Relations Église-État

« Par moi les rois règnent, et les souverains décrètent la justice ! » (Pr 8.15)
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Christophe
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Message non lu par Christophe » mar. 15 mars 2005, 23:30

[align=justify]Bonsoir Guelfo,
guelfo a écrit :Vos interrogations m'étonnent un peu.
Mes interrogations viennent de l'utilisation par le Saint-Père de l'expression "non-confessionnalité de l’État" en lieu et place de "saine et légitime laïcité", ce qui aurait levé toute ambigüité...

Sinon, je suis assez d'accord avec votre dernière intervention. Un Etat acatholique pour un pays acatholique est bien sûr légitime.


Bien à vous
Christophe[/align]
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guelfo
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Message non lu par guelfo » mer. 16 mars 2005, 11:14

Charles a écrit :« Montrez-moi une pièce d'argent. De qui porte-t-elle l'effigie et la légende ? — De l'empereur César », répondirent-ils. Il leur dit : « Alors rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. (Lc 20, 24-25 )

Qu'est-ce qui est à César ? L'argent. Qu'est-ce qui est à Dieu ? Tout le reste.
Votre interprétation me semble très (trop ?) restrictive. Le texte du Saint-Père cité plus haut ne me semble pas par ailleurs conciliable avec celui que vous avez cité.
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wanderer
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Message non lu par wanderer » mer. 04 mai 2005, 21:36

Il y en a, en Italie, qui s’agitent parce qu’ils craignent que le christianisme prenne à César ce qui est à César. Comme si donner à César ce qui lui appartient n’était pas un commandement de Jésus ; comme si la légitime et saine laïcité de l’État n’était pas un des principes de la doctrine catholique ; comme si ce n’était pas la tradition de l’Église de faire un effort continuel pour maintenir les deux pouvoirs distincts et toutefois unis, selon les vrais principes ; comme si, par contre, le mélange du sacré et du profane ne s’était pas le plus fortement vérifié dans l’histoire, quand une partie des fidèles s’est détachée de l’Église.
Pie XII, allocution aux marches.


Quant à la non-confessionnalité de l'Etat, il suffit de lui appliquer la définition de Jean-Paul II pour voir qu'elle signifie bien cette distinction de Pie XII et qu'elle ne dispense pas l'état d'honorer la vraie religion qui subsiste en l'Eglise catholique par un culte authentique.

Je rappelle le CEC

2105 Le devoir de rendre à Dieu un culte authentique concerne l’homme individuellement et socialement. C’est là " la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral des hommes et des sociétés à l’égard de la vraie religion et de l’unique Église du Christ " (DH 1). En évangélisant sans cesse les hommes, l’Église travaille à ce qu’ils puissent " pénétrer d’esprit chrétien les mentalités et les mœurs, les lois et les structures de la communauté où ils vivent " (AA 10). Le devoir social des chrétiens est de respecter et d’éveiller en chaque homme l’amour du vrai et du bien. Il leur demande de faire connaître le culte de l’unique vraie religion qui subsiste dans l’Église catholique et apostolique (cf. DH 1). Les chrétiens sont appelés à être la lumière du monde (cf. AA 13). L’Église manifeste ainsi la royauté du Christ sur toute la création et en particulier sur les sociétés humaines (cf. Léon XIII, enc. " Immortale Dei " ; Pie XI, enc. " Quas primas ").

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Message non lu par Christophe » mer. 04 mai 2005, 21:38

Merci Frédéric pour ce texte introuvable. Je suppose qu'il s'agit là d'un extrait. Disposez-vous de l'intégralité du texte ?

Bien à vous
Christophe
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Altior » ven. 22 mai 2020, 0:02

Gaudens a écrit :
jeu. 21 mai 2020, 17:16
Que l'Etat soit laïque ( c a d non soumis aux directives de quelque Eglise ou Communauté religieuse que ce soit tout en respectant la liberté religieuse)
Un État chrétien n'est pas un État soumis aux directives de l'Église, de la même manière que l'État persan est soumis à son ayatollah et à ses fatwas. Les États chrétiens n'ont jamais été des théocraties. Quand la France était un État chrétien elle n'était pas du tout soumise à l'Église. Par exemple, pendant la plupart de la guerre de 30 ans la France a tenu la part des protestants à l'extérieur, car c'était dans l'intérêt d'État que la Maison d'Autriche, port-étendard du catholicisme dans l'Empire, soit affaiblie. Et c'était un cardinal, le brillant Richelieu qui a bien vu et bien mené cette politique, sans qu'il soit, par cela, moins catholique ou mis au ban par l'Église. Et on peut continuer avec Louis XIV, qui a carrément tenu la part des musulmans pendant un bon moment de son long règne. L'État était catholique, le Roi, quoique pécheur, un fervent catholique, mais la raison d'État était autre chose.

Quel est, alors, la doctrine catholique traditionnelle concernant les rapport entre Église et État? Ni soumission, ni séparation. Mais coopération. À la base des lois doit se trouver la morale chrétienne, qui n'est pas fondamentalement différente de la morale naturelle. Les vérités de la foi doivent être promues comme LA vérité, et d'autres «vérités» ne peuvent que jouir de la liberté de l'opinion, mais non pas promues par l'État.

Eh oui, concernant votre question si un État laïc engendre un pays laïc la réponse est affirmative. Quand on enseigne dans les écoles non pas la Sainte Doctrine, mais on endoctrine les enfants de la patrie dès leur âge le plus tendre avec égalitarisme, démocratie, évolutionnisme, contraception, développement durable et d'autres marottes à la mode serinées sans cesse, à quel résultat vous attendez-vous ?

