Poutine tel qu'il est

« Par moi les rois règnent, et les souverains décrètent la justice ! » (Pr 8.15)
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Poutine tel qu'il est

Message non lu par MB » sam. 07 oct. 2006, 16:52

Une expression rigolote employée par le tsar Vladimir...

En représailles contre la Géorgie, les écoles ont été priées d'envoyer aux flics les noms des enfants à consonance géorgienne. Par ailleurs, on a décidé d'inspecter les marchés, qui, de la bouche même de Poutine, sont des lieux "ethniquement pollués" (lu aujourd'hui dans le Figaro).

Il serait peut-être temps de se dire que Poutine, comme disait Chamberlain en 1939 à propos de quelqu'un d'autre, "n'est pas un gentleman".
Dernière modification par MB le sam. 07 oct. 2006, 17:09, modifié 1 fois.

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Message non lu par MB » sam. 07 oct. 2006, 17:04

J'apprends à l'instant qu'Anna Politkovskaïa, une grande journaliste, opposante à Poutine, enquêtrice sur la Tchétchénie et les crimes qu'on y commet, a été assassinée :

http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 230,0.html

A part ça, Poutine est quelqu'un de bien, naturellement. Quand donc ouvrira-t-on les yeux ?

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Message non lu par MB » dim. 08 oct. 2006, 17:59

Avé

Bon, quelques rappels pour situer les choses.

- La culture politique de la Russie n'est pas européenne. Plus exactement, le but du pouvoir n'y est pas de se mettre au service de la nation, mais de s'accroître le plus possible et de se soumettre le pays. On ne cherche pas à enrichir le peuple ou à l'élever ; on cherche à le mettre au service du pouvoir. Si, par extraordinaire, l'Etat accepte d'enrichir le pays et ses habitants, c'est seulement dans la mesure où cela lui permettra d'être plus puissant. Le but ultime de toute action politique en Russie, est exclusivement politique et non humain, spirituel, économique, social, culturel, etc. Ce qui explique 1° que le communisme ait pris dans ce pays, habitué au despotisme (je rappelle qu'avant tout le communisme est une idéologie de pouvoir), 2° que les dirigeants actuels de ce pays, le premier d'entre eux en tête, regrettent la fin de l'URSS ("la plus grande catastrophe de ce siècle", disait récemment Vladimir).

- Première conséquence : le pouvoir ne conçoit pas d'espace public. Nous, nous avons grandi dans un modèle de coopération, voire de bienveillance ; eux, dans un modèle de domination, voire d'humiliation. Donc, quand on discute avec un Russe en situation de pouvoir, quand nous faisons des concessions, nous pensons créer un espace d'entente par un geste de bonne volonté ; mais le Russe, lui, ramène cette concession à un recul, à une auto-humiliation. Loin donc de le satisfaire, elle va au contraire l'inciter à demander encore plus. C'est exactement ce qui se passe avec la Géorgie : Tbilissi a remis à la Russie les espions arrêtés, par geste de bonne volonté ; au lieu de se calmer, Moscou a redoublé les mesures hostiles à la Géorgie. Pour être honnête, ce type de procédés n'est pas spécifique de la Russie, mais des pays non-occidentaux en général (cf. le monde arabo-musulman...).

- Deuxième conséquence : le pouvoir est indifférent à toute vérité, à toute échelle de valeur, à toute vie humaine. On manipule les sources d'information disponibles, de l'actualité à l'histoire ; les soviétiques sont passés maîtres dans ces procédés, mais Custine les remarquait déjà, à propos des tsars, au 19ème siècle. Cela ne signifie pas que le pouvoir mente systématiquement : mais qu'il dira la vérité s'il juge cela utile. Quant à la vie humaine, il suffit de penser à la façon dont a été "réglée" la prise d'otages de Beslan. Dans un cas pareil, un pays occidental aurait eu comme priorité la sauvegarde de la vie des otages ; Poutine, lui, a eu comme priorité l'affirmation de ce qu'il ne se laisserait pas faire : ses services ont donc d'abord commencé par tuer les otages eux-mêmes pour montrer jusqu'où il était capable d'aller (c'est ce qu'on pourrait appeler le "principe de Kayzer Soze", pour ceux qui ont vu Usual Suspects). Et je renvoie bien sûr à tant d'autres atrocités, la campagne de Poutine en 2000, la Tchétchénie, etc. Sans parler du passé soviétique qui ne suscite absolument aucun remords (un Russe au pouvoir ne regrettera jamais Katyn ou les famines provoquées ukrainiennes).

- Autre chose importante encore : le dirigeant russe ne recule jamais. Il se souvient de toutes les avancées qu'il a faites, ou même projetées il y a plusieurs siècles, ou réalisées tout récemment. Par exemple, à l'époque de l'impératrice Elisabeth, il y a eu des projets de conquête de l'Europe tout entière : ils n'ont pas disparu, mais ont été mis de côté, ils resserviront le jour idoine. D'où le traumatisme vécu à la fin du communisme : des dizaines d'Etats satellites se sont émancipés, il a fallu faire reculer les troupes, et le pays a perdu une bonne fraction de son territoire. Il a fallu s'accommoder de l'avancée de l'UE et de l'OTAN, mais maintenant tout l'effort de la Russie consiste à mettre la main sur les anciennes républiques soviétiques, qui a terme doivent être réintégrées dans sa domination. Disons que les procédés ont été modernisés, on ne conquiert plus stricto sensu (quoique l'hypothèse ne soit jamais exclue), mais on laisse des bases militaires, on prend des participations via des sociétés aux ordres (c'était tout l'enjeu de l'affaire Ioukos) ; comme l'a dit Poutine lui-même en 2000, je crois : l'effort impérial doit passer par l'économie.

