Cher Jeanbaptiste,
Une remarque d'ordre général: si vous me lisiez totalement, calmement, au lieu de prendre quelques mots hors contexte, nous éviterions bien des énervements sans doute inutiles.
jeanbaptiste a écrit :Ceux qui affirment ne pouvoir dire "Ne nous soumets pas" et disent en latin "Ne nos inducas" sont soit ridicules, soit des menteurs.
Déjà je le prend pour moi, car j'affirme cela et je ne me crois ni ridicule ni menteur. Mais je ne suis pas le seul à être ridicule et menteur.
Je ne le disais pas pour vous. Je regrette que vous vous sentiez visé
jeanbaptiste a écrit :Donc saint Augustin est un menteur ? Bossuet est un menteur ? Tous les catholiques jusqu'au XXe siècles sont des menteurs qui, dans les traductions pour les missels donnaient tous, dans tous les pays, "ne nous laisse pas succomber" ou équivalent ?
Vous ne me lisez pas, et vociférez sans m'avoir lu.
Saint Augustin donne la juste interprétation du Pater. Mais quand il célébrait, ou priait en privé, que disait-il à votre avis ? Ne nos inducas, comme tout le monde;
L'ancienne traduction française n'était pas une traduction mais une (juste !) interprétation. Pour les autres langues, je n'en sais rien: je n'ai pas les traductions usuelles (il n'y en avait pas alors d'officielles à proprement parler) des siècles passés. J'observe seulement que la traduction anglaise d'aujourd'hui (do not lead us) semble ancienne, puisque Dieu y est tutoyé.
jeanbaptiste a écrit :1. Il y a une tradition dans tous les pays catholiques de ne pas traduire ici littéralement le latin.
Il faut prendre garde à ne pas abuser du mot tradition, lourd de sens. Disons plutôt habitude. On a rompu avec cette habitude pour revenir à la fidélité au texte. C'est un choix, fait par l'autorité légitime. Cela semble être la tendance encore plus aujourd'hui qu'alors, si j'en juge par les arguments romains à propos du pro multos de la consécration.
Encore une fois (mais à quoi bon me répéter ?), cela ne signifie pas que ceux qui dans les siècle passés faisaient autrement avaient tort.
Mais cela implique que ceux qui hurlent aujourd'hui à la mauvaise traduction, voire à l'hérésie, ont tort, et gravement tort.
jeanbaptiste a écrit :Notre "Ne nous soumets pas" est déjà une atténuation, qui me semble laisser plus de place au libre arbitre. Il faut bien sûr prendre cela au sens de soumettre à une épreuve.
Pardonnez-moi, mais le sens premier de soumettre c'est l'assujettissement :
1. Imposer dépendance, obéissance, par la contrainte, par la force, à quelqu'un. Synon. assujettir.
Pardonnez moi à votre tour, mais ce n'est pas vrai. Vous confondez sens premier et premier sens donné par le dictionnaire. Sens premier: mettre (mitterre) en dessous, d'où bien des sens différents
Il est évident que ce ne peut être ce sens là. Il faut avoir bien peu de confiance en l'Église pour croire qu'elle puisse demander aux fidèles francophones d'employer soumettre à ce sens là. Peut-être est-ce le problème de fond, d'ailleurs.
jeanbaptiste a écrit :
"De même nature" traduit aussi exactement que possible le grec homoousios, dont consubstantialis est en latin une transcription approximative.
On croit rêver...
Vous savez très bien que ousia se traduit par "substance", dire que "consubstantiel" est une approximation est la preuve soit de votre mauvaise foi, soit de votre incompétence en ces sujets.
Croyez bien que je suis navré de devoir vous contredire. Mais les langues grecque et latine sont ce qu'elles sont, et il n'est pas en mon pouvoir de les changer, fût-ce pour éviter vos foudres.
homoousios est en grec un participe présent, d'un verbe composé de eimi, je suis, et du préfixe homo, qui exprime l'identité totale
Il signifie dons "étant exactement semblable".
Il ne pouvait être traduit exactement en latin, pour deux raisons
1) Le verbe être (sum, je suis) n'a pas en latin de participe présent
2) Il n'y a pas non plus d'équivalent à homo
D'où le recours à des approximations (ce n'est pas moi qui suis "gonflé", c'est la langue latine qui ne l'est pas assez. Prenez vous en à elle)
1) L'utilisation de substare. Stare signifie se tenir debout. Sub évoque ici quelque chose comme une antériorité. C'est donc pris comme ersatz de esse. Participe présent substans. Comme le latin préfère dans ces cas là un adjectif, on forme substantialis
2) Le préfixe cum, qui signifie seulement avec, nettement moins fort que homo. Ça donne consubstantialis, une approximation faute de mieux, ne vous en déplaise.