Gaudens
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Gaudens » ven. 22 mai 2020, 20:43

Bonsoir Altior,
Pour le traditionnalisme dont vous vous réclamez,tout est extrêmement simple: si les Etats se soumettaient au jugement de l'Eglise,le monde serait parfait,donc la liberté religieuse (non réduite à la tolérance contrôlée des cultes non catholiques) est une horreur,voire une hérésie puisque la "doctrine traditionnelle" l'affirme ainsi.Du reste c'est là le seul véritable motif d'opposition de feu Mgr Lefebvre au Concile Vatican II reconnaissant la légitimité de la liberté religieuse,contraire selon lui à la "royauté sociale" de Notre Seigneur.Rappelons que le fondateur de la FSSPX avait voté à peu près tous les textes conciliaires dont "Sacrosanctum Concilium " portant sur la liturgie (je reconnais qu'à cet égard,peu de gens auraient pu se douter de ce que les liturgistes chargés de son application allaient mettre au monde,souvent même sans le vouloir ...).

Malheureusement vous et vos amis faites bon marché de l'impossibilité de revenir à une situation de chrétienté constantinienne, c'est à dire que les sociétés modernes renoncent à leur conception d'une autorité autonome pour revenir à une autorité hétéronome( le respect d'une loi divine essentiellement). Mgr Lefebvre avait manifestement en tête des gouvernements "idéaux" comme l'Espagne de Franco et le Portugal de Salazar;voyez-vous un instant nos sociétés y revenir?
Quant au modèle de la France louisquatorzienne,permettez moi un avis tout opposé: au vôtre : outre son comportement privé, que vous relevez-vous même mais qui rejaillissait sur la sphère publique,que dites-vous par exemple du respect de la doctrine catholique de la guerre juste dans les agissements criminels de ce belliciste ,attaquant en pleine paix les villes dont il voulait s'emparer,ruinant ses peuples pour financer la guerre et ses coûteux plaisirs et mettant les Cévennes protestantes en coupe réglée (pour voir pire il faudra attendre la Révolution et le "populicide " vendéen ) ?
Bref,une soumission de façade à l'enseignement catholique ne garantit jamais une "politique chrétienne" à supposer qu'elle puisse exister.Cela dit ,je reconnais avec vous les limites sérieuses d'une société "autonome".Au moment du vote de la malheureuse loi Taubira il y a 6 ans ,je me rappelle avoir écrit au président de l'Assemblée Nationale de l'époque(socialiste,ça va de soi) que nous nous approchions dangereusement du moment où la démocratie tendait à devenir une "démocratie absolue" au sens où on parlait autrefois de monarchie absolue , c'est à dire un régime qui se sentirait libre de tout respect à un quelconque invariant éthique au dessus de lui ,et que ,par conséquent,il nous faudrait fermement la combattre comme on avait combattu, deux cents ans auparavant la monarchie absolue ... Donc oui, probléme il y a .Mais on ne le résoudra pas en s'accrochant au refus ancien de la liberté religieuse par l'Eglise.A cet égard, cette doctrine dont je reconnais l'existence au long de nombreux siècles , était l'adaptation à la nouvelle situation née à la fin du IV è siècle dans l'Empire romain ( qui passait alors comme universel, recouvrant à peu près la totalité du monde connu ,bien à tort du reste) quand l'Empereur Théodose avait fait du catholicisme orthodoxe la religion de l'Etat. Doctrine de circonstance donc, rien à voir avec les dogmes relatifs aux fondements de la foi lentement établis pendant les Quatre premiers siècles de l'Eglise ,qui sont bien eux, des dogmes auxquels nous n'avons pas le droit de toucher.
Il se trouve que les Pères du Conciles Vatican II, constatant que les temps avaient radicalement changé sont donc revenus là dessus , à mon avis à bon droit(on a longuement discuté dans d'autres fils sur une espèce de naiveté de leur part dans la lecture des temps nouveaux mais ça ne me semble pas invalider leur lecture de base(retour à mon premier paragraphe).

Enfin, votre conclusion me parait mélanger des réalités et des concepts qui n'ont rien à faire ensemble quand vous dites qu'on bourre la tête de nos jeunes enfants d'"égalitarisme, démocratie, évolutionnisme, contraception, développement durable et d'autres marottes à la mode ".Non,vraiment,je ne mets pas à la même sauce le nécessaire développement durable, le vraisemblable évolutionnisme(avec quelques bémols) et par ailleurs,a contraception ,voire l'égalitarisme. Je ne souhaite pas que vous deveniez premier ministre ou ministre de l'Educatuon un jour,si la fantaisie vous en prenait(hypothèse peu vraisemblable,je suppose !).

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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Suliko » ven. 22 mai 2020, 22:04

Bonjour Gaudens,
Doctrine de circonstance donc
Non. Un enseignement maintenu depuis que la question des liens Eglise-Etat s'est posée (sous Constantin) jusqu'au dernier concile n'est pas un enseignement de simple circonstances. Pourtant, l'Europe a vécu bien des crises religieuses durant tous ces siècles, et notamment pendant la Réforme et depuis la Révolution française. Au XIXe siècle, alors que les états européens penchaient de plus en plus vers la sécularisation et la laïcisation du pouvoir, l'Eglise n'a pas modifié son enseignement, mais a au contraire sans cesse rappelé que la société et le pouvoir temporel ne sauraient en justice vivre comme si Dieu n'existait pas et n'avait pas établi une vraie religion. Par ailleurs, les Français ont souvent tendance à un peu l'oublier, mais dans les années 60, il existait encore bien des terres catholiques, y compris au niveau de l'Etat. Il n'y avait aucune raison de les affaiblir en y mettant sur un pied d'égalité toutes les religions. Pourtant, c'est ce que l'Eglise a fait, demandant à des Etats encore catholiques d'adopter le principe de la liberté religieuse.
Pour finir, la question n'est pas de savoir si un Etat catholique est possible et réaliste en l'état actuel des choses. La réponse est évidemment négative. La question est de savoir ce que doit tenir pour juste l'Eglise. Et, comme je l'écrivais déjà à Cinci un peu plus haut, c'est là qu'est la contradiction : l'Eglise ne se contente pas de supporter les erreurs modernes, sans les approuver. Elle les approuve et les juge bonnes en soi !

