Sur le mariage civil

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Théophane
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Re: Divorce

Message non lu par Théophane » lun. 23 janv. 2012, 15:27

Au second semestre j'enseigne le droit civil de la famille, j'espère que cette loi me donnera des arguments pour vanter les bienfaits du mariage. :-D
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
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Re: Divorce

Message non lu par lmx » lun. 23 janv. 2012, 17:25

ça serait l'occasion d'aborder l'idée que le mariage reste une institution et que ce n'est pas encore un simple contrat comme on veut de plus en plus le croire.

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Re: Divorce

Message non lu par Théophane » lun. 23 janv. 2012, 17:32

Tout à fait, d'ailleurs c'est cela qui fait que le mariage a plus de valeur que d'autres formes d'union reconnues par le droit civil, comme le concubinage ou le PaCS. Le mariage a une utilité sociale nettement plus évidente.
« Être contemplatifs au milieu du monde, en quoi cela consiste-t-il, pour nous ? La réponse tient en quelques mots : c’est voir Dieu en toute chose, avec la lumière de la foi, sous l’élan de l’amour, et avec la ferme espérance de le contempler face à face au Ciel. »
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Le divorce

Message non lu par MB » ven. 20 déc. 2013, 2:42

Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Avé

Je suis en train de relire un essai qu'Allan Bloom, le grand intellectuel et pédagogue américain, avait écrit en 1986 : L'Âme désarmée, essai sur le déclin de la culture générale (en anglais : The Closing of the American Mind). Ce livre est devenu un classique et n'a pas vieilli ; en gros, c'est une critique très vive de la société post-moderne et un plaidoyer pour l'enseignement de la grande culture à travers le respect des classiques.
Il faut savoir que Bloom se signalait par un sens incroyable de la pédagogie ; il parle, dans ce livre, comme professeur qui a vu passer des milliers d'étudiants, et qui s'est intéressé à eux. Le passage que j'ai trouvé - qu'il faut absolument diffuser, et qui constitue un argumentaire aussi magnifique que pathétique - prend d'autant plus de valeur quand on sait qu'il n'était pas catholique et que sa vie privée, semble-t-il, ne correspondait pas tout à fait aux idéaux chrétiens. Voilà ce qu'il dit sur les étudiants divorcés qu'il a eus à suivre...
On peut répéter tant qu’on veut aux enfants que leurs parents ont le droit de vivre leur vie, que le temps qu’ils leur accordent vaut par la qualité et non par la quantité, que leurs parents les aiment même s’ils doivent se séparer d’eux, ils ne croient rien de tout cela. Ils pensent qu’ils ont droit à une attention totale et que leurs parents doivent vivre pour eux. Il n’existe aucun moyen de leur faire admettre qu’il en soit autrement, et tout écart par rapport à cette norme produit inévitablement chez eux de l’indignation et un sentiment indéracinable d’avoir subi une injustice. A cet égard, la séparation volontaire des parents est pire que leur mort, précisément parce qu’elle est volontaire. Le spectacle de volontés capricieuses, la constatation que celles-ci manquent de se diriger vers le bien commun, le fait qu’elles pourraient être différentes mais ne le sont pas, toutes ces impressions-là constituent la vraie source de la guerre de tous contre tous. Dès lors, les enfants redoutent de dépendre de la volonté des autres, et cette peur se combine avec le besoin de maîtriser cette volonté : tel est le résultat de ce qu’ils ont observé dans le lieu même où ce serait le contraire qu’ils seraient censés apprendre. On nous objectera que beaucoup de familles restent réunies, mais sont malheureuses. Objection non pertinente : l’enseignement qui importe, pour les enfants, c’est de voir qu’il existe entre deux êtres humains un lien indissoluble, pour le meilleur et pour le pire.