Venons-en à la Géorgie. Du côté Nord du Caucase, Moscou fait régner la terreur à travers la Tchétchénie, qui sert d'exemple aux autres républiques autonomes locales. Du côté Sud, la chose se passe à travers les affaires géorgiennes.
Le désir d'indépendance des républiques autonomes de Géorgie n'existait pas avant 1991 ; il a été suscité par la Russie, à travers l'établissement de bases militaires et le soutien à des tyranneaux locaux. L'Abkhazie n'est pas une Tchétchénie en petit : il n'y a pas eu, d'abord, un mouvement populaire réclamant l'indépendance, qui aurait été suivi d'une brutale répression géorgienne. L'indépendantisme local est une création du haut et non du bas. D'ailleurs il serait difficile de l'évaluer au niveau de populations qui vivent sous la férule de ces dictateurs... Quant aux mesures dites racistes que pratiquerait Tibilissi vis-à-vis de ses minorités, c'est tout simplement une pure invention des agences d'information moscovites. En revanche, le racisme anti-caucasien quotidien et soutenu plus ou plus ouvertement, à Moscou, c'est une réalité (il faut remarquer, au passage, que ce racisme est généralisé à toutes les ethnies, les Noirs notamment en sont de grandes victimes).
L'avantage des tyranneaux locaux est que, d'une part ils ne risquent pas de céder leur pouvoir à un autre (c'est d'ailleurs curieux, tous les Etats soutenus par la Russie, sans exception, sont des dictatures). D'autre part, ils permettent d'établir des bases russes, qui seront utiles le jour où il faudra reconquérir la Géorgie (de même que les bases russes en Transnistrie, qui permettent de faire pression et sur la Moldavie et sur l'Ukraine).

Je sais bien que ces considérations ont quelque chose d'anachronique : la conquête, l'annexion, la domination, ça ne se fait plus chez nous, Européens, depuis longtemps ; ce que je dis a l'air parano, j'en conviens. Mais je rappelle, une fois encore, que le pouvoir en Russie ne correspond pas à un cadre de pensée occidental.

Ce qui n'empêche pas de bien s'entendre avec des Russes (je ne parle ici que du Russe quand il est au pouvoir), ou d'apprécier d'autres aspects de la civilisation russe, évidemment ; mais ce n'est pas parce qu'on aime Tolstoï qu'on doit soutenir Poutine (s'agissant de Tolstoï, ce serait d'ailleurs un comble). Raison supplémentaire pour soutenir des gens comme A. Politkovskaïa, qui relevait la dignité de son pays en luttant contre le mensonge.

Amicalement
MB
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Message non lu par FMD » dim. 08 oct. 2006, 21:45

Bonsoir MB,
MB a écrit :Quant aux mesures dites racistes que pratiquerait Tibilissi vis-à-vis de ses minorités, c'est tout simplement une pure invention des agences d'information moscovites.

J'aimerais bien que ce soit une pure invention colportée par RIA Novosti hélas de nombreux faits préoccupants tendent à infirmer cette assertion. L'impérialisme géorgien n'épargne aucun aspect de la vie quotidienne des nombreuses minorités résidant en Géorgie. Non content de ruiner des régions entières du fait de la fermeture des bases militaires russes présentes sur le sol géorgien, le pouvoir central mène une politique extrêmement agressive à l'encontre des symboles culturels et religieux des différentes communautés: églises expropriées au profit de l'Église orthodoxe géorgienne, instituteurs attachés à la défense des langues minoritaires renvoyés, inégalités récurrentes entre les fonctionnaires « de souche » et les autres, etc. On peut de surcroît se demander pourquoi les Occidentaux n'émettent pas à l'égard de la Géorgie les remarques qu'ils se permettent pourtant au sujet de la Tchétchénie. Certes, la situation du peuple tchétchène est bien plus bien plus préoccupante que celle des minorités ethniques et linguistiques vivant en Géorgie, toutefois le problème de fond demeure inchangé: à quoi bon maintenir des frontières injustes, sources de conflits sanglants? Pourquoi les Tchétchènes de Russie et pas les Abkhazes, les Ossètes, les Adjares, les Arméniens et les Azéris de Géorgie?[/align]

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Message non lu par MB » mar. 10 oct. 2006, 11:59

Avé

Il faudrait voir tout d'abord pourquoi 200 000 Géorgiens ont été expulsés d'Abkhazie ; voir le nombre d'attentats dont l'ancien président géorgien a fait l'objet, attentats clairement liés aux services russes (sans parler de l'assassinat de son prédécesseur) ; voir aussi que l'insurrection abkhaze a précisément été lancée par Moscou pour obliger les Géorgiens, en 1995, à accepter le maintien de 4 bases russes ; voir aussi que ces bases russes, malgré un traité, l'année dernière, qui prévoyait leur démantèlement, sont toujours là.
La Russie cherche à reconquérir la Géorgie, soit directement, soit indirectement. Il faudrait qu'on l'accepte noir sur blanc, enfin.

Quant à votre allusion à la politique économique de Poutine, il faut la nuancer sérieusement. La croissance actuelle - dont je me réjouis en soi - provient certes du dynamisme de beaucoup de Russes, mais aussi et surtout de l'évolution des cours des matières premières. Pour ce qui est de la "moralité" de l'économie, vous n'y êtes pas : Poutine ne cherche pas des gens honnêtes, mais des gens qui lui obéissent. D'ailleurs, si le bon Vlad cherchait à installer des gens honnêtes, pourquoi favoriserait-il des potentats locaux comme le dirigeant officiel de la Tchétchénie, ou pire, celui de la Kalmoukie (qui, en plus d'être malfaisant, nage en plein délire clinique) ? Pourquoi tolèrerait-il l'assassinat de quelques rares dirigeants intègres (le récent argentier, ou quelques années plus tôt A. Lebed) ?
La violence et la corruption ne sont pas moindres que dans les années 90 ; seulement, elles sont dirigées en faveur du pouvoir.
Au fait, lisez cet article : http://www.lefigaro.fr/debats/20061010. ... utine.html

Amicalement

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Message non lu par jean_droit » mar. 10 oct. 2006, 13:19

Je pense que nous "européens de l'ouest" et, surtout, nous français, nous ferions bien de nous arrêter de critiquer tous ceux qui ne sont pas fait sur le "moule européen continental de l'ouest".
Je parle des critiques sans fin des américains, des russes, des anglais ....
Qu'il est grand notre orgueil nous qui voulons donner des conseils au monde ...
Sans que cela nous coûte aucun effort !
Ne passons pas notre temps à donner des leçons au monde !

