Traduction et liturgie

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jeanbaptiste
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Traduction et liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » ven. 08 juin 2012, 9:20

Un petit article intéressant de la Schola Saint Maur sur la traduction du chant de la Rencontre Mondiale des Familles qui a eut lieu à Milan :

http://www.scholasaintmaur.net/apprendr ... iturgique/
Dimanche dernier à Milan, Benoît XVI célébrait avec 800.000 personnes à Milan la VIIème rencontre mondiale des familles. A cette occasion, un livret de chant de belle facture fut distribué aux participants, dans lequel on pouvait trouvait en multilingue les traductions du formulaire de la messe célébrée, avec beaucoup de latin et de chant grégorien, en conformité avec les recommandations de la Congrégation du culte divin. Mais là n’est pas la question. La célébration s’est ouverte sur une hymne dédiée à cette rencontre internationale des familles. Oui des familles, vous avez bien lu…. Mais pas en Français…
Dans le refrain la référence à la famille est traduite par "tes amis"...

Ça ne vous rappelle pas tous les génériques pour enfants des dessins animés des années 80 / 90 cette sur-représentation des "amis" dans les chants liturgiques français ?

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François-Xavier
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Re: La france, la famille et la liturgie

Message non lu par François-Xavier » ven. 08 juin 2012, 14:34

Effectivement, le problème c'est que toutes les autres versions européennes (italien, anglais, allemand espagnol) de l'hymne en question mentionnent la famille - ce qui quand même un minimum pour la rencontre internationale des familles de Milan de dimanche dernier ... Sauf la française, qui probablement pour "inculturer" (???) ne le mentionne pas.

Faut il qu'on nous dise encore une fois avec aplomb que les traductions liturgiques françaises sont de qualité ?
Cela prouve ne tout cas qu'en France, le problème est profond, vraiment profond...
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Ça laisse quand même rêveur...
Dernière modification par François-Xavier le ven. 08 juin 2012, 14:51, modifié 1 fois.

jeanbaptiste
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Re: La france, la famille et la liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » ven. 08 juin 2012, 14:48

Nous savons que les traductions liturgiques sont plus que médiocres, ce qui m'étonne c'est que ce soit ENCORE le cas !

Pour le coup, cela m'inquiète quant à la révision en cours de la traduction de la liturgie... J'espère qu'elle est sauve de ce type d'idéologie !

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archi
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Re: La france, la famille et la liturgie

Message non lu par archi » ven. 08 juin 2012, 18:31

jeanbaptiste a écrit :Nous savons que les traductions liturgiques sont plus que médiocres, ce qui m'étonne c'est que ce soit ENCORE le cas !
Eh bien, l'état d'esprit qui a présidé à la production de ces traductions n'a pas disparu même s'il est en recul.

J'ai trouvé cette citation du P. Ephrem Yon (reprise par le Chanoine Rose dans une conférence à Fontgombault) qui indique bien, je pense, l'état d'esprit dans lequel les nouvelles traductions sont apparues:
P. Ephrem Yon O.S.B. a écrit :(...) on est passé d'un monde mystérique et sacré à un autre qui ne l'était plus. Et il ne l'était plus, non par simple inadvertance et incompétence, mais parce qu'on pensait, chez les créateurs de la liturgie, qu'une autre façon de prier devait être introduite dans l'Eglise. A la sensibilité traditionnelle de la liturgie, pénétrée de la conscience du mystère de Dieu et de sa transcendance, se substituait l'intention de promouvoir une liturgie de l'homme et de ses interrogations. Ce qui devait être présenté à Dieu, c'était l'inquiétude de l'homme face aux besoins du monde, et aussi en présence des contradictions d'une foi tiraillée entre le désir de croire et ses difficultés, ses incertitudes.
(source: "Autour de la question liturgique", abbaye ND de Fontgombault, 2001).

Lorsque j'entends ou que je lis beaucoup de prêtres et d'évêques actuellement en fonction, c'est exactement l'impression que me laisse leur discours: un humanisme à ras des pâquerettes, qui s'intéresse aux "interrogations" de l'homme en étant bien incapable de leur apporter des réponses, et qui sombre souvent dans l'infantilisme comme dans la traduction dont il est question ici.

Quoi d'étonnant?
Pour le coup, cela m'inquiète quant à la révision en cours de la traduction de la liturgie... J'espère qu'elle est sauve de ce type d'idéologie !
Si on prend la traduction anglaise, avant d'accepter celle en vigueur depuis quelques mois, le Vatican en avait refusé une première, apparemment parce qu'elle était trop restée dans l'esprit des années 70... On peut espérer qu'ils feront la preuve de la même vigilance pour le français.