(…)
Un professeur de lettres ne peut s’empêcher de constater quelques handicaps particuliers chez les étudiants, de plus en plus nombreux, dont les parents sont divorcés. Je ne doute pas le moins du monde qu’ils réussissent aussi bien que les autres dans toutes sortes de disciplines spécialisées, mais je trouve qu’ils ne sont pas aussi ouverts à l’étude sérieuse de la philosophie et de la littérature que ne le sont certains autres. Pour autant que je puisse en juger, c’est parce qu’ils sont moins désireux de scruter le sens de leur vie, moins disposés à se défaire des opinions reçues. Pour parvenir à vivre avec l’expérience chaotique qu’ils ont intériorisée, ils ont tendance à se construire des cadres rigides de comportement : ceci est juste, cela est faux, il faut agir de la sorte. Leur conversation abonde en platitudes désespérées sur l’autodétermination, sur le respect des droits et des décisions des autres, sur le besoin de mettre en œuvre ses valeurs individuelles et de tenir ses engagements, etc. Tout cela n’est qu’une mince écume sur un océan de rage, de doute et de peur. Souvent, ces jeunes gens manquent d’audace intellectuelle parce que la confiance en l’avenir, si naturelle à la jeunesse, leur fait défaut. L’appréhension de la solitude, la crainte de s’attacher à quelqu’un, ces deux angoisses contradictoires occultent toutes leurs perspectives.
D’habitude, les jeunes gens sont prêts à larguer leurs façons de penser contradictoires pour se rallier à une idée nouvelle qui les excite : ils ont peu de choses à perdre. Bien que ce ne soit pas vraiment une démarche philosophique, car ils n’ont pas conscience de l’importance des enjeux, ils peuvent, durant cette période, faire l’expérience du non-conformisme et acquérir des façons de penser plus profondes et un peu de l’apprentissage qui les accompagne.
Mais chez les étudiants dont je parlais à l’instant, une bonne part de l’enthousiasme, au sens littéral du terme, s’est éteinte et a été remplacée par des moyens mécaniques de se protéger. De même, la confiance ouverte dans l’amitié, qui est un élément de la quête du bien dont ils ont fait récemment la découverte, reste quelque peu entravée, embryonnaire : c’est que chez eux, l’éros dont parle Glaucon, celui qui incite à la découverte de la nature, a subi des lésions plus graves que chez la plupart des autres jeunes gens. Certes, ces garçons et ces filles peuvent faire de leur désarroi au milieu de l’univers le thème de leurs réflexions et de leurs études ; mais c’est là un travail triste et dangereux, et ils sont de tous mes étudiants ceux qui m’inspirent le plus de pitié. Car ce sont, en vérité, des victimes. »
A diffuser, donc !
MB
Dernière modification par MB le ven. 20 déc. 2013, 14:10, modifié 1 fois.

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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par Gaudeamus » ven. 20 déc. 2013, 13:39

Kaire

Merci pour ce texte !

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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par zelie » ven. 20 déc. 2013, 19:51

Si vous me permettez une remarque,

Deuxième partie (après le (...)),
paragraphe 2,
fin de la ligne 3 : j'ai l'impression que vous avez sauté un mot après "de penser plus profondes et un peu.."

du coup je suis un peu frustrée sur la forme...

sur le fond, je ne suis pas d'accord sur tout, mais je ne suis pas non plus en désaccord complet sur aucun point; tout est affaire d'effet loupe ou pas...
L’intégrisme est un refuge pour la misère parce qu’il offre un sursaut d’espérance à ceux qui n’ont rien.
Que leur mal disparaisse, et l’intégrisme perdra ses troupes. L'Abbé Pierre
Vis vraiment chaque instant. Fais-le meilleur. Aime-le. Chéris-le. Fais-le beau, bon pour toi-même et pour Ton DIEU. Ne néglige pas les petites choses. Fais-les avec Moi, doucement. Fais de ta maison un Carmel où Je puisse Me reposer. Jésus, Premier Cahier d'Amour