Charles
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Message non lu par Charles » mar. 10 oct. 2006, 23:14

MB a écrit :La culture politique de la Russie n'est pas européenne.
Je m'étonne d'une telle énormité de ta part ! La culture politique russe a toujours été européenne. Des fondations varègues aux derniers avatars du marxisme. La russie s'est toujours construite en empruntant à l'Europe et en réaction à l'Asie (l'empire gengiskhanide). La Scandinavie, Rome, Byzance, la Prusse, Marx ont façonné la Russie.
MB a écrit : Plus exactement, le but du pouvoir n'y est pas de se mettre au service de la nation, mais de s'accroître le plus possible et de se soumettre le pays.
Que penses-tu de l'entente UMP/PS pour évacuer les projets politiques alternatifs des conseils régionaux ? Le pouvoir, chez nous, n'a pas d'autre but que de soumettre le pays et de s'accroître indéfiniment. Et le nouveau doyen de l'université Louvain en Belgique, le président de Petrofina ? Qu'en penses-tu ? Le fait que Renault dirige l'UFR de philo à Paris IV, un libéral orthodoxe, neutre, mou et sans talent, c'est un hasard ?
MB a écrit :On ne cherche pas à enrichir le peuple ou à l'élever ; on cherche à le mettre au service du pouvoir.
Et que penses-tu de cette élite libérale qui nous a collé cette dette abyssale ? Son but est d'enrichir la France ? Tu plaisantes...
MB a écrit : Le but ultime de toute action politique en Russie, est exclusivement politique et non humain, spirituel, économique, social, culturel, etc.
Le but de nos "politiques" est d'abaisser la sphère politique et de servir l'économie... d'où les grands chantiers de la sécurité routière et de l'interdiction de fumer dans les lieux publics. Et d'où le tabou absolu sur la première solution logique et pragmatique au problème des retraites et qui est de dynamiser la natalité. Je me souviens d'un débat avec Namias, Ockrent, Duhamel sur les retraites... ils ont parfaitement posé le problème et passé en revue toutes les solutions sauf une "on ne va quand même pas parler de la démographie" (rires de tous)...
MB a écrit :Ce qui explique 1° que le communisme ait pris dans ce pays, habitué au despotisme (je rappelle qu'avant tout le communisme est une idéologie de pouvoir),
Le communisme a pris dans de nombreux pays et même dans les plus inattendus comme le Cambodge. Le PCF faisait 30% des voix en France dans les années 50, bien plus que n'ont eu les communistes russes pour prendre le pouvoir.