Par contre, je me demande encore combien d'éons elle va mettre à apparaître. Depuis le temps qu'elle devrait être sortie... c'est l'arlésienne...

In Xto,
archi.
Nous qui dans ce mystère, représentons les chérubins,
Et chantons l'hymne trois fois sainte à la vivifiante Trinité.
Déposons maintenant tous les soucis de ce monde.

Pour recevoir le Roi de toutes choses, Invisiblement escorté des choeurs angéliques.
Alléluia, alléluia, alléluia.

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Re: La france, la famille et la liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » ven. 08 juin 2012, 22:15

Si les propositions sont aussi mauvaises que ce que nous voyons là, alors je crains qu'il faille attendre une génération supplémentaire !

Cela dit, j'espère me tromper complètement.

Emmanuel Lyasse
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par Emmanuel Lyasse » sam. 09 juin 2012, 15:50

Je suis toujours effrayé par la vigueur des réactions et des indignations que peut provoquer une bête question de traduction.

Je n'étais pas à Milan, n'ai pas de lueur particulière quant à ce cantique.
Mais j'observe seulement, à partir de ce qui est publié ici, que les versions allemande et anglaise sont beaucoup plus éloignées de l'italienne que la version française.

En Italien, littéralement: "Ta famille te rend grâce"
En Français, donc : "Nous tes amis, nous te rendons grâce"
En Allemand: "Toutes les familles te rendent grâce"
En Anglais: "Nous vous rendons grâce ensemble, Seigneur, pour toutes les familles"

Donc, dans la version française, il manque certes le mot famille, mais le sens est beaucoup plus proche. En Anglais et Allemand, le sens est totalement différent.

Il semble que dans tous les cas, on se soit plus soucié de la concordance avec la musique que du sens précis des paroles.

De deux choses l'une, donc. Soit ceux qui font circuler ce bobard ont une claire intention de nuire, soit ils sont ignorants de toute syntaxe au point de chercher à repérer, dans les différentes versions, un mot, sans souci aucun du sens.

Quoi qu'il en soit, il ne s'agit que d'un cantique, dont toutes les versions proposées sont manifestement orthodoxes.

Il est donc assez malsain de le prendre pour prétexte pour ramener de vieilles et odieuses polémiques sur les traductions liturgiques en français.

Il est particulièrement déplacé de resservir à ce propos l'odieux mensonge sur la traduction française du Pater, dont il a souvent été question sur ce forum, et encore récemment. Sur ce point, ceux qui connaissent le Latin et le Grec mentent délibérément, à des fins que j'ignore mais qui ne peuvent être catholiques. Ceux qui, ignorant les deux langues, répètent mécaniquement ce que disent les précédents feraient mieux de se taire, ou de les apprendre, et de découvrir ainsi ce que signifie ne nos inducas in tentationem, au lieu de mettre en accusation la prière que nous récitons en chaque messe célébrée en Français.

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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » sam. 09 juin 2012, 19:37

Laissons l'affaire de la famille, peut-être y-a-t-il exagération.

Mais venons aux polémiques que vous jugez "odieuses" et "mensongères".
Il est particulièrement déplacé de resservir à ce propos l'odieux mensonge sur la traduction française du Pater
Oui, "ne nos inducas in tentationem" signifie bien "ne nous conduis pas dans la tentation". Croyez-vous que les "critiques" de la traduction actuelle soit à ce point des buses en latin ?

Mais que dit l'Église depuis. deux millénaires ? Que Dieu ne peut pas tenter, cf. Siracide 15,11 : "Ne dis pas : C'est à cause du Seigneur que je me suis écarté, car ce qu'il déteste, il ne le fait pas" ; cf. Jacques : "Dieu ne tente personne" etc.

Toute la tradition de l'Église va en ce sens : "car Dieu n'induit pas lui-même mais souffre que nous soyons induits" (Augustin) par exemple.

Alors quoi ? Depuis des siècles on traduit par des formules qui retrouvent le sens : "ne nous laissez pas succomber à la tentation", "ne souffre pas que nous soyons induits en tentation" etc.

On peut donc s'étonner que les traducteurs qui n'ont pas hésité à prendre un certains nombre de libertés avec la lettre latine (pensez au "consubstantialem" ...) n'aient pas pris cette liberté là où ils étaient "traditionnel" de le faire !