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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par MB » jeu. 26 déc. 2013, 17:16

zelie a écrit :Si vous me permettez une remarque,

Deuxième partie (après le (...)),
paragraphe 2,
fin de la ligne 3 : j'ai l'impression que vous avez sauté un mot après "de penser plus profondes et un peu.."

du coup je suis un peu frustrée sur la forme...

sur le fond, je ne suis pas d'accord sur tout, mais je ne suis pas non plus en désaccord complet sur aucun point; tout est affaire d'effet loupe ou pas...
Chère Zélie,

J'ai vérifié, c'est bien le texte. Avec quelles parties êtes-vous en accord ou non ?

Bien à vous, et joyeux Noël (avec du retard !)
MB

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zelie
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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par zelie » ven. 27 déc. 2013, 16:09

Cher MB,
merci beaucoup d'avoir vérifié la phrase. Au temps pour moi, qui pensait au départ qu'il y avait deux façons de comprendre cette phrase. Mais bon...

Pour répondre à votre question, je trouve le raisonnement pas faux au départ, mais un peu à l'emporte pièce.
Si je vous répondais en démontant le texte phrase par phrase, c’est vrai que je ne ferais qu’opposer l’expérience de l’auteur à une autre vie d’expérience au coté des jeunes, et dans ces deux cas la réserve est la même : à publier un tel article, il aurait été intéressant que le postulat de départ de l’auteur soit soutenu par des enquêtes sociologiques, ou toute autre démarche scientifique pouvant par sa rigueur valider la position initiale. Sinon, ça reste, comme l’avis que je pourrais donner, qu’un simple avis. Qu’il soit un grand professeur ou non, qu’il ait 40 ans d’expérience ou non. Et en matière de professeurs, (de quoi que ce soit, même de philosophie), puisque c’est mon milieu bien enfermant, je peux vous assurer que tous, après 40 ans, ne voient pas toujours les choses ainsi.

Je vois où vous voulez gentiment en venir avec ce texte : vous voulez rassurer, car cet auteur n’est pas du tout chrétien et pourtant finit par penser comme certains chrétiens très attachés à certaines valeurs fondamentales ; la famille, le devoir de parents, etc… Et ce sont de bonnes, de très bonnes valeurs, avec lesquelles je suis aussi en complet accord. Je conçois aussi qu’en des temps aussi controversés sur les valeurs ci-dessus on ressorte un tel texte, qui donne par son auteur anti-chrétien une légitimité à une position trop souvent décrite comme typiquement chrétienne et anti-sociale, surtout depuis le mois de mai dernier. Et je suis aussi d’accord avec vous sur les autres points ayant trait à la famille ; moi aussi j’ai prié en août 2012 pour la famille à l’appel des évêques, pour moi aussi le fait de faire un enfant pour soi au lieu de le faire pour lui-même en lui offrant les meilleures conditions possibles me heurte. Moi aussi, le « retournement de veste » de l’intelligentsia scientifique et médicale qui claironne depuis un an que tout se vaut en matière de famille me laisse pantoise alors que jusqu’à hier dans tous les cours de psycho on trouvait « essentiels » le rôle de la mère et du père dans le développement du jeune enfant !