De plus si la Russie tsariste avait été si despostique, les communistes n'auraient pas eu tant de facilité à faire leur coup d'état. La Russie du début du XX° siècle ressemblait au reste de l'Europe centrale : boom industriel et économique, développement ultrarapide, émergence d'une classe moyenne libérale, maturation de la bourgeoisie juive, etc.
MB a écrit : 2° que les dirigeants actuels de ce pays, le premier d'entre eux en tête, regrettent la fin de l'URSS ("la plus grande catastrophe de ce siècle", disait récemment Vladimir).
Oui, la Russie s'enveloppait dans le mpanteau de l'URSS.
MB a écrit :- Première conséquence : le pouvoir ne conçoit pas d'espace public. Nous, nous avons grandi dans un modèle de coopération, voire de bienveillance ; eux, dans un modèle de domination, voire d'humiliation.
C'est vrai, et c'est la faute du marxisme. Sans Marx, la Russie aurait évolué comme l'Angleterre ou l'Autriche-Hongrie.
MB a écrit :Donc, quand on discute avec un Russe en situation de pouvoir, quand nous faisons des concessions, nous pensons créer un espace d'entente par un geste de bonne volonté ; mais le Russe, lui, ramène cette concession à un recul, à une auto-humiliation. Loin donc de le satisfaire, elle va au contraire l'inciter à demander encore plus. C'est exactement ce qui se passe avec
tous ceux qui ont du pouvoir, Américains, Européens, Japonais, Chinois... tu es presque naïf, pour le coup.
MB a écrit : la Géorgie : Tbilissi a remis à la Russie les espions arrêtés, par geste de bonne volonté ; au lieu de se calmer, Moscou a redoublé les mesures hostiles à la Géorgie. Pour être honnête, ce type de procédés n'est pas spécifique de la Russie, mais des pays non-occidentaux en général (cf. le monde arabo-musulman...).
;-) allons, allons... tu idéalises l'Occident. Vois comme les EU et l'ONU se sont comporté avec l'Irak...
MB a écrit :- Deuxième conséquence : le pouvoir est indifférent à toute vérité, à toute échelle de valeur, à toute vie humaine. On manipule les sources d'information disponibles, de l'actualité à l'histoire ; les soviétiques sont passés maîtres dans ces procédés,
200.000 enfants tués chaque année par avortement en France... mais tout va bien...
MB a écrit : mais Custine les remarquait déjà, à propos des tsars, au 19ème siècle. Cela ne signifie pas que le pouvoir mente systématiquement : mais qu'il dira la vérité s'il juge cela utile.
Et nos Blair, Schroder, Berlusconi, Chirac, Mitterrand sont différents ??????? Je suis estomaqué par ta crédulité !!! Tu as vu Breton et Coppé sur LCI annoncer le budget 2007 ? Une pure opération de désinformation.
MB a écrit :Quant à la vie humaine, il suffit de penser à la façon dont a été "réglée" la prise d'otages de Beslan. Dans un cas pareil, un pays occidental aurait eu comme priorité la sauvegarde de la vie
Des 200.000 enfants qu'on empêche de naître chaque année ? Et qui constituent le centre sacrificiel de notre société. Leur expulsion garantissant notre bien-être commun... notre existence même. Puisque dans une société libérale, on n'existe pas si l'on n'est pas bien dans sa peau.
MB a écrit : des otages ; Poutine, lui, a eu comme priorité l'affirmation de ce qu'il ne se laisserait pas faire : ses services ont donc d'abord commencé par tuer les otages eux-mêmes pour montrer jusqu'où il était capable d'aller (c'est ce qu'on pourrait appeler le "principe de Kayzer Soze", pour ceux qui ont vu Usual Suspects). Et je renvoie bien sûr à tant d'autres atrocités, la campagne de Poutine en 2000, la Tchétchénie, etc.
Non, effectivement, le gouvernement français donne une prime de 12.000 euros aux étrangers qui viennent sur notre sol violer la loi française...
MB a écrit : Sans parler du passé soviétique qui ne suscite absolument aucun remords (un Russe au pouvoir ne regrettera jamais Katyn ou les famines provoquées ukrainiennes).
Je ne sais pas pour l'Ukraine, mais les russes ont fini par reconnaître leur responsabilité pour Katyn.
MB a écrit : - Autre chose importante encore : le dirigeant russe ne recule jamais. Il se souvient de toutes les avancées qu'il a faites, ou même projetées il y a plusieurs siècles, ou réalisées tout récemment.
C'est tout simplement que les dirigeants russes sont des hommes politiques et d'Etat... nos "politiques" se cantonnent à la sécurité routière et aux paquets de cigarettes... parce qu'ils ont abdiqué la mission confiée à eux par le peuple (et bazardant du même coup notre citoyenneté à tous et la dignité afférente). Le pouvoir s'est déplacé chez nous, de la politique à l'économie, des politiques aux entreprises...
MB a écrit :Par exemple, à l'époque de l'impératrice Elisabeth, il y a eu des projets de conquête de l'Europe tout entière : ils n'ont pas disparu, mais ont été mis de côté, ils resserviront le jour idoine. D'où le traumatisme vécu à la fin du communisme : des dizaines d'Etats satellites se sont émancipés, il a fallu faire reculer les troupes, et le pays a perdu une bonne fraction de son territoire. Il a fallu s'accommoder de l'avancée de l'UE et de l'OTAN, mais maintenant tout l'effort de la Russie consiste à mettre la main sur les anciennes républiques soviétiques, qui a terme doivent être réintégrées dans sa domination. Disons que les procédés ont été modernisés, on ne conquiert plus stricto sensu (quoique l'hypothèse ne soit jamais exclue), mais on laisse des bases militaires, on prend des participations via des sociétés aux ordres (c'était tout l'enjeu de l'affaire Ioukos) ; comme l'a dit Poutine lui-même en 2000, je crois : l'effort impérial doit passer par l'économie.
Au début du XX° siècle, il y a eu des projets de gouvernement mondial, d'inspiration américaine.... tu crois que ces projets ont disparu ???? Je connais une journaliste du Figaro, libérale, qui m'a dit un jour : "les peuples sont trop nuls pour se gouverner eux-mêmes, la démocratie ne fonctionne pas bien, il faut des gens compétents au pouvoir et l'illusion pour les peuples qu'ils aient quelque chose à voir avec le choix de leurs dirigeants"... Journaliste au Figaro, tu peux lire souvent sa signature dans le quotidien.
MB a écrit : Je sais bien que ces considérations ont quelque chose d'anachronique : la conquête, l'annexion, la domination, ça ne se fait plus chez nous, Européens, depuis longtemps ; ce que je dis a l'air parano, j'en conviens.
Tu as entendu parler de l'opération Daguet ? Que fichent nos soldats en Afghanistan ? Pourquoi, les entreprises européennes ont fait main basse sur les fleurons de l'est et ont barré les projets de développement autonome des industriels des ces pays, après la chute du communisme ? Cela a été la fête, les soldes, le grand marché des fêtes de fin d'années, pour nos entreprises.... et si un projet polonais ou autre prétendait aboutir, pressions, emb^cuches, coups bas... tout pour les dézinguer au décollage... Mon cher MB, tu rêves éveillé !!!!!
MB a écrit : Mais je rappelle, une fois encore, que le pouvoir en Russie ne correspond pas à un cadre de pensée occidental.
C'est tout le contraire, il correspond très précisément au cadre occidental. Poutine n'a pas voulu laisser partir à des étrangers les ressources russes en pétrole et gaz. Tu as déjà écouté le discours de l'UMP sur l'industrie de l'armement, le nucléaire et l'énergie ? Et d'ailleurs quand leurs camarades socialistes de l'ENA alternent au pouvoir, rien n'y change.

Poutine pense exactement comme Villepin, Chirac, Blair ou Schroder (qui bosse pour lui d'ailleurs). Tu as la naïveté de croire que les dirigeants russes pensent différemment seulement parce qu'ils ne veulent pas jouer le rôle de la proie... MB, comment en arrives-tu à cela ? Soyons sérieux....

Amitiés

Charles
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Message non lu par Charles » mar. 10 oct. 2006, 23:19

J'ajoute que la mise au pas des oligarques, tant décriée chez nous a été une décision remarquable, politiquement : c'est ce qui a fait qu'au lieu d'être un pays du tiers-monde vassal des banques occidentales, la Russie est aujourd'hui créditrice. Poutine a refusé que l'économie russe soit bradée à des companies étrangères et que l'argent des ressources naturelles profitent à des intérêts privés étrangers... aujourd'hui, c'est son jour de triomphe et c'est un triomphe politique au sens classique du terme (politique).

Christian
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Message non lu par Christian » mer. 11 oct. 2006, 0:02

Je reviens à l’instant d’une manifestation silencieuse devant l’Ambassade de Russie à Londres en mémoire de la journaliste Anna Politkovskaia, assassinée samedi dernier.

A qui profite le crime ? Le froid Poutine, en tout cas, n’a pas pleuré la journaliste. Sa déclaration à la presse allemande, telle que rapportée par la BBC, que la mort de Politkovskaia avait fait plus parler d’elle que ses écrits, était un crachat sur sa tombe.

Après la dévastation de la Tchétchénie, le musellement de la presse, les bourdes meurtrières de Beslan, après le procès le plus stalinien depuis la pérestroïka contre Khodorkovsky et Lebedev et la confiscation du géant pétrolier Yukos (qualifiée par le propre conseiller économique du Kremlin de « plus grande spoliation de l’Histoire »), le « Mugabe des steppes » ne cesse d’inscrire des fripouilleries à son palmarès.

