosophie, je crois qu'il est très loin de correspondre à ce que vous en dites. Par ailleurs il n'interdit personne de parler, iI donne simplement son avis, comme vous vous donnez votre avis. Je ne vois pas où est le problème et la faute de sa part.

Vous avez raison sur l'atmosphère qu'une religion ou autre peut causer sur une société, favorisant des trajectoires de vie individuelle comme les vôtres. Je ne crois pas que Jean Luc Marion nie ceci! Ses propos sur la théologie l'attestent. Simplement il semblerait que les trajectoires inverses de la vôtre soient tout aussi nombreuses, voire franchement majoritaire. Alors des questions se posent, c'est normal.
Une culture pose sa puissance d'influence sur une société par sa grande capacité d'émission et d'absorption. Le catholicisme a eu cette position majoritaire, de fait. Mais il semblerait que ces deux vertus ne soient plus vraiment son fort aujourd'hui. Le catholicisme est devenu minoritaire en France aujourd'hui. Cela change la donne, et comme toute forme de vie minoritaire, elle est souvent plus vive que lorsqu'elle est confortablement installé dans une société. Je crois que le christianisme est déjà passé, un peu partout dans le monde et dans l'histoire, par des positions minoritaires, et ce dans des contextes de persécution horrible incomparables avec ce que vit le catholicisme aujourd'hui, qui n'est pas non plus une victime à mes yeux. Il est encore là aujourd'hui, de fait. Je crois tout de même que le christianisme (catholique ou pas) n'enseigne ni l'optimisme, ni le pessimisme, mais l'espérance dans la lucidité. Les textes de Bernanos sont instructifs sur cette distinction entre ces trois termes. L'espérance n'est pas une méthode Coué qui nie le réel, mais une attitude féconde qui laisse ouvert un avenir possible, et ce en approfondissant son propre présent, toujours plus riche et complexe qu'on ne le pense.
Vous assignez le point de rupture à la réforme liturgique. Peut-être, je ne sais pas. Les témoignages d'ancien catholiques assistant à la messe en latin sont nombreux également, et cela ne les a pas pas empêché de détourner leur trajectoire de l'Eglise.
L'esprit du Concile est à l'œuvre depuis la fin du 19e siècle. Il suffit de lire Huysmans.

Dans l'ensemble, je suis d'accord avec ce que vous dites, comme d'ailleurs je suis d'accord avec ce que dit Marion. Mais comme à Levergero je vous demande : oui, et ? Quel est le rapport avec tout ce qui précède ? Vous détournez la question avec des observations - justes en soi - mais qui n'apportent aucun éclairage, et n'ont aucune pertinence avec la question de départ. Vous continuez à enfoncer les portes ouvertes pour ne pas avoir à regarder une situation de crise qui existe, quoique vous en disiez. La chute de la fréquentation est un fait incontestable. Prolonger la courbe n'a rien de déraisonnable ni d'irrationnel : c'est ce que font les climatologues et les démographes, dans les domaines qui leurs sont propres. En sociologie, on y a recours également dans différentes études. Par exemple, il est évident, et personne ne songe à le contester, que dans un département rural où des prêtres de 75 ans desservent plusieurs dizaines d'églises (là où il y a quelques décennies plusieurs prêtres jeunes desservaient une seule paroisse), la fermeture définitive prochaine de ces paroisses est quasi assurée. Pourquoi le nier ? Pourquoi refuser de regarder ce phénomène qui s'accomplit sous nos yeux ?

Arrêtez l'hypocrisie cinq minutes.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 16:33
par Carhaix
Suroît a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 15:37
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:52
L'esprit du Concile est à l'œuvre depuis la fin du 19e siècle. Il suffit de lire Huysmans.

Peut-être. Huysmans, c'est déjà un choix et une perspective particulière. On peut lire aussi Mauriac pour un autre point de vue sur une partie du catholicisme.