P.S. : Puisque Fée Violine vous en déjà fait la remarque, je me permets également de vous suggérer d'aérer correctement vos messages (notamment en ce qui concerne les virgules). Vous avez tendance à mettre des espaces au petit bonheur la chance, ce qui rend la lecture de vos textes assez pénible. Pour être honnête, j'ai souvent fait l'impasse sur vos interventions à cause de ce problème...
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

Gaudens
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Gaudens » ven. 22 mai 2020, 22:59

Bonsoir Suliko,
Je maintiens:la "doctrine " en question date,non du règne de Constantin qui en 312 accorda aux Chrétiens la liberté de culte mais de celui de Théodose (édit de Thessalonique de 380) : "tous les peuples doivent se rallier à la foi transmise aux Romains par l'apôtre Pierre,celle que reconnaissent le pontife Damase Ier et Pierre,l'évêque d'Alexandrie, c'est à dire la Sainte Trinité".Elle n'est pas un dogme de foi.
Encore une fois en 1960 sa concrétisation n'était plus guère que dans l"Espagne franquiste, le Portugal salazarien et quelques semi dictatures oligarchiques sud-américaines. Pas de quoi susciter l'enthousiasme généralisé ni des anticipations d'avenir. Si l'Eglise avait continué à avaliser ce rapport du politique au religieux,il est vraisemblable qu'elle se serait encore plus enfoncée dans le discrédit.Et ce n'est pas ce changement d'attitude lors du Concile Vatican II qui aura pu provoqué l'éclosion des idées de la triste vague 68 ,contrairement au procès d'intention qui lui est fait régulièrement sur ce site et ailleurs .

Par aillieurs,vous me reprochez mes espacements "au petit bonheur la chance".La typographie n'est certes pas mon fort mais je mets tous mes efforts au service de la syntaxe et de l' orthographe,qui me paraissent finalement plus importantes; je viens de relire mon post juste avant le vôtre et ne vois pas ce que vous pouvez lui reprocher en l'espèce . Si vous ne me lisez pas,peut-être avez -vous d'autres raisons ?

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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Altior » sam. 23 mai 2020, 0:09

Bonsoir, Gaudens!
Gaudens a écrit :
ven. 22 mai 2020, 20:43
Pour le traditionnalisme dont vous vous réclamez,tout est extrêmement simple: si les Etats se soumettaient au jugement de l'Eglise,le monde serait parfait,donc la liberté religieuse (non réduite à la tolérance contrôlée des cultes non catholiques) est une horreur,voire une hérésie puisque la "doctrine traditionnelle" l'affirme ainsi.
Mais il ne s'agit pas QUE de la doctrine traditionnelle (pourquoi les guillemets?), il s'agit de la logique. L'erreur ne peut pas avoir les mêmes droits dans la cité que la vérité. Je peux, au nom de la liberté de l'opinion, accepter qu'il y ait des gens qui sont persuadés que la terre est plate. Je peux, par amour de la paix sociale, accepter que ces gens-là aient leurs clubs, leurs journaux, leurs sites internet. Mais, parce que je veux que la cité catholique soit pas seulement un forum virtuel, mais une réalité, je ne peux pas tolérer que la doctrine de la terre plate soit enseignée dans les écoles d'état comme la doctrine de la terre ronde est y enseignée. Je ne peux pas tolérer que cette contre-vérité soit mentionnée dans les lois, ni accepter la demande des platistes que des expressions comme «tout au rond de la terre» ou bien «partout sur le globe» soient bannies, car politiquement incorrectes.
Malheureusement vous et vos amis faites bon marché de l'impossibilité de revenir à une situation de chrétienté constantinienne, c'est à dire que les sociétés modernes renoncent à leur conception d'une autorité autonome pour revenir à une autorité hétéronome( le respect d'une loi divine essentiellement).
Encore et encore cet argument de l'impossible retour! Mais pourquoi serait-il impossible? Moi, quand je m'égare et je me trouve en difficulté, la première chose qui me traverse l'esprit est de revenir en arrière, sur mes propres pas, jusqu'au point d'où je me suis égaré, pour reprendre le bon chemin.
Mgr Lefebvre avait manifestement en tête des gouvernements "idéaux" comme l'Espagne de Franco et le Portugal de Salazar;voyez-vous un instant nos sociétés y revenir?
Et de l'Irlande ? Et de Malte ? Et même des États Unis, pourquoi vous ne parlez pas ?
Quant au modèle de la France louisquatorzienne,permettez moi un avis tout opposé: au vôtre : outre son comportement privé, que vous relevez-vous même mais qui rejaillissait sur la sphère publique,que dites-vous par exemple du respect de la doctrine catholique de la guerre juste dans les agissements criminels de ce belliciste ,attaquant en pleine paix les villes dont il voulait s'emparer,ruinant ses peuples pour financer la guerre et ses coûteux plaisirs
Vous dites que les temps ont changé ? En est-il autrement de nos jours ? Je ne crois pas que la France louisquatorzienne ait attaqué l'Iraq en pleine paix. Ni l'Afganistan, alors que ce pays était à bout du souffle après l'invasion bolchévique. Et vous avez si vite oublié les bombardements systématiques de la Libye à l'époque de Sarkozy et de ses favorites présindentielles ?
Enfin, votre conclusion me parait mélanger des réalités et des concepts qui n'ont rien à faire ensemble quand vous dites qu'on bourre la tête de nos jeunes enfants d'"égalitarisme, démocratie, évolutionnisme, contraception, développement durable et d'autres marottes à la mode ".Non,vraiment,je ne mets pas à la même sauce le nécessaire développement durable, le vraisemblable évolutionnisme(avec quelques bémols) et par ailleurs,a contraception ,voire l'égalitarisme.
Vous, vous n'avez pas d'enfants en cours de scolarisation dans les écoles de la République, c'est ça? Je pose la question, car apparemment vous ignorez la réalité et les dimensions de l'endoctrinement et de la langue de bois dont les enfants ont à faire face tous les jours.