C’est à cet homme que Chirac, impudemment, a conféré la Légion d’Honneur. Tout homme de bien qui a reçu cette décoration se devrait de la retourner.

Christian

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Message non lu par MB » mer. 11 oct. 2006, 12:44

Pardonne-moi Charles, mais là c'est toi qui n'as rien compris.

- Le simple fait de comparer un ensemble de meurtres et de mensonges en Russie, avec un ensemble de petites magouilles minables en France, relève de la catégorie du grotesque ; mettra-t-on en balance Mao et les combines d'Albin Chalandon ? Himmler et les magouilles de Tardieu ? Réfléchis un peu. Tu veux comparer l'assassinat de Lebed avec tes petites intrigues de conseils régionaux, t'es drôle toi... Allez, on va provoquer un accident d'hélicoptère pour se débarrasser de J.-P. Huchon !
D'ailleurs pour un Russe lui-même, ce qui se passe dans la politique en Occident n'est pas scandaleux, mais ridicule ; l'idée même d'une comparaison lui paraît grotesque ; les Russes ont plus d'ambition, ils voient plus loin, ils ne s'arrêtent pas à des petites questions de forme comme chez nous. J'ai un exemple, en passant, qui résume bien la chose, il s'agit d'une scène d'Ivan le Terrible. D'un côté, le tsar dont le regard porte loin ; de l'autre, le roi de Pologne en sa cour, représenté comme une marionnette Renaissance avec des dentelles et des boucles d'oreilles, au milieu de chevaliers de carnaval, le tout dans une étiquette loufoque : pour les Russes, l'Occident, c'est ça. Donc ne me parle pas de Georges Frêche ou d'Alain Renaut là-dedans, c'est pitoyable (évoquer un néo-kantien quand on cause de Poutine ! Il faut avoir un vrai sens du comique).

La différence, en matière de corruption, entre la France et la Russie, est simple. En Russie, tout le monde ou presque qui a un degré de responsabilité est corrompu (du ministre au guichetier) ; j'ai des témoignages. Ce n'est pas spécifique à notre époque, ni à celle de l'URSS : c'était déjà le cas du temps des tsars (alors qu'en Occident, à ce moment, on commençait à construire l'ethos du fonctionnaire respectueux et obéissant ; tiens, voilà déjà une chose qui nous différencie d'eux en terme d'"Occident"). En France, le ministre et son directeur de cabinet sont corrompus, mais les fonctionnaires font leur boulot. Le libéral que je suis reconnaît l'efficacité de l'éthique du service public à la française, tu devrais admettre mon ouverture d'esprit... Autre chose encore : les montants liés à la corruption en Russie sont immensément plus élevés en valeur absolue et en valeur relative (ce pays étant moins riche), ces pratiques sont donc d'autant plus nuisible. 1 milliard détourné par Chirac et son parti ? qu'est-ce que ça vaut par rapport aux milliards détournés par l'élite poutinienne, dans un pays plus pauvre que nous ? Il y a un moment où le changement de valeur devient changement de nature.
Cela dit - et je te ferai cette concession - il est vrai que la France est le pays occidental qui, dans sa manière de voir le pouvoir, depuis le Moyen-Age, ressemble le plus à la Russie... Ce qui est détestable chez nous, et que tu as évoqué, évoque en petite échelle un état d'esprit commune à nos deux pays. Ce n'est peut-être pas pour rien, finalement, que les Français aiment tellement la Russie : ce pays hypostasie tous leurs fantasmes de pouvoir (même chose avec la Chine). Mais ces points communs, avoue-le, ne sont pas très flatteurs.


- J'entends encore le coup de la comparaison avec l'Irak ou l'Afghanistan, les E-U, l'ONu etc. D'abord une ptite précision, j'ai parlé, explicitement, de l'Europe et non des E-U. De même, quelques rappels car tu mélanges plusieurs choses (je sais, ça fait Schtroumpf lunettes, mais le malheureux, c'est que pour corriger un paragraphe faux, il faut en écrire quatre) :

1° il y a eu deux guerres du golfe ; la première en 1991. Elle fait suite à l'invasion du Koweit par l'Irak et relève de la guerre juste (avec approbation générale de la communauté internationale) ; qu'on y ait commis des atrocités n'enlève rien au fait au fait que l'attaque contre l'Irak était justifiée. Rappelle-toi la différence entre ius ad bellum et ius in bello. Si la France y a participé, rien que de très justifié. Et pour le coup, ça n'a pas été une guerre d'invasion, puisque les troupes alliées se sont vite retirées, au grand regret des Kurdes et surtout des Chiites du sud - tu connais l'histoire.

2° la deuxième guerre du golfe a été décidée unilatéralement par les E-U et leurs alliés, à partir d'une fausse justification. Nous n'y participons pas. Elle a fait de nombreux morts, mais en ce moment, ceux qui tuent le plus d'Irakiens, ce sont les Irakiens eux-mêmes (au fait, un article qui te plaira : http://www.spiked-online.com/index.php? ... icle/1700/ - "Iraq : the first suicide state"). D'ailleurs, en général, les premières victimes des Arabes sont les Arabes eux-mêmes, mais je dévie du sujet.

3° la guerre actuelle d'Afghanistan, à laquelle la France participe, est justifiée. Je te rappelle que le 11 septembre est un acte de guerre qui a été planifié de là-bas, avec la complicité des talibans. Il est donc juste de répliquer sur place. Encore une fois, que les alliés commettent là-bas un certain nombre de bêtises n'enlève rien à la justice générale qui préside à l'initiative de cette guerre. Et comme tu le sais, les talibans et ceux qui les soutiennent veulent notre peau, nous avons le droit de nous défendre.

Tu commets donc une faute intellectuelle majeure quand tu mets tout cela ensemble. Ces cas sont différents, et ne sauraient être confondus ; comment peut-on avoir un jugement clair en faisant ainsi ? Il faudrait d'ailleurs commencer à concevoir comme non-contradictoire que la France refuse la 2me guerre du Golfe et participe, tout à la fois, à celle d'Afghanistan.

