Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Cinci » jeu. 14 sept. 2017, 0:06

Tristan a écrit :
Les actes intrinsèquement mauvais liés à la sexualité seraient un idéal, et si quelqu'un prétend ne pas pouvoir respecter cette loi, eh bien il peut moralement faire sans, car il est aimé de Dieu !!!
Bien sûr que les pécheurs sont aimés de Dieu! Et le dire n'a rien à voir avec mai 1968, avec le modernisme ou l'étourderie du Saint Père, notre évêque de Rome.

Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus le disait déjà à la fin du XIXe siècle cf "S'il faut absolument que je sois punis, cher petit papa, punis-moi par un baiser." (... en parlant à Dieu)

Un péché est un péché, le pécheur est pécheur et il y a nécessité de se confesser. Mais le Père n'aime pas moins les pécheurs quand ils pèchent. Il arrive que c'est nous qui, en péchant, nous coupons de la grâce, qui nous priverons du courant de la vie, serons malheureux, dérangés, perturbés, agités, moins capables de prier, disposant de moins de carburant dans le réservoir. Ce n'est pas Dieu qui nous aime moins et se mettrait à bouder les fautifs. C'est juste nous, fautifs, qui n'aimons pas assez Dieu, et qui aurions besoin d'un sérieux coup de pouce.

:)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Tristan » jeu. 14 sept. 2017, 8:47

Cinci a écrit :
jeu. 14 sept. 2017, 0:06
Tristan a écrit :
Les actes intrinsèquement mauvais liés à la sexualité seraient un idéal, et si quelqu'un prétend ne pas pouvoir respecter cette loi, eh bien il peut moralement faire sans, car il est aimé de Dieu !!!
Bien sûr que les pécheurs sont aimés de Dieu! Et le dire n'a rien à voir avec mai 1968, avec le modernisme ou l'étourderie du Saint Père, notre évêque de Rome.
....C'est juste nous, fautifs, qui n'aimons pas assez Dieu, et qui aurions besoin d'un sérieux coup de pouce.
Mon point portait sur l'invalidité du raisonnement théologique, bien évidemment pas sur le fait que les pécheurs sont aimés de Dieu...

L'interdiction absolue liée aux actes intrinsèquement mauvais (comme l'adultère ou l'avortement) ne peut être levée sous prétexte qu'on se sent incapable d'accomplir ces impératifs hic et nunc. Le concile de Trente a déjà répondu définitivement à cet argument en anathémisant la thèse opposée, ça ne date pas d'hier.

Dans le cas présent, le coup de pouce que vous évoquez ne peut être les sacrements (absolution puis communion) puisque la personne se trouve dans un état objectif de péché grave auquel elle ne souhaite pas mettre fin dans l'immédiat. Le caractère doctrinal de cette interdiction aux couples divorcés vivant more uxorio a été répété maintes fois au cours des dernières années (CEC 1650, CDF 1994, CDF 1998, CPITL 2000, SC 29).

Je recommande tout particulièrement la déclaration officielle du conseil pontifical pour l'interprétation des textes législatifs à ce sujet.
Toute interprétation du canon 915 qui s’oppose à son contenu substantiel, déclaré sans interruption par le Magistère et par la discipline de l’Église au cours des siècles, est clairement déviante
http://www.vatican.va/roman_curia/ponti ... on_fr.html
Enfin quelle serait la conséquence de vider Veritatis Splendor et Humanae Vitae de leur substance, en ne faisant plus référence qu'à un idéal parfois inatteignable ? Il deviendrait inévitable, en logique, de refuser la communion à un mafieux, qui en conscience, proclamerait qu'il doit continuer à tuer des gens, sinon sa famille serait menacée; il serait aussi inévitable, en logique, de refuser la communion à un chef d'entreprise véreux, nouvellement converti, qui soutiendrait qu'il ne peut en conscience cesser ses pratiques car sinon il détruirait sa famille et mettrait ses salariés au chômage, etc.