Mais allons-y franchement, ils sont même allé plus loin ! Car si "ne nous induit pas en tentation" n'est pas une traduction acceptable, "ne nous soumet pas" est bien pire encore !

Car entre "induire" et "soumettre" c'est carrément la question de la liberté qui s'ajoute au problème.

Emmanuel Lyasse
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par Emmanuel Lyasse » dim. 10 juin 2012, 0:29

jeanbaptiste a écrit :
Il est particulièrement déplacé de resservir à ce propos l'odieux mensonge sur la traduction française du Pater
Oui, "ne nos inducas in tentationem" signifie bien "ne nous conduis pas dans la tentation". Croyez-vous que les "critiques" de la traduction actuelle soit à ce point des buses en latin ?
Parmi ceux qui parlent, en termes hélas souvent violents, d'erreur de traduction, ceux qui sont de bonne foi ne peuvent être que des "buses en latin", puisque ce n'est pas, quoi qu'il en soit, une erreur de traduction.
jeanbaptiste a écrit :Mais que dit l'Église depuis. deux millénaires ? Que Dieu ne peut pas tenter, cf. Siracide 15,11 : "Ne dis pas : C'est à cause du Seigneur que je me suis écarté, car ce qu'il déteste, il ne le fait pas" ; cf. Jacques : "Dieu ne tente personne" etc.

Toute la tradition de l'Église va en ce sens : "car Dieu n'induit pas lui-même mais souffre que nous soyons induits" (Augustin) par exemple.
Nous sommes évidemment d'accord.
Il est clair que le texte de l'Évangile pose problème et demande à être interprété.
A-t-on le droit de le déformer en le traduisant pour qu'il soit plus satisfaisant ? C'est une grave question.
On n'a pas le droit, en tout cas, de prétendre qu'une traduction qui est exacte est fausse.
Ceux qui affirment ne pouvoir dire "Ne nous soumets pas" et disent en latin "Ne nos inducas" sont soit ridicules, soit des menteurs.

jeanbaptiste a écrit :Alors quoi ? Depuis des siècles on traduit par des formules qui retrouvent le sens : "ne nous laissez pas succomber à la tentation", "ne souffre pas que nous soyons induits en tentation" etc.
On l'a fait. On ne le fait plus (je vous rappelle que les traductions officielles en Italien, Allemand et Anglais sont également littérales. Ce n'est pas un problème français). On le refera peut-être un jour. Mais ce n'est pas une raison pour imputer à péché à l'Église de choisir aujourd"hui de répéter exactement les paroles que l'Évangile nous donne pour celles de Notre Sauveur.
jeanbaptiste a écrit :On peut donc s'étonner que les traducteurs qui n'ont pas hésité à prendre un certains nombre de libertés avec la lettre latine (pensez au "consubstantialem" ...) n'aient pas pris cette liberté là où ils étaient "traditionnel" de le faire !
Cela n'est pas exact (c'est une autre polémique contre l'Église qui n'a pas lieu d'être). "De même nature" traduit aussi exactement que possible le grec homoousios, dont consubstantialis est en latin une transcription approximative.
jeanbaptiste a écrit :Mais allons-y franchement, ils sont même allé plus loin ! Car si "ne nous induit pas en tentation" n'est pas une traduction acceptable, "ne nous soumet pas" est bien pire encore !

Car entre "induire" et "soumettre" c'est carrément la question de la liberté qui s'ajoute au problème.
Je pense que vous vous trompez.
D'abord, inducere ne signifie induire (mot inusité en français courant, hors l'expression induire en erreur) mais conduire.
La traduction littérale serait (comme vous le dites plus haut) "Ne nous conduis pas dans la tentation" ou, mieux sans doute "Ne nous mène pas à la tentation".
Notre "Ne nous soumets pas" est déjà une atténuation, qui me semble laisser plus de place au libre arbitre. Il faut bien sûr prendre cela au sens de soumettre à une épreuve.
Il reste que ce n'est pas Dieu qui soumet. Mais ça, encore une fois, ce n'est pas une question de traduction, puisque c'est le texte même de l'Évangile qui fait de Dieu le sujet du verbe.

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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » dim. 10 juin 2012, 9:42

Ceux qui affirment ne pouvoir dire "Ne nous soumets pas" et disent en latin "Ne nos inducas" sont soit ridicules, soit des menteurs.
Déjà je le prend pour moi, car j'affirme cela et je ne me crois ni ridicule ni menteur. Mais je ne suis pas le seul à être ridicule et menteur.