Comment peux-tu mettre en balance tout cela avec la Tchétchénie ? Tiens, je vais te trouver un équivalent : imagine que la France jette en pâture à son armée les Pyrénées-Orientales afin de contrer le séparatisme catalan ! Allez ! 30 000 morts dans la prise de Perpignan, des zones entières où l'on ne trouve, dans les villages, qu'un homme pour huit femmes (les commandos de l'armée tuent tous les hommes, violent les femmes, et les hommes qui restent fuient à l'étranger), et pendant ce temps-là, un pouvoir collaborateur dont le cacique se fait construire une piscine au milieu de locaux qui n'ont pas une seule goutte d'eau dans leurs ruines.
A vrai dire, il y a eu chez nous un cas proche de ce type, la guerre d'Algérie ; sauf que c'était il y a plus de 40 ans, et que nous ne cessons depuis de nous en repentir, souvent pour de fausses raisons en plus. Voilà une chose que les Russes ne feront pas (ils ont reconnu Katyn, certes, mais jamais ils le ne regretteront : ce serait pour eux un recul, donc une humiliation) ; non qu'ils éprouvent du remords à la suite d'une série de meurtres, mais pour eux c'est un événement politique comme un autre ; pourquoi le regretter ?

- Quand je te dis que la culture politique de la Russie n'est pas européenne, je pèse mes mots. Ce qui veut dire ceci : la "culture politique" n'est pas l'ensemble du pays. Par exemple les élites pétersbourgeoises sont (ou étaient, à vrai dire) très européanisées, c'est même la crème de l'Europe. Mais la culture politique, c'est autre chose : ce sont les représentations politiques, les pratiques jugées légitimes ou non, le système politique. Et là, je suis désolé, mais je te répète, je te réaffirme, que ces gens ne pensent pas comme nous. Toi qui aimes la Russie, tu devrais être au courant du débat qui la traverse depuis deux siècles : sommes nous européens ou asiates ? occidentaux ou slavophiles ? Le simple fait que cette discussion ne soit toujours pas tranchée, rebondisse encore aujourd'hui, devrait te mettre la puce à l'oreille.

Tu as tout à fait le droit de préférer Poutine à d'autres, ou à Yeltsine. Le président actuel est un professionnel, quelqu'un de très efficace (commencer comme tortionnaire au KGB, c'est une bonne école) ; ça nous change de l'ivrogne précédent. Mais ça n'est pas suffisant, et je ne comprends pas ton absence totale d'esprit critique. Il nous enverrait des chars et des commandos lance-flammes que tu continuerais à persifler sur les faux électeurs de Dominati...

Allez, à bientôt !
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Message non lu par MB » mer. 11 oct. 2006, 13:05

Charles a écrit :J'ajoute que la mise au pas des oligarques, tant décriée chez nous a été une décision remarquable, politiquement : c'est ce qui a fait qu'au lieu d'être un pays du tiers-monde vassal des banques occidentales, la Russie est aujourd'hui créditrice. Poutine a refusé que l'économie russe soit bradée à des companies étrangères et que l'argent des ressources naturelles profitent à des intérêts privés étrangers... aujourd'hui, c'est son jour de triomphe et c'est un triomphe politique au sens classique du terme (politique).
Revois l'étymologie de triomphe ; ca te renverra à une période historique que je connais bien.

La Pologne était submergée de dettes extérieures en 1989, c'était même l'un des pays les plus endettés du monde. Aujourd'hui, ce n'est qu'un lointain souvenir. A-t-on employé les mêmes méthodes ?

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Message non lu par MB » mer. 11 oct. 2006, 13:20

Allez, je te cite encore, mais je n'y tiens plus...

"Le communisme a pris dans de nombreux pays et même dans les plus inattendus comme le Cambodge. Le PCF faisait 30% des voix en France dans les années 50, bien plus que n'ont eu les communistes russes pour prendre le pouvoir.

De plus si la Russie tsariste avait été si despostique, les communistes n'auraient pas eu tant de facilité à faire leur coup d'état. La Russie du début du XX° siècle ressemblait au reste de l'Europe centrale : boom industriel et économique, développement ultrarapide, émergence d'une classe moyenne libérale, maturation de la bourgeoisie juive, etc.
"

- Le communisme a pris le pouvoir dans des pays habitués au "mode de production despotique", comme aurait dit Marx, et non dans les démocraties occidentales.
Tu parles du Cambodge, ben ça tombe bien : les grands travaux meurtriers de Pol Pot ont leur équivalent plusieurs fois répété dans l'histoire de ce pays (chaque nouveau roi faisait construire un mausolée, avec des canaux, des lacs artificiels, des travaux prenant des années et employant des quasi-esclaves : ce que tu vois au Musée Guimet en est le souvenir). Regarde les autres pays : Chine, Russie...
Tiens, puisque tu parles de la Russie, c'est précisément parce qu'elle était despotique qu'elle a été victime du coup d'Etat communiste. Un despotisme paraît fort, mais il suffit d'une petite semaine de fragilité, comme cela arrive fatalement, pour que quelques dizaines d'hommes décidés réussissent à prendre le pouvoir. D'ailleurs, la Russie de ce moment n'est pas à proprement parler adespotique (je te rappelle la répression de 1905, la dissolution des efforts démocratiques...). Le communisme est - je l'ai dit ailleurs - une idéologie non du bonheur du peuple, mais une doctrine de pouvoir : il s'agit de soumettre le pays entier au politique ; peu importe le résultat, le politique est le plus important. En ce sens, c'est une modernisation du despotisme oriental, et cela ne peut être facilement conçu que dans des cerveaux qui y sont habitués.

- Pour les pays occidentaux qui ont voté coco dans les années 50 (ou avant), tu devrais réfléchir... Il s'agit de la France, de l'Italie, de l'Espagne jusqu'en 39... pourquoi tout cela, dans sa forme souvent la plus virulente, dans des pays catholiques ? pourquoi les pays protestants se sont-ils convertis si vite à la social-démocratie et ont abandonné le marxisme pur et dur ? Ca donne à réfléchir... la solution me paraît simple : le catholique d'autrefois est habitué à une autorité morale unique et exclusive, et non à la confrontation des opinions. Forcément, ça guide sa manière de penser même losqu'il a cessé d'être catholique...