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Suliko » jeu. 14 sept. 2017, 19:50

Tristan,
Enfin quelle serait la conséquence de vider Veritatis Splendor et Humanae Vitae de leur substance, en ne faisant plus référence qu'à un idéal parfois inatteignable ?
Mais c'est déjà le cas depuis longtemps dans la majorité des paroisses. Pourquoi tant de catholiques s'offusquent-ils soudain de lire dans la plume et d'entendre de la bouche de François ce qui est déjà la norme un peu partout (du moins sous nos latitudes) ? Ce n'est pas comme s'il tentait de faire passer de force dans le peuple catholique des pratiques mal considérées ou rejetées. Dans les faits, Veritatis Splendor et Humanae Vitae n'ont jamais été enseignés et suivis dans des pans entiers de l'Eglise. C'est cela qui fait que les réformes de François passent aujourd'hui presque sans oppositions : il ne fait qu'avaliser un relativisme moral qui sévit déjà dans toute l'Eglise depuis le dernier concile. Le baptisé catholique lambda, même pratiquant régulier, est déjà habitué à ce nouveau langage si plein de fausse miséricorde.

AdoramusTe,
On remarque que, très souvent, les sédévacantistes sont passés par la FSSPX avant de la devenir.
Le traditionalisme réel (je ne parle pas de la messe traditionnelle ni plus largement de la vie ecclésiale avec les instituts Ecclesia Dei) conduit fatalement au sédévacantisme, consciemment où inconsciemment.
Sauf que la très grande majorité des membres (clercs et fidèles) de la FSSPX ne passe pas au sédévacantisme et que ce que vous nommez le traditionalisme réel précède les mouvements traditionalistes de type "herméneutique de la continuité".
Quant au fait que certains membres de la FSSPX deviennent sédévacantistes, rien de plus normal. Un certain nombre se mettent également à fréquenter la FSSP ou d'autre communauté en communion avec Rome. Il est clair que la position de la FSSPX est inconfortable et que Mgr Lefebvre a émis parfois des opinons de tendance clairement sédévacantistes dans des périodes où il lui semblait que Rome sombrait sans retour possible dans l'hérésie. Mais en même temps, quant on a des croyances traditionalistes (au sens strict du terme), c'est que l'on ne refuse pas que la nouvelle liturgie, mais également certains textes du dernier concile (notamment sur la liberté religieuse et les relations aux fausses religions) et cela, on ne peut pas le passer sous silence comme si ces aspects du mouvement traditionalistes n'avaient aucune importance et qu'il ne s'agissait que de liturgie et d'interprétation orthodoxe du concile.
Fin du gros HS avec AdoramusTe !
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Tristan » jeu. 14 sept. 2017, 22:50

Suliko a écrit :
jeu. 14 sept. 2017, 19:50
Tristan,
Enfin quelle serait la conséquence de vider Veritatis Splendor et Humanae Vitae de leur substance, en ne faisant plus référence qu'à un idéal parfois inatteignable ?
Mais c'est déjà le cas depuis longtemps dans la majorité des paroisses. Pourquoi tant de catholiques s'offusquent-ils soudain de lire dans la plume et d'entendre de la bouche de François ce qui est déjà la norme un peu partout (du moins sous nos latitudes) ?
Nous sommes d'accord, c'est majoritairement le cas chez nous, malgré une doctrine répétée explicitement contraire. Faisons tout pour ne pas tomber encore plus bas en évitant un schisme de jure ! Pensez aux conséquences d'un message officiellement laxiste sur l'avortement !

Et puis le catholicisme, ce n'est pas assurément arrêter de proclamer la vérité et d'annoncer l'Evangile quand on est minoritaire au sein de sa paroisse, de son continent, de son époque. Au contraire ! ;)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Suliko » ven. 15 sept. 2017, 15:13