Cinci
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Cinci » sam. 23 mai 2020, 2:39

Gaudens :

Malheureusement vous et vos amis faites bon marché de l'impossibilité de revenir à une situation de chrétienté constantinienne,
Mgr Lefevbre aurait été très heureux de la situation qui avait cours au Canada durant les années 1950, je pense. Il serait pas nécessaire de remonter jusqu'au IVe siècle.

La situation (si je parle de chez nous) c'était juste celle d'une monarchie constitutionnelle, un système parlementaire avec des partis. On parle d'un état de droit. Une démocratie ! Seulement, la constitution du pays stipule quelle est la religion officielle. Le système judiciaire tient compte des valeurs religieuses du pays. Le système scolaire est confessionnel. On y enseigne que la religion chrétienne dans le système publique. C'est tout. Les Juifs ont leur réseau en parallèle, leurs écoles privées, leurs synagogues, etc.

Le Canada qui a pris part à la libération de l'Europe en 1944-1945 était exactement ce que je viens de dire. On parle d'un pays chrétien, qui interdit l'avortement, qui accorde un traitement de faveur aux prélats. Le premier ministre du pays peut être pris en photo, à genoux, en train de communier à l'église. C'est un pays dans lequel tout le monde fête Noël sans complexe, qui permet à tout le monde d'avoir congé le dimanche. La télévision d'État souligne la semaine sainte. Est-ce le goulag ? Un enfer sur terre ? Non. Personne n'est expédié au bagne au motif de mécréance.

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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Cinci » sam. 23 mai 2020, 14:36

Bonjour,
Gaudens :

Pour le traditionalisme dont vous [Altior] vous réclamez,tout est extrêmement simple: si les Etats se soumettaient au jugement de l'Eglise,le monde serait parfait,donc la liberté religieuse (non réduite à la tolérance contrôlée des cultes non catholiques) est une horreur,voire une hérésie puisque la "doctrine traditionnelle" l'affirme ainsi.
Le point important c'est la position officielle du pays, son gouvernement, ses plus hautes institutions par rapport à la question religieuse. Et le problème avec la liberté religieuse, c'est que dans un pareil régime l'avantage va revenir fatalement à l'erreur, aux fausses religions, à l'Idéologie contraire, aux superstitions, trucs occultes, etc.

Quand les autorités d'un pays envoient le message à tous (avec son abstention, sa neutralité) qu'il n'y aurait pas moyens pour des gens sérieux de déterminer quelle religion serait la bonne, la meilleure ou même s'il serait légitime de croire qu'une religion pourrait être meilleure qu'une autre pour commencer : tous les citoyens vont comprendre soit que toutes les religions se valent (en bien ou en mal) soit que le phénomène religieux en lui-même ne devrait revêtir aucune importance. Et, ici, c'est quand bien même le christianisme serait la moins mauvaise religion parmi cent ou qu'elle serait la religion la moins débile du lot ("supposons !", pour parler comme un agnostique laïcard), il n'en restera pas moins que la religiosité en elle-même sera réputé être un domaine très marginal dans la cité, un truc ne pouvant avoir une grande incidence sur le cours des affaires, son devenir, sur les lois du pays, chaque fois qu'il y aurait des décisions importantes à prendre.

Retour en arrière

Je crois que c'était en 2008, chez nous, qu'un Mgr Ouellet laissait entendre à mot couvert (mais c'était facile à décoder) que si le pays était un pays chrétien comme il l'était jadis en 1950, nous ne traverserions pas les turbulences que nous traversons, avec la question de l'immigration et de l'immigration musulmane en particulier. Tout le monde se sera récrié d'horreur naturellement. Ce fut une universelle clameur pour prier de jeter dehors du pays ce malotru. Néanmoins je pense que c'est lui qui avait raison.

Il voulait dire qu'il est d'autant plus facile d'intégrer des nouveaux venus, lorsque tout le monde a bien connaissance des balises claires, que les gens du cru sont rassurés à l'effet que les autorités défendent bien leurs intérêts collectifs (religieux, patrimoniaux), que les autres savent dans quel pays ils mettent les pieds, quelles sont les limites. Le libéralisme dans le domaine religieux ouvre la porte plutôt à la compétition, les revendications, la guérilla, la confusion, les décisions politiques jugées arbitraires par les uns et amenant la nécessité d'autres combats, la division du pays.

Enfin ...

Le système libéral des Lumières n'a de sens que pour des incroyants en réalité, pour des gens chez qui la religion n'est d'aucune importance réelle, pour qui seul compte le commerce, le profit matériel, le progrès des techniques.

Lorsque notre Église catholique donne parfaitement son aval à ce système, et considère même qu'il n'est rien de mieux que ce modèle de développement des peuples : elle fournit elle-même les armes à ses adversaires pour que ceux-ci puissent finir de la liquider proprement.