Le Moyen-Âge, qui n'avait pas la même conception que les IVe-Ve siècle du respect de la langue latine, a créé essens comme participe présent du verbe être. D'où essentia, transcrit en français par essence, pour traduire ousia, le nom qui était dérivé en grec d'ousios.
Il n'y a donc pas à distinguer la substance et l'essence.
On pourrait traduire homoousios par "de même essence". Mais, le sens courant du mot français moderne prêterait pour le moins à confusion.
C'est donc tout à fait sainement qu'on a choisi "de la même nature", qui signifie à peu près exactement la même chose: la façon dont on est en soi, hors de toute contingence.
Au cas où, ce qu'à Dieu ne plaise, cette dernière proposition vous donnerait envie de hurler à nouveau, je vous signale que de très nombreux textes médiévaux emploient la formule "natura sive essentia", ce qui indique que pour leurs auteurs déjà les deux mots étaient équivalents. voire les trois termes en cause
Par exemple, le quatrième concile du Latran, œcuménique, déclare
Firmiter credimus et simpliciter confitemur, quod unus solus est verus Deus, aeternus, immensus et incommutabilis, incomprehensibilis omnipotens et ineffabilis, Pater et Filius et Spiritus Sanctus: tres quidem personae, sed una essentia, substantia seu natura simplex omnino
Allez-vous l'accuser, lui aussi, d'hérésie ?
jeanbaptiste a écrit :
De fait, il est vrai que le mot nature peut traduire ousia. et d'ailleurs homoousios a posé problème pour cette raison justement. En effet, pour faire vite, nous pourrions dire que la distinction entre nature et substance n'existaient pas, il n'y avait que l'ousia. Avec Nicée la disctinction entre "nature" et "substance" pourra se faire.
Et se fera, va se développer la distinction en théologie entre nature et substance afin de faire disparaître l'ambiguité et affiner la perception du Mystère Trinitaire.
En tout cas dire que "consubstantiel" est une traduction approximative est faux !
Encore une fois, il n'est pas en mon pouvoir, ni même en celui du Magistère, de changer les langues latine et grecque pour vous satisfaire.
jeanbaptiste a écrit :Franchement, vous êtes gonflé. Qui demande la révision des traductions ? Le Magistère. Les cardinaux et le pape seraient-il donc des gens odieux, menteurs et ridicules ?
Et ces insultes à quel titre les proférez-vous ? Au nom du respect de la lettre latine... On croit rêver ! Les traducteurs du missel actuel n'ont pas respecté la lettre quasiment en tout point sauf là où ne pas la respecter est traditionnel !
Comme vous le savez certainement la traduction actuelle est en cours de révision. Vous qui êtes si soucieux du respect du à l'autorité ecclésiale, que ferez-vous lorsque vous devrez dire "ne nous laissez pas succomber à la tentation" ? Vous direz au fond de vous-même : "je ne vais pas prononcer ces mots introduits par des ridicules et des menteurs ?".
Si vous me lisiez au lieu de vaticiner, la réponse irait de soi pour vous. Il est évident que si les traductions officielles changent, j'adopterai les nouvelles, pour les mêmes raisons qu'aujourd'hui j'utilise celles en vigueur.
Encore une fois (mais à quoi bon se répéter face à qui préfère hurler, insulter, déformer plutôt que lire, comprendre et répondre), je n'ai pas de position de principe entre les deux versions françaises successives du Pater, reposant sur des choix contradictoires mais légitimes, faits à chaque fois par l'autorité légitime.
J'ai en revanche une position très claire sur qui refuse la légitimité de la version actuellement en vigueur. (Je signale à tous les ultramontains obsessionnels qu'elle est adoptée par Rome, voir le récent catéchisme de l'Église universelle dans sa version française)
jeanbaptiste a écrit :La réalité c'est que la traduction actuelle nie 20 siècles de développement théologique et de tradition. Ça c'est un fait. Mais au fond vous le savez, et c'est précisément la raison pour laquelle vous défendez cette traduction.
Là, je préfère ne pas commenter.
Je m'en tiens à espérer que, comme souvent, ce que vous écrivez dépasse votre pensée.