Nous sommes d'accord, c'est majoritairement le cas chez nous, malgré une doctrine répétée explicitement contraire. Faisons tout pour ne pas tomber encore plus bas en évitant un schisme de jure ! Pensez aux conséquences d'un message officiellement laxiste sur l'avortement !
Je ne sais pas trop ce que vous entendez par "doctrine répétée explicitement", mais si vous entendez par là que les clercs transmettent clairement la morale de l'Eglise, c'est évidemment faux et c'est bien cela le problème. C'est vrai que les papes précédents étaient assez clairs dans leurs enseignements moraux, mais en même temps, ils ne réprimandaient pas les évêques et les prêtres qui allaient à l'encontre de la doctrine catholique... Le catholique lambda constatait certes que le pape était contre les relations hors-mariage, l'homosexualité, la contraception, le remariage des divorcés civilement, mais sur le terrain, son curé et la majorité des catholiques qu'il pouvait côtoyer étaient relativistes sur ces questions. Ce qu'il en déduisait assez logiquement, c'est que l'enseignement du pape n'était qu'un idéal destiné à une minorité de baptisés et qu'il n'y avait pas péché mortel à se choisir d'autres valeurs morales plus laxistes...La preuve, c'est que dans sa paroisse, tout le monde allait communier, alors même qu'il savait bien qu'une partie d'entre eux n'étaient pas en accord avec la morale traditionnelle de l'Eglise.
Et puis le catholicisme, ce n'est pas assurément arrêter de proclamer la vérité et d'annoncer l'Evangile quand on est minoritaire au sein de sa paroisse, de son continent, de son époque. Au contraire ! ;)
Le souci, c'est qu'en proclamant la vérité, on apparaît clairement en opposition avec la majorité du clergé de nos régions, avec le pape, avec tant de catholiques... Il n'est pas facile de répliquer à un "Mais alors, tu es contre le pape ?"...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Alizee » ven. 15 sept. 2017, 19:56

Lors d'une ordination sacerdotale notre Évêque a dit ceci : "votre évêque peut se tromper, mais vous ne vous tromperez j'ai en lui obeissant". On pourrait transposer cela au niveau supérieur, non ?

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Suliko » ven. 15 sept. 2017, 20:40

Alizee a écrit :
ven. 15 sept. 2017, 19:56
Lors d'une ordination sacerdotale notre Évêque a dit ceci : "votre évêque peut se tromper, mais vous ne vous tromperez j'ai en lui obeissant". On pourrait transposer cela au niveau supérieur, non ?
Très peu pour moi. Si tout le monde avait obéi après le concile, il n'y aura sans doute plus de messe traditionnelle, plus de mouvements traditionalistes et une perte totale de la foi pour encore plus de monde. En matière de foi, il ne faut jamais obéir à l'inacceptable, même pas à un "ange venu du ciel" pour paraphraser l'épître aux Galates. L'obéissance n'a aucun sens si elle a pour conséquence l'apostasie des masses.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Altior » ven. 15 sept. 2017, 22:04

Suliko a écrit :
ven. 15 sept. 2017, 20:40
L'obéissance n'a aucun sens si elle a pour conséquence l'apostasie des masses.
À mon avis, nous sommes arrivés à cette apostasie des masses non pas suite à l'obéissance, mais par contre, suite à la désobéissance.

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Tristan » ven. 15 sept. 2017, 23:55