Comme Suliko, moi, de plus en plus, je ne peux même plus comprendre comment il aura pu se faire que des évêques de l'Église catholique aient pu un jour donner la main à une telle entreprise d'assujettissement de l'Église au libéralisme philosophique comme principe de gouvernance; à ce principe qu'il serait très bien (excellent !) que les rois, les ministres, les chefs, les autorités publiques, l'élite du pays (magistrats, etc.) soient des êtres officiellement "sans religion".

Je pense bien que cet assujettissement philosophique, culturel ou mental en premier explique sans doute en bonne partie les difficultés de l'Église, l'enfouissement, le silence et tout.

Gaudens
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Gaudens » sam. 23 mai 2020, 16:43

Bonjour Altior,

Vous écriviez hier soir « l’erreur ne peut pas avoir les mêmes droits dans la cité que la vérité » et vous compariez à cet égard les non-catholiques avec les tenants de la terre plate.Comment ne pas voir l’incongruité de cette comparaison ? S’il est évident de prouver à toute la cité que la terre est à peu près ronde,comment voulez lui prouver que la religion catholique est la vraie ?Si nous,sommes convaincus que notre foi est la vraie, pourquoi et comment voudriez vous que le reste des Français(Anglais,Roumains,etc…) le soient aussi ? Référez-vous à la longue discussion sur ce forum tenue tout récemment avec un Agnus 151 par exemple.Ne rêvons pas.
Votre comparaison avec le randonneur que vous êtes(et que je suis aussi) ne tient pas davantage :une fois revenu (en marche arrière) au lieu où vous avez perdu la bonne direction, revenez-vous sur vos pas jusqu’au point de départ ? Non, bien sûr, vous allez de l’avant dans la bonne direction et le chemin que vous découvrez alors est nouveau.
De même ,que répliquez-vous à mon objection louisquatorzième ? Que le monde ne va pas mieux et que l’Afghanistan ne vaut pas mieux que le ravage du Palatinat et autres actions belliqueuses du « Grand Roi ». Mais je ne vous dis pas que le monde pas mieux sur ce plan là, simplement que l’adhésion de façade d’un gouvernant au catholicisme ne garantit pas son respect de la morale et de la foi chrétiennes.L’idéalisation du passé n’a pas plus de sens que la soumission béate aux croyances d’aujourd’hui.
Enfin, concernant l’endoctrinement des enfants par l’école publique (avant celle des média et de tout ce que vous voudrez) : j'en suis tout à fait conscient et indigné mais ce que je conteste c’est votre amalgame (très typique du monde tradi,en effet) entre les différents réalités ou concepts dont vous dénoncez l’imposition aux enfants des écoles.

Revenons ensuite , en nous rapprochant un peu de la question qui nous inquiète, aux exemples de pays supposés respecter (du moins avant le Concile Vatican II) « la royauté sociale « du Christ Seigneur : vous citez USA,Malte,l’Irlande et Cinci , pour faire bonne mesure, avec de belles illustrations à la clé ,ajoute le Canada. Voyons cela.

Malte : minuscule Etat, totalement homogène ethniquement et religieusement au moins jusqu’à ces toutes dernières décennies : que le catholicisme ait pu y être religion d’Etat reflète cette situation particulière, nullement gênante pour quelque minorité que ce soit (très rares incroyants exceptés) et ne saurait être un exemple (dans le même genre , Monaco , ce qui n’empêche pas aujourd’hui une polémique concernant la dépénalisation de l’avortement).
L’Irlande : La République d’Irlande a été une création au XXè siècle de l’ethnie irlandaise gaélique, méprisée totalement pendant des siècles (voyez l’histoire de l’Angleterre de Macaulay) par les Anglo-Ecossais ,colons protestants en terre catholique ; l’affirmation de la catholicité de cette terre fraichement libérée était une affirmation de revanche historique sans autre exemple en Europe.
Les Etats-Unis : cherchez l’erreur ! Ce n’est en aucune façon un pays catholique (ils y furent même longtemps suspects par la majorité protestante et tenus à l’écart du pouvoir jusqu’à l’élection de Kennedy en 1960.Leur Constitution et leurs usages politiques et judiciaires intègrent bien la croyance en Dieu (« in God we trust » ) mais je me retiens de dire qu’il s’agit peut-être du dieu Dollar et vous laisse le soin d’autres commentaires.
Le Canada : Cinci a bien dépeint le climat jusqu’aux évolutions du dernier tiers du XXè siècle (la « Révolution tranquille » et ses parallèles en milieu anglophone) avec des traduction légales que je ne connais pas , en tout cas avant l’Acte Constitutionnel de 1982 intégrant la Charte des Droits et Liberté, qui cite explicitement liberté religieuse, de conscience, de croyance, de pensée et d’opinion (pour être sûr ainsi de ne rien oublier…). En tout cas le catholicisme n’était sans doute pas religion officielle dans un pays où la majorité anglophone était plutôt épiscopalienne et protestante,le catholicisme étant essentiellement le fait des francophones. Ce qui montre bien que la déclaration conciliaire Dignitatis Humanae ne fut sans doute pour rien dans ce virage, due plutôt,je pense, à l’entrée du Canada dans la mondialisation avant les autres,en raison sans doute d’un appel à l’immigration entendue dès lors comme s’étendant à la terre entière et non plus seulement aux deux nations fondatrices voire au monde chrétien dans son ensemble. Cinci pourra sans doute discuter et nuancer cela.