Donc saint Augustin est un menteur ? Bossuet est un menteur ? Tous les catholiques jusqu'au XXe siècles sont des menteurs qui, dans les traductions pour les missels donnaient tous, dans tous les pays, "ne nous laisse pas succomber" ou équivalent ?

1. Il y a une tradition dans tous les pays catholiques de ne pas traduire ici littéralement le latin.
Notre "Ne nous soumets pas" est déjà une atténuation, qui me semble laisser plus de place au libre arbitre. Il faut bien sûr prendre cela au sens de soumettre à une épreuve.
Pardonnez-moi, mais le sens premier de soumettre c'est l'assujettissement :
1. Imposer dépendance, obéissance, par la contrainte, par la force, à quelqu'un. Synon. assujettir.
2. Je m'étonne tout de même que nos traducteurs qui ont justifiés des écarts sérieux avec la lettre latine au nom de la "pastorale" et de l'adaptation au monde d'aujourd'hui se soient contentés d'une traduction littérale là où il est traditionnel de ne pas le faire pour ces raisons "pastorales" justement !
"De même nature" traduit aussi exactement que possible le grec homoousios, dont consubstantialis est en latin une transcription approximative.
On croit rêver...

Vous savez très bien que ousia se traduit par "substance", dire que "consubstantiel" est une approximation est la preuve soit de votre mauvaise foi, soit de votre incompétence en ces sujets.

De fait, il est vrai que le mot nature peut traduire ousia. et d'ailleurs homoousios a posé problème pour cette raison justement. En effet, pour faire vite, nous pourrions dire que la distinction entre nature et substance n'existaient pas, il n'y avait que l'ousia. Avec Nicée la disctinction entre "nature" et "substance" pourra se faire.

Et se fera, va se développer la distinction en théologie entre nature et substance afin de faire disparaître l'ambiguité et affiner la perception du Mystère Trinitaire.


En tout cas dire que "consubstantiel" est une traduction approximative est faux !

Franchement, vous êtes gonflé. Qui demande la révision des traductions ? Le Magistère. Les cardinaux et le pape seraient-il donc des gens odieux, menteurs et ridicules ?

Et ces insultes à quel titre les proférez-vous ? Au nom du respect de la lettre latine... On croit rêver ! Les traducteurs du missel actuel n'ont pas respecté la lettre quasiment en tout point sauf là où ne pas la respecter est traditionnel !

Comme vous le savez certainement la traduction actuelle est en cours de révision. Vous qui êtes si soucieux du respect du à l'autorité ecclésiale, que ferez-vous lorsque vous devrez dire "ne nous laissez pas succomber à la tentation" ? Vous direz au fond de vous-même : "je ne vais pas prononcer ces mots introduits par des ridicules et des menteurs ?".

La réalité c'est que la traduction actuelle nie 20 siècles de développement théologique et de tradition. Ça c'est un fait. Mais au fond vous le savez, et c'est précisément la raison pour laquelle vous défendez cette traduction.

Emmanuel Lyasse
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par Emmanuel Lyasse » dim. 10 juin 2012, 17:29

Cher Jeanbaptiste,

Une remarque d'ordre général: si vous me lisiez totalement, calmement, au lieu de prendre quelques mots hors contexte, nous éviterions bien des énervements sans doute inutiles.

jeanbaptiste a écrit :
Ceux qui affirment ne pouvoir dire "Ne nous soumets pas" et disent en latin "Ne nos inducas" sont soit ridicules, soit des menteurs.
Déjà je le prend pour moi, car j'affirme cela et je ne me crois ni ridicule ni menteur. Mais je ne suis pas le seul à être ridicule et menteur.
Je ne le disais pas pour vous. Je regrette que vous vous sentiez visé
jeanbaptiste a écrit :Donc saint Augustin est un menteur ? Bossuet est un menteur ? Tous les catholiques jusqu'au XXe siècles sont des menteurs qui, dans les traductions pour les missels donnaient tous, dans tous les pays, "ne nous laisse pas succomber" ou équivalent ?
Vous ne me lisez pas, et vociférez sans m'avoir lu.
Saint Augustin donne la juste interprétation du Pater. Mais quand il célébrait, ou priait en privé, que disait-il à votre avis ? Ne nos inducas, comme tout le monde;
L'ancienne traduction française n'était pas une traduction mais une (juste !) interprétation. Pour les autres langues, je n'en sais rien: je n'ai pas les traductions usuelles (il n'y en avait pas alors d'officielles à proprement parler) des siècles passés. J'observe seulement que la traduction anglaise d'aujourd'hui (do not lead us) semble ancienne, puisque Dieu y est tutoyé.
jeanbaptiste a écrit :1. Il y a une tradition dans tous les pays catholiques de ne pas traduire ici littéralement le latin.
Il faut prendre garde à ne pas abuser du mot tradition, lourd de sens. Disons plutôt habitude. On a rompu avec cette habitude pour revenir à la fidélité au texte. C'est un choix, fait par l'autorité légitime. Cela semble être la tendance encore plus aujourd'hui qu'alors, si j'en juge par les arguments romains à propos du pro multos de la consécration.