Ceci étant posé, venons-en à l’époque du texte. En 1986, en France ou ailleurs dans le monde occidental, s’opposait grosso modo deux franges idéologiques : les suiveurs des années 70, (encore fraîches dans les esprits), « progressistes », pour lesquels faire un enfant sans être marié et recourir à l’avortement constituaient des progrès indéniables en matière de liberté individuelle, et les « tradis / réacs » (et je passe des épithètes), plus axés famille et baptèmes de toutes obédiences.
Ces deux positions, dans l’esprit général, n’étaient pas autant reliées à des dénigrements connotés religieusement tels que décrits aujourd’hui ; des chrétiens avortaient sans complexes, des athées descendants de communards croyaient dur comme fer à la famille. Le dénigrement « chrétien pratiquant = extrémiste qui gêne la société, anti-social, hors-la-loi », est une notion assez jeune, rondement menée par les médias et les peoples, auquel les politiques ont tous bien emboité le pas, popularité oblige. Tout au plus le chrétien pratiquant de l’époque était un doux dingue, un « has been » dont on se moquait parce qu’il s’agenouillait devant des statues de plâtre (oui, c’est du vécu !). Soutenir à l’époque une valeur comme celle de la famille qui ne divorce pas n’avait rien d’exotique ni de chrétien « extrémiste », même si c’était regardé avec hauteur de la part de certains ; au fond des foyers, pour une large part de la population française, c’était de l’ordre de l’atavisme. Un couple qui divorçait, même si ça devenait courant, était regardé avec compassion et on s’inquiétait pour les enfants. Il faut dire que les mentalités étaient encore largement imprégnées de valeurs tournant autour de la famille et de la réussite des enfants par les études, tout simplement parce que la génération des 40-60 ans est souvent la génération dominante dans les familles.
Bref, un auteur non-chrétien imbibé de valeurs « réacs », ça pouvait se voir assez facilement (et ouf ! ça se voit encore aujourd’hui). Une critique tellement âpre du divorce aussi ; aujourd’hui, les choses ont évolué de telle façon qu’un tel texte se teindrait automatiquement d’une intrépidité un peu déplacée, suicidaire idéologiquement. Mais à l’époque, il faut bien avoir conscience qu’il n’en était rien, bien au contraire.



Pour le texte à proprement parler, je reproche à l’auteur son manque d’impartialité. A vouloir trop bien convaincre, être trop éloquent, on perd parfois la juste mesure, celle qui s’impose par sa pertinence, sa précision ; l’affectif d’un seul ne peut faire consensus, parce qu’on s’y sent insidieusement manipulé. Et même pour la bonne cause, ce n’est pas acceptable.
Et c’est ce que je sens là. Vous me direz, ce n’est que mon humble avis, et pas forcément l’avis général, je le conçois.
Et discuter sur ce qui se dégage réellement de l’évolution de la famille depuis 30 ans est surement plus que passionnant ; mais alors il faut le faire sans artifice.

Quand l’auteur assène son avis comme une vérité incontestable, il n’est pas respectueux d’autrui. On peut penser exactement comme lui, mais alors on ne le publie pas. Mais si on se place en détenteur d’une vérité immuable et qu’on estime devoir la publier internationalement, alors on se place aussi comme quelqu’un d’infiniment respectueux de l’avis ou de la souffrance de l’autre, parce que sinon c’est de la mégalomanie.

On ne peut pas non plus partir d’un point vérifié et inconstestable de la société et s’en servir pour broder dessus, même un peu, même imperceptiblement ; c’est là l’arme préférée de Satan, ne l’oublions pas ; les cultes de la personne, les sectes et leurs dérivés, les mouvements populaires révolutionnaires se sont construits sur de tels poisons. Et à utiliser cette « arme », on ne révèle tout au plus que la faiblesse de son argumentation.
Voilà, je l’écorche un peu le philosophe, et ça me gêne d’avoir à le faire, mais vous vouliez savoir ce que cette lecture m’avait inspiré, je vous le livre. (Et pour aller jusqu’au bout des choses et replacer une dernière fois la forme de ce propos dans son époque, il se peut aussi que cette forme qui me gêne tant ait été d’usage aux USA dans les années 1980 ?)