Tout ceci nous laisse avec notre problème : pourrait-on imaginer,sans pour autant rompre en visière de façon irréaliste avec la neutralité(laïcité) de l’Etat , un système politique qui reconnaitrait quelques invariants éthiques fondés sur la morale « judéo-chrétienne » et accorderait une sorte de primat historique à la confession ayant joué un rôle majeur dans la genèse de la nation : le catholicisme en France mais sans doute d’autres formes de christianisme dans d’autres pays d’Europe ? Ce serait mon souhait personnel, évidemment mais je n’ai aucune idée des moyens et des étapes . Je serais prêt à penser avec Altior que le retour , bien hypothétique aujourd’hui et fût-il presque symbolique , du Roi à la tête de notre pays y aiderait,sans illusion d’ailleurs : voyez l’Espagne où l’intronisation parlementaire du roi Felipe VI ne s’est même pas accompagnée d’un Te Deum le jour même où l’Eglise fêtait le Corpus Domini ( la Fête Dieu)..D’autres idées ? Je suis sec !

Et j’espère que ma typographie défaillante n’empêchera personne de lire ces quelques lignes qui m’ont côuté,quand même, une heure d’attention et de travail.Elles n'intègrent pas la contribution de 14h36 de Cinci , que je découvre à la seconde.

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Suliko
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Re: Des pasteurs de l'Eglise Catholique lancent un appel contre le Nouvel Ordre Mondial

Message non lu par Suliko » sam. 23 mai 2020, 19:29

Bonjour Cinci,
Mgr Lefevbre aurait été très heureux de la situation qui avait cours au Canada durant les années 1950, je pense.
Si vous parlez du Québec, c'est le cas. Je me souviens d'ailleurs qu'il cite cet exemple dans un de ses ouvrages ("Ils l'ont découronné", je crois). Il est d'ailleurs faux de réduire les Etats catholiques des années 60 à quelques dictatures (sans compter que le Portugal de Salazar ne peut pas honnêtement être qualifié ainsi). De plus, tous les pays sont loin d'être aussi centralisés que la France. Il pouvait donc y avoir au sein même d'un pays des régions où le catholicisme exerçait une forte influence politique et sociale.
Et c'est un fait que Rome, acquise au libéralisme, a poussé des Etats catholiques à laïciser leur Constitution...

Notre conversation me rappelle un petit texte lu il y a déjà longtemps sur le Forum catholique, et que je retrouve aujourd'hui :
https://archives.leforumcatholique.org/ ... num=558901

Et l'un des problèmes du système laïque, c'est qu'il n'est pas neutre, malgré ses prétentions. L'idée selon laquelle l'Etat ne devrait pas reconnaître officiellement une religion comme vraie reflète déjà en soi une certaine conception du monde qui n'est pas plus neutre que la vision catholique traditionnelle de l'Etat chrétien...

Et puisque je parlais de l'importance de la liturgie, il me semble pertinent de mentionner que la fête du Christ-Roi a été substantiellement modifiée suite au dernier concile. Alors qu'à l'origine (c'est-à-dire en...1925), elle avait été pensée comme une manifestation de la pleine royauté de Notre Seigneur, et notamment de Sa royauté sociale, cet aspect a été amoindri dans le NOM, qui y substitue un sens plus eschatologique. Il est significatif que l'hymne traditionnel de cet fête ait été modifié. A l'origine, il déclarait ceci :
Que les chefs des nations
Vous glorifient par des honneurs publics;
Que les maîtres et les juges vous confessent,
Que les lois et les arts portent votre marque.

Que les étendards des rois vous soient consacrés
Et resplendissent de vous être soumis,
Que votre douce autorité
Régente la patrie et les foyers.


Evidemment, la néo-liturgie a supprimé ces passages gênants...