Encore une fois (mais à quoi bon me répéter ?), cela ne signifie pas que ceux qui dans les siècle passés faisaient autrement avaient tort.
Mais cela implique que ceux qui hurlent aujourd'hui à la mauvaise traduction, voire à l'hérésie, ont tort, et gravement tort.
jeanbaptiste a écrit :
Notre "Ne nous soumets pas" est déjà une atténuation, qui me semble laisser plus de place au libre arbitre. Il faut bien sûr prendre cela au sens de soumettre à une épreuve.
Pardonnez-moi, mais le sens premier de soumettre c'est l'assujettissement :
1. Imposer dépendance, obéissance, par la contrainte, par la force, à quelqu'un. Synon. assujettir.
Pardonnez moi à votre tour, mais ce n'est pas vrai. Vous confondez sens premier et premier sens donné par le dictionnaire. Sens premier: mettre (mitterre) en dessous, d'où bien des sens différents
Il est évident que ce ne peut être ce sens là. Il faut avoir bien peu de confiance en l'Église pour croire qu'elle puisse demander aux fidèles francophones d'employer soumettre à ce sens là. Peut-être est-ce le problème de fond, d'ailleurs.
jeanbaptiste a écrit :
"De même nature" traduit aussi exactement que possible le grec homoousios, dont consubstantialis est en latin une transcription approximative.
On croit rêver...

Vous savez très bien que ousia se traduit par "substance", dire que "consubstantiel" est une approximation est la preuve soit de votre mauvaise foi, soit de votre incompétence en ces sujets.
Croyez bien que je suis navré de devoir vous contredire. Mais les langues grecque et latine sont ce qu'elles sont, et il n'est pas en mon pouvoir de les changer, fût-ce pour éviter vos foudres.

homoousios est en grec un participe présent, d'un verbe composé de eimi, je suis, et du préfixe homo, qui exprime l'identité totale
Il signifie dons "étant exactement semblable".

Il ne pouvait être traduit exactement en latin, pour deux raisons
1) Le verbe être (sum, je suis) n'a pas en latin de participe présent
2) Il n'y a pas non plus d'équivalent à homo

D'où le recours à des approximations (ce n'est pas moi qui suis "gonflé", c'est la langue latine qui ne l'est pas assez. Prenez vous en à elle)

1) L'utilisation de substare. Stare signifie se tenir debout. Sub évoque ici quelque chose comme une antériorité. C'est donc pris comme ersatz de esse. Participe présent substans. Comme le latin préfère dans ces cas là un adjectif, on forme substantialis
2) Le préfixe cum, qui signifie seulement avec, nettement moins fort que homo. Ça donne consubstantialis, une approximation faute de mieux, ne vous en déplaise.

Le Moyen-Âge, qui n'avait pas la même conception que les IVe-Ve siècle du respect de la langue latine, a créé essens comme participe présent du verbe être. D'où essentia, transcrit en français par essence, pour traduire ousia, le nom qui était dérivé en grec d'ousios.

Il n'y a donc pas à distinguer la substance et l'essence.
On pourrait traduire homoousios par "de même essence". Mais, le sens courant du mot français moderne prêterait pour le moins à confusion.
C'est donc tout à fait sainement qu'on a choisi "de la même nature", qui signifie à peu près exactement la même chose: la façon dont on est en soi, hors de toute contingence.
Au cas où, ce qu'à Dieu ne plaise, cette dernière proposition vous donnerait envie de hurler à nouveau, je vous signale que de très nombreux textes médiévaux emploient la formule "natura sive essentia", ce qui indique que pour leurs auteurs déjà les deux mots étaient équivalents. voire les trois termes en cause

Par exemple, le quatrième concile du Latran, œcuménique, déclare

Firmiter credimus et simpliciter confitemur, quod unus solus est verus Deus, aeternus, immensus et incommutabilis, incomprehensibilis omnipotens et ineffabilis, Pater et Filius et Spiritus Sanctus: tres quidem personae, sed una essentia, substantia seu natura simplex omnino

Allez-vous l'accuser, lui aussi, d'hérésie ?
jeanbaptiste a écrit : De fait, il est vrai que le mot nature peut traduire ousia. et d'ailleurs homoousios a posé problème pour cette raison justement. En effet, pour faire vite, nous pourrions dire que la distinction entre nature et substance n'existaient pas, il n'y avait que l'ousia. Avec Nicée la disctinction entre "nature" et "substance" pourra se faire.