Suliko a écrit :
ven. 15 sept. 2017, 15:13
Nous sommes d'accord, c'est majoritairement le cas chez nous, malgré une doctrine répétée explicitement contraire. Faisons tout pour ne pas tomber encore plus bas en évitant un schisme de jure ! Pensez aux conséquences d'un message officiellement laxiste sur l'avortement !
Je ne sais pas trop ce que vous entendez par "doctrine répétée explicitement", mais si vous entendez par là que les clercs transmettent clairement la morale de l'Eglise, c'est évidemment faux et c'est bien cela le problème.
Je ne partage pas votre pessimisme généralisé ("les clercs...") :
Ce que j'entends par "doctrine explicitement répétée" est évident pour le cas qui concerne directement Amoris Laetitia, explicitement traité dans le Catéchisme de l'Eglise Catholique (para. 1650) :
CEC 1650 a écrit : Si les divorcés sont remariés civilement, ils se trouvent dans une situation qui contrevient objectivement à la loi de Dieu. Dès lors ils ne peuvent pas accéder à la communion eucharistique, aussi longtemps que persiste cette situation. Pour la même raison ils ne peuvent pas exercer certaines responsabilités ecclésiales. La réconciliation par le sacrement de pénitence ne peut être accordée qu’à ceux qui se sont repentis d’avoir violé le signe de l’Alliance et de la fidélité au Christ, et se sont engagés à vivre dans une continence complète.
Le caractère doctrinal de cette prohibition absolue est par exemple réaffirmé en 1994 par la Congrégation pour la Doctrine de la foi. Toute opposition à l'interdiction du paragraphe 1650 du Catéchisme serait en "opposition patente à la Doctrine de l'Eglise".
Le fidèle qui vit habituellement "more uxorio" avec une personne qui n'est pas sa femme légitime ou son mari légitime, ne peut accéder à la communion eucharistique. Si ce fidèle jugeait possible de le faire, les pasteurs et les confesseurs auraient, étant donné la gravité de la matière ainsi que les exigences du bien spirituel de la personne et du bien commun de l'Eglise, le grave devoir de l'avertir qu'un tel jugement de conscience est en opposition patente avec la doctrine de l'Eglise.
http://www.vatican.va/roman_curia/congr ... ed_fr.html
Même prohibition lors de la déclaration faite en 2000 par le Conseil Pontifical pour l'interprétation des textes législatifs. La prohibition faite au canon 915 est une norme divinement révélée que nul ne peut contourner.
Toute interprétation du canon 915 qui s’oppose à son contenu substantiel, déclaré sans interruption par le Magistère et par la discipline de l’Église au cours des siècles, est clairement déviante
http://www.vatican.va/roman_curia/ponti ... on_fr.html
Après, que certains clercs (voire parfois la vaste majorité) s'opposent à cette prohibition doctrinale clairement répétée n'a rien de surprenant ni de nouveau : pensez à la crise arienne ou à St Thomas More, et vous constaterez que la vaste majorité des clercs au niveau national ou international peut se tromper.

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Suliko » sam. 16 sept. 2017, 12:49

Ce que j'entends par "doctrine explicitement répétée" est évident pour le cas qui concerne directement Amoris Laetitia, explicitement traité dans le Catéchisme de l'Eglise Catholique (para. 1650) :

Après, que certains clercs (voire parfois la vaste majorité) s'opposent à cette prohibition doctrinale clairement répétée n'a rien de surprenant ni de nouveau : pensez à la crise arienne ou à St Thomas More, et vous constaterez que la vaste majorité des clercs au niveau national ou international peut se tromper.
C'est bien ce que je voulais dire : les textes des papes précédents sont assez clairs sur ces questions de morale, mais dans les paroisses, c'est un tout autre son de cloche. Or, la plupart des catholiques d'aujourd'hui ou d'hier ne lisent pas forcément le CEC ou les encycliques des papes. Ce qu'ils connaissent de leur foi leur vient principalement de la liturgie, des sermons de leur curé, de ce qui se passe dans leur paroisse, des livres et magazines religieux qu'ils ont l'occasion de lire. Et tout cela est gravement déficient depuis des décennies. Les textes des divers papes ne sauraient contrer ce phénomène, car si un pape les écrit, c'est en toute bonne logique pour que les évêques les lisent et les appliquent dans leurs évêchés. Si ce n'est pas le cas et que les clercs de haut rang qui refusent cet enseignement ne sont pas punis, ces textes ne servent à pas grand chose. On aura certes toujours quelques prêtres ou évêques fidèles, ainsi que des paroissiens bien informés (généralement relativement intellectuels) qui suivront la morale de l'Eglise, mais cela reste bien peu de monde...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Cendrine » sam. 16 sept. 2017, 13:48

Bonjour,
Suliko :
Si tout le monde avait obéi après le concile, il n'y aura sans doute plus de messe traditionnelle, plus de mouvements traditionalistes et une perte totale de la foi pour encore plus de monde. En matière de foi, il ne faut jamais obéir à l'inacceptable, même pas à un "ange venu du ciel" pour paraphraser l'épître aux Galates. L'obéissance n'a aucun sens si elle a pour conséquence l'apostasie des masses.
En lisant votre phrase, j'ai cru que vous alliez terminer par : "et la foi catholique serait encore vivace pour grand nombre de fidèles"

J'ai pour ma part plutôt l'impression que si tout le monde avait obéi nous n'en serions pas là. Nous serions toujours aussi pécheurs mais pas aussi éclatés extérieurement et intérieurement. Si tout avait été suivi à la lettre, la doctrine serait restée exposée sainement et la messe plus digne que ce qu'elle est devenue. Je suis d'accord avec les dits "traditionalistes" pour dire que la pastorale est devenue du grand n'importe quoi mais je pense qu'au raidissement rapide des uns a répondu un raidissement des autres (ou un amollissement tellement extrême qu'il en est devenu rigidité). On a l'impression aujourd'hui que ce qui compte plus que tout c'est de ne surtout pas ressembler aux traditionalistes. Mais comment en tant que catholiques ne pas se réclamer de la Tradition ?