Toutefois, personnellement, de ressentir tout cela à la lecture de ce texte n’enlève rien à la personne qui s’élève courageusement contre une culture après-guerre libertaire et suicidaire pour la famille qui le heurte et qui veut avertir son prochain ; j’admire cet aspect-là d’Allan Bloom. Mais d’un Bloom aussi titré, j’aurais simplement aimé plus de rigueur et surtout plus de retenue ; car sinon il prête le flanc à une cohorte de détracteurs, et à se faire un peu dévorer par son zèle, il y perd sa crédibilité.
Si ce qui se joue plus généralement dans notre monde est l’attirance au bien (pour nous à Dieu) tellement mise en avant par notre Très Saint Père avec un rare brio, alors il faut toujours avoir conscience qu’on n’attire pas les mouches en les stigmatisant par des procédés détournés, mais avec du miel, celui de la miséricorde, de la patience, de l’invitation, de l’exemple, de la sincérité de l’amour. Et à ce jeu je trouve un certain jésuite bien plus solide que le philosophe, trop inquiet pour fédérer sérieusement autour de sa pensée.
J’ai lu autrefois un bouquin qui me rappelle un peu ça ; Jésus expliquait sereinement à une âme sainte que même dans un homme pétri de toutes vertus et bonnes intentions il lui manquerait toujours quelque chose, il taperait toujours un peu à coté de sa cible si cet homme ne consentait pas à croire, (à abaisser son orgueil, -même le plus infime-, devant Dieu). Est-ce cela que l’on perçoit un peu chez Bloom ?


Bises MB et je vous souhaite de très joyeuses fêtes.
Que Dieu vous bénisse et vous garde, vous et les vôtres,
Zélie
L’intégrisme est un refuge pour la misère parce qu’il offre un sursaut d’espérance à ceux qui n’ont rien.
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prodigal
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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par prodigal » ven. 27 déc. 2013, 18:48

Zélie, vous avez parfaitement raison de resituer le contexte. Il s'agit manifestement de faire un bilan négatif de la permissivité, à partir de la question du divorce, à une époque où il s'imposait, 1986 donc.
Mais hélas, vous avez encore plus raison quand vous dénoncez le manque d'impartialité du texte, qui n'a absolument rien de philosophique. C'est de la pure rhétorique, constituée de phrases qui sont presque toutes fausses, selon le procédé de la généralisation abusive, bref un texte malhonnête intellectuellement, ou bien totalement dépassé.
Alan Bloom a écrit :On peut répéter tant qu’on veut aux enfants que leurs parents ont le droit de vivre leur vie, que le temps qu’ils leur accordent vaut par la qualité et non par la quantité, que leurs parents les aiment même s’ils doivent se séparer d’eux, ils ne croient rien de tout cela.
Bien au contraire, ils le croient, et même l'approuvent s'ils sont proches de l'adolescence. C'est ce qui contribue d'ailleurs à les déchirer.
Alan Bloom a écrit : Ils pensent qu’ils ont droit à une attention totale et que leurs parents doivent vivre pour eux.
Ils ont tort. Il leur faut apprendre à dépasser l'égocentrisme. Le monde ne tourne pas autour de leurs préoccupations.
Alan Bloom a écrit : Il n’existe aucun moyen de leur faire admettre qu’il en soit autrement, et tout écart par rapport à cette norme produit inévitablement chez eux de l’indignation et un sentiment indéracinable d’avoir subi une injustice.
Le moyen s'appelle l'éducation. Vous voyez, je ne prône pas le divorce.
Alan Bloom a écrit : A cet égard, la séparation volontaire des parents est pire que leur mort, précisément parce qu’elle est volontaire.
Pire que la mort, vraiment? Qui peut croire cela?
Alan Bloom a écrit :Le spectacle de volontés capricieuses, la constatation que celles-ci manquent de se diriger vers le bien commun, le fait qu’elles pourraient être différentes mais ne le sont pas, toutes ces impressions-là constituent la vraie source de la guerre de tous contre tous.
Qui peut juger de façon aussi générale? Qui sait si la séparation est un caprice? Et qui veut la guerre?
Bon, j'abrège. Encore un peu cependant.
Alan Bloom a écrit : On nous objectera que beaucoup de familles restent réunies, mais sont malheureuses. Objection non pertinente : l’enseignement qui importe, pour les enfants, c’est de voir qu’il existe entre deux êtres humains un lien indissoluble, pour le meilleur et pour le pire.
Dire qu'elle n'est pas pertinente ce n'est pas répondre à une objection. Malheureusement, elle est pertinente. Heureux ceux qui ne s'en rendent pas compte!
Alan Bloom a écrit :Un professeur de lettres ne peut s’empêcher de constater quelques handicaps particuliers chez les étudiants, de plus en plus nombreux, dont les parents sont divorcés. Je ne doute pas le moins du monde qu’ils réussissent aussi bien que les autres dans toutes sortes de disciplines spécialisées, mais je trouve qu’ils ne sont pas aussi ouverts à l’étude sérieuse de la philosophie et de la littérature que ne le sont certains autres.
Jugement totalement gratuit. C'est même le contraire qui est vrai, étrangement. Il y a cependant deux raisons que l'on peut trouver à cela. Quand les parents sont unis, en France du moins, leur souci en matière de scolarité est la réussite, et en France on a pris l'habitude d'opposer celle-ci au plaisir d'apprendre et à l'ouverture d'esprit, ce qui a conduit à la suprématie des études scientifiques. Les études littéraires, plus enrichissantes intellectuellement car plus ouvertes sur la littérature et la philosophie (je rejoins Bloom ici) attirent davantage d'enfants de divorcés, qui peuvent jouer sur la division de l'autorité parentale.
La deuxième raison est que la souffrance affective, le plus souvent, tend à rendre plus ouvert.
De ceci il ne faut pas conclure qu'il vaut mieux divorcer, mais qu'une cause n'est pas mieux défendue quand on utilise pour cela des arguments fallacieux.
"Dieu n'a pas besoin de nos mensonges" (Léon XIII)