Et se fera, va se développer la distinction en théologie entre nature et substance afin de faire disparaître l'ambiguité et affiner la perception du Mystère Trinitaire.


En tout cas dire que "consubstantiel" est une traduction approximative est faux !
Encore une fois, il n'est pas en mon pouvoir, ni même en celui du Magistère, de changer les langues latine et grecque pour vous satisfaire.


jeanbaptiste a écrit :Franchement, vous êtes gonflé. Qui demande la révision des traductions ? Le Magistère. Les cardinaux et le pape seraient-il donc des gens odieux, menteurs et ridicules ?

Et ces insultes à quel titre les proférez-vous ? Au nom du respect de la lettre latine... On croit rêver ! Les traducteurs du missel actuel n'ont pas respecté la lettre quasiment en tout point sauf là où ne pas la respecter est traditionnel !

Comme vous le savez certainement la traduction actuelle est en cours de révision. Vous qui êtes si soucieux du respect du à l'autorité ecclésiale, que ferez-vous lorsque vous devrez dire "ne nous laissez pas succomber à la tentation" ? Vous direz au fond de vous-même : "je ne vais pas prononcer ces mots introduits par des ridicules et des menteurs ?".
Si vous me lisiez au lieu de vaticiner, la réponse irait de soi pour vous. Il est évident que si les traductions officielles changent, j'adopterai les nouvelles, pour les mêmes raisons qu'aujourd'hui j'utilise celles en vigueur.
Encore une fois (mais à quoi bon se répéter face à qui préfère hurler, insulter, déformer plutôt que lire, comprendre et répondre), je n'ai pas de position de principe entre les deux versions françaises successives du Pater, reposant sur des choix contradictoires mais légitimes, faits à chaque fois par l'autorité légitime.

J'ai en revanche une position très claire sur qui refuse la légitimité de la version actuellement en vigueur. (Je signale à tous les ultramontains obsessionnels qu'elle est adoptée par Rome, voir le récent catéchisme de l'Église universelle dans sa version française)
jeanbaptiste a écrit :La réalité c'est que la traduction actuelle nie 20 siècles de développement théologique et de tradition. Ça c'est un fait. Mais au fond vous le savez, et c'est précisément la raison pour laquelle vous défendez cette traduction.
Là, je préfère ne pas commenter.
Je m'en tiens à espérer que, comme souvent, ce que vous écrivez dépasse votre pensée.

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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par Invité » lun. 11 juin 2012, 3:42

En son temps, Etienne Gilson avait écrit, dans La société de masse et sa culture, un texte intelligent et très lisible sur les réels problèmes soulevés par la traduction française du Credo. Nul ne perdra pas son temps à lire ses quelques pages.

jeanbaptiste
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par jeanbaptiste » lun. 11 juin 2012, 7:02

Une remarque d'ordre général: si vous me lisiez totalement, calmement, au lieu de prendre quelques mots hors contexte, nous éviterions bien des énervements sans doute inutiles. (...) (mais à quoi bon se répéter face à qui préfère hurler, insulter, déformer plutôt que lire, comprendre et répondre), je n'ai pas de position de principe entre les deux versions françaises successives du Pater
Voulez-vous que je rappelle votre introduction sur ce fil ?
Soit ceux qui font circuler ce bobard ont une claire intention de nuire, soit ils sont ignorants de toute syntaxe au point de chercher à repérer, dans les différentes versions, un mot, sans souci aucun du sens.
Il est donc assez malsain de le prendre pour prétexte pour ramener de vieilles et odieuses polémiques sur les traductions liturgiques en français.
Sur ce point, ceux qui connaissent le Latin et le Grec mentent délibérément, à des fins que j'ignore mais qui ne peuvent être catholiques.
Les torts sont partagés il me semble, non ?