Je comprends que les deux points principaux ayant mené à une sorte de séparation entre "traditionnalistes" et "conciliaires" sont l'œcuménisme moderne et le principe de liberté religieuse + la messe révisée selon le nouveau missel. Je ne me risquerai pas à entrer dans la discussion concernant ces points précis (même si je préfère la messe selon l'ancien missel, et suis dubitative sur une certaine façon d'appliquer l'œcuménisme aujourd'hui).

Mais là où je pense qu'il y a un énorme malentendu c'est au sujet de ce qu'est l'obéissance. J'ai comme l'impression que rares ont été les personnes - laïcs et clercs - à avoir eu la volonté d'appliquer réellement les conclusions du Concile Vatican II. Les dogmes fondamentaux n'ont pas changé, mais le peuple a manifestement cru que c'était le cas ; la messe doit être telle qu'indiquée dans la PGMR, mais le peuple a pensé qu'on pouvait désormais se passer de ces demandes, etc. La grande question que je me pose c'est : pourquoi Rome n'a pas mis le holà à ces mauvaises interprétations très vite ? Cela nous aurait peut-être évité de voir des pans entiers de catholiques quitter la communion avec Rome et l'essentiel des fidèles demeurant devenir des apostats qui s'ignorent.

La désobéissance a eu lieu à deux niveaux : l'une extérieurement manifeste (paradoxalement par un légitime esprit d'obéissance à la Tradition) pour les traditionalistes, et l'autre plus intérieurement pour les fidèles heureux de croire qu'enfin "l'Église se modernise". L'Église n'a jamais à se moderniser, ce semble. Ces deux pans de l'Église se sont laissé dicter par les médias d'alors (et par leur esprit plus ou moins fier et rebelle) ce qu'était devenue leur Sainte Mère l'Église. Mais cette Église était un fantasme pratique pour les uns et les autres. Et il n'en est ressorti que toujours plus de divisions, de laisser-aller d'un côté et de raidissement de l'autre. Quand on tient la Tradition pour essentielle, ne vaudrait-il pas mieux combattre au sein de ce qui la fait vivre, à l'exemple de sainte Catherine de Sienne ? Et si on ne la tient pas pour essentielle cesser de professer la foi catholique ?

On peut très bien être traditionaliste sans adhérer à l'esprit de la Fraternité Saint Pie X. J'ai une dette envers elle, qui remonte à mon adolescence. Je pense que des paroles extrêmement salées (d'aucuns diraient violentes) dogmatiquement - et justes - qui m'ont été dites par des membres de ma famille faisant partie de la FSPX ont formé comme une petite graine en moi qui m'a peut-être permis de prendre le chemin de la conversion, mais je ne désirerais nullement donner aux yeux des incroyants le spectacle désolant de la division qui fait trop plaisir au malin.

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Altior » dim. 17 sept. 2017, 8:10

Cendrine a écrit :
sam. 16 sept. 2017, 13:48
La désobéissance a eu lieu à deux niveaux : l'une extérieurement manifeste (paradoxalement par un légitime esprit d'obéissance à la Tradition) pour les traditionalistes,
Je n'ai pas bien compris en quoi consiste la désobéissance des traditionnalistes. Voulez-vous m'éclairer, s'il vous plaît ?

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Cendrine » dim. 17 sept. 2017, 13:45

Bonjour Altior,

Je faisais référence à la création de la FSPX, cet état schismatique qui, instituant une Église à côté de l'Église, a mené à la plaie sédévacantiste.

