Le terrorisme ...
Selon l'avis des super flics de France écrivant dans la collection
Que sais-je? :
... les définitions du terrorisme laissent généralement perplexe. En effet, elles insistent soit sur la fin poursuivie (violence à finalité politique), soit sur
les moyens utilisés (attentats, enlèvements, etc.), soit sur les conséquences attendues (susciter la peur). Ces définitions tombent ainsi dans deux travers évidents. Le premier est celui de la tautologie. Affirmer que le terrorisme c'est de la peur ou de la violence politique constitue un raisonnement circulaire. Le second est celui de l'énumération. Or, une simple liste de crimes n'a aucun pouvoir explicatif.
Un concept complexe
Aucune définition consensuelle du terrorisme ne peut émerger. La raison en est aussi simple que trop souvent ignorée : il y a au coeur du concept de terrorisme une antinomie et une ambivalence essentielle.
Le qualificatif terroriste a dérapé : utilisé à l'origine pour désigner
des méthodes, des technologies, on l'emploie désormais pour désigner des organisations ou des États. Le terme est donc profondément passionnel et polémique [...]
Terrorisme et résistance
Afin d'échapper à ce jeu de miroir idéologique, à ce relativisme rapide, il a souvent été proposé d'opérer une distinction claire entre le terrorisme (violence politique illégitime) et la résistance (violence politique légitime). Le critère de légitimité d'une violence repose alors généralement sur le contexte politique dans lequel le combattant évolue. Le jugement normatif porté sur la cible visée est déterminant : le résistant est un combattant de la liberté, par opposition au terroriste qui frappe un régime libéral.
La différence fondamentale entre la résistance et le terrorisme est basée sur la nature du régime où ils se manifestent. Il y a résistance quand la violence est exercée contre un régime fondé sur elle : tyrannie politique ou occupation militaire. Il y a terrorisme quand la violence est dirigée contre un régime démocratique où les citoyens ont les moyens de résister paisiblement. La distinction s'applique également aux peuples colonisés ou qui se disent tels.
[par contre]
"Il est des armes qu'on n'a jamais le droit d'employer, même pour les meilleures causes, la torture par exemple ; ainsi la violence aveugle qui cherche moins à frapper les coupables ou des combattants qu'à semer l'épouvante en massacrant des foules d'innocents ou de civils. Ces moyens restent fascistes par essence, quels que soient leur fin proclamée et l'idéal de ceux qui les emploient." (Maurice Duverger : terrorisme libérateur?, Le Point, no 1520, 2 novembre 1981)
Yasser Arafat, président de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), a donné une illustration célèbre de ce problème lors de son discours devant l'Assemblée générale des Nations Unies le 13 novembre 1974 :
"La différence entre le révolutionnaire et le terroriste réside dans les motifs pour lesquels chacun se bat. Car il est impossible d'appeler terroriste celui qui soutient une cause juste, qui se bat pour la liberté, pour la libération de sa terre des envahisseurs, des colons et des colonialsites ..."
Mais toute tentative de distinguer terroriste et résistant en fonction des objectifs poursuivis ou des moyens utilisés semble fragile. Il y a en premier lieu de la naïveté et de l'angélisme à imaginer qu'il peut exister une parfaite adéquation entre une cause juste et des moyens qui le soient tout autant. Aucun combat n'est un dîner de gala. Par ailleurs, la discussion sur la légitimité des buts est très complexe : l'histoire nous enseigne que même un pouvoir démocratique peut opprimer.
En fait, la parenté est forte entre résistance et terrorisme : la frontière est tracée par la notion controversée et subjective de légitimité. Tout terroriste se décrira comme un résistant. Le débat est sans fin.
[et]
La criminalisation de l'adversaire est une tentation permanente du pouvoir agressé. Cette attitude peut traduire un choix conscient et tactique de disqualification de l'ennemi, une analyse fine d'une situation complexe ou de façon plus inquiétante une profonde cécité sur la nature réellement politique d'une menace. L'historien juif, Flavius Joseph, contemporain des violences commises par les sicaires (1er siècle), la branche armée des zélotes juifs en guerre contre Rome, ne voit en eux que des brigands maquillant leurs pillages d'un fallacieux albi patriotique.