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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par MB » sam. 28 déc. 2013, 2:16

Chers Zélie et Prodigal,

A vous lire, je pense que j'ai bien fait de poster ce texte : il provoque des discussions. En fait ma position est assez proche de la vôtre, je le trouve trop dogmatique. Cela dit, on ne peut pas jeter aux orties ce qu'il dit. Il faut effectivement se mettre dans le contexte des années 80, et américain qui plus est (à une époque où les States s'étaient déjà plongés dans le politiquement correct, avec 20 ans d'avance sur nous, comme toujours). Sans doute est-ce différent de chez nous...

Je n'aurais cependant pas envie d'être si catégorique que vous, Prodigal : vous tombez dans le même excès que lui. En revanche, il y a quelque chose d'intéressant dans nos remarques, c'est que nous avons le réflexe de confronter les enseignements qu'il a tirés de ses cours avec nos connaissances en sciences sociales. C'est là que le bât blesse, précisément : car l'une des thèses principales de ce livre, c'est que les sciences sociales sont moins utiles à l'homme que la lecture des classiques.

Cette thèse, qui sonne un peu vieux c..., m'aurait hérissé il y a quelques années, où je me lançais avec enthousiasme dans les sciences sociales. Mais maintenant que j'en ai vu un peu - et je pense avoir assez de bouteille, même si ça ne suffit jamais - je pense qu'il a raison. Mais c'est une autre discussion..

Amicalement (et joyeuses fêtes de fin d'année, comme on dit à la mairie de Paris)
MB

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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par zelie » sam. 28 déc. 2013, 11:19