Quand on aime l'Église on ne lui désobéit pas au premier faux pas et on lui fait confiance quoi qu'il nous en coûte. "Une Tradition coupée du Magistère n'est pas traditionnelle" dit le Père Humbrecht. En osant créer une Église-bis contre celle de Rome, Mgr Lefebvre a eu une attitude curieusement en avance sur son temps : déjà postmoderne. On peut ne pas être d'accord avec le pape mais continuer à croire en la suprématie du Magistère tout entier, en la validité du catéchisme et vivre en communion avec sa Sainte Mère, tout en sachant que les papes et les erreurs passent, mais jamais ne disparaîtra l'Église.

Il est dommage que la majorité des fidèles assimile le traditionalisme à un ensemble de personnes qui professent de fait la désobéissance comme une valeur de combat alors qu'en réalité elle affaiblit et divise la foi catholique dans le cœur des gens. La Tradition est désormais vue comme un repoussoir : quel saccage. Je comprends ce qui a mené Mgr Lefebvre a prendre sa grave décision, mais je pense que son orgueil l'a conduit à ignorer la faiblesse naturelle du peuple de Dieu qui, constatant sa propre désobéissance alors qu'il était censé être exemplaire, ne pourrait que prendre le contrepied en allant vers un relativisme dans lequel nous voilà à présent empêtrés.

Bon dimanche ! :)

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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Altior » dim. 17 sept. 2017, 14:27

Cendrine a écrit :
dim. 17 sept. 2017, 13:45
Bonjour Altior,

Je faisais référence à la création de la FSPX,
Il ne faut pas mettre le signe égal entre «traditionaliste» et «FSSPX». Sans doute, FSSPX est traditionnaliste et professe une foi traditionnelle. Mais la réciproque n'est pas valable. En quoi désobéissent-ils ceux de FSSP, IBP, ICR, et tant d'autres sociétés, paroisses, monastères, etc etc qui, ensemble, forment «le traditionnalisme»?
cet état schismatique qui, instituant une Église à côté de l'Église, a mené à la plaie sédévacantiste.
Alors, ici je vois deux erreurs dans la même phrase.

1) D'abord, si la FSSPX est en état schismatique, c'est un peu tordu de l'accuser de désobéissance. Par exemple, les orthodoxes sont en désobéissance ? Les protestants sont en désobéissance ? Peut-on dire que tous les baptisés acatholiques sont-ils en désobéissance ? D'un certain point de vu, du point de vue ecclesiologique, je suis d'accord que la réponse est affirmative. Car le vicaire du Christ a une juridiction sur tous les baptisés parce que par leur baptême tous sont entrés dans la seule Église du Christ qui est l'Église catholique. Néanmoins, dans la réalité du terrain, accuser les orthodoxes de désobéissance ne passerait par la tête de personne. Alors, il faut choisir de deux, un: soit les FSSPX sont en état schismatique comme vous dites, autrement dit en rupture, et alors personne ne peut plus dire qu'il sont en désobéissance, soit ils sont catholiques, et alors il faut voir plus clairement en quoi ils désobéissent.

2) La «plaie sédévacantiste» n'a rien à voir avec la FSSPX. Les sédévacs ont bien précédé les FSSPX. Leurs évêques proviennent de la lignée Thuc, aucun d'eux n'a jamais été membre de la FSSPX.
Puis, il y a une question de terminologie: si les sédévacs sont schismatiques (et là les choses sont beaucoup plus claires que pour la FSSPX), alors comment ose-t-on parler de «plaie sédévacantiste» et, en même temps on parle de «nos frères protestants», «nos frères orthodoxes en communion imparfaite» et même «nos frères musulmans» sinon «nos frères ainés, les juifs» ? Vous ne voyez pas ici les deux poids, deux mesures ?
Je comprends ce qui a mené Mgr Lefebvre a prendre sa grave décision, mais je pense que son orgueil l'a conduit à ignorer la faiblesse naturelle du peuple de Dieu qui, constatant sa propre désobéissance alors qu'il était censé être exemplaire, ne pourrait que prendre le contrepied en allant vers un relativisme dans lequel nous voilà à présent empêtrés.
Ici encore je ne suis pas d'accord avec vous. Je reconnais que le fait de transmettre les ordres sacres contre l'avis de Rome est un acte de désobéissance. Je reconnais, en même temps, que même si, de nos jours, les prêtres et les fidèles de la FSSPX sont une minorité dans le monde des traditionnalistes, ils continuent à être la locomotive de la tradition. Sans eux, sans cette décision douleureuse de Mons Lefebvre, nous n'aurions aujourd'hui ni messe traditionnelle, ni enseignement traditionnel, ni instituts de vie consacrée traditionnalistes, rien. Il suffit de se rendre compte de cela simplement en regardant la carte des endroits où les diocèses permettent la messe en latin. Là où la FSSPX s'est implantée, après quelques années apparaît un lieu de messe traditionnelle ayant le feu vert de la part de «l'Église Conciliaire». Là où FSSPX n'est pas implanté, pas de lieu de messe. En Roumanie la FSSPX n'est pas implanté du tout. Savez-vous combien de lieux de messes traditionnelle existent en Roumanie? Aucun. Zéro. Niente. Bien sûr, si on ne compte pas les messes en rite byzantin et les lieux d'enseignement byzantin, qui ont gardé la tradition.