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Message non lu par elisseievna » mer. 11 oct. 2006, 16:22

Vous allez vite en besogne MB,

Politovskaya a pu heurter les interets de pas mal de gens, depuis les nazis russes jusqu'a des mafieux tchetchenes ou russes, en passant par des barbouzeux enervés se prenant pour des heros. Poutine n'est pas forcement LE coupable, en quoi cela lui sert il vraiment ? Il y a quelques semaines a peine, le dirigeant de la banque russe a été assassiné lui aussi : était ce l'interet de Poutine ?
Roublev, peintre de genie, chretien ou pas.

Charles
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Message non lu par Charles » mer. 11 oct. 2006, 22:12

Très cher MB,
MB a écrit :Pardonne-moi Charles, mais là c'est toi qui n'as rien compris.

- Le simple fait de comparer un ensemble de meurtres et de mensonges en Russie, avec un ensemble de petites magouilles minables en France, relève de la catégorie du grotesque ; mettra-t-on en balance Mao et les combines d'Albin Chalandon ? Himmler et les magouilles de Tardieu ? Réfléchis un peu. Tu veux comparer l'assassinat de Lebed avec tes petites intrigues de conseils régionaux, t'es drôle toi... Allez, on va provoquer un accident d'hélicoptère pour se débarrasser de J.-P. Huchon !
Nos méthodes ne sont en rien différentes de celles des russes. Nous assassinons sans le moindre complexe. Le SAC de De Gaulle, où Pasqua à fait ses armes, tuait les opposants sans l'ombre d'une hésitation. Nous assassionons, neutralisons, pourrissons, torturons, expulsons en Occident tous ceux qui nous gènent. Les irlandais (méthodes du très libéral gouvernement anglais), les basques (méthodes du gouvernement espagnol), les opposants à l'avortement (méthodes du gouvernement français), les gauches (méthodes du gouvernement italien), etc. etc. Et quand "l'ennemi" est au loin dans le tiers-monde... cela donne la guerre en Irak et autres cochonneries.

MB a écrit : D'ailleurs pour un Russe lui-même, ce qui se passe dans la politique en Occident n'est pas scandaleux, mais ridicule ; l'idée même d'une comparaison lui paraît grotesque ; les Russes ont plus d'ambition, ils voient plus loin, ils ne s'arrêtent pas à des petites questions de forme comme chez nous.
Non, il ont exactement la même ambition, ni plus, ni moins, et c'est pour cela qu'ils sont vus comme des rivaux. Et aussi comme un danger : si le tiers-monde commence à relever la tête (l'Occident pense la Russie comme devant appartenir au tiers-monde), si chaque pays possédant des ressources énergétique commence à affirmer sa souveraineté et refuser la vassalité à l'Occident... où va-t-on ? C'est quand même inadmissible que la rente pétrolière russe ait servi a rembourser la dette de la Russie et l'ait dégagé de son obligation envers les banques occidentale ! Plutôt que cet argent aillent directement chez nous et que la Russie continue de s'enfoncer dans un après-communisme tiers-mondisé !!!!! Inadmissible ! Et quelle nullité que ce Poutine qui obtient de tels résultats... ;-)
MB a écrit : J'ai un exemple, en passant, qui résume bien la chose, il s'agit d'une scène d'Ivan le Terrible. D'un côté, le tsar dont le regard porte loin ; de l'autre, le roi de Pologne en sa cour, représenté comme une marionnette Renaissance avec des dentelles et des boucles d'oreilles, au milieu de chevaliers de carnaval, le tout dans une étiquette loufoque : pour les Russes, l'Occident, c'est ça. Donc ne me parle pas de Georges Frêche ou d'Alain Renaut là-dedans, c'est pitoyable (évoquer un néo-kantien quand on cause de Poutine ! Il faut avoir un vrai sens du comique).
Je te dis seulement que le jour où le PDG de total ou d'EADS sera le président de la Sorbonne, tu feras la gueule. Et déjà le fait que Renault soit à la tête de l'UFR de philo montre qu'on va aussi chez nous dans ce sens.
MB a écrit : La différence, en matière de corruption, entre la France et la Russie, est simple. En Russie, tout le monde ou presque qui a un degré de responsabilité est corrompu (du ministre au guichetier) ; j'ai des témoignages. Ce n'est pas spécifique à notre époque, ni à celle de l'URSS : c'était déjà le cas du temps des tsars (alors qu'en Occident, à ce moment, on commençait à construire l'ethos du fonctionnaire respectueux et obéissant ; tiens, voilà déjà une chose qui nous différencie d'eux en terme d'"Occident"). En France, le ministre et son directeur de cabinet sont corrompus, mais les fonctionnaires font leur boulot. Le libéral que je suis reconnaît l'efficacité de l'éthique du service public à la française, tu devrais admettre mon ouverture d'esprit... Autre chose encore : les montants liés à la corruption en Russie sont immensément plus élevés en valeur absolue et en valeur relative (ce pays étant moins riche), ces pratiques sont donc d'autant plus nuisible. 1 milliard détourné par Chirac et son parti ? qu'est-ce que ça vaut par rapport aux milliards détournés par l'élite poutinienne, dans un pays plus pauvre que nous ? Il y a un moment où le changement de valeur devient changement de nature.
La belle affaire, on est en France un peu moins corrompu qu'en Russie, et c'est pour cela qu'on peut se permettre de donner des leçons aux russes. Il n'y a pas en France une seule opération de BTP qui soit propre. Tout le monde le sait en plus. Et il y a tout le reste du Crédit Lyonnais à Elf en passant par tous les degrés de l'économie française.