MB a écrit :car l'une des thèses principales de ce livre, c'est que les sciences sociales sont moins utiles à l'homme que la lecture des classiques.
MB
Les outils sont tous bons, c'est leur usage qui ne l'est pas. L'homme se distingue de l'animal parce qu'il a besoin de réfléchir à ce qu'il fait et à ce que cela engage; vouloir comprendre sa société et anticiper le futur pour le contrôler est une bonne chose en soi; alors bon voyage à la fois dans les sciences et dans la littérature MB!
Mais voyez vous, même dans cette position de Bloom, on en reviendrait presque encore une fois à la question de la place du divin dans la construction d'une société. En son temps, Jean-Paul ll, philosophe émérite lui aussi, plaidait pour que l'homme n'oublie pas de relier à Dieu chacun de ses positionnements sociaux, pour éviter tous les glissements possibles et imaginables.
Bloom aussi dénonce un glissement; mais il jette le bébé avec l'eau du bain... Il aurait gagné à renouveler sa réflexion à l'aune d'une foi.
L’intégrisme est un refuge pour la misère parce qu’il offre un sursaut d’espérance à ceux qui n’ont rien.
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Re: Réflexions d'Allan Bloom sur le divorce

Message non lu par prodigal » sam. 28 déc. 2013, 12:37

MB a écrit :.

Je n'aurais cependant pas envie d'être si catégorique que vous, Prodigal : vous tombez dans le même excès que lui.
Je ne crois pas que vous puissiez dire cela, puisque je ne me prononce pas sur le sujet, la valeur du divorce. Je ne fais qu'examiner les pièces du dossier telles que vous nous les avez fournies. Vous pouvez dire que je rejette leur valeur de probation catégoriquement, oui. Mais mon discours n'est pas un contre-discours du sien.
MB a écrit : l'une des thèses principales de ce livre, c'est que les sciences sociales sont moins utiles à l'homme que la lecture des classiques.
Thèse fortement intéressante, et que je ferais volontiers mienne, pourvu qu'on accorde la nuance proposée par Zélie, à savoir que ce n'est pas l'outil qu'il faut incriminer, mais son usage. D'ailleurs pour le coup, et pour une fois, l'approche sociologique paraît bien utile. Qui divorce, où, pourquoi, dans quelles conditions, qui s'occupe des enfants, qu'en est-il de la notion de faute et de l'adultère? Toutes ces questions, et d'autres, mériteraient que soient données à leur sujet des informations précises.
Mais surtout, il faut s'entendre sur ce que peuvent apporter les études classiques, c'est-à-dire littéraires et philosophiques. Le texte que vous nous avez soumis ne donne qu'un exemple de rhétorique : l'art d'employer des arguments faux pour convaincre le lecteur endormi ou intimidé ou déjà convaincu. La thèse que vous présentez comme essentielle au livre de Bloom ne prend tout son sens que si, bien au contraire, les études classiques ouvrent un champ de connaissance et nourrissent l'intelligence, font réfléchir en un mot, ce dont je maintiens que les enfants de divorcés sont au moins aussi capables que les autres.
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Le mythe de la nouveauté du divorce de masse

Message non lu par Bénédictions » sam. 11 avr. 2015, 14:03

Bien sur formellement il n'y a jamais eu autant de divorces.
Mais songeons au passé. Beaucoup de couple vivaient dans l'infidélité sexuelle et affective.
Il n'y avait souvent plus d'estime ni de respect.

Je ne vois pas en quoi la situation était fondamentalement différente dans les familles.

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Re: Le mythe de la nouveauté du divorce de masse

Message non lu par Fée Violine » sam. 11 avr. 2015, 14:15

Oui, et alors ? :incertain:

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Re: Le mythe de la nouveauté du divorce de masse

Message non lu par Anonymus » dim. 12 avr. 2015, 0:55

Disons qu'il y a tout de même une différence majeure : aujourd'hui nous vivons dans des sociétés plus individualistes. Autrement dit, il est à présent bien plus accepté que l'on fasse passer son intérêt personnel avant celui du couple et de la famille.

Je ne suis pas nostalgique et je ne doute pas que les sociétés de jadis avaient leurs travers ; néanmoins je constate (à ma modeste échelle) que malheureusement beaucoup ont oublié le don de soi qu'implique le mariage chrétien et qui s'oppose par nature à une logique individualiste.

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