In Christo,
A.

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Cendrine
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Re: Les cinq dubia de quatre cardinaux au pape François à propos d'Amoris Laetitia

Message non lu par Cendrine » dim. 17 sept. 2017, 16:34

Cher Altior,

L'Institut du Bon Pasteur, la Fraternité Sacerdotale Saint Pierre et l'Institut du Christ Roi Souverain Prêtre ont des statuts qui les engagent à respecter le Magistère du Saint Siège Romain je crois bien. Malgré un regard vigilant sur la vie ecclésiale post Concile Vatican II, ils sont fidèles à Rome. Le monastère du Barroux édite un missel selon la forme ancienne en prenant en compte certains des apports post Vatican II et il évite soigneusement de faire montre d'agressivité envers tout pape même récent.

1) La FSPX a posé des actes de désobéissance dès le début de ses activités (par exemple Mgr Lefebvre donnant la consécration épiscopale à quatre prêtres de sa Fraternité alors qu'il n'y était pas autorisé par Rome...). Je n'ai pas dit qu'il y avait eu un schisme au sens propre du terme, mais un "état schismatique", une situation qui sent le souffre, qui en est proche. Je pense qu'il ne viendrait à l'idée de personne de dire que les fidèles de la FSPX ne sont pas catholiques, ils sont nos frères dans la foi catholique, mais ils sont quand même marqués par des actes - au moins au début - par des actes clairement désobéissants à l'autorité du Saint Siège.

2) Dans les années 90 j'ai pourtant clairement entendu dire à un membre de ma famille (FSPX) que Jean-Paul II n'était pas le pape et même qu'il était l'anti-Christ ; je vous laisse entrevoir l'image que ces propos donnaient de l'Église à l'adolescente protestante que j'étais alors : une vaste pétaudière verticale où les charitables catholiques se tiraient dessus à boulets rouges... Les sédévacantistes sont selon moi aussi catholiques que les modernistes, leur point commun étant une sorte de vertige spirituel qui leur fait perdre de vue une foi qu'il devraient davantage garder, autant pour eux-même que pour la foi de leurs frères fidèles.
sans cette décision douleureuse de Mons Lefebvre, nous n'aurions aujourd'hui ni messe traditionnelle, ni enseignement traditionnel, ni instituts de vie consacrée traditionnalistes, rien.
Je ne suis pas assez introduite dans ce type d'observations, ni avec assez de recul (je suis fraîchement convertie) pour oser abonder dans votre sens, mais vous aurez pu noter que j'éprouve du respect pour ces gens de la FSPX, ce n'est pas parce que je regrette la désobéissance que je déplore leur existence. Je leur en veux seulement d'avoir quitté le navire au moment où nous aurions eu besoin d'eux, mais en communion tangible avec Rome. Est-ce que vous pensez que des entités comme l'ICRSP sont nés de la volonté de reprendre l'œuvre de la FSPX en la faisant revenir (cette œuvre) dans le giron Romain ? Si oui, je comprends ce que vous dites avec votre image de la locomotive, et je suis d'accord avec vous, et cela peut nous servir à voir à quel point le Seigneur tire d'un mal un bien beaucoup plus grand... :)

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