https://eglise.catholique.fr/sengager-d ... e-mauriac/
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:52
Dans l'ensemble, je suis d'accord avec ce que vous dites, comme d'ailleurs je suis d'accord avec ce que dit Marion. Mais comme à Levergero je vous demande : oui, et ?
Ah! Eh bien je n'avais pas compris que vous étiez d'accord avec Marion dans vos messages précédents. Ce n'était pas si clair...
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:52
La chute de la fréquentation est un fait incontestable. Prolonger la courbe n'a rien de déraisonnable ni d'irrationnel : c'est ce que font les climatologues et les démographes, dans les domaines qui leurs sont propres. En sociologie, on y a recours également dans différentes études.
A la différence près que l'être humain ne peut être totalement nivelé avec les mouvements de banquises, les déplacements de terrain ou le niveau de la mer. Que cette approche, à l'échelle de la masse sociale, puisse apporter des éclairages sur les comportements collectifs, d'accord. Mais si c'est pour calquer totalement cette méthode sur l'être humain, je crois que c'est une erreur epistémologique que la sociologie a tendance à souvent commettre et que les journaux reprennent abondamment, et c'est pourquoi son point de vue n'est pas très adéquate.
La climatologie traite d'objets matériels et biologiques soumis à des forces physiques et des rapports strictement mesurables et quantifiables. Réduire l'être humain à cela, c'est clairement reconduire cette "pensée unique" que vous déplorez par ailleurs. Car notre monde pense comme cela, que ce soit en économie, en politique, en analyse sociale, etc.
Les sciences que vous mentionnez sont de l'ordre du prévisible. Là il n'y a pas d'evènements, si ce n'est lorsque nous ignorons un certain nombre de facteurs.
Avec l'homme il y a de l'imprévisible, de l'évènement, et donc des inflexions possibles. Donc non, ce n'est pas nécessairement très rationnel de vouloir prolonger les courbes et de les comprendre comme on comprend des tendances climatologiques, puisque l'objet étudié n'est pas du tout le même, et qu'il présente même une différence essentielle. C'est précisément ce qu'essaie de dire Jean Luc Marion. :D
Les paraboles du Royaume prennent des images végétales et montrent des développements inattendus, extravagant même. Peut-être que c'est pour signifier le fait que la logique de la foi n'est pas réductible aux phénomènes biologiques observables. Ce n'est pas nier le problème que de dire cela. C'est tout simplement le poser dans des termes différents. Cessons de ravaler l'autre à ses petites dénégations.
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:52
Quel est le rapport avec tout ce qui précède ?
Pour ma part, je l'ai déjà dit plus haut.
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 13:52
Arrêtez l'hypocrisie cinq minutes.
Donc je suis hypocrite et vous êtes de bonne foi. J'aurai dû y penser plus tôt!
Carhaix a écrit :
dim. 01 déc. 2019, 11:30
Même ceux qui, aujourd'hui, comme Suroît (d'après ce que j'ai compris), n'ont aucune foi, aucune pratique (mais viennent quand même hanter les forums catholiques, on se demande pourquoi d'ailleurs, vrai mystère),
Ok. Ne voulant pas être la cause de cauchemars parmi mes concitoyens, je vais cesser toutes discussions sur ce forum. Il n'est visiblement pas possible de parler avec certains catholiques sans essuyer ce genre de propos (sur la foi ou autres), et je ne voudrais pas me plonger dans ce genre de querelles stériles, ce que j'ai déjà fait une ou deux fois, ce qui n'était sans doute pas une bonne chose.
Dommage. Je vous laisse entre vous. Vous êtes chez vous! Mais alors la dimension "catholique" du catholicisme risque d'en prendre un coup, dans ces conditions.

Excusez-moi pour le dérangement!

Ciao :ciao: .
Ha oui, vous quittez le forum sur ma seule remarque. Mais bien sûr. Vous faites ce que vous voulez et n'ai aucune responsabilité là dedans.

Pour le reste, le déni est total.

Re: Les signes de division au cours de la messe

Publié : dim. 01 déc. 2019, 16:40
par Cendrine
Bonjour Suroît,

Il serait dommage que vous partiez, vous n'êtes pas d'accord avec nous mais vous avez su rester respectueux et clair, en donnant des arguments précis et pertinents pour la discussion (même si pour certains d'entre nous ils sont réfutables), ce qui est de plus en plus rare sur un forum il est vrai.

Ce que je voudrais simplement souligner, et qui contredit les propos de Lavergero :
Dans les villages et les petites villes, le "qu'en dira-t-on" avait beaucoup d'importance et les gens tenaient à être vus à la sortie de la messe le dimanche pour ne pas faire l'objet de ragots de la part des bien pensants...Mais étaient-ils vraiment pratiquants ? Va savoir...
c'est que les non catholiques (et pas mal de catholiques aussi d'ailleurs il faut le constater) pensent à tort que pour être un "vrai" catholique il faut être proche de la perfection. C'est tout le contraire qui se passe en réalité. Je prendrai comme point d'appui de mon propos le sacrement de la confession. Ce n'est pas parce que nous sommes des saints que nous allons nous confesser, mais parce que nous aimerions le devenir un jour. Nous n'y arrivons pas, mais le désirons de tout notre cœur, pas pour avoir une médaille, mais pour vivre de l'amour de Dieu, pour le voir au milieu de nos frères. Pour l'immense majorité d'entre nous, cela ne sera pas ici-bas.

Le catholicisme est l'exact contraire d'une croyance hermétique, d'une religion initiatique pour laquelle il faut passer des degrés de perfectionnement définitifs. C'est ce que vous soulignez un peu quand vous parlez de l'universalisme catholique. :)