Je finirai en citant l'encyclique LIbertas de Léon XIII:
C'est Dieu qui a fait l'homme pour la société et qui l'a uni à ses semblables, afin que les besoins de sa nature, auxquels ses efforts solitaires ne pourraient donner satisfaction, pussent la trouver dans l'association. C'est pourquoi la société civile, en tant que société, doit nécessairement reconnaître Dieu comme son principe et son auteur et, par conséquent, rendre à sa puissance et à son autorité l'hommage de son culte. Non, de par la justice; non, de par la raison, l'Etat ne peut être athée, ou, ce qui reviendrait à l'athéisme, être animé à l'égard de toutes les religions, comme on dit, des mêmes dispositions, et leur accorder indistinctement les mêmes droits.
[...]
Le vrai, le bien, on a le droit de les propager dans l'Etat avec une liberté prudente, afin qu'un plus grand nombre en profite; mais les doctrines mensongères, peste la plus fatale de toutes pour l'esprit ; mais les vices qui corrompent le coeur et les moeurs, il est juste que l'autorité publique emploie à les réprimer avec sollicitude, afin d'empêcher le mal de s'étendre pour la ruine de la société. Les écarts d'un esprit licencieux, qui, pour la multitude ignorante, deviennent facilement une véritable oppression, doivent justement être punis par l'autorité des lois, non moins que les attentats de la violence commis contre les faibles. Et cette répression est d'autant plus nécessaire que contre ces artifices de style et ces subtilités de dialectique, surtout quand tout cela flatte les passions, la partie sans contredit la plus nombreuse de la population ne peut en aucune façon, ou ne peut qu'avec une très grande difficulté se tenir en garde.
Accordez à chacun la liberté illimitée de parler et d'écrire, rien ne demeure sacré et inviolable, rien ne sera épargné, pas même ces vérités premières, ces grands principes naturels que l'on doit considérer comme un noble patrimoine commun à toute l'humanité. Ainsi, la vérité est peu à peu envahie par les ténèbres, et l'on voit, ce qui arrive souvent, s'établir avec facilité la domination des erreurs les plus pernicieuses et les plus diverses. Tout ce que la licence y gagne, la liberté le perd ; car on verra toujours la liberté grandir et se raffermir à mesure que la licence sentira davantage le frein.
[...]
A cette erreur comme à un genre se rattache une double opinion. Plusieurs, en effet, veulent entre l'Eglise et l'Etat une séparation radicale et totale; ils estiment que, dans tout ce qui concerne le gouvernement de la société humaine, dans les institutions, les moeurs, les lois, les fonctions publiques, l'instruction de la jeunesse, on ne doit pas plus faire attention à l'Eglise que si elle n'existait pas ; tout au plus laissent-ils aux membres individuels de la société la faculté de vaquer en particulier si cela leur plaît aux devoirs de la religion. Contre eux gardent toute leur force les arguments par lesquels Nous avons réfuté l'opinion de la séparation de l'Eglise et de l'Etat; avec cette aggravation qu'il est complètement absurde que l'Eglise soit, en même temps, respectée du citoyen et méprisée par l'Etat.
Les autres ne mettent pas en doute l'existence de l'Eglise, ce qui leur serait d'ailleurs impossible : mais ils lui enlèvent le caractère et les droits propres d'une société parfaite et veulent que son pouvoir, privé de toute autorité législative, judiciaire, coercitive, se borne à diriger par l'exhortation, la persuasion, ceux qui se soumettent à elle de leur plein gré et de leur propre vouloir. C'est ainsi que le caractère de cette divine société est dans cette théorie, complètement dénaturée, que son autorité, son magistère, en un mot, toute son action se trouve diminuée et restreinte, tandis que l'action et l'autorité du pouvoir civil est par eux exagérée jusqu'à vouloir que l'Eglise de Dieu, comme toute autre association libre, soit mise sous la dépendance et la domination de l'Etat. Pour les convaincre d'erreur, les apologistes ont employé de puissants arguments que Nous n'avons pas négligés Nous-mêmes, particulièrement dans notre encyclique Immortale Dei ; et il en ressort que, par la volonté de Dieu, l'Eglise possède toutes les qualités et tous les droits qui caractérisent une société légitime supérieure et de tous points parfaite.
Beaucoup enfin n'approuvent pas cette séparation de l'Eglise et de l'Etat ; mais ils estiment qu'il faut amener l'Eglise à céder aux circonstances, obtenir qu'elle se prête et s'accommode à ce que réclame la prudence du jour dans le gouvernement des sociétés. Opinion honnête, si on l'entend d'une certaine manière équitable d'agir, qui soit conforme à la vérité et à la justice, à savoir: que l'Eglise, en vue d'un grand bien à espérer, se montre indulgente et concède aux circonstances de temps ce qu'elle peut concéder sans violer la sainteté de sa mission. Mais il en va tout autrement des pratiques et des doctrines que l'affaissement des moeurs et les erreurs courantes ont introduites contre le droit. Aucune époque ne peut se passer de religion, de vérité, de justice: grandes et saintes choses que Dieu a mises sous la garde de l'Eglise, à qui il serait dès lors étrange de demander la dissimulation à l'égard de ce qui est faux ou injuste, ou la connivence avec ce qui peut nuire à la religion.
De ces considérations, il résulte donc qu'il n'est aucunement permis de demander, de défendre ou d'accorder sans discernement la liberté de la pensée, de la presse, de l'enseignement, des religions, comme autant de droits que la nature a conférés à l'homme. Si vraiment la nature les avait conférés, on aurait le droit de se soustraire à la souveraineté de Dieu, et nulle loi ne pourrait modérer la liberté humaine. Il suit pareillement que ces diverses sortes de libertés peuvent, pour de justes causes, être tolérées, pourvu qu'un juste tempérament les empêche de dégénérer jusqu'à la licence et au désordre. Là enfin où les usages ont mis ces libertés en vigueur, les citoyens doivent s'en servir pour faire le bien et avoir à leur égard les sentiments qu'en a l'Eglise. Car une liberté ne doit être réputée légitime qu'en tant qu'elle accroît notre faculté pour le bien; hors de là, jamais.


On ne saurait donc nier qu'il y a, depuis le concile, un total renversement de la position officielle de l'Eglise sur le sujet de la liberté religieuse. Pour résumer, on pourrait dire qu'autrefois :
1) l'Eglise s'opposait au principe libéral qui voit dans la liberté des cultes un droit intrinsèque de l'être humain, mais pouvait tolérer l'exercice des fausses religions dans un Etat catholique pour conserver la paix sociale. Donc : elle ne tolérait pas cette liberté des cultes, sauf en cas de danger pour la paix sociale, càd pour éviter un plus grand mal.
tandis qu'aujourd'hui :
2) l'Eglise considère la liberté religieuse comme un droit intrinsèque de l'être humain (cf Dignitatis Humanae : Les communautés religieuses ont aussi le droit de ne pas être empêchées d’enseigner et de manifester leur foi publiquement). On est dans un jugement totalement différent de la position catholique traditionnelle, puisqu'il s'agit à présent d'accepter la liberté des cultes, sauf si la paix sociale en est perturbée.
Je ne comprends pas comment font les catholiques pour accepter aujourd'hui ce qui était condamné hier. La religion ne peut pas être basée sur des sables mouvants ! Et si c'est une chose que de constater que la société occidentale actuelle n'est pas en faveur d'un Etat chrétien, c'en est une autre que de considérer cette situation comme intrinsèquement juste et conforme à l'enseignement de l'Eglise.
C'est pourquoi elle seule, prédestinée avant les générations et annoncée par les prophètes, la Mère du Créateur de tout l'univers, non seulement n'a participé en rien à la tache originelle, mais elle est toujours demeurée pure comme le ciel et toute belle. (extrait du règlement pour le monastère de Biélokrinitsa (1841)