MB a écrit : Cela dit - et je te ferai cette concession - il est vrai que la France est le pays occidental qui, dans sa manière de voir le pouvoir, depuis le Moyen-Age, ressemble le plus à la Russie...
Oui deux sommes de talent encombrées par le talent. Il n'y a rien de plus difficile à assumer que le talent.
MB a écrit : 1° il y a eu deux guerres du golfe ; la première en 1991. Elle fait suite à l'invasion du Koweit par l'Irak et relève de la guerre juste (avec approbation générale de la communauté internationale) ; qu'on y ait commis des atrocités n'enlève rien au fait au fait que l'attaque contre l'Irak était justifiée. Rappelle-toi la différence entre ius ad bellum et ius in bello. Si la France y a participé, rien que de très justifié. Et pour le coup, ça n'a pas été une guerre d'invasion, puisque les troupes alliées se sont vite retirées, au grand regret des Kurdes et surtout des Chiites du sud - tu connais l'histoire.
La 1° guerre du Golfe n'était pas plus justifiée que la seconde. Moins encore selon la logique puisque les américains ont choisi de ne pas aller jusqu'à Bagdad. Le fait que l'ONU ait donné son aval et ait mis en oeuvre cette horreur morale absolue que furent les "accords" pétrole contre nourriture est tout le contraire d'une caution morale. C'est une honte.
MB a écrit : 2° la deuxième guerre du golfe a été décidée unilatéralement par les E-U et leurs alliés, à partir d'une fausse justification. Nous n'y participons pas. Elle a fait de nombreux morts, mais en ce moment, ceux qui tuent le plus d'Irakiens, ce sont les Irakiens eux-mêmes (au fait, un article qui te plaira : http://www.spiked-online.com/index.php? ... icle/1700/ - "Iraq : the first suicide state"). D'ailleurs, en général, les premières victimes des Arabes sont les Arabes eux-mêmes, mais je dévie du sujet.
La justification de l'existence juridique du Koweit, c'est quoi ? Les intérêts des companies pétrolières occidentales, rien de plus. Nous vivons à des milliers de kilomètres du Golfe persique et nous fichons du sort des populations qui y vivent. La seule justification de ces guerres est l'American Way of Life, notre bien-être matériel. Point barre. Soit on assume (et c'est posssible) et on s'abstient de donner des leçons de morale au reste du monde, soit on se comporte comme on le fait aujourd'hui, on fanfaronne et on continue de tirer les bénéfices des ressources des autres tout en les maintenant dans leur merde.
MB a écrit : 3° la guerre actuelle d'Afghanistan, à laquelle la France participe, est justifiée. Je te rappelle que le 11 septembre est un acte de guerre qui a été planifié de là-bas, avec la complicité des talibans. Il est donc juste de répliquer sur place. Encore une fois, que les alliés commettent là-bas un certain nombre de bêtises n'enlève rien à la justice générale qui préside à l'initiative de cette guerre. Et comme tu le sais, les talibans et ceux qui les soutiennent veulent notre peau, nous avons le droit de nous défendre.
Les 11 septembre a été une attaque contre les EU pas contre la France, à moins que je sois si nul en géographie que tu m'apprennes que le WTC était à la Défense.
MB a écrit :Tu commets donc une faute intellectuelle majeure quand tu mets tout cela ensemble. Ces cas sont différents, et ne sauraient être confondus ; comment peut-on avoir un jugement clair en faisant ainsi ? Il faudrait d'ailleurs commencer à concevoir comme non-contradictoire que la France refuse la 2me guerre du Golfe et participe, tout à la fois, à celle d'Afghanistan.
Bien sûr... les EU n'ont pas soutenu et armé les talibans contre les soviétiques... les EU n'ont pas fait le choix des talibans plutôt que celui de Massoud (qui sur la fin recevait de l'aide russe contre les talibans qui étaient les pions des EU).
MB a écrit : Comment peux-tu mettre en balance tout cela avec la Tchétchénie ? Tiens, je vais te trouver un équivalent : imagine que la France jette en pâture à son armée les Pyrénées-Orientales afin de contrer le séparatisme catalan ! Allez ! 30 000 morts dans la prise de Perpignan, des zones entières où l'on ne trouve, dans les villages, qu'un homme pour huit femmes (les commandos de l'armée tuent tous les hommes, violent les femmes, et les hommes qui restent fuient à l'étranger), et pendant ce temps-là, un pouvoir collaborateur dont le cacique se fait construire une piscine au milieu de locaux qui n'ont pas une seule goutte d'eau dans leurs ruines.
Les musulmans thétchènes sont les ennemis de la France, nos services secrets ont travaillé sur cette question, à surveiller et démanteler les réseaux terroristes tchétchènes, et cela jusqu'en Europe de l'est, en Pologne si tu veux savoir...

Quand à nos opérations de maintient de la paix, je veux dire occidentales, il n'y a qu'à se souvenir de l'Irlande du Nord ou de Madagascar, du Panama, de l'Irak, du Vietnam, de l'Algérie, etc. etc. Dès qu'on estime, en Occident, que nos intérêts économiques peuvent être lésés, on sort l'artillerie, quand on ne le fait pas, c'est que l'opération n'est pas économiquement rentable.
MB a écrit : sommes nous européens ou asiates ? occidentaux ou slavophiles ? Le simple fait que cette discussion ne soit toujours pas tranchée, rebondisse encore aujourd'hui, devrait te mettre la puce à l'oreille.
Cette question est posée et résolue dans l'oeuvre de Dostoievski, c'est la même question que se posent tous les provinciaux vis-à-vis des parisiens : c'est une crise mimétique. Les russes ont assez de talent pour ne pas être complètement fascinés par notre "réussite". Ils sont peut-être plus spirituels, finalement, que nous.

Je vais me coucher, on en reparlera.

Amitiés

C.

Larmorencourt
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Message non lu par Larmorencourt » jeu. 12 oct. 2006, 11:30

L'Ukraine, le Kazhakhstan, les pays baltes et toutes les pays de la CEI ont acquis leur indépendance sans qu'une seule goutte de sang n'ait été versée. Ce fait remarquable est occulté par la tchetchenie. Mais que ferions nous à la place des soldats russes, sans cesse sur le qui vive, et sur qui, même des enfants, sont susceptibles de jetter des grenades?

D'autre part, l'assassinat de Politkovskaïa profite plus à Kadyrov qu'à Poutine.

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