En ce qui concerne votre réponse, rapidement :
Pardonnez moi à votre tour, mais ce n'est pas vrai. Vous confondez sens premier et premier sens donné par le dictionnaire. Sens premier: mettre (mitterre) en dessous, d'où bien des sens différents
Vous dites souvent à une personne qu'il est soumit à quelqu'un pour dire qu'il se situe sous ses pieds ?

Vous exigez que je vous lise bien, d'accord, mais faites de même. Qu'ai-je dit ? Ceci : «2. Je m'étonne tout de même que nos traducteurs qui ont justifiés des écarts sérieux avec la lettre latine au nom de la "pastorale" et de l'adaptation au monde d'aujourd'hui se soient contentés d'une traduction littérale là où il est traditionnel de ne pas le faire pour ces raisons "pastorales" justement !
»


Au sens usuel, soumettre signifie "obliger", "contraindre". Vous le savez très bien, pourquoi le nier ?
Il n'y a donc pas à distinguer la substance et l'essence.
Je ne vais pas entrer dans l'histoire des concepts de nature, d'essence et de substance, dans la différence entre l'homoiousios d'Arius et le homoousios de Nicée. Pourquoi, au début, homoousios posait problème à ce qui combattaient l'arianisme eux-même, précisément parce que l'essence désignait à l'époque ces deux choses que nous distinguons aujourd'hui : la nature et la substance. Je vous renvoie à la première partie de la Trinité de Lonergan pour ça.

Je rappelle au passage qu'une traduction littérale de homoousios en français serait, aujourd'hui : de même essence. Sachant que nature => phusis, essence => ousia et substance => hupostasis.

Gilson disait : « deux êtres de même nature ne sont pas nécessairement de même substance »

Alors, oui, sur le plan divin, dire que Jésus est de même nature que le Père, ou de même substance, c'est égal. Mais la distinction entre nature et substance, qui est effective ailleurs, doit être conservée afin de savoir de quoi nous parlons.

Nous avons une tradition qui consiste à dire "consubstantiel" afin d'exprimer clairement que nous avons affaire au même Dieu en deux personnes, et non pas deux dieux en deux personnes, ce que le terme de nature peut laisser sous-entendre (la nature humaine partagée par tous les hommes etc.).

Vous n'arrêtez pas de dire que je ne vous ai pas lu, mais enfin, je peux vous retourner la remarque : où ai-je dit que le Pater et le Credo étaient hérétiques ? Je ne l'ai jamais dit.

Qu'ai-je dit ?

Nous avons une tradition de traduction du Pater, et une distinction traditionnelle en théologie entre nature et substance, qui permettent de lever clairement des ambiguïtés. Il est regrettable que cela ait été balayé d'un revers de la main.

Deuxième point :

Le Magistère a demandé la révision des traductions liturgiques, et cela concerne la France, le travail est en cours. Si les traductions étaient bonnes, cette instruction n'aurait pas lieu d'être : Liturgiam authenticam.

On ne peut pas faire comme si cela n'existait pas !

Car nous nous sommes étripés sur le Pater et le Credo, mais le problème est bien plus large (hymnes, preces, oraisons non traduites du PTP ; choix du psautier œcuménique plutôt que la néo-vulgate ; omissions dans l'ordo etc.)

Le livre de Michel Dangoisse, les mots de la messe, me semble très instructif, quoique parfois trop dur par endroit, selon moi.

Mais je vais vous dire qu'elle est mon opinion sur le sujet : je ne suis pas de ceux qui disent que la traduction actuelle est hérétique, ou que ses traducteurs l'étaient. Je ne le crois pas du tout. Je crois même qu'ils étaient habités de très bonnes intentions. En revanche on ne peut nier qu'il y a dans cette traduction une volonté de mettre de côté tout ce qui pouvait "sentir la scolastique" ou même "la Tradition", au nom de la "pastorale". Ce qui est triste.

Le problème de fond des traductions et des "adaptations" des années 70 c'est qu'elles sont trop marquées par l'esprit de ce temps, jusqu'à porter des accents sur des points qui ne sont pas aussi accentués dans le missel romain en latin (qui est la norme il faut le rappeler).

Emmanuel Lyasse
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par Emmanuel Lyasse » lun. 11 juin 2012, 11:48

Clarifions. Sur le Pater, je n'ai jamais dit qu'il était interdit de préférer l'ancienne version française à la nouvelle. La discussion est parfaitement légitime. Ce qui décidément ne l'est pas (mais vous ne le faites pas) c'est de prétendre qu'il s'agit d'une erreur de traduction.