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Re: Relations Église-État

Message non lu par Cinci » dim. 24 mai 2020, 12:45

Bonjour,

Gaudens :

En tout cas le catholicisme n’était sans doute pas religion officielle dans un pays où la majorité anglophone était plutôt épiscopalienne et protestante,le catholicisme étant essentiellement le fait des francophones. Ce qui montre bien que la déclaration conciliaire Dignitatis Humanae ne fut sans doute pour rien dans ce virage, due plutôt,je pense, à l’entrée du Canada dans la mondialisation avant les autres,en raison sans doute d’un appel à l’immigration entendue dès lors comme s’étendant à la terre entière et non plus seulement aux deux nations fondatrices voire au monde chrétien dans son ensemble. Cinci pourra sans doute discuter et nuancer cela.
Le catholicisme ne pouvait pas être la religion officielle du Canada moderne issu de la conquête britannique de 1760. Non. Simplement, parce que le souverain anglais est en même temps chef de l'Église anglicane. Et la Couronne britannique ne peut pas être à la tête d'un État catholique.

Et alors ce que je disais: la religion chrétienne était la seule religion faisant l'objet d'un statut officiel dans l'État canadien. Le christianisme, compris comme l'anglicanisme pour les Anglais (avec les autres déclinaisons protestantes) et le catholicisme pour les Français pour faire court. L'empire britannique peut s'accommoder du fait que certains des sujets de sa Majesté soient des catholiques.

Il est arrivé que le pouvoir anglais concédât aux habitants français de la vallée du Saint-Laurent le droit de conserver leur religion romaine et donc à l'Église catholique d'y conserver toutes ses possessions, son territoire de juridiction, etc. C'est l'Acte de Québec de 1774 qui aura servi de fondation légale ou constitutionnelle, toujours, à travers les autres remaniements éventuels ou refonte du pays sur de nouvelles bases. Ainsi, dans ce qui fut l'Acte de l'Amérique du nord britannique de 1867 : il fut établi qu'il revenait au pouvoir du gouvernement provincial du Québec de s'occuper (législativement) de domaines tels celui de l'éducation ou de la santé publique (charité, nécessiteux). Et, alors, c'est l'Église catholique qui prenait déjà l'éducation en charge, comme elle le faisait depuis le début de la colonisation française, et qui, de fait, n'aura qu'à continuer de le faire, comme avec le secteur hospitalier et toute la charité publique jusqu'en 1960.

Aucun politicien, aucun chef d'État canadien ne se serait permis de remettre en cause le statut particulier de l'Église catholique au Québec avant les années 1960, surtout lorsque la population du Québec était formée à plus de 80% de catholiques. C'est pourquoi un premier ministre du Québec, comme Duplessis, pouvait se permettre d'accrocher un beau grand crucifix catholique au-dessus du siège du président de l'Assemblée législative (Parlement de la province de Québec) dans les années 1930. Le pouvoir politique au Canada accordait un statut officiel aux Églises chrétiennes et à l'Église catholique.

Les immigrants qui venaient au Canada au XIXe et au XXe siècle étaient essentiellement des populations européennes et alors des chrétiens (des Anglais protestants, des Écossais, des Irlandais catholiques; ou des catholiques français, des Italiens, des Polonais ... voire des Allemands, des Ukrainiens ...)

Par conséquent

L'État canadien est un État démocratique, s'inspirant du parlementarisme britannique et ... et ne reconnaît officiellement que la religion chrétienne. Il en est bien ainsi avant l'époque charnière des années 1960/1970 et cette consécration définitive du changement de régime au Canada en 1982 ( = charte des droits et libertés, multiculturalisme, etc.)

Désormais ...

C'est l'avancée du libéralisme qui vient détruire l'ancien équilibre des choses. Et alors le Vatican, ainsi que nos ecclésiastiques canadiens, n'auront pas voulu mettre d'obstacles à cette recomposition de la société publique, ce changement des rapports au plan politique et tout. L'Église a collaboré très pacifiquement à ce changement.

Cinci
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Re: Relations Église-État

Message non lu par Cinci » dim. 24 mai 2020, 12:51

Gaudens :

Ce qui montre bien que la déclaration conciliaire Dignitatis Humanae ne fut sans doute pour rien dans ce virage
La déclaration conciliaire non.

Toutefois, le progressisme ou le libéralisme était déjà très présent dans les milieux catholiques et bien avant le concile Vatican II. Il y avait déjà une sorte d'influence ou d'interpénétration des idées entre la gauche en Europe (libéraux ou socialistes en Angleterre), les libéraux aux États-Unis et nombre de catholiques français de l'avant ou de l'après-guerre 1939-1945.

Un politicien comme Pierre Trudeau qui fut le père de la fameuse charte de 1982 au Canada, c'est un bonhomme qui fut très en contact avec des milieux catholiques libéraux en France comme en Angleterre, dans l'immédiat après-guerre, ainsi qu'avec une foule de professeurs, de penseurs et juristes socialistes anglais. Trudeau faisait ses délices de la revue catholique française Esprit, avec les idées personnalistes d'Emmanuel Mounier, etc. La bête noire de Trudeau fut le catholicisme traditionnel, l'emprise du cléricalisme sur la société civile, le nationalisme bien entendu (le fascisme).

Dans l'après-guerre, et d'autant plus après le concile Vatican II : l'Église ne pouvait pas offrir de résistance à l'éclosion de tout un programme de libéralisation de la société.

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