Sur soumettre, passons.

Sur le credo, il vaut mieux en rester là. Les philosophes et les théologiens sont très forts pour créer des distinctions de sens entre mots ayant manifestement le même (voir l'opposition à la mode entre éthique et morale). Doit-on les suivre systématiquement ? Vaste question.

Un mot sur ceci
Nous avons une tradition qui consiste à dire "consubstantiel" afin d'exprimer clairement que nous avons affaire au même Dieu en deux personnes, et non pas deux dieux en deux personnes, ce que le terme de nature peut laisser sous-entendre (la nature humaine partagée par tous les hommes etc.).
Je ne crois pas que homoousios exprime l'union entre les personnes de Trinité. Il définit l'essence (ou la substance, ou la nature, pour parler comme Latran IV) divine du Fils comme totalement semblable à celle du père (en opposition à Arius, qui en faisait apparemment une créature. Les homéistes d'après Nicée, ça semble encore plus compliqué)
Donc consubstantialis non plus, qui le transcrit. L'unité entre le Père et le Fils, qui ne sont pas deux dieux distincts est exprimée par la première proposition "Je crois en un seul Dieu".


J'en viens, après vous, à la question de la révision des traductions. Il est fort juste de les réviser régulièrement, car aucune traduction n'est parfaite, et toutes sont potentiellement perfectibles.

Dans le cas des traductions liturgiques des années 1970, il y a deux raisons supplémentaires
1) Elles ont été faites très vite (normal: il y avait urgence), et peuvent certainement être améliorées.
2) La doctrine alors tout à fait romaine et officielle était que les traducteurs pouvaient adapter le texte à ce qu'ils jugeaient la réalité culturelle. Ils ne s'en sont pas privés. Aujourd'hui, la doctrine a changé, et Rome demande des traductions aussi littérales.
Il est faux, scandaleusement faux, de faire croire comme certains le font que c'est uniquement un problème français. Voir la querelle d'Allemands en cours sur le "pro multis", dont il est question ici
http://chiesa.espresso.repubblica.it/ar ... 50236?fr=y

Je signale que le (2) s'il devrait (ce n'est qu'un pronostic) conduire à la disparition de "Prions ensemble au moment…" et à la rectification du "repas du Seigneur", va au contraire dans le sens de la nouvelle version.

Quand le pape dit "la traduction de "pro multis" par "pour tous" n’a pas été une pure traduction, mais plutôt une interprétation, qui était et qui reste bien motivée mais qui est une explication et donc quelque chose de plus qu’une traduction.", pour la refuser, il semble que le même raisonnement doive s'appliquer à "ne nous laisse pas succomber".

On peut discuter de ces choses là à l'infini. Mais ce qui me semble inacceptable est de prendre prétexte de ces discussions pour remettre en question l'autorité de l'Église.

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François-Xavier
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Re: La France, la famille et la liturgie

Message non lu par François-Xavier » mar. 12 juin 2012, 15:41

Emmanuel Lyasse a écrit :Je suis toujours effrayé par la vigueur des réactions et des indignations que peut provoquer une bête question de traduction.

Je n'étais pas à Milan, n'ai pas de lueur particulière quant à ce cantique.
Mais j'observe seulement, à partir de ce qui est publié ici, que les versions allemande et anglaise sont beaucoup plus éloignées de l'italienne que la version française.

En Italien, littéralement: "Ta famille te rend grâce"
En Français, donc : "Nous tes amis, nous te rendons grâce"
En Allemand: "Toutes les familles te rendent grâce"
En Anglais: "Nous vous rendons grâce ensemble, Seigneur, pour toutes les familles"

Donc, dans la version française, il manque certes le mot famille, mais le sens est beaucoup plus proche. En Anglais et Allemand, le sens est totalement différent.

Il semble que dans tous les cas, on se soit plus soucié de la concordance avec la musique que du sens précis des paroles.

De deux choses l'une, donc. Soit ceux qui font circuler ce bobard ont une claire intention de nuire, soit ils sont ignorants de toute syntaxe au point de chercher à repérer, dans les différentes versions, un mot, sans souci aucun du sens.

Quoi qu'il en soit, il ne s'agit que d'un cantique, dont toutes les versions proposées sont manifestement orthodoxes.
Oui c'est bien ça. C'est l'hymne de la 7ème rencontre des familles, let l'adaptation française est la seule à ne pas comporter le mot "famille" au singulier ou au pluriel. Il y a tout de même de quoi s'étonner. Légitimement.

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